Date de création : Le 18 octobre 1967 Nom Original : Akela Créateur(s) : Ken Anderson (Conception Visuelle) Milt Kahl (Conception Visuelle) Eric Cleworth |
Apparition : Cinéma Télévision BD Voix Originale(s) : John Abbott (Le Livre de la Jungle, 1967) Rob Paulsen (Le Livre de la Jungle – Souvenirs d’Enfance, 1996) Clancy Brown (The Jungle Book: Mowgli’s Story, 1998) Giancarlo Esposito (Le Livre de la Jungle, 2016) Voix Française(s) : Henry Djanik (Le Livre de la Jungle, 1967) Pierre Tessier (Le Livre de la Jungle, 2016) |
Le portrait
Le 18 octobre 1967, les spectateurs découvrent en salle Le Livre de la Jungle. Dernier film auquel Walt Disney a participé activement avant son décès survenu le 15 décembre 1966, le long-métrage met en scène les célèbres personnages créés en 1894 par Rudyard Kipling parmi lesquels Akela, le vénérable chef du clan des loups.
Akela apparaît dans une seule et unique scène du (Le) Livre de la Jungle. La situation est alors particulièrement tendue. Shere Khan est de retour dans la région. Il faut donc décider au plus vite du sort de Mowgli, le « Petit d’Homme », avant que le terrible tigre ne lui fasse du mal. Pour statuer au sujet de l’avenir du garçon et prendre la meilleure des décisions concernant sa sécurité, Akela a convoqué les anciens du clan. « Shere Khan tuera certainement Mowgli et ceux qui le protègeront », annonce sans détour Akela, « Alors ? Sommes-nous tous d’accord sur ce qu’il convient de faire ? ».
Obtenant sans tarder l’aval des autres sages du clan, Akela convoque Rama, le père adoptif de Mowgli, afin de lui annoncer la mauvaise nouvelle. « Le conseil a pris sa décision », explique-t-il, « Le Petit d’Homme ne peut rester avec les loups du clan. Il doit partir immédiatement. Je regrette beaucoup, Rama… C’est la seule solution ». Écoutant les arguments de Rama, Akela refuse malgré tout de revenir sur sa décision. « Voyons, Rama... », précise-t-il, « Même si tout le clan le voulait, il n’aurait pas raison du tigre... ».
Pour consoler Rama, Bagheera intervient dans la conversation en proposant de conduire Mowgli en sécurité auprès de ses semblables. « Qu’il en soit ainsi », acquiesce Akela, « Fais-le tout de suite, Bagheera. Bonne chance ! ». Alors que la panthère se met en route avec le garçon, Akela et les autres loups sortent définitivement de l’histoire.
Au moment de débuter l’écriture du (Le) Livre de la Jungle, les scénaristes de Disney disposent d’ores et déjà d’un contenu particulièrement dense. Publiés en 1894 et 1895, Le Livre de la Jungle et Le Second Livre de la Jungle de Rudyard Kipling regorgent en effet de personnages et de situations tout à fait enthousiasmants pour un long-métrage d’animation.
Rudyard Kipling
Parmi les protagonistes principaux de l’œuvre originale, figure en particulier Akela, le chef du clan des loups. Décrit par Kipling comme un « grand loup gris solitaire » (Akela signifiant « solitaire » en langue hindi), le personnage apparaît dès les premières pages du (Le) Livre de la Jungle. Le lecteur apprend alors que celui-ci a été nommé chef par ses congénères qui admirent sa vigueur et sa finesse. Jadis, lorsqu’il était jeune, Akela est parvenu à trois reprises à échapper aux hommes. Par deux fois, il est tombé dans un piège à loup. Une troisième fois, il fut assommé. Réussissant à chaque fois à s’en sortir, Akela est ainsi devenu le plus à même de comprendre le comportement et la philosophie des humains.
Gravure de M. & E. Detmold, 1898
À la tête du grand conseil depuis douze saisons, Akela est le garant de la Loi de la jungle. En vertu des règles ancestrales, c’est lui qui refuse de livrer le petit Mowgli à Shere Khan. Avec cette décision, le loup devient par conséquent un ennemi du terrifiant tigre qui, en coulisse, manœuvre pour le renverser puis le tuer. À présent très vieux, Akela est en effet une proie facile pour les jeunes loups assoiffés de pouvoir. Et Shere Khan a déjà ligué une partie du clan contre son chef. Akela peut cependant compter sur le soutien de Mowgli qui, en grandissant, est devenu un farouche garçon. Mais le « Petit d’Homme » reste malgré tout impuissant au moment où Akela est destitué de son rôle de chef.
Gravure de W. H. Drake, 1894
Plus tard, lorsque Mowgli tente de maîtriser le troupeau afin de le sauver des griffes de Shere Khan, il peut compter sur l’aide d’Akela qui, malgré son grand âge, parvient à guider les taureaux jusque dans la jungle. Quelques instants plus tard, le vieux loup pousse les bovins du haut d’un ravin. Après avoir dévalé la pente, les taureaux se mêlent aux vaches et aux veaux, non sans piétiner Shere Khan qui attend en contrebas. Le tigre est tué durant la débandade. Après avoir constaté que Shere Khan est bel et bien mort, Mowgli récupère sa peau. Akela l’aide ensuite à ramener le troupeau au village. La victoire contre Shere Khan permet au vénérable loup de reprendre sa place à la tête du clan.
Gravure de W. H. Drake, 1894
Dans Le Second Livre de la Jungle, l’âge a fait son effet et Akela a perdu sa fourrure grise pour une robe désormais blanche. Les côtes saillantes, le loup a de plus en plus de mal à se déplacer. Incapable de chasser, il ne doit à présent sa nourriture qu’à Mowgli qui la lui ramène. Trop âgé pour diriger seul le clan, Akela donne bientôt l’ordre aux autres loups de se choisir un nouveau chef. Phao est alors désigné pour épauler Akela qui succombe finalement des blessures infligées lors d'une ultime chasse contre le dhole Chien-Rouge.
Prenant la relève de Bill Peet, les scénaristes Larry Clemmons, Ralph Wright, Vance Gerry et Ken Anderson décident de considérablement altérer le rôle d’Akela afin de se concentrer sur celui de Mowgli. Les apparitions du vieux loup sont ainsi réduites à la portion congrue. Akela ne croise dès lors plus la route de Shere Khan. Présent dans une seule et unique scène au début du film, il perd au passage son rôle de mentor auprès de Mowgli.
L’apparence graphique d’Akela et des autres loups est initialement développée par Bill Peet à qui Walt Disney a confié l’écriture de la première mouture du (Le) Livre de la Jungle. Pendant que les autres cadres du département animation s’affairent à réaliser Merlin l’Enchanteur, l’artiste conçoit alors seul le script et le dessin des personnages. Sur ses croquis, les loups apparaissent rachitiques, avec une mine parfois patibulaire.
Lorsque Bill Peet est écarté de la production par Walt qui n’aime pas du tout son scénario et sa manière trop sombre d’aborder l’histoire, la conception des personnages passe entre les mains de Ken Anderson et Milt Kahl.
Né le 17 mars 1909 à Seattle, dans l’État de Washington, Kenneth Anderson étudie l’architecture en Europe puis à Washington avant de partir pour Los Angeles afin de trouver un travail dans l’animation. Engagé comme décorateur de plateau par MGM, il rejoint les studios Disney en 1934 et travaille sur plusieurs courts-métrages comme La Déesse du Printemps et Trois Petits Orphelins. Repéré par Walt Disney, il est nommé directeur artistique sur Blanche Neige et les Sept Nains, un poste qu’il occupe ensuite lors de la production de Pinocchio et de Fantasia. Animateur sur Le Dragon Récalcitrant et Mélodie du Sud, il participe aussi à l’écriture de Mélodie Cocktail, Danny, le Petit Mouton Noir et Cendrillon. Promu directeur artistique de La Belle au Bois Dormant, Les 101 Dalmatiens, Merlin l’Enchanteur et Le Livre de la Jungle, Ken Anderson travaille par ailleurs aux cotés de Walt Disney à la création de Disneyland et de certaines attractions comme Peter Pan’s Flight et Mr. Toad’s Wild Ride. Après la mort de Walt, il planche sur des films comme Les Aristochats, Robin des Bois, Peter et Elliott le Dragon, Les Aventures de Winnie l’Ourson et Les Aventures de Bernard et Bianca. Associé à l’édification d’Epcot, Anderson prend finalement sa retraite en 1978. Parfois surnommé le « Dixième vieux monsieur », en référence aux Nine Old Men, il meurt le 13 décembre 1993, deux ans après avoir reçu un Disney Legends Award pour l’ensemble de sa carrière.
Membre du groupe très fermé des Neuf Vieux Messieurs, Milt Kahl naît le 22 mars 1909 à San Francisco, en Californie. Débutant sa carrière modestement à l’âge de seize ans lorsqu’il est embauché comme dessinateur pour le journal The Oakland Post Inquirer puis pour le San Francisco Bulletin, il devient bientôt dessinateur d’affiches de cinéma. Il entre ensuite chez Disney en 1934. Se distinguant grâce à son caractère bien trempé de ses collègues qui redoutent ses colères mémorables, Kahl travaille comme intervalliste sur plusieurs cartoons de Mickey. Son talent lui permet rapidement de devenir animateur puis superviseur de l’animation. Très doué pour animer des humains, il collabore alors à presque tous les longs-métrages animés de Disney et donne vie à des personnages aussi fameux que Pinocchio, dont il définit l’apparence finale, Bambi, Brom Bones, Frère Lapin, Johnny Pépin de Pomme, Cendrillon, le prince Philippe et le roi Hubert, Roger Radcliff et Pongo, Merlin l’enchanteur ou bien encore Tigrou. Derrière l’animation remarquable de Shere Khan et de Madame Médusa, son ultime méchante, Milt Kahl est élevé au rang de Disney Legend en 1989, deux ans après sa mort survenue le 19 avril 1987 à l’âge de soixante-dix-huit ans.
Ensemble, Ken Anderson et Milt Kahl imaginent des loups plus dignes et distingués. Le pelage épais et la gueule plus massive, ces derniers deviennent instantanément plus convaincants et plus avenants. Moins cartoonesques, leur apparence se rapproche dès lors de celle de vrais loups que les artistes ont pu observer dans les zoos de la région.
La scène du conseil dans laquelle apparaît Akela est magistralement créée par Eric Cleworth. Originaire de Minneapolis où il voit le jour le 3 janvier 1920, l’artiste entre chez Disney en 1939. Au cours de sa carrière, il participe notamment aux productions de Peter Pan, La Belle et le Clochard, Goliath 2, Le Livre de la Jungle. Créateur, entre autres, de Peter Pan, Jock, Sire Kay et Sire Hector, le roi Louie et Baloo ou bien encore Maléfique changée en dragon, il participe à l'écriture des (Les) Aristochats et des (Les) Aventures de Winnie l'Ourson. Il quitte les studios à la fin des années 1970. Il disparaît le 10 décembre 1999 à l'âge de soixante-dix-neuf ans.
En version originale, Akela est interprété par John Abbott. Originaire de Londres où il voit le jour le 5 juin 1905, l’acteur débute au théâtre dès les années 1930 dans diverses adaptations de l’œuvre de William Shakespeare telles que La Nuit des Rois et Peines d’Amour Perdues. À l’affiche de Last Train South, Le Deuil Sied à Électre et Une Maison de Poupée, la guerre le contraint à poursuivre sa carrière aux États-Unis, à Broadway où il joue dans He Who Gets Slapped, Montserrat et La Valse des Toréadors. En parallèle, John Abbott apparaît également au cinéma dans des films comme La Conquête de l’Air (1936), Shanghaï (1941), Madame Miniver (1942), Jeanne de Paris (1942), Jane Eyre (1943), L’Aveu (1944), Le Fils de Robin des Bois (1946), Anna et le Roi de Siam (1946), Madame Bovary (1949), La Veuve Joyeuse (1952), Gigi (1958), La Plus Grande Histoire Jamais Contée (1965) et T’es Fou Jerry (1983). Également crédité au générique de dizaines d’épisodes de séries télévisées, John Abbott disparaît le 24 mai 1996 à l’âge de quatre-vingt-dix ans.
En France, le rôle est offert à Henry Djanik. Né à Varna, en Bulgarie, le 21 mars 1926, l’acteur étudie l’art dramatique avant de débuter sa carrière dans les années 1950. Au théâtre, il apparaît alors dans Colombe, Médée ou bien encore Le Cheval Chinois. Au générique de certains épisodes de L’Inspecteur Leclerc Enquête, Au Théâtre Ce Soir, Les Bridages du Tigre et Les Enquêtes du Commissaire Maigret, il joue par ailleurs au cinéma dans Cet Homme est Dangereux, L’Aventurière du Tchad, Les Trois Font la Paire, Z, Peur sur la Ville, Le Corps de Mon Ennemi ou bien encore 588, Rue Paradis. Dès les années 1960, Henry Djanik devient par ailleurs la voix française d’Anthony Quinn, Ernest Borgnine et Telly Savalas. Il incarne également Corniaud, Bourriquet, Maître Hibou, Bill Sykes et Monsieur d’Arque. Henry Djanik disparaît le 18 août 2008 à l’âge de quatre-vingt-deux ans.
Rama apparaît très ponctuellement dans les différentes adaptations en bande dessinée du (Le) Livre de la Jungle.
Contrairement aux autres loups du film d'origine, Akela apparaît dans Gare aux Loups, un épisode du (Le) Livre de la Jungle - Souvenirs d’Enfance diffusé le 28 décembre 1996. Les téléspectateurs le découvrent alors aux côtés de sa compagne Leah. Obligés de quitter le clan dirigé par l’intraitable Cain qui ordonne leur mise à mort, tous les deux croisent la route d’Hathi, Baloo, Bagheera et Shere Khan dans leurs jeunes années. Après leur combat victorieux contre Cain, Akela et Leah deviennent les parents de huit louveteaux. Dans cet unique épisode dans lequel il apparaît, Akela est interprété en version originale par le comédien Rob Paulsen.
Le Livre de la Jungle - Souvenirs d'Enfance (1996)
Akela est de retour dans le long-métrage en prises de vues réelles The Jungle Book : Mowgli’s Story sorti en vidéo le 29 septembre 1998. Le rôle du loup est alors considérablement réduit. Marié à Raksha, la femelle loup, il se méfie au départ de Mowgli qu’il perçoit comme une menace. Il accepte cependant que le garçon soit élevé parmi les loups. Akela disparaît de l’intrigue après la mort de Raksha, tuée par Shere Khan. Dans cette nouvelle version du (Le) Livre de la Jungle, le vieux loup est vocalisé par l’acteur Clancy Brown (Highlander, Les Évadés, Flubber, Star Wars : Ahsoka).
The Jungle Book : Mowgli’s Story (1998)
Akela retrouve un rôle plus central dans Le Livre de la Jungle réalisé en 2016 par Jon Favreau. Présenté comme le chef du clan, il accepte que Raksha élève le petit Mowgli retrouvé dans la forêt par Bagheera. Le loup devient alors une sorte de père adoptif pour le petit garçon, reprenant de fait le rôle dévoué à Rama dans le classique animé de 1967. Soucieux de faire respecter la Loi de la jungle, il rejette en bloc tous les outils et autres inventions imaginés par Mowgli. Lorsque Shere Khan réapparaît dans la forêt, Akela se dresse, avec les autres membres du clan, pour protéger l’enfant comme s’il était le sien.
Le Livre de la Jungle (2016)
Quand le Roc de la paix disparaît sous les eaux de la rivière, Akela n’a d’autre choix que de convoquer le conseil des loups. Shere Khan a en effet promis de revenir pour tuer Mowgli. Il faut donc décider au plus vite de l’avenir du petit garçon. Alors que les débats s’agitent, Mowgli annonce son choix de partir de lui-même. Sur la proposition de Bagheera, Akela accepte que l’enfant soit raccompagné au village des Hommes.
Le Livre de la Jungle (2016)
Lorsque Shere Khan se présente enfin pour réclamer son dû, Akela l’informe que Mowgli a déjà quitté la jungle. Pour contraindre le garçon à revenir, le tigre empoigne soudain le loup et le projette du haut de la falaise. La nouvelle de la mort d’Akela ne tarde alors pas à parcourir toute la jungle. Mis au courant par le Roi Louie, Mowgli fait ainsi le choix de faire demi-tour pour venger son père adoptif et tuer Shere Khan.
Dans Le Livre de la Jungle (2016), Akela est vocalisé en version originale par Giancarlo Esposito (Malcolm X, Ali, Star Wars : The Mandalorian). En version française, le loup est interprété par Pierre Tessier (voix française de Ryan Reynolds, de Billy Zane, de L’Agent, du Roi Agnarr et de Mario).
Bien que présent quelques secondes à l’écran, Akela incarne remarquablement toute la noblesse des loups et complète dignement le bestiaire du (Le) Livre de la Jungle.