La Souche
Date de création :
Le 30 juillet 1932
Nom Original :
The Stump
Autre(s) Nom(s) :
The Old Man Tree
Créateur(s) :
Tom Palmer
Norm Ferguson
Dick Lundy
Apparition :
Cinéma

Le portrait

rédigé par
Publié le 20 octobre 2020

En 1932, Walt Disney révolutionne le cinéma d’animation. Après le son synchronisé introduit dès 1928 avec Willie, le Bateau à Vapeur, l’un des tout premiers cartoons de Mickey, le cinéaste marque en effet une fois encore les esprits avec Des Arbres et des Fleurs, vingt-neuvième opus de la collection des Silly Symphonies et premier du genre à bénéficier de la couleur grâce à la technologie développée par Technicolor.

L’intrigue débute au cœur d’une nature endormie. Au son du gazouillis d’un petit moineau, les arbres, les fleurs, les champignons et les insectes s’éveillent bientôt. Alors que chacun goûte joyeusement à la vie, un arbre se prend d’affection pour l’une de ses congénères. Débute alors entre eux un joli moment de séduction et de romance. Mais c’est sans compter sur une vieille souche bien décidée à ravir la belle.

Petite, sans ramure et sans feuille, la souche est un être ignoble. Son écorce grisâtre, sa mine patibulaire, ses racines et ses branches fourchues, ses bois morts sortant de son tronc, les craquements audibles à chacun de ses mouvements sont, il est vrai, particulièrement repoussants. C’est simple, le vieil arbre est si laid qu’il vit reclus au milieu des arbres morts et des squelettes d’animaux, loin de la faune et de la flore joyeuse des environs. Seuls les vautours osent encore se poser sur ses quelques branchages moribonds, une poignée de chauve-souris se risquant quant à elles à dormir dans son tronc creux aux côtés d’un lézard agressif qui ne manque pas, en sortant de la bouche de l’arbre, de les chasser avec ses cris effrayants.

Hideuse, la souche sait qu’elle ne peut pas compter sur ses charmes pour conquérir la belle. Qu’à cela ne tienne. La créature n’hésite pas à recourir à la brutalité. Elle s’empare donc de la jolie demoiselle arbre, au nez et à la barbe de son fiancé qui se rue pour la libérer. Se saisissant d’une branche, la souche refuse de se laisser faire et engage le combat. Les coups pleuvent. Mais elle est finalement défaite.

Toutefois la partie n’est pas finie. Humilié, le méchant décide de faire du feu et d’embraser les amants. Les flammes se répandent à toute vitesse. La nature doit alors lutter contre l’incendie volontaire. Les plus vulnérables ne peuvent que fuir. Se frottant les mains, la souche savoure ce qu’elle pense être sa victoire. Hilare, elle oublie cependant qu’elle est elle aussi faite de bois, un bois sec, très sec, que les flammèches ne tardent pas à dévorer aussi. Le retour de flamme est terrible. La souche est consumée par ce feu qu’elle a pourtant elle-même allumé. Sans avoir le temps de profiter d’une pluie salvatrice, elle succombe, les vautours tournant déjà au-dessus du cadavre fumant pendant que la nature et l’amour reprennent leurs droits…

La souche fait partie de ces personnages de Disney que chacun connaît sans pour autant en avoir un souvenir précis. Méchant d’un seul et unique cartoon, mais pas n’importe lequel puisqu’il s’agit du premier du genre en couleur, il n’est en effet visible qu’une poignée de minutes à l’écran avec des apparitions qui, il faut l’avouer, ne brillent pas forcément par leur qualité. L’animation demeure en effet rudimentaire. Ses racines, notamment, changent de forme d’un plan à l’autre. Son visage est également différent en fonction des vues. Ses « dents » pointues deviennent carrées. Le nombre de ses branches est aléatoire…

Si l’apparence du personnage est critiquable, sa personnalité, quant à elle, est mémorable. La souche est un méchant absolument redoutable et, en y repensant, terrifiant. Sa fin est risible, certes, mais ses agissements sont juste terribles. Mise au ban de la forêt, elle s’en prend à la demoiselle arbre sans aucune raison valable. Le spectateur ignore ce qu’elle veut vraiment... Les enfants n’y verront que de la pure méchanceté, rien de plus. Mais en y repensant, ne s’agit-il pas de prédation sexuelle ? La jeune femme arbre est emmenée sans aucune forme de procès, sans aucun tact, sans état d’âme. Il ne peut dès lors pas s’agir d’amour. La souche n’ayant à l’évidence aucune chance de charmer la belle, elle l’emporte avec violence, heureusement retenue dans son élan par le damoiseau arbre qui se décide à l’affronter. Le malaise est dès lors énorme et les sous-entendus particulièrement malsains.

La souche est animée par le trio Tom Palmer, Dick Lundy et Norman Ferguson
Anthony (Tony) Pipolo, dit Tom Palmer, est engagé en 1929 après avoir un temps travaillé sur les cartoons d’Oswald pour le compte de Charles Mintz puis de Walter Lantz. Pour Disney, il a notamment collaboré à la production de Cannibal Capers, Midnight in a Toy Shop, The Chain Gang, Gare au Gorille, Les Joueurs de Pan, The Beach Party, Mickey in Arabia, Rien qu’un Chien, Mickey au Grand Nord, Bâtissons, The Mad Doctor ou bien encore Le Roi Midas, La Remorque de Mickey et Le Vieux Moulin. À la fin des années 1930, il rejoint les studios Fleischer pour qui il participe à l’animation des (Les) Voyages de Gulliver.

Norm Ferguson
Dick Lundy

Également engagé en 1929, Norm Ferguson dessine l’enlèvement de la demoiselle arbre et le combat avec son fiancé. Au cours d’une carrière longue de plus de trente ans, l’artiste est devenu l’un des animateurs fétiches de Pluto, le chien de Mickey qu’il supervise entre autres dans Mickey et son Ami Pluto, Pluto Jongleur, Le Jour du Jugement de Pluto, Les Alpinistes, Donald et Pluto ainsi que Les Quintuplés de Pluto ou Mickey à l’Exposition Canine. En parallèle de sa participation à des dizaines de courts-métrages, Ferguson, qui part en Amérique du Sud avec El Grupo durant l’été 1941, a donné vie au Grand Méchant Loup, au juge Oliver Owl dans Qui a Tué le Rouge-Gorge, à la Sorcière de Blanche Neige et les Sept Nains, à Grand-Coquin et Gédéon dans Pinocchio, aux animaux dansants de Fantasia, au Morse et au Charpentier d’Alice au Pays des Merveilles et à Nana dans Peter Pan.

Lui aussi arrivé en 1929, Richard Lundy, qui anime la séquence de l’incendie de la forêt, fait partie des Duckmen, ces animateurs devenus, avec le temps, les spécialistes de Donald Duck que l’artiste dessine notamment dans Une Petite Poule Avisée, Mickey's Gala Premier, L’Entreprenant Mr Duck. Réalisateur de plusieurs aventures du canard colérique parmi lesquelles Scouts Marins, Donald à la Kermesse, Le Jardin de Donald ou La Mine d’Or de Donald, Lundy a également inscrit son nom au générique de L’Assiette de Porcelaine, Le Vilain Petit Canard (version 1931), Les Trois Petits Cochons, Le Jour du Jugement de Pluto, De L’Autre Côté du Miroir et Blanche Neige et les Sept Nains. Après son départ des studios Disney dans les années 1940, il passe chez Hanna-Barbera et travaille dans les années 1960 sur Les Pierrafeu et Yogi l’Ours.

Unique antagoniste d’un cartoon ayant marqué l’histoire du cinéma, la souche reste un méchant redoutable dont les intentions de prédateur sexuel sont particulièrement malsaines…

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