Randy Fullmer

Le 10 juillet 2023, la communauté Disney apprend avec tristesse le décès de Randy Fullmer, l’un des artistes ayant œuvré aux studios durant l’Âge d’or des années 1980-1990.

Mark Dindall et Randy Fullmer

Randall Wyn (Randy) Fullmer voit le jour le 27 avril 1950 à Richland, une ville située au centre de l’État de Washington, dans le nord-ouest des États-Unis. Fils d’un père physicien nucléaire et d’une mère physiothérapeute, il se découvre très jeune une passion pour la musique. Dès l’âge de six ans, il prend ainsi ses premiers cours de trombone. Il se met ensuite à jouer de la guitare à six cordes. Lorsque ses parents refusent de lui acheter un second instrument, il construit lui-même sa première guitare à douze cordes. Il n’a alors que douze ans ! Épaulé par un ancien luthier prénommé Tom, il en assemblera trente autres durant son adolescence.

Membre du groupe de rock The Isle of Phyve avec lequel il se produit les week-ends et pendant les vacances scolaires, Randy Fullmer quitte le lycée avec pour projet de devenir architecte. Il s’inscrit ainsi à l’Université de l’État de Washington (WTU). Durant deux ans, il apprend le dessin technique tout en suivant en parallèle des cours de cinéma. Découvrant les rudiments de l’animation, Fullmer est absolument ravi au point de changer ses projets d’avenir. Quittant sa région natale, il s’installe bientôt en Californie et intègre l’Institut CalArts. Apprenant les techniques de l’animation auprès d’enseignants prestigieux ayant, pour certains, travaillé dans les plus grands studios hollywoodiens à l’image de Marc Davis, Jules Engels et Elmer Plummer, il décroche finalement son diplôme en Beaux-Arts en 1974.

Fraîchement sorti de l’école, Randy Fullmer décide de se lancer à son propre compte. À la tête de son studio, il produit et réalise des spots publicitaires ainsi que plusieurs films éducatifs et scientifiques. Il conçoit également quelques séquences diffusées dans diverses émissions pour la jeunesse, en particulier Sesame Street. Entre 1983 et 1987, Fullmer entame une collaboration avec Don Bluth en travaillant comme animateur des effets spéciaux sur les jeux-vidéo Dragon’s Lair et Space Ace. Il travaille dans le même temps pour la société Apogee fondée par John Dykstra, l’un des pionniers dans l’univers des effets spéciaux et cofondateur d’ILM. Animateur sur long-métrage Lifeforce, l’Étoile du Mal de Tobe Hopper (1985), Randy Fullmer est également engagé par Filmation qui lui propose de plancher sur divers projets pour la télévision tels que la série animée She-Ra, la Princesse du Pouvoir (1985-1987) et le téléfilm He-Man et She-Ra: A Christmas Special (1985), ou bien encore Ghostbusters (1986-1987) et BraveStarr (1987-1989). Pour Hyperion Pictures, il œuvre un temps sur Le Petit Grille-Pain Courageux (1987).

Également associé à la production des longs-métrages d’animation Pinocchio et l’Empereur de la Nuit (1987) et Blanche Neige et le Château Hanté (1989) produits par Filmation, Randy Fullmer rejoint finalement les équipes de Disney en 1987. En tant qu’animateur des effets spéciaux, il travaille alors sur la séquence animée de Qui Veut la Peau de Roger Rabbit se déroulant à Toonville (1988). Au même poste, il enchaîne ensuite avec Oliver & Compagnie (1988) et La Petite Sirène (1989). Il est bientôt promu superviseur des effets spéciaux sur Bernard et Bianca au Pays des Kangourous (1990) et La Belle et la Bête (1991), ce qui lui vaut d’être nommé pour un BAFTA Award.

Randy Fullmer poursuit sa collaboration avec Disney en tant que coordinateur artistique du (Le) Roi Lion (1994) et Le Bossu de Notre-Dame (1996). À ce poste, il est alors chargé de coordonner les équipes et de veiller au respect du cahier des charges prédéfinis pour le film, notamment en matière d’effets spéciaux et d’éclairages. D’autres artistes après lui prendront le relai sur les longs-métrages suivants. Avec humour, ces derniers seront souvent surnommés les « Randy » de la production.

Randy Fullmer débute ensuite un beau partenariat avec son ami Mark Dindall, un autre animateur des effets spéciaux qu’il avait rencontré dans les années 1980 lorsqu’il travaillait chez Filmation. Fullmer en tant que producteur et Dindall en tant que réalisateur supervisent ainsi la création de Kuzco, l’Empereur Mégalo (2000) puis de Chicken Little (2005). Pour ce dernier film, il est nommé pour le prix du Meilleur producteur pour un film animé lors de la cérémonie des Producers Guild of America Awards. En 2004, il travaille comme artiste des effets spéciaux sur le long-métrage Mickey, Donald, Dingo – Les Trois Mousquetaires sans pour autant être crédité au générique.

En 2006, Randy Fullmer fait le choix de tourner la page de l’animation pour revenir à l’un de ses premiers amours, la musique. Il quitte alors Disney après dix-huit ans de bons et loyaux services et fonde Wyn Guitars. Seul employé de sa société, il se consacre désormais exclusivement à la fabrication de guitares, un travail qui se limitait jusqu’à présent à un simple loisir, et parvient à se constituer un beau carnet d’adresses en vendant ses instruments à des artistes tels que Jimmy Haslip, Abraham Laboriel, James LoMenzo, Adam Johnson et Ethan Farmer. Apprécié des professionnels, son travail est mis à l’honneur dans le documentaire Restrung réalisé par Mike Enns en 2014.

Atteint d’un cancer, Randy Fullmer disparaît le 10 juillet 2023 dans sa maison de Woodland Hills, au nord-ouest de Los Angeles. Entouré par sa femme Diana et ses enfants Becky et Nick, il avait soixante-treize ans.

« La plupart des gens ne sont bons que dans un seul domaine », note le producteur Don Hahn suite à l’annonce du décès de son ancien collègue, « Randy était pour sa part bon dans énormément de choses. Il savait dessiner et peindre magnifiquement. Mais il avait aussi l’esprit d’un ingénieur et le cœur d’un artisan. Il était excellent en tant qu’animateur mais aussi comme producteur de films. Il fut au centre de la renaissance des studios Disney. Et puis, lorsqu’il a décidé d’écrire un nouveau chapitre de sa vie, il s’est mis à fabriquer des guitares basses fabuleuses et très recherchées avec le même esprit d’ingénieur et la même âme artistique que ceux qu’il a apporté aux films d’animation Disney. Il me manque déjà mais je continuerai de porter en moi sa passion et sa joie ».

« C’est avec une tristesse infinie que j’apprends le décès de mon collègue et ami de longue date », écrit pour sa part le réalisateur Gary Trousdale, « Randy était mon superviseur des effets spéciaux, mon résolveur de problèmes, un véritable génie durant la production de La Belle et la Bête. Je dois dire que j’ai toujours été impressionné par ses guitares, plus même que par son travail dans l’animation. Après tout, n’importe quel idiot peut faire un dessin animé. Mais ses guitares étaient absolument merveilleuses, de vraies œuvres d’art. Savoir que cet homme, aussi doux que drôle, est parti est un déchirement. Ma tendresse et mes condoléances à sa femme Diana. Repose en paix, Rembie ».