Titre original :
Education for Death
Production :
Walt Disney Animation Studios
Date de sortie USA :
Le 15 janvier 1943
Série :
Genre :
Animation 2D
Réalisation :
Clyde Geronimi
Durée :
10 minutes
Disponibilité(s) aux États-Unis :

Le synopsis

A travers l'exemple du petit Hans, la déviation de la jeunesse allemande par la dictature hitlérienne n'a pour seule perspective que celle d'être soldat et de courir le risque d'une mort certaine...

La critique

rédigée par
Publiée le 27 octobre 2015

Jusqu'à l'entrée en guerre des Etats-Unis consécutive à l'attaque de Pearl Harbor par l'aviation japonaise, les Studios Disney n'étaient touchés par le conflit que sur l'aspect financier. L'Europe en guerre était devenue, en effet, un marché éteint où les productions de la Compagnie ne s'écoulaient plus. D'un point de vue artistique, la guerre, dont les enjeux restaient très éloignés des préoccupations de l'Amérique profonde, n'avait, qu'à de très rares exceptions (telle une commande du gouvernement canadien pour quatre films de propagande) d'influences sur les productions Disney.

Pourtant, ce fameux 7 décembre 1941, l'Amérique attaquée se retrouve subitement partie prenante au conflit. Le gouvernement U.S. réquisitionne alors immédiatement les Studios de Mickey ; la machine de guerre américaine se mettant en marche. Disney reçoit la lourde tache de vulgariser les enjeux du conflit, ses tenants et aboutissants. Toutes les Stars de la Compagnie sont mises à contribution et participent à l'effort de Guerre. La fibre patriotique est exacerbée et tous les thèmes sont bons à mobiliser : de l'intérêt pour tout un chacun de payer ses impôts en temps et en heure (The New Spirit) à la dissection des méthodes de la dictature hitlérienne (Raison et Émotion)...

Au delà des commandes gouvernementales, les Studios, sous l'impulsion de Walt Disney lui-même, prennent fait et cause pour la théorie du Makor Alexander P. de Seversky qu'ils contribueront à populariser auprès de Roosevelt (Victory Through Air Power) et participent tout autant à une féroce critique du régime hitlérien (Der Fuehrer's Face). Education for Death entre dans cette dernière catégorie en se présentant comme un cartoon farouchement anti-nazi. En réalité, il s'agit d'une commande indirecte d'une série de quatre courts-métrages de propagande du gouvernement américain comprenant en plus de Education for Death : Der Fuehrer's Face, Raison et Émotion et Chicken Little. Mais après la déconvenue de The New Spirit où Walt Disney avait été accusé d'utiliser à tort l'argent du contribuable pour faire son court-métrage, le Maître de l'Animation refuse d'utiliser le même mode de financement direct. Il passe par l'intermédiaire du magazine Reader's Digest qui accepte de prendre à sa charge la série des quatre cartoons, en recevant, lui, discrètement une aide financière de la Coordinator of Inter-American Affairs.

Education for Death est une adaptation du livre Education for Death : The Making of a Nazi écrit par Gregor Ziemer. Ce dernier est un éducateur américain qui vivait en Allemagne durant les terribles années de 1928 à 1939. Le livre expose le plan délibéré des Nazis afin d'enfermer psychologiquement la jeunesse du pays, celle-là même appelée alors « la jeunesse hitlérienne ». Le Reader's Digest en publie une version condensée et demande aux studios Disney de produire un cartoon à partir du livre. L'ouvrage, comme le court-métrage, prend l'exemple d'un jeune garçon et analyse comme celui-ci évolue au fil du temps du berceau au cercueil. Parallèlement, un film à prise de vues réelles, Les Enfants d'Hitler, sort le 6 janvier 1943 et adapte également le livre. Il est réalisé par Edward Dmytryk (un homme de gauche qui fera partie des Dix d'Hollywood durant le maccarthysme puis mis sur liste noire pour le reste de sa carrière). Le long comme le court-métrage ont droit à une promotion croisée due aussi bien à la similarité des sujets qu'au fait qu'il sont distribués tous les deux par RKO Pictures.

Education for Death est assurément l'un des cartoons les plus étranges de toute la filmographie Disney. Clairement œuvre de propagande, sa vision gênera plus d'un spectateur. Alliant la caricature à outrance à une dramatisation extrême, comme jamais vues dans aucun film Disney, il met en exergue les méfaits du régime Nazi. Le cartoon commence ainsi par les parents du petit Hans qui viennent déclarer leur dernier né. Cela tombe bien car le nom qu'ils ont choisi pour leur fils fait partie de la liste des prénoms autorisés. Et en remerciement pour ce qu'ils ont apporté à leur nation, ils se voient offrir le livre Mein Kampf. Dès ce passage, l'ambiance devient sombre et dramatique. Après un court passage caricatural, presque grotesque, le récit gagne en intensité quand le spectateur voit la mère au chevet de son fils malade. Un soldat pénètre alors dans la chambre. Seule son ombre est visible : elle annonce que les enfants malades sont inutiles au pays ; si Hans ne guérit pas, il ne sert à rien ! Retour à la caricature avec la salle de classe où le jeune garçon apprend que la loi du plus fort l'emporte sur toute autre considération. Le cartoon se termine enfin sur une note extrêmement grave : Hans est devenu adulte et soldat. Le spectateur voit les livres bruler et les jeunes allemands conditionnés, privés de tout sens moral ou libre-arbitre. Le plan final est ainsi d'une violence absolue quand l'armée de jeunes gens se change en champ de croix dans un cimetière à perte de vue.

L'animation d'Education for Death est d'excellente facture. Elle allie d'ailleurs deux styles différents. L'un est constitué de scènes d'un réalisme criant mises au service d'une dramaturgie impressionnante. L'autre se base sur des éléments caricaturaux presque grotesques tellement ils sont gros. Ward Kimball est l'artiste qui s'est amusé à réaliser toutes ces animations loufoques. Il y a ainsi cette scène du conte de La Belle au Bois Dormant revisité. Le prince n'est autre qu'Hitler tandis que la belle endormie est Germania, représentant l'Allemagne, dessinée sous les traits d'une grosse et laide diva. Le dictateur a alors beaucoup de mal à soulever sa « belle » pour l'emmener sur son fort destrier. Un autre passage caricature une salle de classe du petit Hans où trois cadres affichés sur les murs le jugent ; ils représentent des personnalités importantes du régime Nazi : Adolf Hitler, bien-sûr mais aussi Hermann Goering et Joseph Goebbels.

Adolf Hitler
Hermann Goering
Joseph Goebbels

Education for Death est un objet de propagande parfaitement efficace tant le spectateur ressort de son visionnage en détestant profondément le régime Nazi. Il est aussi troublant en parvenant malgré tout à rendre le petit Hans sympathique. Le spectateur éprouve presque de la pitié pour lui et pour sa mère même s'il finit par le détester quand il devient un soldat obéissant aveuglement aux ordres. Education for Death n'en reste pas moins un acte d'effort de guerre, une œuvre de propagande malhonnête intellectuellement.

Education for Death met mal à l'aise de par son sujet, le plus sombre jamais dépeint par les studios Disney. D'un point de vue technique, il reste néanmoins de toute beauté et terriblement efficace dans son objet.

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