Mr. & Mrs. Smith
L'affiche du film
Titre original :
Mr. & Mrs. Smith
Production :
New Regency Productions
Date de sortie USA :
Le 10 juin 2005
Distribution :
20th Century Fox
Genre :
Action
Réalisation :
Doug Liman
Musique :
John Powell
Durée :
120 minutes (Version Cinéma)
126 minutes (Director's cut)
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Jane et John Smith se mentent depuis des années. Espions sous couvertures tombés amoureux sous leurs fausses identités, ils ont appris à s’aimer ainsi. Jouant au couple idéal et sans histoire malgré l'essoufflement de leur relation, leur quotidien est bouleversé quand tous deux reçoivent un jour l’ordre de tuer l’autre, sans le savoir…

La critique

Publiée le 14 février 2020

Que se passe-t-il quand deux sex-symbols, en plus de compter parmi les meilleurs acteurs de leur génération, sont réunis pour la toute première fois à l’écran pour une comédie d’action ? Tout simplement un très bon moment de cinéma, à la fois terriblement classe et totalement décomplexé !

Sur le titre apparaissant à l’écran, leur patronyme est pourtant l’un des plus communs aux États-Unis. Mais ce nouveau duo n’est en rien le reflet de son insignifiante identité. Le quotidien calculé de Monsieur et Madame Smith risque d’être chamboulé à jamais lors d’une aventure qui va s'avérer loin d’être linéaire. Qui a dit que le mariage sonnait la fin du couple ? Les contraires s'attirent et les histoires d’amour qui commencent sur les chapeaux de roues sont les plus difficiles à faire durer parait-il… Bienvenue dans l’univers de Mr. & Mrs. Smith. Pour le meilleur et pour le pire...

Mr. & Mrs. Smith est librement inspiré de la furtive série télévisée éponyme de 1996 mettant en scène Scott Bakula (L’Indestructible, Code Quantum) et Maria Bello (Coyote Girls, McFarland, USA) dans la peau de deux espions chargés de passer pour des époux alors qu’ils se détestent. Le scénariste en herbe (à l’époque) Simon Kinberg décide en effet de remettre cette histoire au goût du jour. Désormais connu pour être l'auteur et le producteur de la prélogie X-Men - dont l’ultime volet Dark Phoenix (2019) pour lequel il fait ses débuts de réalisateur - il participe notamment à la production de Star Wars : Rebels (2014/2018) pour Lucasfilm Ltd., Cendrillon (2015) pour Disney, Le Crime de l’Orient-Express (2017), puis toujours fidèle aux Mutants de Deadpool (2016), Logan (2017), Deadpool 2 (2018) et Les Nouveaux Mutants (2020) pour Marvel.
Né à Londres en 1973, Kinberg emménage encore enfant à Los Angeles et poursuit ses études à New York où il remporte de nombreux prix d'écriture scénaristique, avant d’être diplômé d’une maîtrise en arts de la Columbia University School of the Arts. Voulant rendre hommage aux longs-métrages d’action hongkongais qu’il trouve « cools, fluides et sexy », il y rédige le premier jet de son script Mr. & Mrs. Smith. Cherchant une nouvelle approche pour son binôme, il s’inspire de deux amis qui débutent une thérapie de couple pour mêler la rancœur amoureuse à l’action, jusqu'à les faire devenir ennemis professionnellement parlant. Le scénariste et producteur oscarisé Akiva Goldsman est de suite séduit, mais les studios qui pensent déjà à la promotion boudent tous et à plusieurs reprises le projet, ne sachant pas s’ils doivent le vendre comme un film d’action ou d’amour !

Après que Kinberg a retravaillé son scénario (mêlant plus habilement rapports humains et action) pour illustrer ces deux personnes qui traversent différentes étapes pour sauver leur mariage avant de littéralement s’entretuer, la société spécialisée dans le cinéma indépendant Summit Entertainment et New Regency Productions en acquièrent les droits. Mr. & Mrs. Smith, produit par Arnon Milchan en personne notamment (le fondateur de la maison mère New Regency Pictures) et distribué par 20th Century Fox, devient alors une priorité. La réalisation revient à Doug Liman, metteur en scène, producteur, scénariste et directeur de la photographie tout juste auréolé par le succès de La Mémoire dans la Peau (2002). Séduit par le scénario misant d'abord sur ses personnages, il voit là l'opportunité d'exposer l’idée qu’il est bien plus simple d’être un super-héros que l’époux ou l’épouse parfaits.
Né en 1965 à New York, Liman se lance dans la réalisation de courts-métrages dès l’âge de sept ans, avant d’étudier l’image au Centre international de la photographie de New York, puis de fréquenter l'École de Cinéma et de Télévision de l'Université de Californie du Sud à l’issue de laquelle il signe sa première œuvre Getting In (1994). Suivront Swinger (1996) écrit par Jon Favreau - Happy du Marvel Cinematic Universe dont il est parfois producteur et réalisateur, également celui du (Le) Livre de la Jungle (2016) et du (Le) Roi lion (2019) - puis Go (1999) avant la susvisée consécration. Si Jumper (2008) avec Hayden Christensen (Anakin Skywalker de la prélogie Star Wars) est un échec, il retrouve le succès avec l’excellent Edge of Tomorrow (2014) avec Tom Cruise et Emily Blunt (Le Diable s’Habille en Prada, Into the Woods : Promenons-nous dans les Bois, Le Retour de Mary Poppins).

Après ce véritable parcours du combattant retardant la préproduction, Monsieur et Madame Smith semblent donc mener la vie la plus paisible qui soit, pour ne pas dire ennuyeuse : une jolie maison en banlieue, de gentils voisins, une profonde réflexion sur le changement des rideaux du salon (qui tirent sur le vert et ne sont plus assortis aux coussins), des dîners taciturnes entrecoupés de courtes nouvelles de leurs (factices) emplois respectifs… Le spectateur pourrait assister à un très bon épisode de Desperate Housewives si le postulat de base s’arrêtait là ! Heureusement, non. Premier souci, et non des moindres : les Smith sont victimes de la routine, qui quand elle n’est pas rassurante peut s’avérer insupportable pour certains. Deuxième problème, plus conflictuel celui-ci : tous deux sont chargés de la même affaire les amenant à s'éliminer l'un l’autre.
Une nouvelle (La) Guerre des Rose (1989) s’apprête donc à commencer. Avec de l’artillerie lourde cette fois-ci ! Mr. & Mrs. Smith a en effet pour double mission de jouer de manière comique sur la mésentente et les non-dits au sein du couple, tout en assurant niveau action. Tel True Lies - Le Caméléon (1994), son autre source d’inspiration. La délicieuse scène qui introduit les époux Smith, en pleine thérapie (tiens donc !) illustre sobrement le conflit sous-jacent et présente parfaitement de la manière la plus parlante qui soit ses deux protagonistes. Jane est concentrée, précise et factuelle. John est détendu, approximatif et désinvolte. Après tout, ils sont mariés depuis cinq ans d’après Monsieur Smith. Six, précise Madame. Un tandem aussi détonant devait trouver deux interprètes à la hauteur de leur tempérament… et de leur incongrue mission.

Si la chanteuse Gwen Stefani (Aviator pour Miramax) est intéressée, Cate Blanchett (Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal, Cendrillon, Thor : Ragnarok), Catherine Zeta-Jones (Haute Voltige) et Eva Green (Dumbo) sont envisagées, Nicole Kidman (Moulin Rouge !) est finalement retenue pour incarner Jane Smith avant d'abandonner au profit d’Angelina Jolie. Née en 1975 à Los Angeles, Jolie débute sa collaboration avec Disney avec Playing God : Au Service du Mal (1997) et 60 Secondes Chrono (2000) pour Touchstone, La Carte du Cœur (1998) pour Miramax, avant d’incarner la méchante la plus emblématique de l’univers Disney dans Maléfique (2014) et Maléfique : Le Pouvoir du Mal (2019). Elle perpétue cet engagement avec la sortie en 2020 de The One and Only Ivan et Eternals, intégrant enfin la grande famille du Marvel Cinematic Universe.
Avec aussi à son actif Les Aiguilleurs (1999) et 7 Jours et une Vie (2002) pour 20th Century Fox, trois Golden Globes, un Oscar pour Une Vie Volée en 2000, Angelina Jolie - réalisatrice depuis 2012 - est un visage incontournable d’Hollywood. Star internationale, bombe sexuelle et valeur sûre du cinéma d’action depuis Lara Croft : Tomb Raider (2001), elle est tout simplement parfaite dans la peau de la femme fatale qu’est Jane Smith et embrasse pour la première fois une carrière d’espionne prolifique qu’elle poursuivra dans Wanted : Choisis ton Destin (2008), Salt et The Tourist (2010). Soit ses plus gros salaires et ses plus gros succès au box-office (hors animation et interprétations de Maléfique). Elle reçoit d’ailleurs ici ce qui restera longtemps son plus gros chèque : 20 millions de dollars. Fait à saluer, exactement le même montant que son partenaire masculin !

Madame n'a en effet rien à envier à Monsieur. Elle est l'archétypique de l'espionne moderne digne d'un James Bond au féminin qui n'hésite pas à jouer de ses charmes, à la tête d'une agence d'élite sur les toits de New York aux ressources ultra-perfectionnées (mention spéciale au bon goût de la direction artistique) et à l'équipe intégralement féminine (parmi elle Jennifer Morrison, Once Upon a Time - Il Était une Fois). Jane peut compter sur son bras droit et confidente, la cartésienne Jasmine (Kerry Washington, Ray, Les Quatre Fantastiques, Scandal). John, lui, est plutôt vieille école. L'agent secret friand de parties de poker qui finissent mal évolue, en effet, au sein d'une agence basée sur la rive bien plus modeste (en apparence). Il a pour seul acolyte Eddie (Vince Vaughn, désopilant), véritable main gauche et totalement paranoïaque de surcroît.
En coulisse, c'est pourtant un binôme complémentaire qui naît, malgré des caractères très différents à l’instar de leurs personnages respectifs. Les producteurs - qui souhaitaient juste que le binôme ne se déteste pas - sont conquis ! La complicité développée entre les deux stars sur le tournage est communicative et transparaît à l'écran. Mais si ce dernier se passe sans encombre, la presse people s’empare et expose très rapidement l’alchimie jugée un peu trop prononcée entre les deux comédiens sur le plateau. Son collègue Brad Pitt est en effet marié à Jennifer Aniston et Angelina Jolie traîne une réputation légèrement sulfureuse. Couple formé avant ou après la séparation Pitt/Aniston ? Libre à chacun - ou personne - d’en juger… Quoi qu’il en soit, le scandale (relativisé à l’échelle hollywoodienne bien-sûr) ne nuira pas à la sortie et à la carrière du long-métrage. Bien au contraire…

Si Will Smith (Aladdin) et Johnny Depp (Pirate des Caraïbes) sont des John Smith potentiels, Doug Liman est ravi de diriger Brad Pitt qui s’implique de suite dans le projet en apprenant la participation de Nicole Kidman. Il se désiste d'ailleurs également lors du départ de cette dernière avant de reprendre son rôle avec autant d’enthousiasme en apprenant qu’Angelina Jolie sera finalement l’élément féminin de Mr. & Mrs. Smith. Né en 1963 dans l’Oklahoma, le cultissime Thelma & Louise (1991) fait connaître le jeune homme, puis Et au Milieu Coule une Rivière (1992) de Robert Redford et Entretien avec un Vampire (1994) aux côtés de Tom Cruise lancent sa carrière. Pitt obtient sa première nomination aux Golden Globes avec Légendes d’Automne (1994) et aux Oscars avec L’Armée des 12 Singes (1995), pour lequel il remporte le Golden Globe du Meilleur Acteur dans un Second Rôle.
Loin de n'être qu'un simple play-boy, Brad Pitt dispose d'une filmographie des plus éclectiques avec notamment la saga Ocean’s (2001, 2004, 2007), Babel (2006), Le Stratège (2011), 12 Years a Slave (2013), Ad Astra (2019). Ainsi qu'une collaboration à succès avec David Fincher pour Se7en (1995), Fight Club (1999), L’Étrange Histoire de Benjamin Button (2008) et Quentin Tarantino pour Inglourious Basterds (2009) puis Once Upon a Time… in Hollywood (2019). Malgré une riche et longue carrière démontrant un véritable talent et un éventail des genres plus que varié, Pitt n'est toutefois pas un homme d'action. Et cela tombe plutôt bien - à moins que John Smith ne soit calqué sur l'acteur - car si l'espion est efficace, il s'avère néanmoins un brin lourdaud et maladroit. Rudimentaire et loin de la sophistication de son épouse, leurs différences sont ainsi encore plus mises en valeur.

Dans sa première partie, Mr. & Mrs. Smith prend le temps de poser son cadre et faire monter la pression au détour de scènes banales mais parfaitement orchestrées, au point d'en devenir tout simplement les plus intéressantes. L'occasion parfaite de mettre en scène la complexité d’une relation amoureuse devenue fragile au sein d’un quotidien redondant, dont les sentiments vacillent parfois entre l’affection et l’exaspération. Les séquences de dîners sont particulièrement réussies. Sans mots superflus, le public assiste, sous couvert de moments anodins, à une véritable guerre froide. À ce propos, ces nombreuses scènes relativement taciturnes contenaient initialement beaucoup plus de texte. Mais le réalisateur préfère finalement laisser parler les regards de ses deux acteurs, qui en disent tout autant et en suggèrent beaucoup plus que de longues et ennuyeuses tirades.
Les mimiques exaspérées et les yeux revolvers d’Angelina Jolie, toujours dans le contrôle, font en effet des merveilles. Sans jamais pour autant basculer dans le rôle de la mégère détestable. Tout comme Brad Pitt, plus léger et nuancé, qui oscille parfaitement entre l’air penaud d’un mari toutefois aimant (mais rattrapé par sa fierté) et son humeur joueuse au détriment de son épouse. Sans jamais pour autant basculer dans le rôle du parfait crétin. Ces moments permettent également de moquer les sempiternels clichés de la vie maritale : la paresse et la goujaterie de Monsieur, la psychorigidité (« organisée » dira-t-elle) et la fade cuisine de Madame, l'absence de vie sexuelle après des années de mariage… De même que John établit son refuge et cache ses armes dans son cabanon de jardin, tandis que Jane préfère comme terrain de prédilection et de rangement sa cuisine.

Leur nouvelle et identique mission introduit enfin le deuxième acte. Finissant par se télescoper et par échouer, tous deux sont commandités par leurs agences de trouver et éliminer leur fautif respectif. Après un petit jeu du chat et de la souris tout aussi plaisant à regarder qui les amène à découvrir l’identité de l’autre, c'est une nouvelle fois au cours d’un dîner plus que tendu que tombent les masques et que l’œuvre prend la tournure tant attendue, au cours de peut-être la meilleure scène de Mr. & Mrs. Smith. La linéarité du récit laisse enfin place aux premiers rebondissements de ce scénario finalement pas si simpliste. Petit souci cependant : comment faire passer les Smith d'un couple classique, certes mal en point mais foncièrement de bonne volonté, à ennemis mortels prêts à tout pour liquider l'autre de sang froid ?
C'est un simple malentendu (comme il en arrive souvent) qui tourne au quiproquo et déclenche la guerre entre les Smith : une balle échappe par inadvertance à John à quelques centimètres du visage de Jane (pas si courant finalement). Les conseils de leur psychologue semblent loin… La confiance et la communication ne sont-elles pas les bases d'une relation ? Bien sûr que oui, mais le point de non-retour est atteint ! Tout ceci n’est après tout que la partie émergée de l’iceberg… Et c’est enfin l’opportunité pour Doug Liman de montrer qu’il est aussi doué pour narrer la routine avec légèreté et comédie, que filmer l'action avec sérieux et panache. Une fois les préliminaires terminés et un tango passionné digne d'un duel qui signe leur divorce (un interrogatoire durant lequel ils prennent bien heureusement soin de se désarmer mutuellement), les époux laissent place aux espions qu’ils sont.

Ils n’ont après tout que 48 heures pour se liquider l’un l’autre. Leur confrontation lourdement armée au sein de leur demeure est incontestablement la scène la plus décomplexée de Mr. & Mrs. Smith, à la fois rythmée, violente et parsemée de répliques bien senties. Lieu du crime ? Non, juste une nouvelle occasion de refaire la décoration de la maison ! Il faut cependant accepter que la triste réalité relative aux violences conjugales puisse être tournée en dérision. Doug Liman contourne la difficulté en mettant comme à son habitude l'accent sur l'humour. Sortie estivale oblige, l'interdiction aux moins de 17 ans est bannie ! Certains gestes jugés trop violents se passent donc derrière le sofa placé au premier plan (tels les coups de pieds que donne John à Jane, à terre), quand certains passages sont tout simplement écartés du montage final pour figurer sur la future édition director’s cut.
Mais le plus violent n’est peut-être pas celui auquel le spectateur s’attend… John devient à ce moment bien plus fin qu’à l’accoutumée. Se rend-il compte de la gravité de la situation ou connaît-il trop bien les qualités de Jane ? Elle, se montre finalement moins calculatrice et devient au contraire plus agressive. Le sous-estimerait-elle ? Et quand les munitions manquent, rien de mieux qu’un bon jeu de mains pour jouer les vilains. Force est de constater que leur préparation pour Lara Croft : Tomb Raider et Fight Club offrent de très beaux restes aux deux comédiens. Angelina Jolie et Brad Pitt retrouvent d’ailleurs le coordinateur de cascades Simon Crane (réalisateur de la seconde équipe) afin d'effectuer le maximum d'acrobaties. Tous deux suivent également les entraînements spéciaux des forces de police et les tactiques anti-terroristes, apprenant à travailler en équipe.

En équipe ? Oui, car tout serait bien trop simple si l’histoire s’arrêtait une nouvelle fois ici. Mais comment corser d’un cran cette aventure et entraîner le public vers de nouvelles péripéties pour son dernier acte ? Avec un petit reste d’amour bien évidemment. La passion ravive la flamme, c’est bien connu. Mais hors de question de tomber dans la comédie sentimentale ou rebasculer dans la routine. Si les Smith ne s’entre-tuent pas… leurs agences concurrentes se chargent de prendre le relais. Depuis fort longtemps, John et Jane forment une nouvelle fois un duo. Et cette fois-ci, doivent apprendre à collaborer. Le mélange étant parfait - et c’est ce qui fait vraiment toute la force de Mr. & Mrs. Smith - même dans l’action et leur enquête (car le scénario recèle encore son petit lot de surprises), les querelles resurgissent de plus belle et la comédie se veut toujours omniprésente.
Autre preuve et autre classique du genre : une course-poursuite efficace et effrénée parfaitement calibrée qui accélère le rythme, tout en laissant le temps à Jane et John de se dire leurs quatre vérités et mettre à plat leurs vies inventées de toutes pièces. Ainsi, pendant que les balles fusent entre deux crissements de pneus, les aveux honteux et inavouables fusent. Une situation des plus classiques une nouvelle fois brillamment ironisée qui permet à une scène classique et incontournable d’action de sortir un peu des sentiers battus. De même quand plus tardivement, les époux s’amusent à comparer non pas le nombre de leurs amants mais celui de leurs victimes, et que Monsieur en dévoile fièrement 50/60 (encore une fois imprécis) quand Madame en confesse gênée mais très exactement 319 !

Si une petite chose peut être pointée du doigt - hormis la tournure conventionnelle que prend le film dès lors que l’action prédomine - c’est l’absence d’un véritable méchant une fois les Smith réunis. Jusque-là, le fait que chacun soit l’ennemi de l’autre suffisait. Même si la menace de leurs agences respectives plane et les hommes de mains fourmillent de partout, c’est avec regret de savoir que Père et Mère - boss suprêmes de Jane et John - faisaient non seulement partie intégrante du scénario, mais avaient trouvé interprètes lors du tournage de leurs scènes (visibles sur DVD et Blu-ray). Dommage également de découvrir qu’ils étaient incarnés une première fois par Terence Stamp (Le Manoir Hanté et les 999 Fantômes) et Jacqueline Bisset, puis avec une approche différente, par Keith David (Docteur Facilier de La Princesse et la Grenouille) et Angela Basset (Black Panther).
Cette deuxième configuration permettait de plus d'amener plus habilement le final de Mr. & Mrs. Smith, pour le coup maladroitement amorcé scénaristiquement parlant. Point d’inquiétude concernant le plaisir des yeux, le spectacle n’en pâtit pas et offre une ultime scène magistralement chorégraphiée, dans laquelle les Smith forment enfin une équipe en parfaite harmonie. Préférant finalement laisser planer le doute (argument défendable), Doug Liman délaisse donc volontairement l'intrigue secondaire pour focaliser son attention sur le couple phare - de son point de vue la véritable problématique (argument plus que défendable) - pour ainsi conserver la cadence. Rythme qui ironiquement souffre un peu de ralentissements dans sa dernière partie, avant de dévoiler de manière un peu abrupte une conclusion somme toute rapide, mais cohérente avec le prologue.

Telle leur scène de danse (répétée et maîtrisée en une heure par les deux interprètes pourtant novices en la matière), une telle passion ne pouvait être illustrée que par un tango argentin. Le tempo est donné par John Powell, compositeur né en 1963 à Londres, qui retrouve Doug Liman après La Mémoire dans la Peau. Sa première incursion dans le cinéma se fait avec Volte / Face (1997), puis signe notamment les partitions de X-Men : L’Affrontement Final (2006), Solo : A Star Wars Story (2018) et L’Appel de la Forêt (2020). Il s’illustre également dans l’animation avec Robots (2005), les deuxième, troisième et quatrième volets de la saga L’Âge de Glace (2006, 2009, 2012), la trilogie Dragons (2010, 2014 et 2019) et le diptyque Rio (2011 et 2014) pour ne citer qu’eux. Disney n’est pas en reste avec sa participation pour Volt, Star Malgré Lui (2008) et Milo sur Mars (2011).
Les violons accompagnent donc Jane et John au rythme de l’évolution de leur relation et de leurs humeurs. Powell dépoussière cependant le genre avec des sonorités plus modernes et jazzy pour l’action, et légèrement comiques lors des fameuses scènes du quotidien, qui auraient pu s'avérer rébarbatives et terriblement tristes (un narrateur qui parsème avec humour ces passages a été coupé au montage au profit de l’ambiance sonore plus subtile et moins intrusive dans le récit). Et puisque tout couple digne de ce nom a SA chanson, c’est donc l’enivrant et sensuel Mondo Bongo de Joe Strummer & The Mescaleros qui immortalise la rencontre des Smith. Une parade amoureuse et une première danse beaucoup plus libre, lascive et romantique que leur tango, durant laquelle Liman se rend compte immédiatement durant son tournage du charisme et du sex-appeal du tandem.

Le tournage se déroule entre janvier et avril puis août et octobre 2004, Brad Pitt devant s’absenter momentanément pour rejoindre le casting d’Ocean's Twelve. La vie professionnelle des Smith prenant place à New York, les prises de vue extérieures y sont tout naturellement capturées. Mais si le couple est censé couler des jours « paisibles » dans sa périphérie, pour des raisons pratiques et économiques, la grande partie des prises de vue intérieures se déroulent en Californie. Les extérieurs de leur magnifique demeure se situent finalement à Pasadena au 1565 San Pasqual Street (devant laquelle est reconstituée la saison de l'automne, inexistante dans cet État) et la fameuse scène du tango a lieu au Citada à Los Angeles au 617 Olive Street (anciennement Rex Il Restorante dans lequel notamment Julia Robert néglige un pauvre escargot dans Pretty Woman).
Concernant les destinations plus exotiques, la scène pivot de leur mission dans le désert est tournée tout près de là, à Johnson Valley dans le désert de Californie. La séquence de varappe de Jane digne de l’ouverture de Mission : Impossible II se déroule sur les rochers rouges de Glenwood Springs dans le Colorado (plus précisément les roches factices du plateau sont rajoutées sur les prises de vue réelles). Point de voyage à Bogotá en Colombie également, lieu de rencontre des deux tourtereaux. Le plan large introduisant cet épisode flash-back étant issu du long-métrage Danger Immédiat (1994) et l'intérieur de l’hôtel créé en studio. Un petit tour dans la région de Rome, en Italie, est organisé pour le tournage d’une scène, une fin alternative présente sur les supports numériques de Mr. & Mrs. Smith dans laquelle est présentée la jeune fille de Jane et John, déjà prédisposée au tir comme ses parents.

Une fois la mission accomplie, Angelina Jolie et Brad Pitt illuminent de leur présence l’avant-première de Mr. & Mrs. Smith organisée le 7 juin 2005 à Los Angeles, trois jours avant sa sortie dans les salles américaines. Après un petit tour du monde, les Smith débarquent en France le 27 juillet suivant. Malgré des critiques presse mitigées, le succès est à la fois surprise et planétaire. Le budget estimé à 110 millions de dollars est ainsi largement rentabilisé avec plus de 478,2 millions de dollars de recettes mondiales (dont 186,3 millions aux États-Unis). Les spectateurs, eux, semblent conquis. Comment pourrait-il en être autrement ? Le tandem Jolie/Pitt, finalement parfait et plus sexy que jamais, constitue le principal attrait et la véritable force de l’œuvre ! Le box-office ne trompe pas : il s'agit là du plus gros succès commercial de l’époque pour Madame et le second pour Monsieur (juste après Troie en 2004 !).
Jamais Jolie n’aura, en effet, été aussi charmeuse tout en étant des plus redoutables (Jane porte étonnamment très bien le latex). Jamais Pitt n'aura semblé s'amuser de façon aussi cabotine et communicative (moins mis en valeur, peut-être pour souligner la simplicité de John). Sans surprise, de nombreuses nominations populaires à leur encontre tombent, mais sans victoires. Le duo est nommé pour le MTV Award et le Teen Choice Award du Meilleur Baiser, mais également le Teen Choice Award et au People’s Choice Award de la Meilleure Alchimie à l’Écran. Parmi ces événements, les Teen Choice Awards soulignent également la Meilleure Scène de Danse, le Meilleur Film à Voir en Couple et plus traditionnellement, le Meilleur Film d’Action/Aventure. Tandis que les People’s Choice Awards nomment Angelina Jolie et Brad Pitt Meilleure Actrice et Meilleur Acteur de Film d’Action.

Parfait mélange d’humour et d’action porté deux protagonistes explosifs, Mr. & Mrs. Smith est défini à l'époque par Doug Liman comme le deuxième épisode de sa trilogie de films pop-corn débutée avec La Mémoire dans la Peau (qu’il clôture avec Jumper ou Edge of Tomorrow ?). En deux mots : terriblement jouissif ! Sans compter que le public assiste à la naissance du couple hollywoodien le plus emblématique de sa génération, ou d'offrir désormais un joli souvenir des « Brangelina » pour les plus nostalgiques. De quoi donner au long-métrage un charme supplémentaire !

Comme le conclut si bien l’épilogue de Mr. & Mrs. Smith - parés pour de nouveaux projets et sur la même longueur d'onde durant peut-être leur ultime séance de thérapie - avec un peu de travail, les différences font la force et la complémentarité la plus parfaite des équipes. « À leur échappée belle… ».

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