Date de création : Le 18 octobre 1967 Nom Original : Rama Créateur(s) : Ken Anderson (Conception Visuelle) Milt Kahl (Conception Visuelle) Hal King Eric Cleworth |
Apparition : Cinéma BD Voix Originale(s) : Ben Wright Voix Française(s) : Jacques Degor |
Le portrait
Au milieu des années 1960, les artistes de Disney débutent la production du (Le) Livre de la Jungle. Ultime long-métrage animé auquel Walt participe activement avant son décès survenu le 15 décembre 1966, le film donne alors vie aux célèbres personnages créés en 1894 par Rudyard Kipling parmi lesquels Rama, le Père loup.
Rama apparaît dans deux séquences du (Le) Livre de la Jungle. Il est ainsi l’un des premiers protagonistes à entrer en scène dès le début de l’histoire. Alors qu’elle parcourt la majestueuse jungle indienne, Bagheera entend soudain un bruit insolite. Non loin de là, un panier est abandonné sur le bord de la rivière. La barque qui le transportait est brisée en deux, laissant dès lors imaginer un destin funeste pour ses occupants. À l’intérieur du panier, un « Petit d’homme » hurle à pleins poumons. Ignorant quoi faire du bébé, la panthère hésite un temps avant de l’emporter auprès d’une famille de loups.
Pour Bagheera, la louve sera une mère idéale pour prendre soin de l’enfant, et ce d’autant plus qu’elle vient elle-même de donner naissance à une portée de louveteaux. Si l’instinct maternelle de la femelle fait immédiatement son effet, il faut désormais convaincre le père, Rama, d’accepter la présence du petit garçon. Inquiet, Bagheera est toutefois rapidement rassuré. Au départ décontenancé, Rama tombe à son tour sous le charme du bébé.
Pendant dix ans, Mowgli a ainsi grandi auprès de sa nouvelle famille. Mais à présent, un danger menace le clan. En apprenant l’existence du « Petit d’homme », Shere Khan, le terrible tigre, a fait son retour dans la jungle. Le danger est si grand qu’Akela, le chef du clan, décide de réunir ses semblables autour du Rocher du conseil afin de discuter du sort de Mowgli.
Tenu à l’écart des discussions, Rama est bientôt invité à écouter le verdict du Conseil. Pour la sécurité de tous, ce dernier exige que Mowgli quitte le clan. Effondré, Rama a du mal à trouver ses mots. « Partir… Mais… Mais le petit d’homme est… Il est comme un de nos fils… Et j’estime qu’il a droit à la protection de notre clan ». Les arguments de Rama ne trouvent malheureusement aucun écho favorable. Pour Akela, Shere Khan est beaucoup trop fort et le clan est bien incapable de le vaincre. « Mon petit Mowgli ne peut survivre seul, dans la jungle... », tente d'expliquer Rama, en vain…
Bagheera s’autorise finalement à intervenir. Pour la panthère, la meilleure option reste de rendre Mowgli à ses semblables en le conduisant vers le village le plus proche. Validée par Akela, cette solution est entérinée. Comme les autres loups, le triste Rama sort alors de l’histoire au moment où Bagheera et Mowgli se mettent en chemin…
Lorsqu’ils se lancent dans l’écriture du (Le) Livre de la Jungle, Larry Clemmons, Ralph Wright, Vance Gerry et Ken Anderson disposent d’un matériel très dense. Publiés en 1894 et 1895, Le Livre de la Jungle et Le Second Livre de la Jungle de Rudyard Kipling regorgent en effet de personnages et de situations tout à fait enthousiasmants pour un long-métrage d’animation.
Concernant Rama, les scénaristes font cependant le choix de s’éloigner considérablement des œuvres originales. Pour commencer, ces derniers prennent sur eux de donner un nom au personnage. Simplement appelé « Père loup » dans les écrits de Kipling, il est alors baptisé Rama. Les auteurs recyclent ainsi le prénom donné par Kipling au grand taureau blanc appartenant au troupeau des hommes du village. Juché sur son dos, c’est à ses côtés que Mowgli livre le combat durant lequel Shere Khan est tué.
Le rôle de Rama est par ailleurs considérablement réduit par rapport aux livres. Les scénaristes suppriment en particulier sa querelle avec le chacal Tabaqui, lui-même écarté de l’intrigue. La rencontre avec Shere Khan est également éludée du film et au final, jamais les loups ne sont montrés à l’écran au contact du puissant tigre. La découverte de Mowgli est en outre dévolue à Bagheera alors même que dans le livre, c’est bien Père loup qui le trouve dans la jungle et le ramène à sa compagne. L’éducation du « Petit d’homme » par son père adoptif est également supprimée et remplacée par une simple ellipse de dix ans. Le retour de Mowgli auprès de son clan est lui aussi trappé, tout comme la mort de Père loup et de Mère loup brièvement évoquée dans Le Second Livre de la Jungle.
L’apparence graphique de Rama est initialement définie par Bill Peet à qui Walt Disney a confié l’écriture du (Le) Livre de la Jungle. Pendant que les autres cadres du département animation s’affairent à réaliser Merlin l’Enchanteur, l’artiste conçoit alors seul le script et le dessin des personnages. Sur ses croquis, les loups apparaissent rachitiques, avec une mine parfois patibulaire.
Lorsque Bill Peet est écarté de la production par Walt qui n’aime pas du tout son scénario et sa manière d’aborder l’histoire, la conception des personnages passe entre les mains de Ken Anderson et Milt Kahl.
Né le 17 mars 1909 à Seattle, dans l’État de Washington, Kenneth Anderson étudie l’architecture en Europe puis à Washington avant de partir pour Los Angeles afin de trouver un travail dans l’animation. Engagé comme décorateur de plateau par MGM, il rejoint les studios Disney en 1934 et travaille sur plusieurs courts-métrages comme La Déesse du Printemps et Trois Petits Orphelins. Repéré par Walt Disney, il est nommé directeur artistique sur Blanche Neige et les Sept Nains, un poste qu’il occupe ensuite lors de la production de Pinocchio et de Fantasia. Animateur sur Le Dragon Récalcitrant et Mélodie du Sud, il participe ensuite à l’écriture de Mélodie Cocktail, Danny, le Petit Mouton Noir et Cendrillon. Promu directeur artistique de La Belle au Bois Dormant, des (Les) 101 Dalmatiens, Merlin l’Enchanteur et Le Livre de la Jungle, Ken Anderson travaille également aux cotés de Walt Disney à la création de Disneyland et de certaines attractions comme Peter Pan’s Flight et Mr. Toad’s Wild Ride. Après la mort de Walt, il planche sur des films comme Les Aristochats, Robin des Bois, Peter et Elliott le Dragon, Les Aventures de Winnie l’Ourson et Les Aventures de Bernard et Bianca. Associé à l’édification d’Epcot, Anderson prend finalement sa retraite en 1978. Parfois surnommé le « Dixième vieux monsieur », en référence aux Nine Old Men, il meurt le 13 décembre 1993, deux ans après avoir reçu un Disney Legends Award pour l’ensemble de sa carrière.
Membre du groupe très fermé des Neuf Vieux Messieurs, Milt Kahl naît le 22 mars 1909 à San Francisco, en Californie. Débutant sa carrière modestement à l’âge de seize ans lorsqu’il est embauché comme dessinateur pour le journal The Oakland Post Inquirer puis pour le San Francisco Bulletin, il devient bientôt dessinateur d’affiches de cinéma. Il entre ensuite chez Disney en 1934. Se distinguant grâce à son caractère bien trempé de ses collègues qui redoutent ses colères mémorables, Kahl travaille comme intervalliste sur plusieurs cartoons de Mickey. Son talent lui permet rapidement de devenir animateur puis superviseur de l’animation. Très doué pour animer des humains, il collabore alors à presque tous les longs-métrages animés de Disney et donne vie à des personnages aussi fameux que Pinocchio, dont il définit l’apparence finale, Bambi, Brom Bones, Frère Lapin, Johnny Pépin de Pomme, Cendrillon, le prince Philippe et le roi Hubert, Roger Radcliff et Pongo, Merlin l’enchanteur ou bien encore Tigrou. Derrière l’animation remarquable de Shere Khan et de Madame Médusa, son ultime méchante, Milt Kahl est élevé au rang de Disney Legend en 1989, deux ans après sa mort survenue le 19 avril 1987 à l’âge de soixante-dix-huit ans.
Ensemble, Ken Anderson et Milt Kahl imaginent des loups plus dignes et distingués. Le pelage épais et la gueule plus massive, ces derniers deviennent instantanément plus convaincants et plus avenants. Moins cartoonesques, leur apparence se rapproche dès lors de celle de vrais loups que les artistes ont pu observer dans les zoos de la région.
La première scène de Rama est animée par Hal King. Né le 3 mai 1913, il rejoint les studios Disney à la fin des années 1930. Intervalliste puis assistant animateur, il collabore à Pinocchio, Fantasia, Bambi ou bien encore Les Trois Caballeros. Également au travail sur des dizaines de cartoons, il devient rapidement l'un des grands spécialistes de Donald. Au générique de la plupart des longs-métrages jusqu'aux (Les) Aventures de Winnie l'Ourson, il est animateur des souris de Cendrillon, du Grand Duc et de Lady. Il sert également de mentor à toute la nouvelle génération, notamment Dale Baer puis se retire finalement dans les années 1980 après avoir aidé au développement des (Les) Gummi et des (Les) Wuzzles. Il décède en 1986.
La scène du conseil est pour sa part créée par Eric Cleworth. Originaire de Minneapolis où il voit le jour le 3 janvier 1920, l’artiste entre chez Disney en 1939. Au cours de sa carrière, il participe notamment aux productions de Peter Pan, La Belle et le Clochard, Goliath 2, Le Livre de la Jungle. Créateur, entre autres, de Peter Pan, Jock, Sire Kay et Sire Hector, le roi Louie et Baloo ou bien encore Maléfique, il participe à l'écriture des (Les) Aristochats et des (Les) Aventures de Winnie l'Ourson. Il quitte les studios à la fin des années 1970. Il disparaît le 10 décembre 1999 à l'âge de soixante-dix-neuf ans.
En version originale, Rama est interprété par Ben Wright. Né à Londres le 5 mai 1915, l’acteur britannique débute au cinéma et à la télévision au milieu des années 1930. À l’affiche de Well Done, Henry, il apparaît dans L’Exilé, Les Amants Traqués, Les Rats du Désert, Prince Vaillant et Massacre à Sand Creek. Installé aux États-Unis, il continue avec Témoin à Charge, Voyage au Centre de la Terre, Le Monde Perdu, Jugement à Nuremberg, Les Révoltés du Bounty, Cléopâtre, My Fair Lady, La Mélodie du Bonheur, La Canonnière du Yang-Tsé ou bien encore L’Étau. Ben Wright prête par ailleurs sa voix à Roger dans Les 101 Dalmatiens et à Grimsby dans La Petite Sirène. Il disparaît le 2 juillet 1989 à l’âge de soixante-quatorze ans.
En France, le rôle est offert à Jacques Degor. À l’affiche des (Les) Frangines, La Salamandre d’Or, Le Bluffeur, Illusions Perdues, L’Homme aux Cheveux Gris et L’Amour à la Bouche, l'artiste prête ponctuellement sa voix à Lee Marvin, Martin Landau, James Patterson et Yul Brynner.
Rama apparaît très ponctuellement dans les différentes adaptations en bande dessinée du (Le) Livre de la Jungle.
Étonnamment, son rôle n’est plus repris dans aucune autre production Disney. Il est notamment absent dans Le Livre de la Jungle 2 produit en 2003. Dans le film en prises de vues réelles The Jungle Book : Mowgli’s Story, son rôle de père adoptif de Mowgli est donné à Akela, interprété pour l'occasion par Clancy Brown. Dans la nouvelle version du (Le) Livre de la Jungle réalisée en 2016 par Jon Favreau, le rôle de Rama est également trappé. Le spectateur apprend alors que Mowgli a été adopté par Raksha avec l’accord d’Akela.
Simple figurant visible seulement une poignée de minutes, Rama n’en demeure pas moins un très beau personnage. Graphiquement impeccable, il permet d’apporter une belle dignité mais également beaucoup d’émotion au premier acte du (Le) Livre de la Jungle.