Les Quatre Fantastiques
Le synopsis
Le scientifique Red Richards arrive à convaincre le richissime Victor Von Fatalis de financer une expédition dans l'espace afin d'étudier un nuage cosmique. Un accident se produit au cours du voyage… |
La critique
Au milieu des années 2000, la 20th Century Fox est particulièrement prolifique vis à vis des licences Marvel. Après avoir connu un succès critique et public avec X-Men (2000), sa suite X-Men 2 (2003), et un échec monumental avec Daredevil (2003) et son spin-off Elektra (2005), le studio se lance, en effet, dans l'adaptation d'une autre franchise célèbre, celle des Quatre Fantastiques.
Les Quatre Fantastiques est une équipe de super-héros créée par Stan Lee et Jack Kirby en 1961 dans Fantastic Four #1.
En 1960, Marvel Comics cherche son identité après des années d'errance dans le monde de la publication. Les succès d'antan connus par Captain America ou Namor The Sub-Mariner ne fonctionnent plus et les comics d'épouvante, de Western ou d'amour marchent en fonction du succès des films du genre. Stan Lee, rédacteur en chef de Marvel Comics, ne trouve ainsi plus aucun plaisir à écrire des scénarios et estime qu'il est temps pour lui de quitter l'entreprise. Sa femme lui conseille néanmoins d'écrire une dernière histoire, de la façon dont il l'entend, avec les personnages qu'il souhaite et sans se soucier des modes actuelles. Il imagine ainsi une famille de super-héros, les Quatre Fantastiques. Le scientifique Red Richards (Reed Richards en version originale), Jane Storm (Susan Storm en version originale), son frère Johnny Storm et Ben Grimm sont victimes d'une exposition à des rayons cosmiques suite à une expédition dans l'espace. Dès leur retour, ils sont dotés de pouvoirs incroyables et prennent l'identité de M. Fantastique, la Femme Invisible (La Fille Invisible au départ), la Torche Humaine et la Chose. Ensemble, ils luttent contre des menaces terrestres
et extraterrestres.
Le succès pour la nouvelle création de Stan Lee est immédiat. L’auteur mythique décide alors de rester chez Marvel Comics et lance dans les années 60 la grande vague des super-héros, avec Spider-Man, les X-Men, Iron Man, Hulk, ou encore les Vengeurs.
Les premières adaptations des Quatre Fantastiques se font dans des séries animées sur le petit écran : tout d'abord en 1966 dans Les Quatre Fantastiques, une série 2D de 20 épisodes, puis en 1978 dans The New Fantastic Four. La Chose a droit, quant à elle, à sa propre série avec Fred and Barney Meet the Thing en 1979. Il faut alors attendre 1994 pour que l'équipe refasse une apparition dans la nouvelle série Fantastic Four. Certains membres font aussi quelques caméos dans Spider-Man, l'Homme Araignée (1994) et L'Incroyable Hulk (1996).
En 2006, une nouvelle série 2D se consacre aux super-héros, Les Quatre Fantastiques. Toute l’équipe apparait aussi dans Super Hero Squad (2009), Avengers : L'Équipe des Super-Héros (2010), Ultimate Spider-Man (2012), Avengers Rassemblement (2013), et Hulk et les Agents du S.M.A.S.H.
Coté cinéma, après le film de 1994 The Fantastic Four, une nouvelle adaptation live voit le jour en 2005, avec Les Quatre Fantastiques, et sa suite, Les Quatre Fantastiques et le Surfer d'Argent en 2007. 20th Century Fox
souhaitant conserver les droits d'exploitation cinématographique des
personnages met alors en chantier un reboot qui sort en 2015 sous
l'appelation, Les Fant4stiques.
Les Quatre Fantastiques n'est donc pas la première adaptation live du comics. Un film voit, en effet, le jour en 1994, mais ce dernier est en réalité un pur nanar produit à un coût dérisoire dans le seul but pour le studio alors détenteur des droits (Constantin Film) de garder la main mise sur les personnages. Le producteur de l'époque Bernd Eichinger s'était, il est vrai, associé à un spécialiste des films de séries B, Roger Corman pour créer ce qui peut être considéré aujourd'hui comme
l'une des pires adaptations de comics ! Le résultat ne trompe pas
Marvel qui décide de racheter les droits d'exploitation cinématographique de ses personnages pour les confier à la 20th Century Fox...
Le projet démarre donc dés 1995, un an après l'échec de The Fantastic Four. Le studio engage Chris Columbus, futur réalisateur d'Harry Potter à l'École des Sorciers et sa suite, pour écrire une première version du film, le réaliser et le produire. L'artiste décide pourtant de se retirer du projet en 1996, tout en conservant la casquette de producteur. La 20th Century Fox se tourne alors vers des remplaçants potentiels et plusieurs noms se succèdent pour réaliser le reboot. Peter Segal (Match Retour) en 1997, puis Sam Weisman (George de la Jungle) l'année d'après. Le projet n'avançant toujours pas, le script est modifié plusieurs fois, et la 20th Century Fox (ainsi que Bernd Eichinger,
toujours producteur malgré l'échec de 1994) repousse l'opus aux années 2000. Enième recru, Rajna Gosnell est engagé pour réaliser le
film mais quitte le projet pour s'occuper de Scooby-Doo en 2002. Il est remplacé par Peyton Reed (Ant-Man) qui travaille sur le long-métrage pendant un moment avant d'abandonner, lui-aussi, à la suite de différents créatifs avec la 20th Century Fox. Son successeur, Tim Story, parvient à se mettre d'accord avec le studio et entame le tournage pour une sortie
du film en 2005, soit après dix ans de production laborieuse.
Tim Story est un réalisateur américain né le 13 mars 1970 à Los Angeles. Il commence par réaliser de nombreux clips musicaux avant de se tourner vers le cinéma. Son premier film, The Firing Squad sort en 1997. Il réalise ensuite Babershop en 2002, puis le remake américain de Taxi en 2004, New York Taxi. La 20th Century Fox le remarque sur ce dernier et lui propose de réaliser Les Quatre Fantastiques en 2005, puis sa suite, Les Quatre Fantastiques et le Surfer d'Argent en 2007. Sa carrière en tant que réalisateur ne s'arrête pas là : il signe en 2010 Hurricane Season. Think Like a Man en 2012, Mise à l'Épreuve en 2014, Think Like a Man Too en 2014 et Mise à l'Épreuve 2 en 2016.
Si The Fantastic Four est un nanar absolu, Les Quatre Fantastiques lui dispute aussi le rang navet. Certes, le film n'est pas désagréable à regarder, mais il n'apporte rien de nouveau au paysage des adaptations super héroïques. D'un convenu affligeant, il n'est qu'une "origin story" des plus banales sans aucune autre ambition que de proposer un spectacle divertissant... Ses scènes d'actions sont ainsi ordinaires au possible et dénuées de toute virtuosité, que cela soit dans leur mise en scène ou leur réalisation. Les Quatre Fantastiques est d'une platitude consternante, oubliable dès la fin du générique. Les dialogues y sont particulièrement mal écrits, et le développement du film ou les retournements de situations sont prévisibles à souhait. Le long-métrage est en réalité construit selon un schéma si classique qu'il ne provoque rien chez le spectateur. Jamais, il ne vibrera pour les personnages, sera ému pour eux ou même simplement concernés par leur sort. Du vu, déjà vu et revu.
En fait, dès sa sortie, Les Quatre Fantastiques est obsolète !
Et que dire casting du film ?
Ioan Gruffudd, vu dans 102 Dalmatiens, Le Roi Arthur, ou la série Forever, incarne Red Richards, un scientifique passionné par ses travaux, qui délaisse trop souvent les personnes l'entourant. Bien que le comédien soit relativement crédible dans le rôle, le personnage se révèle bien vite irritant, voire hautain et ne présente qu'un intérêt limité.
Jane Storm est interprétée par Jessica Alba (Sin City). Décriée lors de son annonce pour sa couleur de peau dans un réflexe peu louable de racisme ordinaire (l'actrice est métisse contrairement au personnage des comics), elle parait figée tout au long du film et porte bien le surnom de femme invisible. Un glaçon !
Chris Evans, quelques années avant de prendre le bouclier emblématique de Captain America dans le Marvel Cinematic Universe prête ses traits à Johnny Storm, la Torche Humaine. Vantard, blagueur, et sûr de lui, il apporte au film une touche de fun et de légèreté bienvenue. L'acteur est visiblement à l'aise dans ce rôle, et reste, de loin, le plus convaincant de tout le casting.
Michael Chiklis, célèbre pour sa prestation magistrale dans la série The Shield (et vu aussi dans No Ordinary Family), est Ben Grimm, la Chose. Malgré la prestance qu'il apporte au personnage, il est, comme Red Richards, rapidement insupportable tant sa relation avec les autres tourne en rond.
Les Quatre Fantastiques n'ont donc rien de fantastiques à part leur nom. La faute à un développement au ras des pâquerettes, superficiel et convenu. Seul Chris Evans arrive à sauver les meubles,
ses comparses faisant peu ou prou de la figuration.
Coté méchant, Les Quatre Fantastiques introduit la Némésis des héros, le Docteur Victor Von Fatalis (ou Victor Von Doom en version originale). Fatalis est un personnage créé en 1962 dans Fantastic Four #5 par Stan Lee et Jack Kirby. Souverain incontesté de la Latvérie, un pays inventé par
Marvel, il est l’un des plus grands savants de l'univers Marvel, et un sorcier expérimenté, qui peut se révéler aussi génial que fou. Toujours noble, avec une grande prestance, il cherche à
assoir sa domination sur le monde, étant de fait souvent amené à affronter les
Quatre Fantastiques ou les Vengeurs. Il entretient aussi une rancœur permanente envers Red Richards qu'il tient pour responsable de sa défiguration physique. Les deux hommes travaillaient en effet ensemble étant jeunes, avant qu'un accident ne marque Fatalis à vie. Mais le docteur peut aussi être terriblement émouvant et attachant, les auteurs lui ayant toujours donné une sensibilité
appuyée.
Le personnage est ainsi particulièrement apprécié par les lecteurs de comics, à l'image de Magnéto, un autre "méchant" complexe, loin d'être manichéen. Malheureusement, alors que la 20th Century Fox a su rendre chacune des apparitions de Magnéto remarquables, que ce soit sous les traits de Ian McKellen dans les X-Men ou Michael Fassbender dans X-Men : Le Commencement et ses suites, Fatalis rate,
lui, toutes ses transpositions sur grand écran. Il est incarné dans Les Quatre Fantastiques par Julian McMahon (Charmed, Nip/Tuck). Si l'acteur a, en soit, le charisme et la prestance nécessaire pour offrir une prestation digne de Fatalis, le personnage est si mal écrit dans le film, qu'il en devient simplement ridicule. Aucune nuance, aucune ambigüité, du simple manichéisme qui enlève toute la profondeur à Victor Von Doom. Une hérésie difficilement pardonnable et un défaut de plus qui condamne Les Quatre Fantastiques au rang de film dispensable.
Coté technique, le long-métrage ne fait que le minimum syndical.
Les costumes sont certes fidèles au comics, mais ce qui pourrait passer pour un clin d'œil volontaire dans un film maitrisé prend ici des airs de kitsch au rabais ; le choix du latex moulant plombant notamment la crédibilité du film. Ses effets spéciaux et autres maquillages sont, quant à eux, et pour la plupart, réussis. Le rendu de la Chose est particulièrement convaincant, la Torche brille dans le ciel et les scènes d'actions, certes quelconques, restent bien faites. Seuls les pouvoirs de M. Fantastique, en demi-teinte, pêchent un peu. Enfin, la musique, composée par John Ottman, un habitué des productions héroïques, puisqu'il est à l'origine de la bande originale d'X-Men 2, de Superman Returns et X-Men : Days of Future Past en plus des deux films consacrés aux
Quatre Fantastiques, s’avère de qualité et accompagne correctement l'opus. Le thème principal arrive même à être accrocheur !
Malgré son accueil mitigé en salles, Les Quatre Fantastiques réalise un score correct. Pour un budget de 100 millions de dollars, il en récolte en effet plus de 300 millions qui suffisent à convaincre la 20th Century Fox de lancer la production d'une suite, Les Quatre Fantastiques et le Surfer d'Argent qui sortira en 2007.
Lors de sa sortie en vidéo, il connait une sorte de version longue dans laquelle certaines scènes sont modifiées, allongées ou supprimées. Les personnages y sont un peu plus développés sans que cela ne suffise toutefois à sauver le résultat final
Les Quatre Fantastiques est un film qui brille par son extrême fadeur : manque d’originalité, scénario simpliste et personnages creux sont au programme d’un simple produit formaté à l’excès. Regardable mais aussitôt oubliable, il est à classer avec les navets Daredevil, Elektra et autre Ghost Rider. Assurément, l'équipe mérite mieux...