The Amateur
Titre original : The Amateur Production : 20th Century Studios Hutch Parker Entertainment Date de sortie USA : Le 11 avril 2025 Genre : Thriller |
Réalisation : James Hawes Musique : Volker Bertelmann Durée : 123 minutes |
Le synopsis
La critique
Le 11 avril 2025, 20th Century Studios livre – tardivement – son tout premier long-métrage de l’année, The Amateur, avec Rami Malek.
Mélange de thriller, de film d’espionnage et de film d’action, The Amateur est l’adaptation du roman The Amateur: A Novel of Revenge de Robert Littell. Publié par l’éditeur new-yorkais Simon & Schuster en 1981, le livre provient du scénario que l’auteur a lui-même écrit avec Diana Maddox pour le long-métrage L’Homme de Prague (1981 au Canada, 1982 aux États-Unis et en France). Réalisé par Charles Jarrott, il est alors produit par Garth H. Drabinsky et Joel B. Michaels via leurs sociétés Balkan Productions et Tiberius Film Productions, et distribué à l’international par 20th Century Fox. Interprété par John Savage, Christopher Plummer et Marthe Keller dans les rôles principaux, il raconte la vengeance orchestrée par Charlie Heller, un cryptographe de la CIA, après que sa femme a été tuée par un commando ayant pris d’assaut le consulat américain de Munich. Confronté à l’inaction de ses chefs, il obtient au prix d’un chantage sur ces derniers l’autorisation d’être envoyé en Tchécoslovaquie afin d’éliminer lui-même ses assassins. Les choses ne se passent toutefois pas comme prévu. Lorsque les cadres de la CIA mettent la main sur l’objet du chantage, ils décident en effet de laisser tomber leur agent, à présent coincé derrière le « Rideau de fer », en pleine Guerre froide, sans aucune formation, ni aucun soutien sur place.
Nommé dix fois lors de la troisième édition des Prix Génie, l’équivalent des Oscars au Canada, L’Homme de Prague est devenu un classique du genre, tout comme le roman de Robert Littell que le scénariste Evan Katz (24 Heures Chrono) décide de reprendre dès 2006 afin d’en livrer une nouvelle adaptation. Hugh Jackman, qui vient de triompher dans X-Men (2000), est pressenti pour incarner le personnage principal, Charles Heller. Le projet traine toutefois en longueur avant de tomber plusieurs années aux oubliettes. Il n’est repris par les producteurs Hutch Parker (Les Fant4stiques, Logan) et Dan Wilson (Traque à Boston) qu’en février 2023. Les scénaristes Gary Spinelli (Barry Seal : American Traffic, Impulse) et Ken Nolan (La Chute du Faucon Noir, The Company, Line of Fire) sont alors chargés de réécrire le script. L’époque ayant changé depuis 1981, toutes les références à la Guerre froide sont gommées. Le « Rideau de fer » est en effet tombé il y a des décennies, en 1989. Pour coller à l’époque actuelle, l’intrigue est déplacée de Prague vers Londres, Paris, Marseille, Madrid et Istanbul. Une partie des événements se déroule également en Roumanie et au large de la Russie, dans les eaux de la mer Baltique. La dualité entre la CIA et le KGB n’a en outre plus lieu d’être.
La réalisation de The Amateur est confiée à James Hawes qui, à l’époque, s’est déjà frotté au genre de l’espionnage grâce à la série Slow Horses avec Gary Oldman, Jack Lowden et Kristin Scott Thomas (2022). Originaire de Wimbledon, au Royaume-Uni, il étudie au départ le droit sur les bancs de l’université de Warwick, servant également comme acteur et metteur en scène au sein de la troupe de théâtre de l’école. Abandonnant finalement toute carrière dans la justice, Hawes est engagé par la division documentaire de la chaîne de télévision BBC qui lui propose de réaliser le téléfilm The Earth in Balance dans lequel le Prince Charles est invité à parler des défis environnementaux (1990). James Hawes réalise ensuite les documentaires Divine Magic: The World of the Supernatural - Messengers of the Gods (1996), Haunted History: The Myrtles Plantation (1998), Lawrence of Arabia: The Battle for the Arab World (2003), ainsi que plusieurs épisodes des séries Staying Alive (1996), The Bill (1996-1998), Holby City (1999), Sea of Souls (2004), Doctor Who (2005-2006), Black Mirror (2016-2019), Slow Horses (2022) et Empires: Egypt’s Golden Empire nommée aux Emmy Awards (2001). Sa filmographie compte également les téléfilms A Line in the Sand (2004), The Chatterley Trial (2006), The 39 Steps (2008), Enid (2010), Pulse (2010) et The Challenger (2013). The Amateur est son deuxième long-métrage de cinéma, deux ans après Une Vie avec Anthony Hopkins (2023).
Pour le rôle de Charles Heller, James Hawes se met en quête d’un acteur capable de mêler à l’écran intelligence, vulnérabilité et une part de maladresse, tout en étant convaincant dans sa recherche de vengeance. Il porte alors son choix sur Rami Malek, qui endosse également pour l’occasion une casquette de producteur exécutif. Né à Los Angeles le 12 mai 1981, le comédien débute modestement dans des séries telles que Gilmore Girls (2004), Médium (2005) et La Guerre à la Maison (2005-2007). Décrochant ses premiers rôles au cinéma dans La Nuit au Musée (2007) et Twilight, chapitre V : Révélation, Partie 2 (2012), il parvient à percer grâce à L’Enfer du Pacifique (2010), la série Mr. Robot (2015-2019) qui lui permet de décrocher l’Emmy Award du Meilleur Acteur, et surtout son interprétation de Freddie Mercury dans Bohemian Rhapsody (2018), rôle pour lequel il est sacré aux BAFTA, aux Golden Globes et aux Oscars. Il apparaît ensuite dans Mourir Peut Attendre (2021), Amsterdam (2022) et Oppenheimer (2023).
En mai 2023, la presse annonce que Laurence Fishburne rejoint le casting. À l’affiche de Matrix (1999), Mystic River (2003), Predators (2010), Man of Steel (2013), John Wyck 2 (2017) et Ant-Man et la Guêpe (2018), l’acteur interprète le mentor de Charles, Robert (Hendo) Henderson. La femme du héros, Sarah Heller, est pour sa part jouée par Rachel Brosnahan, vue dans Sublimes Créatures (2013), The Finest Hours (2016) et Superman (2025). Pour contrebalancer l’amateurisme de Charles, Jon Bernthal (Fury, Le Mans 66, The Punisher) prête ses traits à l’agent chevronné Jackson "The Bear" O’Brien.
Après être apparue dans Strictly Criminal (2015), New York, Section Criminelle (2006-2010) et Boardwalk Empire (2011-2013), Julianne Nicholson prend quant à elle le costume de la directrice de la CIA, Samantha O’Brien. Holt McCallany (Alien3, Gangster Squad, Nightmare Alley) et Sanny Sapani (Star Wars : Les Derniers Jedi, Black Panther, Halo, 2022) incarnent les cadres corrompus de l’Agence, Alex Moore et Caleb Horowitz. Le chef des terroristes est campé par Michael Stuhlbarg, déjà au casting d’Hitchcock (2013), Lincoln (2013), Doctor Strange (2016) et La Forme de l’Eau (2017). Caitríona Balfe (Super 8, Belfast), Adrian Martinez (Kick-Ass, La Belle et le Clochard), Marc Rissmann (Overlord), Joseph Millson (La Chute du Président) et Barbara Probst (Demi-Sœurs) complètent la distribution. L’acteur japonais Takehiro Hira (Shōgun) est engagé pour le rôle du Professeur qui n’apparaît finalement pas dans le montage final. Enfin, Marthe Keller, qui jouait Elisabeth dans L’Homme de Prague en 1981, fait un bref caméo dans le rôle d’une fleuriste parisienne.
Son casting réuni, James Hawes pose ses caméras à Londres et dans le sud-est de l’Angleterre en juin 2023. Les prises de vues se poursuivent en France, à Paris et à Marseille, puis en Turquie. Les studios Pinewood, dans la banlieue londonienne, sont également utilisés. Le tournage est cependant suspendu le 14 juillet, au moment où débute la grève menée par la Screen Actors Guild-American Federation of Television and Radio Artists (SAG-AFTRA), le syndicat des acteurs de cinéma et de télévision. Il faut alors attendre la fin du conflit social, le 9 novembre, pour que la conception du film reprenne.
Profitant d’une photographie volontairement sombre dirigée par Martin Ruhe (Harry Brown) et d’un montage serré supervisé par Jonathan Amos (A United Kingdom, Baby Driver), The Amateur rappelle par certains aspects les meilleurs thrillers et films d’espionnage de ces dernières décennies, à commencer par Mission Impossible (1996), Ronin (1998), Ennemi d’État (1998), Spy Game, Jeu d’Espions (2001) et Le Pont des Espions (2015). Fort heureusement, les enjeux et les stratégies mis en place sont beaucoup moins difficiles à appréhender que ceux présentés dans La Taupe (2011) ou Red Sparrow (2018), deux autres classiques du genre. Le caractère improvisé de l’opération menée par Charles Heller peut par ailleurs faire penser, dans un sens, à Argo de Ben Affleck (2012). Certains verront aussi dans cette recherche de vengeance personnelle des airs de ressemblance avec la saga Taken (2008). Les créateurs du film, à commencer par son réalisateur, ont clairement expliqué s’être inspirés de l’atmosphère dégagée par les films mettant en scène le personnage de Jason Bourne, en particulier le premier, La Mémoire dans la Peau (2002), ou bien ceux avec Jack Ryan, tels que The Ryan Initiative de Kenneth Branagh (2014).
Comme ses prédécesseurs, The Amateur utilise la plupart des ficelles du genre. En réalité, c’est même toute la pelote qui est déroulée ! Enveloppé par la musique oppressante – mais peu mémorable – de Volker Bertelmann (Lion, Conclave), le public se retrouve ainsi plongé dans les méandres de la CIA, avec ses locaux surprotégés par une armée de vigiles auxquels s’ajoutent pléthores de portiques, de caméras, de détecteurs et d’applications faisant appel à l’intelligence artificielle pour repérer le moindre trombone glissé à l’intérieur d’une chemise. Étonnamment, le héros, Charles Heller, parvient d’ailleurs malgré tout à passer à travers ! Les bureaux aseptisés sont évidemment remplis de cols blancs parfois pas si propres sur eux qu’il n’y paraît. Les agents honnêtes côtoient ainsi les fruits pourris. Les espions en costumes croisent les gros-bras déguenillés, à commencer par le personnage de Jon Bernthal qui semble fraîchement revenu d’une rave-party bien arrosée.
L’informatique est évidemment reine dans cet environnement où les données incompréhensibles pour le commun des mortels inondent des murs entiers d’écrans. Pour les interpréter, les sous-sols sont alors remplis de geeks à lunettes et à pulls sans manche. Histoire de renforcer un peu plus la caricature, il faut bien sûr ajouter la petite dose d’agents étrangers avec des accents est-européens prononcés. Et que serait un bon film d’espionnage sans ses gadgets et ses bombes artisanales que chacun, semble-t-il, peut fabriquer dans sa cuisine à l’aide de quelques produits chimiques savamment mélangés dans des bouteilles en plastiques attachées par quelques centimètres de ruban adhésif à un téléphone portable utilisé comme détonateur ?!
Tous ces ressorts, des plus classiques, permettent à Charles Heller, un petit gars ordinaire, d’organiser sa vengeance. Comme bon nombre de personnages avant lui, « Monsieur Tout-le-monde » se trouve ainsi en mesure de gérer des situations toutes plus extraordinaires les unes que les autres. Voilà bien une autre ficelle du genre, à savoir montrer quelqu’un de banal en train de réaliser des choses en rien anodines. Charlie achète un ordinateur bon marché dans une boutique miteuse d’Istanbul. Et bim ! Le voilà qui parvient à créer une machine capable de piloter une bombe à des kilomètres à la ronde ou bien d’entourlouper les caméras de sécurité de toute l’Europe en plaçant une copie numérique de son visage sur celui de badauds en train de se promener simultanément à Berlin, Rome et Prague… De là à donner envie au spectateur sortant de la salle d’aller faire un tour dans son magasin informatique le plus proche, il n’y a qu’un pas !
À l’évidence, The Amateur n’est pas du tout crédible. Il ne cherche d’ailleurs pas vraiment à l’être. Le spectateur qui entre dans une salle de cinéma pour voir ce genre de divertissement sait pour quoi il a payé sa place et, à l’évidence, il en a pour son argent. Les créateurs ne se cachent d’ailleurs pas des choix scénaristiques qu’ils ont faits. « C’est le genre de film que j’aime voir, note James Hawes. C’est devant ce type de fiction que j’aime m’asseoir avec mon seau de popcorn. Je ne prétends pas que nous ayons réinventé la roue. Nous avons repris certains éléments familiers du genre et nous leur avons donné une touche spéciale. Au cœur du film, il y a ce personnage, un héros avec lequel on aimerait être, qu’on aimerait suivre ». James Hawes poursuit. « Il était important pour nous que Heller reste un héros ordinaire et sous-estimé. Dans un long-métrage traditionnel, le geek serait devenu, à la fin de son entraînement, un as du tir et du combat au corps à corps. Nous avons cherché à montrer tout le contraire. Comme l’indique le titre du film, il n’est qu’un amateur ».
Comme voulu, le public vient donc voir un pauvre garçon dévasté par le chagrin, qui se lance dans une série de représailles préparées avec les moyens du bord aux quatre coins de l’Europe. Bien sûr, il est difficile de croire aux exploits qui sont montrés. En fait, il est difficile de croire tout ce qui est présenté dans le film. Les invraisemblances sont légion. L’une d’entre elles, et pas des moindres, est cette aptitude qu’ont les agents de la CIA à déverser – tels les meilleurs Stormtroopers de l’Empire – des kilomètres de munitions sans jamais atteindre leur cible. La vulgaire voiture dans laquelle Charlie se trouve embarqué est ainsi canardée de toutes parts, mais les rafales envoyées depuis la route, la mer et le ciel ne parviennent même pas à faire exploser un pneu ! Certains diront qu’il y a pourtant bien une victime dans ce carnage. Certes oui. Mais le héros parvient à s’en sortir sans une égratignure. Un miracle, sans doute !
Cela est-il pour autant si important ? The Amateur fait partie de ces productions qui ne demandent pas de réfléchir. Il s’agit d’action à l’état pur, avec sa succession de clichés et de situations ubuesques. Au passage, il offre une excursion palpitante, de Londres à Marseille, en passant par Istanbul, utilisés par les équipes de la décoratrice Sophie Phillips qui a, entre autres, déjà fait ses preuves sur les films d'espionnage Quantum of Solace (2008), La Taupe (2011) et Red Sparrow (2018). « Nous ne voulions pas proposer une espèce d’excursion touristique, précise James Hawes. Je ne voulais pas montrer Londres telle que la voient les passagers assis au premier étage d’un bus panoramique. Je désirais montrer la ville dans laquelle les habitants vivent, où des espions peuvent potentiellement se fondre dans la masse. Le même concept a été repris pour dépeindre Paris, Marseille et Istanbul ».
Outre quelques scènes d’action à couper le souffle, notamment ce passage – étonnamment divulgâché dans la bande-annonce – où l’une des Némésis se retrouve prisonnière d’une piscine construite au-dessus du vide, entre deux immeubles madrilènes, le principal point fort de The Amateur reste son acteur principal, Rami Malek. Il porte littéralement tout le film sur ses épaules. Les autres comédiens sont davantage des renforts que des intervenants de premier plan. Laurence Fishburne est parfait dans le rôle du formateur chevronné ensuite chargé de traquer son élève devenu trop doué. Holt McCallany a assurément le profil parfait pour jouer le cadre corrompu de la CIA. Son comparse, Danny Sapani, est de son côté plus transparent, la faute à un scénario qui ne nécessitait peut être pas d’avoir deux pourris dans les hautes sphères de l’Agence. Étonnamment, Jon Bernthal prête ses traits à un personnage qui, à l’évidence, n’apporte absolument rien à l’intrigue. Ses apparitions sont aussi ridicules qu’inutiles. Il en va de même pour Adrian Martinez et Julianne Nicholson qui, malgré un jeu convaincant, incarnent des protagonistes peu exploités.
Reste donc Rami Malek qui livre une prestation remarquable et très subtile. Jamais dans l’excès, il explique s’être notamment inspiré d’Harrison Ford dans Le Fugitif (1993). Comme ce dernier, Rami Malek est un homme traqué cherchant à libérer son esprit du poids de la mort de sa femme. Dans le rôle de Charles Heller, le comédien conjugue émotion et colère, assurance et incertitude, force et vulnérabilité, timidité et assurance, précision et improvisation, peur et courage. « Je trouve ce personnage profondément humain, confie-t-il à un journaliste du New York Times. Il me parle. Il y a cette phrase d’accroche sur l’affiche que je pense avoir glissée à l’oreille des publicitaires, à savoir que Charlie est constamment sous-estimé par les autres. C’est une chose à laquelle beaucoup de gens peuvent s’identifier. Cela me ramène à une époque où, plus jeune, j’étais extrêmement timide, très introverti, cherchant toujours à faire mes preuves. Avec Charlie, j’ai en quelque sorte cherché ce qu’il y avait de plus profond en moi ».
Autre qualité inhérente au film, The Amateur est un bon départ pour questionner notre société. Tout au long du film, les caméras et l’informatique sont omniprésentes. « Big Brother is Watching You », disait George Orwell dans son roman 1984. The Amateur montre à quel point cette citation est devenue réelle. Comme cela est montré dans le film, la vidéosurveillance est présente absolument partout autour de nous. Les téléphones sont autant d’espions glissés dans nos poches. La question de la préservation des libertés fondamentales peut par conséquent se poser. Que se passe-t-il lorsque quelqu’un de mal intentionné met la main sur toutes ces données ou bien les manipule ? Une autre interrogation s’ajoute. Que valent la justice et la police lorsque, dans un état de droit, elles ne sont plus capables de fonctionner normalement et de faire ce pour quoi elles ont été créées ? Chacun est-il dès lors autorisé à se rendre lui-même justice ? Par de nombreux aspects, le monde présenté dans The Amateur – le monde contemporain – possède des travers particulièrement anxiogènes sur lesquels il pourrait être important de se pencher.
Initialement prévue le 8 novembre, la sortie dans les salles américaines de The Amateur est finalement repoussée au vendredi 11 avril 2025. En France, le long-métrage est projeté deux jours plus tôt, à partir du mercredi 9 avril 2025. La critique manifeste alors une certaine tiédeur à son sujet. « Pendant vingt minutes, The Amateur est particulièrement exaltant, note Alissa Wilkinson dans les colonnes du New York Times. C’est brillant, joliment interprété et plein de promesses. Mais à partir du moment où Charlie commence à courir le monde par soif de vengeance, le film semble n’aller nulle part. Le spectateur se retrouve devant une affaire classique impliquant un gars qui en sait trop et qui doit être éliminé. Inspiré du roman de Robert Littell, The Amateur est construit comme un film d’espionnage conjugué à un thriller. Ce sont deux genres qui vont bien ensemble. Tous les poncifs sont ici réunis : l’épouse assassinée, le mystérieux informateur, les courses-poursuites… James Hawes nous sert des images pleines de menace. C’est ce que chacun attend de ce type de film. Mais voilà, The Amateur n’a rien de bien terrible. La promesse initiale est grande, mais le résultat n’est pas à la hauteur. L’ensemble ressemble plus à la copie d’un bon film, qu’à un véritable bon film ».
« The Amateur ne fait qu’effleurer la surface des thrillers d’espionnage d’antan, estime pour sa part Brian Tallerico du site RogerEberg.com. Mais il ne parvient pas à trouver ni son rythme, ni sa propre identité, ni sa personnalité. Si vous vous demandez ce que Tony Scott aurait fait de cette histoire, alors allez plutôt regarder Spy Game, Jeu d’Espions. Sur le papier, The Amateur est prometteur, qui plus est avec son casting talentueux. Mais tout est filmé de manière si fade. Les dialogues sont ringards, les personnages incohérents. C’est une entreprise sans vie, dépourvue de séquences d’action. Si chacun accepte de suivre Jason Bourne ou James Bond, c’est parce qu’ils sont tous les deux suffisamment charismatiques pour nous y forcer. Ici, ce n’est pas le cas ».
« The Amateur arrive plusieurs décennies après la création de ce genre de film, constate Owen Gleiberman de Variety. Il n’est pas si percutant. C’est la troisième fois que Rami Malek joue dans un thriller depuis son triomphe avec Bohemian Rhapsody. Il est certainement le meilleur acteur pour jouer un geek se changeant en chasseur. Ses yeux sont comme des lasers. Si ce film est sympathique, il n’est toutefois pas mortel ». « The Amateur est conçu sur le même modèle que les aventures de Jason Bourne ou bien les Mission Impossible, écrit pour sa part Peter Bradshaw dans The Guardian. Il offre quelques passages divertissants, comme cette scène dans la piscine ou bien ce moment amusant durant lequel Charles sort son smartphone pour regarder un tutoriel expliquant comment crocheter une serrure. Mais un problème fondamental se pose quant à la cruauté dont Charles est censé faire preuve en tuant de sang-froid les meurtriers de sa femme ».
« Le thriller de vengeance est l’un des genres les plus satisfaisants du cinéma, pense Amon Warmann dans les pages de la revue Empire. Il met généralement en scène un héros doté d’un certain talent et dominant quiconque se dresse en travers de son chemin. Ce n’est pas le cas ici. Adapté du roman de Robert Littell, le film ne présente pas un ancien tueur à gage surentraîné. Le héros ne sait même pas manier une arme. Charlie Heller est un cryptographe sédentaire, un intello derrière un ordinateur. Voilà un parti pris qui, sur le papier, est intrigant. Mais la mise en œuvre n’est que partiellement réussie. The Amateur atteint son plus haut niveau durant le premier acte. La situation change cependant radicalement lorsque Heller met son intelligence et son ingéniosité au service de sa vengeance. Quelque chose se perd dans la transformation trop rapide qu’il opère, passant du statut de débutant maladroit à celui de tueur calme, posé et très compétent. La narration reprend le rythme des thrillers, sans aller trop loin. La partie de l’intrigue impliquant le directeur adjoint de la CIA est particulièrement mal ficelée et mène vers une fin invraisemblable. Bien qu’il puisse paraître rigide et monocorde, Malek est convaincant dans son rôle de héros improbable. Le reste du casting est hétéroclite. Jon Bernthal est notamment sous-exploité ».
Salué pour la performance de ses comédiens et son constat de départ, tout en étant condamné pour les promesses non tenues, The Amateur s’affiche face à des concurrents comme Warfare, Drop Game et Gunslingers. Projeté dans 3 300 salles, il parvient à récolter 5,99 millions de dollars lors de son premier jour d’exploitation et environ 20,1 millions de dollars en Amérique du nord lors de sa première semaine. Il se classe alors à la troisième place du box-office derrière Minecraft, le Film et le film d’animation The King of Kings. 17,4 millions de dollars de recettes s’ajoutent dans le reste du monde. C’est un départ timide pour un long-métrage dont le budget ne dépasse toutefois pas les 60 millions de dollars.
Porté du début à la fin par un Rami Malek assez inspiré, The Amateur peut au final se targuer d’être un divertissement correct. Dans l'incapacité de laisser un souvenir impérissable, le film se regarde sans rougir même si, au demeurant, il ne possède pas une once de crédibilité.