Albert Hurter
Date de naissance : Le 11 mai 1883 Lieu de Naissance : Zurich, en Suisse Date de Décès : Le 28 mars 1942 Lieu de Décès : Los Angeles, en Californie, aux États-Unis |
Nationalité : Suisse Américaine Profession : Artiste Animateur |
La biographie
Tout au long de sa carrière, Walt Disney s’est attaché à s’entourer des meilleurs artistes. Certains d’entre eux ont alors pu laisser durablement leur empreinte sur la filmographie des studios. Parmi d’autres, Mary Blair a ainsi largement influencé les réalisations de Cendrillon, Alice au Pays des Merveilles et Peter Pan. Eyvind Earle a quant à lui insufflé son style inimitable à La Belle au Bois Dormant. Walt Peregoy a marqué les productions des (Les) 101 Dalmatiens et Merlin l'Enchanteur. De son côté, Ken Anderson a pour sa part contribué à définir les décors et les personnages du (Le) Livre de la Jungle, des (Les) Aristochats et de Robin des Bois. Les premiers longs-métrages de Disney portent pour leur part la marque d’un autre artiste de talent, Albert Hurter.
Albert Hurter voir le jour le 11 mai 1883 à Zurich, dans le nord de la Suisse. Fils aîné d’Albert Hurter Senior et de Maria Schmid, le petit garçon est très tôt victime de sévères problèmes cardiaques. Se trouvant isolé, il s’évade alors grâce à sa collection de timbres. Il se découvre en outre une passion certaine pour le dessin, laquelle est entretenue par son père, lui-même professeur de dessin en génie mécanique. Partageant cet amour du crayon avec ses frères Hugo et Ernst, Albert Hurter a à peine vingt ans lorsque, le 6 avril 1903, il quitte sa ville natale pour s’installer à Berlin. Là, il étudie l’art et l’architecture. Son diplôme en poche, il rentre en Suisse au cours de l’année 1910. Après quelques mois passés à Paris, Albert Hurter apprend la mort de son père à l'âge de soixante ans. C'est à la même époque qu'il fait le choix de quitter l’Europe où la guerre couve. En août 1914, il embarque à bord d’un navire en partance pour les États-Unis.
Arrivé à Ellis Island le 24 août 1914, Albert Hurter se met immédiatement à la recherche d’un emploi. Il se rapproche pour cela d’artistes tels que le pionnier Raoul Barré qui l’engage dès 1916 au sein du studio Barré-Bowers qu’il vient tout juste de fonder avec Charley Bowers. Se liant d’amitié avec plusieurs employés tels que Burt Gillett, Ted Sears, Dick Huemer, Isadore Klein et George Stallings, Hurter travaille notamment sur quelques courts-métrages inspirés de la bande dessinée à succès Mutt and Jeff créée par Bud Fisher en 1907. Il impressionne alors ses collègues qui admirent autant son sens du détail que sa capacité à tout dessiner avec une incroyable dextérité.
Après quelques années chez Barré-Bowers, Albert Hurter pense que son avenir n’est plus New York mais en Californie. Sans prévenir ses employeurs ni ses collègues, il s’offre un billet de train grâce à l’argent gagné à la loterie et part vers l’Ouest. Durant son voyage, il passe par les États du sud-ouest où il s’imprègne de la culture amérindienne qui le fascine depuis longtemps. Il fait également un passage par le Mexique. Il s’installe enfin à Los Angeles où il fonde son propre studio de publicité. L’entreprise est modeste. Les contrats sont parfois rares. Hurter vivote en acceptant de réaliser quelques séquences animées que lui sous-traitent certains studios voisins. Il fournit également les illustrations du livre Litany of American Holiday Prayer écrit en 1925 par Elwood Lloyd IV. À la fin des années 1920, il met par ailleurs son talent au service du publicitaire Randolph Van Nostrand.
La seconde moitié des années 1920 est une période de vaches maigres pour Albert Hurter qui a tout juste les moyens de louer un minuscule studio au sein du vieil Hôtel Westminster situé à l’angle de la 4e Rue et de Main Street. Se consacrant entièrement à son travail aux dépends de toute vie de famille, l’artiste sait que sa destinée est de travailler un jour pour un grand studios comme celui des frères Disney. En 1931, il postule enfin et parvient à décrocher sa place grâce à l’entremise de son ami Ted Sears lui-même engagé deux mois et demi plus tôt. Déjà âgé de quarante-huit ans, Albert Hurter intègre les studios d’Hyperion Avenue le 1er juin. Il est alors surnommé « Old Man » par les autres employés qui, comme Walt Disney, n’ont guère plus de trente ans. Obtenant une place d’animateur, Hurter commence par travailler sur le court-métrage Le Chat N’Est Pas Là, le vingtième opus de la collection des Silly Symphonies (1931).
Se chargeant de dessiner certains plans mettant en scène le chat et les troncs d’arbre anthropomorphes, Albert Hurter participe ensuite à la création des huit Silly Symphonies suivantes, Mélodies Égyptiennes (1931), Quel Bazar ! (1931), L’Araignée et la Mouche (1931), La Chasse au Renard (1931), Le Vilain Petit Canard (1931), The Bird Store (1932), Les Ours et les Abeilles (1932) et Rien qu’un Chien (1932). Walt Disney apprécie alors son sens de l’humour. Il aime son sens de l’exagération. Il admire sa capacité à tout animer et à humaniser des objets inertes.
Désireux de profiter de ce talent incroyable, Walt Disney décide rapidement de changer Albert Hurter de division. L’artiste troque ainsi son poste d’animateur pour celui de sketch artist. Pour chaque nouveau projet, sa mission est alors de laisser libre cours à son imagination afin de créer de nouveaux personnages, des costumes, des éléments de décors, des ambiances… Hurter est autorisé à dessiner ce qu’il veut, comme il le veut, ses collègues pouvant s’inspirer ou non de ses créations. Parfois loufoques, certains de ses dessins n’aboutissent à rien de concret. D’autres, en revanche, sont parfois si intéressants qu’ils sont immédiatement repris par les scénaristes et les animateurs. Au milieu de ses centaines de croquis, c’est notamment lui qui développe les héros des (Les) Trois Petits Cochons (1933). Hurter imagine en particulier leurs costumes et leurs petites maisons. Durant la production d’Une Petite Poule Avisée (1934), il contribue également à la création de Donald qu’il décide d’habiller avec un costume de marin.
Parmi d’autres sujets, Albert Hurter influence aussi la création de Mickey in Arabia (1932), Trader Mickey (1932), Mickey Père Noël (1932), Bâtissons (1933), Mickey au Moyen-Âge (1933). Dans la collection des Silly Symphonies, il conçoit des centaines de recherches graphiques pour Le Roi Neptune (1932), Les Enfants des Bois (1932), L’Arche du Père Noé (1933), Le Joueur de Flûte de Hamelin (1933), L’Arbre de Noël (1933), Le Magasin de Porcelaine (1934), La Cigale et la Fourmi (1934), La Souris Volante (1934), Histoire de Pingouins (1934), La Déesse du Printemps (1934), Le Lièvre et la Tortue (1934), Le Petit Chat Voleur (1935), Bébés d’Eau (1935), Carnaval des Gâteaux (1935), Qui a Tué le Rouge-Gorge (1935), Jazz Band Contre Symphony Land (1935), Trois Espiègles Petites Souris (1936) ou bien encore Cabaret de Nuit (1937).
Devenue une source d’inspiration inestimable, Albert Hurter profite au passage de sa position pour sensibiliser ses collègues à l’œuvre de différents artistes européens tels que Ludwig Richter, Hermann Vogel, Arthur Rackham et John Bauer. Heinrich Kley est une autre de ses références. Parvenant par là même à passionner Walt qui, lors d’un séjour en Europe, acquiert des centaines de volumes ensuite entreposés dans la bibliothèque des studios, il montre par ailleurs l’œuvre du dessinateur français Sem qui, entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe, a su si bien croquer la société de son temps. Maîtrisant sur le bout des doigts l’art de la caricature, Albert Hurter est chargé dès 1936 de former les autres artistes des studios à cette forme d’art au sein d’une classe également animée par Joe Grant, Campbell Grant et Ward Kimball.
Blanche Neige et les Sept Nains (1937)
Durant l’automne 1934, Walt Disney présente pour la première fois à ses équipes son projet d’adapter Blanche Neige et les Sept Nains sous la forme d’un long-métrage animé et sonore (1937). C’est une grande première pour les studios et pour le cinéma d’animation en général. Albert Hurter devient alors un maillon essentiel du processus créatif. Comme Gustaf Tenggren et Ferdinand Horvath, engagés comme lui en tant que référents visuels, il connaît en effet très bien cette Europe d’antan dans laquelle se situe le conte imaginé au XIXe siècle par les frères Grimm. Hurter devient donc le référent principal du film, chargé de lui insuffler l’atmosphère si particulière du Vieux continent.
Blanche Neige et les Sept Nains (1937)
Nommé responsable des personnages par le réalisateur Dave Hand, il conçoit des dizaines d’esquisses de la princesse, des nains, du prince et de la reine. Il dessine les animaux. Il imagine certains décors. Albert Hurter invente les moulures, les petits meubles sculptés et tous les accessoires visibles dans le film… Les autres artistes doivent systématiquement en référer à lui, en particulier Tom Codrick chargé de créer l’intérieur de la chaumière des nains ou bien encore Charles Payzant et Mack Stewart qui travaillent quant à eux sur la forêt. Samuel Armstrong et les décorateurs Mique Nelson, Merle Cox, Claude Coats, Phil Dike, Ray Lockrem et Maurice Noble reprennent parfois à l’identique ses croquis.
Pinocchio (1940)
Après le triomphe de Blanche Neige et les Sept Nains, Albert Hurter est attaché à la production de Pinocchio (1940). Après l’Allemagne pour l’histoire de la princesse, c’est cette fois le Tyrol qui l’inspire pour concevoir le village de Geppetto. L’atelier du marionnettiste est une formidable occasion de mettre en valeur les pendules et autres jouets dessinés par Hurter. Là encore, les décorateurs disposent d’une source d’inspiration énorme.
Fantasia (1940)
Grâce au succès de Blanche Neige et les Sept Nains qui continue de tenir le haut de l’affiche durant des mois, d’autres projets sont mis en chantier. Albert Hurter travaille ainsi sur une adaptation d’Alice au Pays des Merveilles. Pour Walt Disney, c’est alors une merveilleuse occasion d’utiliser tous les dessins saugrenus et loufoques de l’artiste qui, jusqu’ici, sont restés dans les tiroirs. Hurter planche aussi sur Fantasia (1940), en particulier la séquence représentant La Nuit sur le Mont Chauve, avec son démon terrifiant, et celle inspirée de La Symphonie Pastorale avec ses créatures mythologiques. Il utilise en outre sa connaissance parfaite de l’œuvre d’Heinrich Kley pour représenter les animaux dansants de La Danse des Heures.
Parmi d’autres sujets, Albert Hurter travaille un temps sur Le Dragon Récalcitrant (1941), Dumbo (1941) et Bambi (1942). Il réalise plusieurs recherches graphiques avec les personnages du (Le) Vent dans les Saules, d’après l’œuvre du romancier Kenneth Grahame. Il se plonge dans la pièce Peter Pan de James Matthew Barrie et dans la version de Cendrillon écrite par Charles Perrault en 1697. Il est associé aux productions de Johnny Fedora et Alice Bluebonnet et de Bongo, Roi du Cirque. Il réalise certaines esquisses autour de l’histoire de la chienne Lady imaginée par Joe Grant. Il participe au développement de Reynard the Fox d’après Le Roman de Renard.
La Seconde Guerre mondiale ayant dramatiquement asséché les finances des studios, aucun de ces projets ne verra le jour avant des années. Il faudra en effet attendre la fin du conflit pour que soit relancées les réalisations de Johnny Fedora et Alice Bluebonnet, Bongo, Roi du Cirque et La Mare aux Grenouilles respectivement intégrées dans les longs-métrages d’anthologie La Boîte à Musique (1946), Coquin de Printemps (1947) et Le Crapaud et le Maître d’École (1949). Après le succès de Cendrillon (1950), Alice au Pays des Merveilles (1951) et Peter Pan (1953) viendront à leur tour compléter la filmographie des studios, tout comme l’histoire de Lady qui inspirera La Belle et le Clochard (1955).
Tous ces longs-métrages animés sortis entre 1946 et 1955, Albert Hurter ne les verra pas. Au cours de l’année 1940, l’illustrateur se décide enfin à quitter son studio de Los Angeles pour une belle maison située le long de Ventura Boulevard, dans la Vallée de San Fernando. C’est là qu’il souhaite installer son atelier et sa bibliothèque. Mais sa santé décline très vite et ce rêve ne se réalisera pas. En octobre 1940, Albert Hurter est conduit à l’hôpital d’Hollywood où les médecins lui diagnostiquent un œdème pulmonaire. Fumeur invétéré de cigares, son cœur est également de plus en plus malade. Fin novembre, il est placé en convalescence au sanatorium de Cedar Lodge. Ce repos forcé ne l’empêche pas de continuer à dessiner. Pour Disney, il imagine notamment le cirque de puces de Fido Bones, ou bien le héros de Hootsie the Owl, deux films qui ne verront finalement pas le jour.
Durant l’année 1941, les nouvelles se veulent rassurantes. Les collègues et les amis qui lui rendent visite pensent qu’Albert Hurter est sur la voie de la guérison. Leurs espoirs ont toutefois tôt fait d’être anéantis. Le 28 mars 1942, l’artiste succombe... Il avait cinquante-sept ans… Inhumé au cimetière de Forest Lawn, sa mort est vécue comme une immense perte. Choquées par cette disparition soudaine, les équipes des studios Disney s’efforcent de conserver au mieux le fruit de son travail et de l’utiliser autant que possible durant les années d’après-guerre. En 1948, six ans après sa mort, l’éditeur Simon & Schuster s’associe avec Ted Sears pour proposer un très beau recueil de plus de sept-cents dessins réalisés par Albert Hurter. Introduit par un bref hommage rédigé par Walt Disney, l’ouvrage est alors simplement intitulé He Drew As He Pleased – un titre qui peut être traduit par la phrase "Il dessinait comme bon lui semble".
« L’esprit impénétrable d’Albert Hurter n’a jamais été très facile à saisir », écrivait Walt Disney en 1953, « Mais force est de constater qu’il était un personnage parmi les plus adorables dès lors qu’on avait appris à le connaître. Son imagination était sans conteste rare et unique ».
La filmographie
001 |
Le Chat N'Est Pas Là
Animateur : Le Chat, les Arbres anthropomorphes • Animation 2D
1931
Cinéma
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1931
Cinéma
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003 |
Quel Bazar !
Animateur • Animation 2D
1931
Cinéma
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1931
Cinéma
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004 |
La Chasse au Renard
Animateur • Animation 2D
1931
Cinéma
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1931
Cinéma
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005 |
L'Araignée et la Mouche
Animateur • Animation 2D
1931
Cinéma
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1931
Cinéma
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007 |
The Bird Store
Animateur • Animation 2D
1932
Cinéma
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1932
Cinéma
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