L'Animation Disney
De la Version des Livres à celle des Films
L'article
Pendant plus de 80 printemps, le Maître de l’animation et ses successeurs ont su apporter au monde toute la magie et la beauté des sentiments au travers d’histoires fantastiques aux messages d’amour et de générosité emballés dans un cocon d’humour. Ainsi, il est difficile de trouver dans une de ces œuvres, une seule ne se terminant pas par une fin heureuse. Un seul film d’animation, le seul en date, selon les experts de la firme aux grandes oreilles, déroge à cette règle de happy ending par un dénouement séparant les deux protagonistes : Pocahontas ne vivra jamais en effet aux côtés de son colon préféré, John Smith. Mais ce n’est là qu’un cas isolé face aux multiples fins voyant la mort, ou tout du moins la disparition, du méchant de l’histoire et la réunion de deux êtres faits pour vivre ensemble jusqu’à la fin des temps…
Une grande partie des films d’animations Disney se nourrit de contes notamment européens (Blanche Neige et les Sept Nains, Cendrillon…) mais également de mythes (Hercule), de légendes (Atlantide, l'Empire Perdu) et de personnages ayant réellement existés (Mulan, Pocahontas, une Légende Indienne). Mais lorsqu’il s’agit de retranscrire une histoire s’inspirant de faits réels ou de légendes ayant traversée les siècles, les Walt Disney Animation Studios font face à une toute autre vérité : ces bases d’histoires sont pour certaines assez violentes et par trop inadaptées à l’image de marque des studios. Il est donc nécessaire de s’inspirer de ces textes mais d’en édulcorer des passages, quitte à en supprimer des pans entiers, tout en gardant l’essence et le message narratif. Ainsi, bon nombre d’œuvres de la firme basées sur des récits séculaires voit leur fin totalement modifiée et quelques passages altérés. Pour autant, il ne s’agit pas pour Walt Disney ou ses artistes de traduire à l’écran, mots pour mots, ces histoires remontant à des temps immémoriaux mais bien de s’en inspirer et de leur insuffler le souffle disneyen qui caractérise tant les films d’animations estampillés Disney. Dès lors, ces versions ne sont que la vision disneyenne dont le seul but est de faire rêver des générations entières en leur inculquant des valeurs universelles, participant à la création d’un monde meilleur…
Blanche Neige est en réalité... victime d'un accident domestique !
Comme pour beaucoup d’œuvres Disney, de 1937 à aujourd’hui, les contes ont été une source d’inspiration inépuisable. Le premier du genre, traduit sur grand écran fut, Blanche Neige et les Sept Nains. Conte des frères Grimm publié en 1812 dans le recueil Contes de l’Enfance et du Foyer, il a connu pourtant de nombreuses adaptations avant celle du Maître. Mais c’est bien sa version qui reste ancrée dans l’imaginaire collectif. Il existe cependant des contradictions entre la vision des conteurs allemands (elle-même remodelée à partir de contes populaires transmis dans la pure tradition orale) et celle de 1937. Pour exemple, dans le conte, les nains n’ont aucun nom mais Disney décide de leur donner à chacun une personnalité qui transparait dans leur patronyme. De cette façon, ils sont l’atout comique du film ! Bien sûr, Walt Disney a également épargné aux spectateurs les deux autres tentatives d’assassinat de Blanche Neige par la reine jalouse, celle par un corset trop serré et l'autre par un peigne empoisonné. Elément tout aussi essentiel, la cause du réveil de Blanche Neige est également modifiée. Alors que dans le film, un baiser langoureux du Prince fait sortir de sa léthargie la jeune princesse, le conte des Frères Grimm raconte une toute autre version, beaucoup moins romantique. Les serviteurs du Prince emportent sur leurs épaules Blanche Neige dans son cercueil de verre et trébuchent sur une racine : le soubresaut a pour effet de déloger le morceau de pomme coincé dans sa gorge ! Pour finir, la Reine qui, dans le film est poursuivie par les nains et les animaux de la forêt, se retrouve dans le conte à danser dans des souliers en fer chauffés à blanc, jusqu’à ce que mort s’en suive ! Efficace et radical !
Pinocchio est en réalité... un gamin du ghetto !
L’histoire originelle de la marionnette de bois a été créée par Carlo Collodi, un écrivain italien, en 1881, dans le livre Les Aventures de Pinocchio. Histoire d’un Pantin. Le petit pantin au nez s’allongeant à chaque mensonge a été dépeint par Disney comme un personnage naïf mais désireux d’apprendre de ses erreurs. Pourtant dans la version originale, le héros semble être un garnement non civilisé n’hésitant pas à écraser d’un coup de marteau le pauvre Jiminy Cricket ! Fort heureusement, Walt Disney sauve l’insecte d’une mort certaine en lui donnant un rôle majeur dans la construction psychologique de Pinocchio, le considérant comme sa propre conscience. Une autre discordance est à noter sur le personnage de Monstro : alors que l’écrivain de Florence décrit la bête comme un « terrible requin », Disney le transforme en une baleine, non sans rajoutant là, un clin d’œil au mythe biblique de Jonas. Enfin, les scènes principales du film ont un accent germanique de par l’architecture des bâtiments et certains noms, alors que le livre ancre l’action dans l’Italie de son auteur.
Bambi est en réalité... un chevreuil femelle !
Bambi (dont le nom provient de l’italien « Bambino » signifiant « enfant », à l’instar du Prince de la forêt), jeune chevreuil ayant perdu sa mère, est apparu pour la première fois sous la plume de Felix Salten, un auteur hongrois, dans le roman Bambi le Chevreuil : une Vie dans les Bois. Il s’agit alors d’un chevreuil femelle ! Walt Disney s’est donc inspiré de cette œuvre pour créer en 1942 son cinquième classique d’animation. L’histoire en elle-même n’est pas modifiée mais des personnages comme Panpan sont inventés de toutes pièces pour aider aux intermèdes comiques. Une autre discordance est à pointer du doigt quant à l’espèce même du personnage principal… Bambi est un chevreuil dans l’histoire originale alors que chez Disney, ne connaissant ni de près, ni de loin cette espèce, Bambi devient un cerf de Virginie ! C’est ainsi que depuis, des générations d’enfants croient que les chevreuils portent des bois à l’âge adulte…
Cendrillon est en réalité... restée scotchée sur l'escalier comme une mouche sur son ruban !
En voilà un personnage qui a connu de nombreuses versions ! D’autant plus que, selon le continent, la belle à la pantoufle de verre (ou vair ?) prend des traits foncièrement différents. Ainsi, en Asie, une histoire similaire raconte la vie de Chujo-hime ; aux Amériques, elle prend le nom d’Oochigeas dans le conte éponyme ; etc. Mais c’est bien à la Cendrillon européenne que Disney s’est intéressée et plus particulièrement à la version du conteur français, Charles Perrault. Peut-être s’était-il dit que la version des frères Grimm dans laquelle les affreuses belles-sœurs se coupent les doigts de pied afin de rentrer dans la pantoufle égarée et se font piquer les yeux par des colombes, était, certes, un peu trop compliquée à étêter ? Il n’empêche. La version de Perrault se voit aussi quelque peu modifiée par le Maître. Ainsi, alors que dans le conte, le Prince tente de retenir sa belle en déposant de la poix sur l’escalier, le film d’animation se contente de la laisser partir en omettant une chaussure de verre sur les marches. Mais dans l’ensemble, la trame de l’histoire de Charles Perrault est assez bien respectée… à un point près ! Lady Trémaine, la marâtre, reste méchante jusqu’à la fin du film tandis que Monsieur Perrault la rend gentille et reconnaissante envers celle qui était autrefois, sa prisonnière. Disney est donc pour le coup celui qui en rajoute sur la noirceur du personnage.
Alice est en réalité... entourée de beaucoup plus de personnages !
Une adaptation littéraire a cette particularité de posséder tout un lectorat soucieux du respect et de l’intégrité d’une œuvre. Ainsi, il est aisé d’adapter un conte populaire dont les nombreuses versions offrent un matériel varié mais cette facilité d’adaptation s’estompe lorsque Walt Disney s’attaque à une œuvre littéraire. Et Alice au Pays des Merveilles, écrit par Lewis Carroll en 1865, ne déroge pas à la règle… De nombreux scénaristes se sont alors attelés à cette lourde tâche, non sans mal. Pour exemple, pas moins de 80 personnages existent dans l’œuvre, il est donc, dès lors, impossible pour Disney de tous les représenter et leur rendre l’honneur qu’ils méritent. C’est ainsi que sur les quatre reines du roman, seule une, la Reine de Cœur, se voit représentée dans l’adaptation cinématographique. Même la Tortue Tête-de-Veau passe à la trappe…
Peter Pan est en réalité... un kidnappeur d'enfants !
Le classique d’animation de 1953 utilise Peter Pan, petit garçon n’ayant jamais grandi, personnage de J.M Barrie, un auteur écossais. Bien qu’il soit bienveillant à l’égard des enfants perdus, il refuse cependant, dans le récit de l’auteur, qu’ils grandissent sous peine de les exécuter ! De plus, l’auteur insiste sur le temps qui passe en dépeignant une Wendy vieillie lorsque Peter revient la voir quelques années plus tard… L’enfant se sent alors trahi et décide d’emmener la fille de cette dernière, Jane et le cycle continue, encore et encore…
La Belle au Bois Dormant est en réalité... violée dans son sommeil !
Voilà un autre conte qui a reçu, lui aussi, de nombreuses modifications. Pour La Belle au Bois Dormant, les Studios se sont inspirés des versions des frères Grimm et de celle de Charles Perrault. Mais les conteurs français et allemands se sont inspirés d'une autre variante, celle de Giambattista Basile, écrivain napolitain reconnu. Dans sa version intitulée Soleil, Lune et Thalie, le Prince profite de la princesse dans son sommeil long de 100 ans, tant est si bien qu’elle tombe enceinte, donne naissance à deux enfants dont l’un d'eux suce son doigt, fait ressortir l’écharde qui la maintenait en léthargie et lui permet donc de se réveiller ! Le conteur français en reprend une partie mais épure notamment le passage du viol et raconte ainsi une histoire radicalement différente. La Princesse, qui ne se dénomme plus Aurore, se réveille en effet au bout de 100 ans, sans baiser de prince mais simplement parce que le sortilège est révolu. Un Prince l’attend malgré tout à son chevet et deux ans plus tard, elle est déjà mère de deux enfants : Aurore, une fille et Jour, un petit garçon. Mais voilà, la mère du Prince, issu d’une famille d’ogres, ne peut refreiner l’envie de goûter à la chair de ses petits-enfants : elle demande donc à son Maître d’hôtel de les cuisiner ! Il ne le fait toutefois pas, par bonne conscience, et tue à la place un agneau et un chevreau… Il cache ensuite les deux jeunes enfants dans son logement. L’ogresse, toujours affamée, lui demande alors de carrément dépecer… la Princesse ! Il ne peut là aussi s’y résoudre et tue… une biche, tout en informant la princesse de la folie de sa belle-mère qui ne tarde pas à découvrir la supercherie ! Furieuse, elle ordonne de placer une énorme cuve dans la cour, remplie de serpents, crapauds, vipères, pour y jeter les « coupables ». Le Roi arrive fort heureusement de sa campagne de guerre, interloqué d’un tel spectacle… Folle de rage, l’ogresse se jette alors elle-même dans la cuve ! Les conteurs allemands délivrent une histoire sensiblement identique à la différence près qu'ils ne font aucune mention d'une belle-mère cannibale... Les Studios, eux, ont préféré s’arrêter à un simple baiser de Prince, aussi chaste que romantique.
Les 101 Dalmatiens sont en réalité... 99 !
La suppression de personnages lors de l’adaptation d’une œuvre littéraire au cinéma est un procédé assez fréquent. C'est ainsi le cas avec le roman de Dodie Smith, One Hundred and One Dalmatians adapté par Walt Disney en chef-d’œuvre d'animation, Les 101 Dalmatiens. Dans le récit original, Pongo et Missis forment, en effet, un couple de dalmatiens appartenant aux Dearlys (et non aux Radcliffe dans le dessin animé, une méprise corrigée dans le film en prises de vue réelles de 1996). Le personnage de Perdita est, quant à elle, une chienne abandonnée, perdue (d’où son nom, le roman expliquant son origine), séparée de son amour de chien et de sa portée de quinze chiots et accueillie par les Dearlys. Les scénaristes ont donc tout simplement fusionné les deux chiennes en supprimant sans remords Prince, le compagnon de Perdita, mais également le chat de Cruella et son mari ! Bill Peet, le scénariste du film, s'est donc révélé aussi cruel que Cruella d'Enfer ! Autre fait notable, lorsque dans le roman, les quatre-vingt-dix-sept chiots du livre sont délivrés de la maniaque excentrique, le compte est de cent avec les dalmatiens adultes : Perdita, Pongo et Missis. Il en manque donc un… C’est donc Prince qui vient compléter le cheptel ! Disney choisira de simplifier le tout en "injectant" directement quatre-vingt-quatre chiots supplémentaires histoire de tomber pile sur le nombre cent-un.
Madame Mim est en réalité… une ravissante jeune femme et Arthur a pour surnom... « verrue » !
S’attaquer à la légende arthurienne, bien installée depuis des siècles, est un chalenge que les Studios Disney n'ont pas réchigné à relever, même en période de vache maigre. Mais c’est pourtant bien des coupes budgétaires qui ont eu raison d’une adaptation cinématographique définitivement allégée en comparaison du roman de T.H. White, The Sword in the Stone (1938), sur lequel Bill Peet, scénariste du film, s’est appuyé. La première différence fondamentale est la profondeur des personnages qui se retrouvent bien moins détaillés dans l’œuvre de Disney. Il n’est ainsi fait aucune mention du père d’Arthur qui légitimerait son accession au trône tandis que Madame Mim, alors belle jeune femme d’une trentaine d’années dans le roman, se transforme en vieille sorcière laide et bedonnante ! Côté scénario, les multiples transformations d’Arthur en différents animaux, censées lui apprendre à chaque fois une nouvelle leçon, sont réduites à seulement trois, pour des raisons là aussi de budget d'animation, zappant ainsi de voir un futur roi en oie, en fourmi ou même en blaireau ! Une dernière modification est à remarquer dans la traduction française ; alors que l’œuvre de T.H. White et celle de Disney utilisent le mot anglais « Wart » comme surnom d’Arthur (à cause de la ressemblance homonymique avec « Art »), la version française traduit cela en… Moustique, faisant d’une part fi de la rime et d’autre part en commettant une erreur de traduction ; « Wart » signifiant en réalité « verrue » !
Mowgli se promène en réalité… toujours nu !
Parmi les adaptations de romans par les Studios, Le Livre de la Jungle aurait pu être celle qui se rapprochait le plus de son original… avant que Walt Disney n'y mette son (dernier) grain de sel ! L’œuvre de Rudyard Kipling, The Jungle Book, est en effet une succession de mini-épisodes fonctionnant comme des fables utilisant des animaux aux comportements anthromorphiques. Mais les histoires sont sombres, le ton est dramatique et la version du script écrit par Bill Peet suit cette atmosphère jugée incompatible avec le label Disney. Walt, après la démission de Bill Peet, demande donc en personne à sa nouvelle équipe de ne pas lire l’œuvre originale pour n’en tirer que les personnages phares et aboutir à une adaptation cinématographique joyeuse. Le personnage du Roi Louie est ainsi créé et le film se termine sur un Mowgli décidé à quitter la jungle pour le village, alors que dans la vision de Kipling, le petit d’homme (qui est entièrement nu dans le roman d’ailleurs) est déjà allé deux fois au village. La première, aux alentours de ses 10 ans, il devient chef d’un troupeau et fomente la mort de Shere Khan en lui envoyant un troupeau de buffles qui le piétine à mort. Par la suite, Mowgli l’écorche vif et ramène la fourrure du tigre dans la jungle. Sa deuxième arrivée au village est motivée pour d’autres raisons : Akela est mort, Bagheera vieillissant, Baloo presque aveugle, il est alors temps pour lui de retrouver le peuple des hommes. Le ton est donc radicalement changé mais les aventures du jeune héros sont néanmoins conservées. À l’exception de quelques-unes, comme celle de l’histoire d’un phoque à fourrure blanche de l’Ile de Béring décidé à trouver un endroit sûr où aucun homme n’aura l’intention de le dépecer !
Robin des Bois est en réalité… un bourreau compulsif !
S’il est bien une adaptation Disney à voir avec indulgence, c’est bien celle de Robin des Bois, le Classique de 1973. Le personnage, entré dans la légende, s’est vu, en effet, maintes et maintes fois modifié par le temps mais aussi par des auteurs à travers le monde s’emparant de ce héros devenu par la force des Siècles synonyme de loyauté et défenseur des plus démunis. Ainsi, les récits relatant ses exploits pullulent et se contredisent parfois. Il est de fait quasiment impossible d’adapter avec la fidélité la plus extrême un tel personnage légendaire. Tantôt, Robin est représenté comme un combattant de l’injustice sociale à l’altruisme développé, tantôt comme un rustre violent capable de décapiter moines et enfants. Disney choisit bien évidemment une version positive du justicier où sa générosité et son humour égalent son amour pour Belle Marianne. D’ailleurs, en voilà une qui n’a pas toujours été ce qu’elle est dorénavant dans l’imaginaire collectif. Elle n’était à l’origine aucunement associée au détrousseur des riches mais ce n’est que vers le XVIème siècle que l’idylle entre les deux héros s’est créée, comme l’évidence qu’elle est aujourd’hui. Enfin, la plus grande différence entre la littérature et l’œuvre de Disney est sans aucun doute le choix de la représentation en animaux anthropomorphes. En soi, cela ne pose aucun problème si le caractère de chaque personnage se voit respecté, ce qui est ici le cas. Mais l’affaire se complique lorsque des liens familiaux sont attribués aux personnages. Marianne - encore elle - représentée par une renarde, est censée être la nièce du Roi Richard et du Prince Jean, qui sont eux, deux lions, donnant un lien de parenté totalement inédit par ailleurs ! Darwin peut réviser sa théorie de l’évolution des espèces…
Winnie l’Ourson se trimballe en réalité… toujours à poils !
Deuxième plus grande star des Studios Disney après Mickey Mouse, Winnie l’Ourson est définitivement entré dans l’imaginaire collectif. Mais qui l’imaginerait sans son pullover rouge trop court ? L’adaptation cinématographique a, en effet, pris la liberté d’habiller l’ourson de la Forêt des Rêves Bleus alors que l’œuvre originale se contente de l’animal en peluche au naturel. Ce qui n’a pas échappé à la critique acerbe anglaise… Comme toujours, de nouveaux personnages ont fait leur entrée sans passer par l’œuvre littéraire. C'est notamment le cas de La Taupe qui d’ailleurs rappelle par une réplique qu’il est une création des Studios : « Je ne fais pas partie du bottin, vous savez ? ». Un autre personnage se voit effacé et troqué pour le sexe opposé dans une des adaptations Disney. Jean-Christophe qui jusque-là correspondait trait pour trait à la vision de l’auteur Alan-Alexander Milne qui s’inspira de son fils, est aux abonnés absents dans la série Mes Amis Tigrou & Winnie, alors remplacé par une jeune fille, Darby, accompagnée de son chien Buster, tous deux totalement inventés par les animateurs de la Walt Disney Television Animation qui ne manquent visiblement pas d’imagination, ni de scrupules. Malgré tout, l’œuvre originale bénéficie d’une très bonne transposition cinématographique, comme un hommage à un père dont l’imagination débordante ne tient qu'au coffre à jouets de son fils…
Miss Bianca est en réalité... trop bien pour Bernard !
Des souris, des souris et encore des souris ! Après Mickey et les souris de Cendrillon, les Studios Disney s’approprient donc une nouvelle histoire autour de rongeurs, s’inspirant de l’œuvre de Margery Sharp. Ainsi, Bernard et Bianca sont bien des créations de l’auteure britannique dont le label obtient les droits dès les années 60. Pour créer le Classique de 1977, les animateurs puisent alors majoritairement dans deux de ses romans : The Rescuers (1959) et Miss Bianca (1962). Mais alors que l’histoire originale traite du sauvetage d’un poète norvégien (car Miss Bianca parle norvégien) d’une terrible prison, celle de Black Castle, les Studios retiennent l’autre histoire, celle de Patience, une jeune fille kidnappée par une Duchesse, issue du roman Miss Bianca. L’idée reste la même : partir au secours d’une personne en détresse comme l’indique l’intitulé de la compagnie « Rescue Aid Society ». L’œuvre littéraire pourtant parle d’une « Prisoner’s Aid Society » dont le but est de divertir des prisonniers désespérés et non de les libérer. Le poète laisse donc sa place pour une petite Penny qui est une inspiration de Patience, prisonnière de la Duchesse au Diamant, cette dernière prêtant d’ailleurs quelques traits à Madame Médusa, sans pour autant en être l’adaptation fidèle. Cette dernière vit, en effet, dans un marais, le Bayou du Diable, totalement inventé par Disney, tandis que son homologue romanesque habite, elle, le Diamond Palace. Un personnage a également été soigneusement retiré : Nils, la plus courageuse des souris de Norvège ! Le duo est donc sauf et les deux protagonistes centraux ont même droit à un semblant de romance (voire même une demande de mariage dans la suite Bernard et Bianca au Pays des Kangourous) là où les souris de l’œuvre originale se heurtent à leur statut social respectif, trop différent selon Bianca… Heureusement, Disney a donné sa chance à Bernard !
Rox & Rouky sont en réalité… ennemis pour la vie !
S’il y a bien un propos d’œuvre originale qui fut outrageusement malmené par sa transposition cinématographique, c’est bien celui de Rox et Rouky ! Le 24ème long-métrage de Disney est ainsi une ode à l’amitié, là où le roman de Daniel P. Mannix, Le Renard et le Chien Courant (1967), n’en fait aucune mention ! Les deux animaux ne seront, en effet, jamais amis dans le livre qui narre plutôt la traque continuelle du chien de chasse, nommé en anglais Copper, tout au long de sa vie, pour attraper le malicieux renard, prénommé en anglais Tod. Les raisons de cette chasse sont encore bien plus tristes : le jeune chien préféré du chasseur, Chef, taquiné par Tod, meurt après avoir rompu sa chaîne et poursuivi le renard qui lui tend un piège et le fait percuter par un train. Son propriétaire dédiera ainsi sa vie à sa traque sans relâche. La veuve Tartine n'est de la sorte qu’une pure invention des Studios car le renard, entre deux chasses à courre, se constitue une famille dans les bois… qui se fait exterminer par l’odieux chasseur ! À chaque hiver, ce dernier part d'ailleurs à la recherche de l’animal jusqu’au jour où, après vingt-quatre heures d’une longue traque, le renard au bord de l’épuisement se laisse attraper et tuer… Le chien, maintenant vieux, connaît lui aussi une bien triste fin : son maître avant de partir en maison de retraite, décide à contrecœur, de l’abattre ! La version disneyenne épargne fort heureusement les deux animaux tout en leur offrant, à tous, une fin plus heureuse bien que douce-amère. Enfin, un dernier aspect du roman n’est pas traité dans le Classique de 1981 ; il s’agit de la destruction de la forêt par l’Homme au profit du développement urbain. Cette dimension écologique aurait pourtant eu sa place dans le film Disney, tant le sujet, à la morale toute trouvée, est d’actualité depuis de nombreuses années…
Tirelire est en réalité… une grosse truie blanche et Princesse Eilonwy... une fausse blonde !
Ce Classique est synonyme d’échec commercial chez Disney... Et pourtant, l’œuvre originale promettait de belles aventures dans le pays de Prydain ! L’une des erreurs du Studio est d'ailleurs d’avoir voulu condenser en moins d’une heure et trente minutes les cinq tomes du cycle de Lloyd Alexander, Les Chroniques de Prydain, tant et si bien que ce sont seulement les deux premiers volumes de la saga qui servent de référence. Dès lors, de nombreux éléments sont passés à la trappe tandis que d’autres ont droit à une mise en avant inédite jusqu’à pousser le propre auteur à ne pas reconnaître dans le film, son œuvre ! Ainsi, des personnages mineurs des romans, comme le Seigneur des Ténèbres assimilé au Roi Cornu, se retrouvent sur le devant de la scène au grand dam d’autres protagonistes mis au rabais voire totalement absents à l’instar du Prince Gwydion, un guerrier puissant qui porte la légendaire épée, ou encore Coll, l'un des tuteurs de Taram. Pire encore, lorsque Disney décide de garder certains personnages, leurs apparences s’en retrouvent totalement changées : le barde Ritournelle est bedonnant et vieux alors que l’auteur américain le décrivait comme un homme grand et fort qui était roi autrefois ! Pour les autres, Disney rase la barbe blanche de Dalben, la Princesse Eilonwy est teinte en blonde (alors qu’elle possède à l'origine une chevelure rousse et dorée) et comme si cela ne suffisait pas, Tirelire n’est plus une grosse truie blanche mais une mignonne petite cochonne toute rose ! Enfin, la scène du sacrifice, même si elle est conservée, liquide le mauvais protagoniste… Ce n’est pas Gurgi qui aurait dû sauter mais bien le Prince Ellidyr, un jeune homme arrogant mais finalement courageux !
Le Professeur Ratigan est en réalité… une souris !
Décidément, les Studios ont une passion pour les souris. Le 26ème long-métrage signe ainsi une adaptation du roman d’Eve Titus, Basil of Baker Street (1958), un rongeur grand fan de Sherlock Holmes à tel point qu’il habite sa cave ! Concernant l’histoire, la ressemblance avec l’œuvre littéraire s’arrête ici. Point de Mr. Flaversham dans le livre mais deux jumelles kidnappées (ou plutôt mousenapped comme cité dans le roman), Angela et Agatha, que Basil doit impérativement retrouver car sa petite ville est en jeu… Il n’est, en effet, pas le seul à habiter dans les fondations de la maison du célèbre détective mais c’est bien tout un petit village, surnommé Holmestead, qui s’est créé par la volonté de Docteur Dawson qui rassemble ici 44 familles de souris ! L’adaptation Disney s'éloigne de cette colonie envahissante et se cantonne aux deux seuls compères vivant dans le sous-sol de Sherlock Holmes. Le Docteur et non moins ami de Basil est d’ailleurs bien plus que ça dans le livre : il écrit les mémoires de la souris ayant déjoué le plus de crimes dans le monde des rongeurs ! Enfin, le méchant de l’histoire, le Professeur Ratigan, n’est pas ce qu’il prétend être… Alors que Disney le dépeint comme un rat, c’est en réalité, dans l’œuvre originale, une souris, comme son nom l'indique d'ailleurs... Mais un rat pour vilain, c’est bien plus malin !
Oliver reste en réalité… pauvre toute sa vie !
Le 27ème Grand Classique des Studios Disney s’inspire librement d’une œuvre monumentale de Charles Dickens de 1838 : Oliver Twist. Bien que les différences dans la forme sautent aux yeux (l’histoire se déroule à New York et non à Londres, l’action se place au XXème siècle et plus au XIXème siècle, Oliver est un chat au lieu d’un enfant…), dans le fond, il est difficile d’y trouver des contradictions tant l’histoire est d’un mimétisme respectueux. Bien évidemment, la myriade de personnages qui peuple le roman est réduite à son minimum dans le film mais ceux ayant été adaptés (Oliver, Roublard, Fagin, Sykes), le sont avec justesse. La plus grande différence, si c’en est une, se trouve dans l’omission complète de l’enfance d’Oliver. Alors que dans le livre ce dernier vit des heures sombres dans un orphelinat, battu et maltraité, cet épisode n’est pas traité par Disney. La fin également diffère : Oliver était pauvre dans le livre et le reste jusqu’à la fin… alors qu'Oliver le chat, devient un riche matou !
Ariel est en réalité... sans voix, sans langue et en meurt !
En 1989, les Studios Disney signent une très belle adaptation du conte homonyme de l’écrivain danois, Hans Christian Andersen, La Petite Sirène. Une fois de plus, les contes européens font recette. Dans la version danoise, Ursula, appelée la Sorcière des mers, lui demande aussi en contrepartie du philtre pour devenir humaine, sa voix sauf que Disney a oublié de préciser que, pour cela… Elle lui coupe la langue ! Puis, le breuvage qu’elle boit la fait terriblement souffrir comme si une lame d’épée la transperce. Enfin, le Prince ne s’entiche pas d’Ariel mais d’une autre pimbêche dont il tombe amoureux. Ne pouvant le supporter, la Petite Sirène se suicide !
La Belle et la Bête sont en réalité… cousins !
À l’aube des années 90, les Studios Disney décident de revenir à leurs premiers amours : les contes intemporels. Et c’est l’histoire d’amour d’une jeune femme avec un prince victime d’un terrible sortilège qui séduit les animateurs. Le conte popularisé par Jeanne-Marie Leprince de Beaumont en 1757 détient pourtant quelques éléments absents du film. Ainsi, la Belle du XVIIIème siècle n’est pas fille unique : elle a trois frères et trois sœurs ! Dans une version antérieure, celle de Villeneuve, elle a même six frères et cinq sœurs ! Autant de bonnes âmes à sacrifier à la place de la vie de leur père… L’image du Prince est également quelque peu écornée. Alors que dans le roman, il refuse de se marier avec une gouvernante s’avérant être une méchante fée et qui lui lance un terrible sortilège,
Disney fait passer le Prince pour un égoïste de première qui n’hésite pas à claquer la porte à la première vieille dame venue demander le gîte et le couvert ! Une variante du conte indique de plus, comment le père de Belle (qui est alors un marchand et non un inventeur) rencontre la Bête : tombant sur son château, quelque peu éméché, il se fait accueillir dans cette grandiose demeure, où boissons et dîners lui sont offerts. Mais il fait l'erreur de couper une rose, à la demande Belle ; la Bête s’en sentant terriblement insultée, après l’accueil qu'il lui a réservé !
Un autre détail de taille : dans le roman, point de chandelier parlant ou de théière rassurante. Non, les seuls domestiques du château sont… des singes ! Le méchant de l’histoire est enfin à peine suggéré dans l’œuvre littéraire (même si la méchante fée ayant jeté le sort à la Bête peut être considérée comme tel) alors que
Disney choisit un garçon arriviste, bellâtre mais terriblement narcissique !
Mais comment la Bête perd donc la vie dans le conte original ? En réalité, la Bête décide de laisser Belle partir de sa prison dorée car son père est mourant tout en espérant qu’elle reviendra à temps avant sa mort perpétrée par le sort… À un jour près, Belle rate le coche et retrouve son bien-aimé inanimé. Elle réussit cependant à lui redonner la vie et lui avoue son amour. L’occasion pour la Bête de demander s’il pouvait partager son lit, pour une nuit, bien qu’il ne se soit toujours pas transformé ! Belle accepte et s’endort près d’une créature ronflant à plein nez… jusqu’au matin où elle se retrouve au lit avec un beau jeune homme, le sortilège ayant pris fin ! Mais pourtant, le bel éphèbe ne se réveille pas, bien que Belle tente de l'animer à maintes reprises à coups de baisers, de chants et d’instruments. Rien n’y fait. C’est alors que deux femmes s’approchent de la fenêtre : voici la Reine, mère du Prince, et la bonne fée ! La mère ne souhaite pas que son fils épouse une roturière, le Prince se réveille alors et c’est là que tout devient intéressant… Belle EST de sang noble ! En réalité, Belle est la fille d’un roi d’un royaume voisin qui a procréé avec la sœur de la bonne fée, mère de Belle ! Mais cela outrepassa les lois, la méchante fée enferme donc la mère de Belle et séduit le roi. Pendant ce temps, la bonne fée sauve sa nièce d’une mort certaine en la confiant à un marchand. La méchante fée séduit par la suite le Prince qui n’y succombe point et se fait transformer en bête hideuse, la boucle est bouclée. Ah oui, un dernier détail : ce Roi, vrai père de Belle, est le frère de la mère du Prince, donc son oncle. Et oui… La Belle et la Bête sont cousins !
Aladdin est en réalité... chinois !
Pour la première fois, les sources d’inspiration s’affranchissent des contes européens et vont plus loin… vers des contes orientaux, tels les Mille et Une Nuits ! Ainsi, Aladdin provient de l’œuvre Aladin ou la Lampe Merveilleuse rajoutée tardivement au recueil persan, mais n’est pas pour autant arabe comme le film d’animation tente de le faire croire… C’est, en effet, un chinois ! De plus, le diamant d’innocence ne se rend pas dans une caverne sous le sable mais dans un jardin magique pour y trouver le précieux objet ; la lampe contenant le Génie. Ce dernier ne lui concède ensuite pas trois vœux mais bien tous les souhaits qu’il désire, sans modération ! Enfin, la lampe n’est pas le seul moyen d’invoquer le Génie dans le conte, Aladdin possède en plus un anneau magique ayant le même pouvoir.
Pocahontas est en réalité… mineure quand elle rencontre John Smith et meurt à 21 ans !
Pour la première fois dans l’histoire des Studios Disney, les animateurs vont s’inspirer d’un autre support pour leur prochain long-métrage : l’Histoire avec un grand H. Pocahontas, une Légende Indienne s’inspire donc d’une indienne ayant réellement existée. Seulement Disney va quelque peu édulcorer son récit. Premièrement, ils vieillissent la jeune femme (elle aurait dû avoir dix ans environ au regard des événements mis en lumière dans le film), la romance avec le plus âgé John Smith étant désormais permise. Ensuite, comme toutes légendes, les versions diffèrent. Selon une d’entre elles, elle se serait bien mariée avec un certain Kocoum, laissant entre elle et le colon John Smith, une relation de pure amitié. Une autre version indique qu’elle est enlevée et éduquée par un prêtre anglais qui la renomme Rebecca. Moins exotique que Pocahontas qui signifie en langue Powhatan « Petite dévergondée » ! Pour en revenir à l’histoire d’amour de Disney, les faits historiques ne la relatent pas voire la rendent impossible, comme lorsque Pocahontas, venant à Londres, retrouve John Smith qu’elle croit mort, et qu’elle appelle « Père ». Elle se marie d’ailleurs avec John Rolfe, un autre colon anglais, avec qui elle a un fils, Thomas. Pire, le dénouement final de Disney est certainement le plus triste parmi les Grands Classiques, mais il reste bien moins douloureux que la fatale réalité : la belle indienne, mariée à John Rolfe et dorénavant mère, succombe, en effet, à une maladie indéfinie - selon une légende orale de la tribu des Mattaponi, elle aurait été empoisonnée pour l’empêcher de divulguer les plans des colons d’étendre leurs pouvoirs sur les terres de son père - à l’âge de vingt-et-un ans, alors en route vers ses terres natales…
Quasimodo est en réalité... sourd !
Le roman de Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, paru en 1831, constitue la trame de fond idéal pour le classique d’animation de 1996, Le Bossu de Notre-Dame. A quelques exceptions près… En effet, le héros bossu n’était pas que difforme, dans l’œuvre de l’auteur français, mais devient aussi sourd ! Assez gênant pour en faire un personnage attachant et, qui plus est, insatiable chanteur ! Egalement, Claude Frollo n’est pas un juge dans le roman mais bien un archidiacre garant du respect des bonnes pratiques religieuses. La fin est par la même occasion altérée : dans la version littéraire, Esméralda meurt pendue car elle se refuse à l’immonde Claude Frollo tandis que Quasimodo pousse son père adoptif dans le vide, récupérant le corps sans vie de sa belle égyptienne et l’enlaçant jusqu’à la rejoindre au paradis. Disney offre donc une fin beaucoup plus heureuse et salutaire !
Hercule est en réalité... un nudiste !
En 1997, les Studios Disney s’attaquent à une véritable légende de la mythologie grecque : Hercule, le demi-dieu ! Cependant, de nombreuses libertés ont été prises vis-à-vis du mythe originel. Ainsi, Alcmène, la mère adoptive d’Hercule est en réalité dans le mythe sa véritable mère, dupée par Zeus qui prit l’apparence de son mari. Un autre exemple réside dans le rôle du satyre Philoctète, responsable de l’éducation d’Hercule dans le film. L’histoire raconte en effet que c’est le centaure Chiron qui se charge de cette tâche, alors que Philoctète, héros de la Guerre de Troie, n’a pas participé de près ou de loin à l’entrainement du jeune demi-dieu. Enfin, et c’est une décision sage de la part des Walt Disney Animation Studios que de ne pas retranscrire les goûts vestimentaires du personnage mythique : et pour cause, il était toujours tout nu !
Mulan est en réalité... courtisée par l'Empereur de Chine !
Mulan fait partie de ces classiques d’animation s’inspirant de la vie d’une personne ayant réellement existé. En effet, comme dans l’œuvre cinématographique, Hua Mulan est une fabuleuse guerrière s’étant faite passée pour un homme pendant des années. De retour de campagnes, elle reprend son identité. L’empereur découvre alors la « supercherie » et tombe éperdument amoureux du général Mulan… jusqu’à lui demander sa main ! La femme refuse mais face aux multiples insistances de l’empereur décide… de se suicider avec son épée. La version Disney omet bien sûr cette partie pour des raisons aisément compréhensibles.
Tarzan est en réalité… Clayton !
L’œuvre d’Edgar Rice Burroughs contient, en tout et pour tout, vingt-six volumes. Dès lors, l’adaptation de Tarzan, Seigneur de la Jungle au cinéma au cours du XXème siècle n’a pas toujours été fidèle. Les Walt Disney Studios n’échappent pas à cette règle. La première incartade des animateurs, aussi étonnante soit-elle, est de donner le patronyme de Tarzan… au méchant ! Clayton, ce vilain d’ailleurs totalement inventé pour les besoins du film, adopte même le prénom du père du héros, John. Le début de l'opus de Disney varie également quelque peu du roman : les parents de Tarzan se retrouvent dans cette jungle perdue à cause d’une mutinerie sur leur bateau les obligeant à quitter le navire. Sa mère meurt peu après avoir été attaqué par un grand singe violent tandis qu’un autre, nommé Kerchak, finit John Clayton, alias Lord Greystoke, déjà accablé par la mort de sa bien-aimée. Kerchak est donc ici un ennemi de Tarzan et non son beau-père. Ce dernier par ailleurs n’est pas un gorille, comme Disney veut le faire croire, mais quelque chose entre un humain et un chimpanzé appelé un Mangani, une espèce totalement inventée par l'auteur. Les autres animaux n’en sont pas moins épargnés : Sabor n’est pas un léopard dans le roman mais une lionne tandis que Tantor est le seul animal que Kerchak semble craindre ! Difficile à croire dans le cas de l’éléphant pétochard dépeint par Disney… Concernant le héros, le livre en révèle un peu plus sur l’origine du surnom du héros, donné par Kala ; « Tarzan » signifiant « peau pâle ». Enfin, la conclusion de l’histoire disneyenne détonne avec le roman. Alors que Jane reste dans la jungle avec son amour de sauvage, la Jane Porter du roman alors une américaine blonde et plus une anglaise aux bonnes manières, le retrouve en Amérique et en fait un parfait gentleman. Mais voilà, n’étant plus attiré par l’homme singe devenu imprévisible et violent, elle accepte, aussi par soucis de classe sociale, la proposition de mariage d’un autre Clayton… alors cousin de Tarzan et se désignant comme digne héritier de la fortune de l’homme singe !
Lewis n’est pas en réalité… le père de Wilbur !
L’adaptation du roman de William Joyce, A Day with Wilbur Robinson (1990), tient plus de l’inspiration que d’une transposition fidèle bien que, pour une fois, les personnages et leurs caractéristiques physiques sont en tous point semblables ! La famille loufoque décrite par l’auteur américain l’est, en effet, tout autant dans le 47ème Classique d’animation ! Malgré tout, une différence - et de taille celle-là - réside dans la relation des deux personnages Wilbur et Lewis. Alors qu’ils ne sont qu’amis dans le roman, Disney va plus loin : les scénaristes créent un lien de parenté entre les deux enfants, Lewis étant le père de Wilbur ! De fait, la couleur de cheveux de Lewis et du père étant l’indice de ce lien de parenté, elle diffère dans le livre, avec un père à la chevelure noire. Rien que pour cette différence cruciale engendrant des conséquences inévitables dans l’intrigue du film, il se devait de figurer dans cette liste…
Tiana est en réalité... l'arnaqueuse de l'histoire !
Le long-métrage de 2009 renoue avec la source d’inspiration originelle de Disney : les contes populaires. Ainsi, La Princesse et la Grenouille est une interprétation du conte des frères Grimm, Le Prince Grenouille. Interprétation car le film s’éloigne peu à peu de l’histoire de base… Pourquoi ? Tout simplement parce que la version des frères allemands s’annonce plus directe : la Princesse fait la promesse à une grenouille de la laisser partager sa vie si cette dernière daigne bien chercher une balle perdue dans un puits. La balle une fois retrouvée, la Princesse fait mine d’oublier sa promesse, ne l’honore pas et retourne dans son royaume. La grenouille la suit et s’installe sur sa chaise, mange dans son assiette et même dort à ses côtés… C’en est trop pour la princesse qui se saisit de la grenouille et la balance contre le mur ! Miracle, le batracien était en réalité…un prince !
Raiponce est en réalité... tout sauf ingénue !
Pour leur 50ème long-métrage, les Studios ont misé sur une valeur sure : un bon vieux conte européen ! Une recette qui fonctionne toujours, à condition d’en épurer un peu les parties les plus violentes… Ainsi, le conte allemand Raiponce (Rapunzel en allemand) des Frères Grimm présente une version différente de celle de Disney : Raiponce reçoit souvent des visites d’un prince qui s’accroche à sa chevelure pour accéder au haut de la tour, dans laquelle elle se trouve prisonnière. Mais la belle à la longue chevelure avoue à sa geôlière qu’un prince vient lui rendre visite… La sorcière, alors furieuse, lui coupe les cheveux et l’envoie dans une zone désertique ! C’est alors que le prince va rendre visite à sa belle mais se voit trompé par la sorcière qui le pousse du haut de la tour… Le prince atterrit dans les ronces et se relève avec les yeux crevés. Il retrouve cependant sa princesse qui survivait tant bien que mal dans un environnement hostile où elle avait mis au monde, seule, des jumeaux. Ses larmes guérirent les yeux de son bien-aimé et, comme toujours, ils vécurent heureux jusqu'à la fin des temps !
La Reine des Neiges est en réalité... une méchante patentée !
Véritable triomphe mondial, la retranscription à l’écran du conte homonyme d’Hans Christian Andersen ne se présente plus. Mais comme tous contes, il a vu son histoire largement retoquée, ce qui n’a pas empêché son succès, bien au contraire. C’est d’ailleurs, sans conteste, le Classique d’animation le plus éloigné de sa trame originale. En effet, dans la version danoise, point d’Anna, de Kristoff, de Sven ou d’Olaf. La Reine des Neiges fait tout de même partie du casting mais elle n’a alors aucun lien de parenté avec les deux protagonistes du livre, Kaï et Gerda, cette dernière pouvant se rapprocher du personnage d’Anna. Ainsi, dans l’histoire, Gerda part à la recherche de son ami Kaï qui est emprisonné par la Reine des Neiges. De plus, cette dernière crée dans le film un seul garde fait de glace et de neige appelée Guimauve lorsque dans le livre, elle lève une authentique armée de bonshommes de neige, prêts à la défendre. Foncièrement mauvaise dans le roman danois, la Reine des Neiges en devient touchante et attachante dans la version de Disney. Il s’agit là véritablement d’une inspiration pure du conte et non d’une adaptation stricte faite magistralement par les Studios Disney.
Baymax est en réalité… un OGM !
Une fois n’est pas coutume : le 54ème Grand Classique Disney se base sur un comic Marvel ! Mais l’adaptation reçoit pourtant le même traitement que celle de La Reine des Neiges. Les noms des personnages sont gardés ainsi que quelques-unes de leurs caractéristiques. Il en est de même pour le titre, également conservé. Pour le reste, l’histoire est réinventée ! La différence la plus flagrante reste le design de Baymax, le robot de Hiro. Cet Assistant de Santé Personnel si avenant et touchant est en réalité une créature génétiquement modifiée, capable de se transformer en humain ou encore en dragon ! Hiro l’a ensuite reprogrammée à la mort de son père en utilisant l’intelligence artificielle lui donnant en quelque sorte celle de son paternel. Pour le reste de l’équipe, les personnages sont assez ressemblants, même si deux sont manquants, remplacés par Wasabi et Fred : le Samouraï d’argent et Sunfire sont en effet deux super-héros dont les droits d'adaptation cinématographiques appartiennent à 20th Century Fox. Dès lors, il est aisément compréhensible de ne pas les voir dans ce film d'animation signé Disney. Concernant le lieu de l’action, les animateurs Disney ne se contentèrent pas du Tokyo du comic, Big Hero 6, et combinèrent alors la ville nippone avec… San Francisco ! Une différence qui se laisse apprécier tant le résultat en est des plus bluffants. Un dernier élément n’a pas été porté à l’écran, expliquant pourtant l’enrôlement d’Hiro dans l’équipe : la capture de sa mère par un certain Everwraith, un être maléfique créé à partir de toutes les âmes perdues lors de l’explosion des bombes nucléaires de Nagasaki et d’Hiroshima en 1945… Bizarrement, Disney n’a pas jugé nécessaire de transposer cette partie de l'histoire !