Date de création : Le 16 mars 1961 Nom Original : Molly Crump Créateur(s) : Ernest Nordli (Conception) Julius Svendsen (Animation) Art Stevens (Animation) |
Apparition : Cinéma Télévision |
Le portrait
En 1961, les studios Disney portent à l’écran une ancienne légende de l’Ouest. Titré Le Chariot à Voile, le court-métrage met alors en scène Windwagon Smith, capitaine exubérant voyageant à bord d’un conestoga équipé d’une voile de bateau et qui, en arrivant à Westport, tombe sous le charme de la ravissante fille du maire, Molly.
Après une arrivée fracassante dans la rue principale de Westport sous les yeux ébahis de la population et de son maire, le capitaine Smith crie famine. « Comme on dit à Cancale, j’ai la dalle, Amiral ! », s’exclame-t-il en pénétrant dans le saloon. Prenant place à l’une des tables, le marin des prairies exige du bœuf et de la bière. Quelle n’est pas sa déception en constatant que l’établissement ne sert que du ragoût.
Peu séduit par cette nourriture, Smith est déjà prêt à en découdre. Mais il n’a pas le temps de prononcer un mot qu’il tombe soudainement en extase devant la belle serveuse, Molly, qui n’est autre que la fille du maire. La chevelure rousse imposante et les yeux d’un bleu magnifique, la demoiselle est « plus belle qu’une figure de proue ». Le cœur battant, Smith est incapable de baisser le regard. Bouché-bée, il est comme hypnotisé par la jolie serveuse qui se déhanche devant lui.
La romance s’installe en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Mais c’est sans compter sur le maire qui refuse tout net que sa fille fréquente un tel homme. Molly est ainsi renvoyée en cuisine le temps que son père fasse affaire avec le capitaine. La nuit venue, Smith retrouve la belle qui le rejoint sur le gigantesque chariot en cours de construction. Mais le maire veille toujours. De sa fenêtre, il ordonne à sa fille de rentrer à la maison sur le champ.
Quelques jours plus tard, le chariot à voile est enfin prêt pour son voyage inaugural. Molly est alors chargée de baptiser le vaisseau en brisant sur sa figure de proue une cruche de bourbon. Mais hors de question que la belle embarque à bord ! Pour son père, ce voyage est une affaire d’hommes. Les femmes n’ont rien à y faire.
Le premier périple du chariot à voile se révèle bien vite être une calamité. Si Smith supporte la houle et les embruns, le maire et les autres passagers ne rêvent que d’une chose, rentrer au plus vite à Westport. Le chemin du retour est cependant compliqué. Impossible, en effet d’arrêter l’engin lancé à toute allure. Tout le monde saute alors par-dessus bord, laissant Smith seul. Enfin pas tout à fait... Molly est malgré tout parvenue à embarquer clandestinement. « Je m'étais cachée », dit-elle en badinant avec le capitaine.
Rejoignant son amant, la jolie demoiselle décide de rester à ses côtés pour affronter la tempête. Soulevé par une tornade, le chariot à voile ne parvient malheureusement pas à revenir sur le plancher des vaches. La légende raconte que depuis un siècle, le capitaine et sa belle continuent ainsi de voguer ensemble pour l’éternité dans l’étendue du ciel...
Mis en production à la fin des années 1950 afin d’occuper certains artistes entre deux projets d’envergure, La Belle au Bois Dormant et Les 101 Dalmatiens, Le Chariot à Voile s’inspire d’une vieille légende du folklore américain notamment mise par écrit en 1947 par l’écrivain Wilbur Lang Schramm dans son ouvrage Windwagon Smith and Other Yarns. Remontant au XIXe siècle, elle raconte les mésaventures du capitaine Smith, marin au long cours qui décida de traverser les étendues sauvages en direction de l’Ouest à bord d’un chariot non pas tiré par des bœufs, mais par une voile de navire. Partie de Westport, dans le Missouri, l’expédition se serait néanmoins mal passée. Selon les uns, tous les passagers, victimes du mal de mer, sautèrent par-dessus bord. Selon les autres, un accident réduisit le véhicule en miettes...
Au moment d’écrire le scénario du (Le) Chariot à Voile, Charles A. Nichols et Lance Nolley décident de reprendre les principaux éléments de la légende : le capitaine excentrique, le gigantesque chariot tracté par une voile, les notables de la ville obligés d’abandonner le vaisseau en marche... Ils font en outre le choix de densifier l’histoire en ajoutant des protagonistes. Parmi eux, ils créent notamment le personnage de Molly, la jolie fille du maire devenue la dulcinée de Windwagon Smith.
Ultime réalisation de Charles A. Nichols, Le Chariot à Voile est l’un des derniers courts-métrages produits par les studios Disney. Il se distingue alors de la majorité des œuvres précédentes par son style typique de l’époque. Au cours des années 1950 et 1960, la mode est en effet au minimalisme, un choix largement impulsé par les studios UPA avec des productions comme Gerald McBoing Boing et Mr. Magoo. Appréciée du public et surtout beaucoup moins onéreuse, cette animation limitée a dès lors pris le pas sur les animations complexes et les décors fourmillant de détails à présent jugés d’un autre temps. Bien qu’il déteste ce style, Walt Disney n’a lui-même pas eu d’autre choix que de prendre ce virage. Bien avant la fin de la réalisation de La Belle au Bois Dormant, dernier long-métrage produit avec la technique ancienne, il l’utilise ainsi pour créer des cartoons comme Adventures in Music : Melody. Il s’en sert aussi à la télévision. Le style minimaliste est également utilisé lors de la conception des (Les) 101 Dalmatiens.
Reprenant ce style plus simple, les personnages du (Le) Chariot à Voile sont conçus par Ernest Nordli. Né à Salt Lake City le 15 juin 1912, l’artiste étudie à la Santa Barbara School of the Arts avant d’être engagé par Disney en 1936. Il sert alors comme directeur artistique et artiste de layout sur des films comme Fantasia et Dumbo. Travaillant également sur plusieurs cartoons avec Donald, il quitte un temps les studios au milieu des années 1950 et débute une collaboration avec Chuck Jones. Nordli signe cependant rapidement son retour chez Disney. Il œuvre ainsi sur La Belle au Bois Dormant et Les 101 Dalmatiens, participant à définir le style si particulier de ce dernier film. Dans les années 1960, Ernest Nordli passe chez Hanna-Barbera et planche sur The Alvin Show, Yogi l’Ours ou bien encore The Man From Button Willow. Il décède le 22 avril 1968 à l’âge de cinquante-cinq ans.
Recherche graphique de Windwagon Smith et Molly
Sous la mine d’Ernest Nordli, Molly apparaît sous les traits d’une petite midinette au déhanché aguicheur. La taille ajustée par un corset particulièrement serré, elle arbore une longue chevelure rousse bouclée et ornée de fleurs. Son visage, fin, est marqué par une petite bouche et de grands yeux de biches d’un bleu profond. Au moment d’étrenner le chariot, la belle a troqué son habit de soubrette pour une jolie robe rose agrémentée d'une tournure et de manches bouffantes parfaitement dans l’air du temps. Une ombrelle et un chapeau à plumes complètent son costume. Ce dernier a tôt fait de disparaître dans la tempête, laissant les cheveux de la belle libres de voler au gré du vent.
Les crédits du court-métrage indiquent que son animation est assurée par Julius Svendsen et Art Stevens. Originaire de Norvège où il voit le jour en 1919, le premier entre chez Disney en 1940. Engagé dans l’armée américaine durant la Seconde Guerre mondiale, il participe alors à la création de plusieurs courts-métrages : Adventures in Music : Melody, Les Instruments de Musique, Donald Visite le Grand Canyon. Associé à la production des émissions Man and the Moon, Mars et Au-Delà et À la Conquête de l'Espace réalisées par Ward Kimball, il travaille aussi sur quelques longs-métrages, Les 101 Dalmatiens, Les Aristochats, L’Apprentie Sorcière ainsi que Robin des Bois et Les Aventures de Winnie l’Ourson pour lesquels il sert comme scénariste. Également auteur de bandes dessinées, Julius Svendsen disparaît en août 1971.
Art Stevens naît quant à lui le 1er mai 1915 à Roy, dans le Montana. Commençant chez Disney en 1939 en tant qu'intervalliste sur Fantasia, il participe à la plupart des longs-métrages des studios, en particulier Peter Pan pour lequel il est promu animateur du personnage principal. En 1977, il coréalise Les Aventures de Bernard et Bianca aux côtés de Wolfgang Reitherman et John Lounsbery. Animateur d'Evinrude, il supervise ensuite Rox et Rouky et Taram et le Chaudron Magique. Il quitte les studios Disney en 1983, avant la fin de production de ce dernier film. Il décède le 22 mai 2007.
Ne prononçant que quelques mots, les voix originales et françaises de Molly ne sont pas connues...
Jolie jeune femme aux formes avenantes, Molly fait partie de ces faire-valoir féminins typiques des cartoons produits dans les années 1960.