Les Prétendantes

Kuzco, l'Empereur Mégalo

Le 15 décembre 2000, le public fait connaissance avec Kuzco, empereur antipathique et particulièrement grossier avec toutes les personnes qui croisent son chemin. Réunies par un préposé, sept charmantes demoiselles en font notamment l’amère expérience.

Après son grand numéro musical, Kuzco entre avec fracas dans l’une des salles du palais où l’attend un préposé qui a réuni pour lui sept prétendantes. « Ah ! Un nouvel arrivage ! », s’exclame l’empereur qui s’approche des jeunes femmes. Alignées les unes à côté des autres, toutes sont particulièrement tendues.

« Alors, voyons tout ça ! ». Kuzco débute son inspection. Pointant grossièrement du doigt les demoiselles, il s’autorise à faire un commentaire pour chacune d’elles. « Déteste tes cheveux… Même pas en rêve… Berk ! Berk ! Berk ! Oh ! Laisse-moi deviner. Toi, tu es très intelligente ». Sans se donner la peine de juger la dernière femme, Kuzco se tourne vers son préposé. « C’est vraiment c’que t’as trouvé de mieux ? », demande-t-il avec mépris sans voir que derrière lui, l’une des prétendantes est prête à en découdre. Le poing levé, elle est retenue par sa voisine. Humiliées, les autres jeunes filles baissent les yeux. Elles disparaissent alors de l’intrigue pour ne plus y revenir.

Les prétendantes font partie des protagonistes créés tout spécialement pour Kuzco, l’Empereur Mégalo. Aucune d’elles n’est en effet présente dans le script de Kingdom of the Sun initialement développé par le réalisateur Roger Allers avec le concours du chanteur Sting. Inspiré du (Le) Prince et le Pauvre de Mark Twain, le film met en scène le personnage de Manco Capac, un jeune prince et prétendant au trône du royaume des Incas. Charmeur, l’héritier n’en reste pas moins un être arrogant, persuadé que le monde n’a été créé que pour le servir et le divertir. Célibataire capricieux, il décide un jour de se trouver une épouse. Il jette alors son dévolu sur Nina, une jeune femme qui se résigne à accepter sa demande en mariage, et ce malgré le fait qu’elle ne l’aime pas. La vie des uns et des autres bascule lorsque Manco décide d’offrir sa place à Pacha, un éleveur de lamas qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau. Affranchi de la tutelle de sa conseillère Yzma, le prince mène ainsi sa vie en dehors du palais. Pacha, de son côté, profite de son nouveau statut et croise la route de Nina qui, en découvrant sa bonté d’âme, tombe amoureuse de lui.

Feuille de modèles de Nina

Supervisée par Doug Frankel, placé à la tête d’une équipe comprenant une dizaine d’animateurs parmi lesquels Mark Pudleiner, Nina est conçue comme un personnage fort et courageux. Vocalisée par la comédienne Carla Gugino, elle mène une vie indépendante, loin des contraintes du protocole qui, malheureusement pour elle, ne tardent pas à la rattraper. Fiancée de force avec Manco, elle ne rêve que d’évasion et d’amour aux côtés d’un homme gentil et humble qui l’appréciera à sa juste valeur.

Dessins d'animation de Nina par Mark Pudleiner

Confié au réalisateur du (Le) Roi Lion, Roger Allers, et au chanteur Sting, Kingdom of the Sun est un projet ambitieux qui, dès le début de sa production, souffre de nombreux problèmes. Bien que le décor soit planté au cœur du royaume des Incas, l’intrigue principale, avec l’échange de places entre le prince et le paysan, a déjà maintes fois été portée à l’écran, y compris par les studios Disney qui ont à deux reprises adapté l’œuvre de Mark Twain, en 1962 et en 1990. Après des projections tests mitigées, Allers doit revoir sa copie. Pour ce faire, il est associé à l’artiste Mark Dindall qui n’a pas la même vision des choses que lui. Si le premier envisage de créer un drame, le second cherche à développer une comédie. Allers et Dindall ne travaillent pas dans la même direction, tant et si bien que la production patine.

Après que Roger Allers et Sting ont décidé de claquer la porte, Mark Dindall se retrouve seul aux manettes avec son ami, le producteur Randy Fullmer. Réécrit par David Reynolds, Kingdom of the Sun se mute alors en Kuzco, l’Empereur Mégalo, une comédie d’aventure potache dans la veine des dessins animés d’antan. Si le personnage de Manco survit pour devenir Kuzco, celui de Nina disparaît purement et simplement de l’intrigue. L’idée de montrer l’empereur en train de se choisir une fiancée est malgré tout conservée. C’est ainsi qu’au début de l’histoire, les prétendantes sont introduites dans le récit.

Au nombre de sept, elles n’ont qu’un rôle mineur. Dépourvues de lignes de dialogue, les prétendantes ne font ainsi que de la figuration et servent à montrer au public à quel point Kuzco est un être abjecte et égocentrique. Elles partagent dès lors la même fonction que Rudy, le vieillard, le préposé, ou bien encore l’armée de domestiques que le héros maltraite durant les premières minutes du film. Anonymes, les prétendantes possèdent toutes un visage assez similaire. Elles se distinguent néanmoins les unes des autres grâce à leur coiffure, leur tenue et leurs bijoux. Leur caractère diverge également. Si certaines encaissent leur humiliation avec dépit, une est prête à coller son poing dans la figure de Kuzco.

Sandro Cleuzo

Les prétendantes sont animées par Sandro Cleuzo. Également en charge du chanteur du générique, de Rudy, du préposé et de la serveuse, il débute sa carrière à la fin des années 1980 lorsqu’il rejoint les studios de Don Bluth en Irlande. Associé à la production de Poucelina et Anastasia, il rejoint les équipes de Disney au travail sur Tarzan. Il planche également sur Le Géant de Fer puis Fantasia 2000, Kuzco, l’Empereur Mégalo, La Ferme se Rebelle, film pour lequel il anime le shérif Sam Brown et Jeb, et La Princesse et la Grenouille où il supervise l’animation des frères Fenner. Sa filmographie comprend par ailleurs les films Astérix et les Vikings, Il Était une Fois, Angry Birds : Le Film, Le Retour de Mary Poppins, Monsieur Link, Klaus, Scooby! et Space Jam : Nouvelle Ère.

Visibles seulement une poignée de secondes au tout début de Kuzco, l'Empereur Mégalo, les prétendantes n’ont pas d’autre rôle que de montrer au public à quel point Kuzco est un mufle égocentrique et maltraitant.