Le Prince Saxophone
Date de création : Le 05 octobre 1935 Nom Original : Prince Saxophone Autre(s) Nom(s) : Prince Max Créateur(s) : Albert Hurter (Conception Visuelle) Clyde Geronimi (Animation) Dick Lundy (Animation) Frenchy de Trémaudan (Animation) Les Clark (Animation) Dick Huemer (Animation) |
Apparition : Cinéma Télévision BD Jeux Vidéo |
Le portrait
En salle le 5 octobre 1936, Jazz Band contre Symphony Land complète la collection des Silly Symphonies. Version décalée et musicale de la tragédie Roméo et Juliette de William Shakespeare, le court-métrage met en scène la romance contrariée entre une charmante Princesse Violon et un courageux Prince Saxophone.
Située à l’est de la Mer de la Discorde, l’Île du Jazz est un royaume joyeux où la musique et la fête battent leur plein. Assis sur son trône, le Roi de l’Île du Jazz adore en effet convoquer ses sujets afin de les voir danser et s’amuser. La bonne humeur du souverain tranche alors avec la mine renfrognée de son fils, le Prince Saxophone qui, assis près de lui, s’ennuie à mourir. Peu enclin à écouter du jazz toute la journée, il nourrit davantage d’intérêt pour la ravissante Princesse Violon dont le royaume est situé de l’autre côté de la mer, au Pays de la Symphonie, grand rival de l’Île du Jazz.
Profitant que son père est absorbé par la musique, le Prince s’échappe bientôt de la salle du trône. Accédant au balcon voisin, il se saisit d’une clarinette-longue vue afin d’apercevoir sa dulcinée qui le salue au loin. Ni une, ni deux, le jeune Saxophone prend sur lui de traverser la mer pour aller la rejoindre.
À peine a-t-il accosté que le Prince Saxophone se risque à sauter par-dessus l’immense portail du Pays de la Symphonie. Pénétrant ainsi dans le jardin, il badine avec sa belle puis s’amuse à la pourchasser à travers les arbres. Apercevant les deux amants, la Reine du Pays de la Symphonie manque de s’étouffer. Sans plus attendre, elle décide de mettre fin à ces roucoulades inadmissibles.
Alors que la Princesse fait mine de fuir, le Prince Saxophone part à sa poursuite. Guettant son arrivée caché derrière un mur, il surgit soudain pour l’embrasser. Mais c’est à la Reine qu’il donne par mégarde un fougueux baiser. Tentant de s’excuser platement, le garçon est immédiatement mis aux fers par la souveraine, folle de rage.
Depuis sa prison en forme de métronome, le Prince Saxophone compose un message afin de prévenir son père. Ainsi averti, le Roi de l’Île du Jazz lance sans attendre les hostilités. De part et d’autre de la Mer de la Discorde, les armes parlent, causant des destructions colossales. La prison est elle-même détruite. Observant les ravages de la guerre, le Prince aperçoit bientôt sa belle, partie à bord d’un frêle esquif afin de ramener la paix entre les deux pays.
Voyant la princesse risquer sa vie, le Prince Saxophone se jette à son tour à la mer afin de la secourir. Menacés d’une mort certaine à cause des emportements des uns et des autres, les deux amants sont finalement sauvés par leurs parents qui, à leur grande surprise, tombent à leur tour amoureux.
La guerre laisse alors place à un formidable mariage durant lequel le Roi de l’Île du Jazz épouse la Reine du Pays de la Symphonie. Le Prince et la Princesse prononcent eux aussi leurs vœux. Les deux royaumes peuvent ainsi être enfin réunis par le Pont de l’Harmonie. Happy End!
Écrite par William Shakespeare en 1597, Roméo et Juliette fait partie des histoires les plus adaptées au cinéma. En 1908, déjà, le cinéaste italien Mario Caserini signe l’une des toutes premières versions cinématographiques de la célèbre tragédie. La mythique scène du balcon est ensuite reproduite en 1929 par John Gilbert qui donne pour l’occasion la réplique à Norma Shearer dans Hollywood Chante et Danse de Charles Reisner. Produite par MGM, la comédie musicale remporte un beau succès, tant et si bien que le studio au lion décide de mettre en chantier une nouvelle adaptation complète du classique de Shakespeare. Réalisée par George Cukor, la production est alors portée par Norma Shearer, qui reprend son rôle de Juliette, et Leslie Howard choisi pour incarner Roméo. En salle le 3 septembre 1936, Roméo et Juliette est toutefois un échec critique et commercial qui enterre pour la décennie suivante toute tentative de la part des grandes majors hollywoodiennes de porter une quelconque œuvre de Shakespeare sur grand écran.
Un an avant la sortie du film de Cukor, les studios Disney livrent eux-mêmes leur propre version de l’histoire. Scénarisé par Pinto Colvig, le court-métrage offre cependant une vision totalement nouvelle de l’œuvre. Très simplifiée, l’intrigue est déplacée des rues de Vérone vers un monde imaginaire peuplé d’instruments de musique anthropomorphes. Les personnages sont évidemment eux-mêmes changés. Le rôle de Roméo Montaigu échoie alors à un petit saxophone alto.
L’apparence graphique du Prince Saxophone est issue de l’imagination d’Albert Hurter. Né à Zurich, en Suisse, le 11 mai 1883, l’artiste étudie l’art et l’architecture à Berlin puis à Paris avant de rejoindre les États-Unis en 1914. Engagé par les studios new-yorkais Barré-Bowers, il décide bientôt de partir pour la côte Ouest, à Los Angeles, où il fonde sa propre entreprise de publicité. Peinant à se faire une place, il intègre finalement les équipes de Disney en 1931. Il participe alors à définir le style graphique de nombreux courts-métrages de Mickey et de plusieurs Silly Symphonies. Contribuant, entre autres, à la création des Trois Petits Cochons et de Donald, il imprime également sa marque sur les productions de Blanche Neige et les Sept Nains, Pinocchio et Fantasia. Auteur de nombreuses recherches graphiques représentant les personnages d’Alice au Pays des Merveilles, Dumbo, Bambi ou Cendrillon, Albert Hurter quitte Disney en 1940. Malade, il s’éteint le 28 mars 1942 à l’âge de cinquante-sept ans.
La première apparition du Prince est animée par Clyde Geronimi. Né à Chiavenna, en Italie, le 12 juin 1901, l’animateur débute chez Walter Lantz dès 1924. Sept ans plus tard, il rejoint Disney et planche sur des dizaines de cartoons comme Le Vilain Petit Canard, L’Arche du Père Noé, Le Grand Méchant Loup, La Déesse du Printemps, La Fanfare, Le Rival de Mickey et Papa Pluto. En 1938, il devient l’un des réalisateurs les plus prolifiques des studios. Il supervise ainsi, entre autres, Chien d’Arrêt, Colleurs d’Affiche, Le Voyage de Mickey, Tends la Patte ou Education for Death, puis coréalise Le Crapaud et le Maître d’École, Cendrillon, Alice au Pays des Merveilles, Peter Pan, La Belle et le Clochard, La Belle au Bois Dormant et Les 101 Dalmatiens. En désaccord avec Walt Disney qui souhaite lui confier la gestion des productions en prises de vues réelles filmées en Europe, Clyde Geronimi claque la porte des studios à la fin des années 1950 et passe chez UPA où il réalise les séries The Dick Tracy Show, The New Casper Cartoon Show, Famous Adventures of Mr. Magoo et L’Homme-Araignée. Il meurt le 24 avril 1989 à l’âge de quatre-vingt-sept ans. Un Disney Legends Award remis en 2017 couronne sa carrière.
La scène du flirt entre les deux jeunes amants est supervisée par Richard (Dick) Lundy. Entré chez Disney en 1929, l’artiste fait partie des Duckmen, ces animateurs devenus, avec le temps, les spécialistes de Donald Duck que l’artiste dessine notamment dans Une Petite Poule Avisée, Mickey's Gala Premier, L’Entreprenant Mr Duck. Réalisateur de plusieurs aventures du canard colérique parmi lesquelles Scouts Marins, Donald à la Kermesse, Le Jardin de Donald ou La Mine d’Or de Donald, Lundy a également inscrit son nom au générique du dessin animé Des Arbres et des Fleurs dans lequel il anime la Souche, puis de L’Assiette de Porcelaine, Le Vilain Petit Canard, Les Trois Petits Cochons, Le Jour du Jugement de Pluto, De L’Autre Côté du Miroir et Blanche Neige et les Sept Nains. Après son départ des studios Disney dans les années 1940, il passe chez Hanna-Barbera et travaille dans les années 1960 sur Les Pierrafeu et Yogi l’Ours.
La capture du Prince est créée par Gilles « Frenchy » de Trémaudan. Né au Canada le 9 mars 1909, il entre chez Disney en 1929. Il participe alors à la création de dizaines de cartoons tels que Mickey Pionnier, Mickey et les Embouteillages, Mélodies Égyptiennes, Les Ours et les Abeilles, Bâtissons, Mickey au Pays des Géants, La Cigale et la Fourmi ou bien Le Rival de Mickey. Travaillant également comme scénariste, l’artiste quitte Disney au début des années 1940. Il disparaît le 24 novembre 1988 à l’âge de soixante-dix-neuf ans.
Le Prince en prison et la scène finale du mariage sont animés par Les Clark. Membre du groupe des Neuf Vieux Messieurs, l’animateur est l’un des premiers artistes engagés par Walt Disney. Né le 17 novembre 1907 à Ogden, dans l’Utah, il rencontre les frères Disney dès 1925. Clark n’est alors qu’un jeune marchand de glaces dans une confiserie située près des studios. Passionné par le dessin, il est finalement embauché le 23 février 1927. C’est le début d’une carrière de quatre décennies marquée par l'animation de personnages aussi remarquables que Mickey, Clara Cluck, Blanche Neige, Pinocchio, Lulubelle, Alice, Lady ou bien encore les trois bonnes fées de La Belle au Bois Dormant. Réalisateur des courts-métrages Paul Bunyan, Donald au Pays des Mathémagiques, Donald et la Roue et L'Homme, le Monstre et les Mystères, Les Clark prend sa retraite en 1975. Il disparaît quatre ans plus tard, le 11 septembre 1979. Un Disney Legends Award lui est décerné à titre posthume dix ans plus tard.
Le Prince qui s’échappe de sa prison et part secourir sa belle est enfin dessiné par Dick Huemer. Né à New York le 2 janvier 1898, il est le créateur de nombreux personnages parmi lesquelles Toby the Pup et Scrappy. Repéré par Walt Disney qui le rencontre à de nombreuses reprises lors de ses passages dans la Grosse Pomme, il accepte de rejoindre les studios le 16 avril 1933. Il sert alors comme animateur sur divers cartoons. Nommé réalisateur de Chasseurs de Baleines et de Dingo et Wilbur, il signe les scénarios de plusieurs films, le plus célèbre restant Dumbo, écrit en duo avec Joe Grant. Après Alice au Pays des Merveilles, Dick Huemer œuvre sur les émissions télévisées de Walt Disney et les documentaires de la collection True-Life Adventures. À la retraite en 1973, il décède le 30 novembre 1979.
En août 1935, une page de bande dessinée réalisée par Tom Wood reprend les grandes lignes de Jazz Band Contre Symphony Land dans la revue Good Housekeeping.
Très populaire, le court-métrage Jazz Band Contre Symphony Land fait partie des œuvres les plus diffusées à la télévision puis en vidéo. Le 27 mars 1959, le public a notamment l’occasion de le voir ou de le revoir dans l’émission Toot, Whistle, Plunk and Boom, le vingt-quatrième épisode de la première saison de l’émission Walt Disney Presents diffusée sur ABC. Pour l’occasion, le Prince Saxophone est présenté sous le nom de Prince Max.
Disney's Tous en Boîte
Le 2 septembre 2002, le Prince Saxophone fait un caméo dans La Soirée de la Musique, le septième épisode de la Saison 3 de la série Disney’s Tous en Boîte. Il apparaît alors à la toute fin de l’opus, dans une fausse publicité pour le Pays de la Musique réconcilié.
Epic Mickey : Le Retour des Héros
En 2012, le Prince Saxophone peut être aperçu furtivement dans le jeu vidéo Epic Mickey : Le Retour des Héros aux côtés des autres personnages de Jazz Band Contre Symphonie Land.
Le Monde Merveilleux de Mickey
Le 4 décembre 2020, le Prince est de retour dans Le Grand Gentil Loup, un court-métrage de la série Le Monde Merveilleux de Mickey. Le film met en scène Mickey qui tente de rendre gentil le Grand Méchant Loup. Ses efforts sont néanmoins vains, le terrible canidé ne pouvant s’empêcher de dévorer ses prochains, en particulier les Trois Petits Cochons, Donald, Dingo, Clarabelle, Horace, Dumbo ou bien encore le Prince Saxophone. Tous sont cependant libérés à la fin du film par Mickey.
Petit personnage courageux mis en scène dans un opus des Silly Symphonies particulièrement charmant, le Prince Saxophone est une sympathique création typique des productions Disney des années 1930.