Kingsman : Le Cercle d'Or
L'affiche du film
Titre original :
Kingsman: The Golden Circle
Production :
20th Century Fox
Marv Films
Cloudy Production
Date de sortie USA :
Le 22 septembre 2017
Genre :
Aventure
IMAX
3-D
Réalisation :
Matthew Vaughn
Musique :
Henry Jackman
Matthew Margeson
Durée :
141 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Suite au démantèlement de la société secrète Kingsman basée à Londres, Eggsy - désormais agent accompli - et Merlin se retrouvent seuls face à une nouvelle menace. Lorsqu’ils découvrent l’existence d’une filiale parallèle, tous deux s’envolent pour les États-Unis afin de collaborer avec l’agence Statesman, qui révèle bien des surprises.

La critique

Publiée le 17 janvier 2021

Après le succès retentissant de Kingsman : Services Secrets début 2015 - adaptation cinématographique du comic book The Secret Service portée par 20th Century Studios - il était tout simplement impensable que les espions anglais les plus irrévérencieux de la planète ne reprennent pas du service, pour une mission dépaysante encore plus folle. Après la sophistication et le flegme britannique mis à l’honneur dans le premier volet, place ici au naturel et à l’extravagance américaine. Mais hors de question de dénaturer l’œuvre papier de Mark Millar et Dave Gibbons, ainsi que le travail de transposition à l’écran de Matthew Vaughn.

Si Mark Millar (né en 1969 à Coatbridge, en Écosse) et Matthew Vaughn (né en 1971 à Londres et fondateur de Marv Films) espèrent tous deux une suite aux aventures des Kingsmen avant même la sortie du long-métrage, les studios annoncent bel et bien la mise en chantier d’un nouvel épisode dès avril 2015, motivé par le récent et retentissant succès de son prédécesseur. A priori sans la présence du réalisateur cependant, qui s’évertue à refuser de tourner ses propres suites comme il l’a fait pour Kick-Ass 2 (2013) et X-Men : Days of Future Past (2014). Sans contredire ou confirmer ces dires, Vaughn tease cependant sa participation dès le mois de juin en affirmant qu’il aime tellement ces personnages qu’il serait prêt à enfreindre sa propre règle. Impliqué dès le début de la production et de l’écriture comme à son habitude, il rendosse finalement et définitivement le rôle de réalisateur pour Kingsman : Le Cercle d’Or, dont le titre est révélé en mars 2016.
Vaughn s’accompagne une nouvelle fois de la scénariste Jane Goldman avec laquelle il a déjà collaboré sur Kick Ass (2010), X-Men : Le Commencement (2011) et Kingsman : Services Secrets. Si ce premier opus avait vocation à présenter de manière relativement fidèle l’univers dessiné « so british » de l’agence Kingsman, tout en invitant le public à suivre la formation d'Eggsy en tant que recrue potentielle pour le titre de l’unique et prochain Lancelot, Vaughn base plus librement cette suite sur l’existence des services secrets américains nommés Oncle Sam dans le comics. Ce grand fan des États-Unis et de sa culture (allant des cow-boys aux grands acteurs américains) change donc de décor pour adopter un esprit totalement « made in USA » et emmener les gentlemen au-delà des frontières à la rencontre de leurs homologues et cousins américains pour un véritable choc des cultures, tout en surprenant les spectateurs, bien décidé à rapidement casser les codes.

L’intouchable agence Kingsman fait les frais d’une menace qui éradique la totalité de l’organisation et par la même occasion multitude de ses agents : même Roxy/Lancelot (Sophie Cookson) n’y échappe pas, laissant désœuvrés Merlin et Eggsy. Ce dernier n’est finalement pas le nouveau Lancelot, mais promu Galaad depuis qu'il a sauvé le monde suite à la disparition de son mentor Harry/Galaad, sacrifié avant le grand final de Kingsman : Services Secrets. Le britannique Taron Egerton, né en 1989 à Birkenhead, encore inconnu du grand public avant d’incarner Eggsy, devient donc la tête d’affiche de Kingsman : Le Cercle d’Or. Ravi de son retour (qui nécessite quelques aménagements car déjà engagé sur Robin des Bois) et plus que jamais dans son élément, l’acteur porte le film à bout de bras - comme le confirmera le biopic consacré à Elton John Rocketman (2019) qui lui vaut un Golden Globe - tel son personnage passé de voyou novice à espion chevronné digne de son costume trois pièces.
Mark Strong, né en 1963 à Londres et vu notamment dans John Carter (2012), rendosse lui le rôle de Merlin - homme de l’ombre qui supplée les agents en mission - pour former un nouveau duo qui fonctionne à merveille, oscillant entre la légèreté d’Eggsy et le cynisme de Merlin. Mais il faut bien avouer que ce binôme n’aurait pas la même saveur si Matthew Vaughn n’avait pas trouvé le moyen de ramener à la vie Galaad numéro un pour reformer le trio anglais un peu plus tard... et par la même occasion de rappeler Colin Firth sans qui cette suite était tout bonnement inenvisageable pour le réalisateur. Né en 1960 à Grayshott, le comédien vu dans la trilogie Bridget Jones (2001/2016), Le Drôle de Noël de Scrooge (2009), Le Retour de Mary Poppins (2018) et oscarisé Meilleur Acteur en 2011 pour Le Discours d'un Roi (2010), avait en effet surpris le monde entier en homme d’action (une première pour lui), pourtant laissé pour mort dans le Kentucky lors du précédent épisode.

C’est justement l’endroit où les conduit une bouteille de whisky de marque Statesman, préservée dans le coffre-fort de leur défunt QG en guise d'ultime message ! Car le véritable intérêt de Kingsman : Le Cercle d’Or est d'élargir ce petit monde de l’espionnage plus riche qu'il ne le paraît et de proposer de nouveaux personnages hauts en couleur, en confrontant par la même occasion de manière toujours comique les méthodes anglaises conventionnelles et d’une précision redoutable avec les us et coutumes américains bien plus bruts et beaucoup moins subtils. À l'image des hommes de la Reine, Matthew Vaughn s’inspire ici des grands hommes d’État américains baptisés les « Statesmen » pour nommer la filiale outre-Atlantique. Concernant sa couverture, c'est la période de la Prohibition - pendant laquelle un amendement à la Constitution des États-Unis interdit la fabrication et la vente d'alcool - qui lui suggère l'activité parfaite en façade : le whisky.
Si les Kingsmen empruntent les patronymes des chevaliers de la Table ronde, les Statesmen utilisent donc les appellations des grands alcools comme le démontre leur dirigeant Champagne, alias Jeff Bridges. Grâce au succès du premier volet, de grands noms veulent en effet rejoindre le projet. Né en 1949 à Los Angeles, l'acteur sept fois nommé aux Oscars qui remporte celui du Meilleur Acteur en 2010 pour Crazy Heart (2009), compte en effet une filmographie impressionnante et variée comme le prouvent le diptyque Tron (1982 et 2010) et Iron Man (2008). Mais le premier personnage que rencontrent Eggsy, Merlin et le public est l'agent Tequila, campé par Channing Tatum. Né en 1980 en Alabama, révélé par Sexy Dance (2006) de Touchstone, tête d'affiche du blockbuster G.I. Joe : Le Réveil du Cobra (2009) et inspiration de son propre rôle dans Magic Mike (2012), Vaughn le trouve parfait en cow-boy de l'espionnage qui chique du tabac, paré de jeans, de santiags et d'un stetson.

Ginger Ale, quant à elle, tête pensante à l'image de Merlin, est interprétée par Halle Berry. Née en 1966 dans l'Ohio, cette première Afro-Américaine à concourir au titre de Miss Monde en 1986 et à remporter l'Oscar de la Meilleure Actrice en 2002 pour À l'Ombre de la Haine (2001) reste l'inoubliable (première) Tornade de la saga X-Men (de 2000 à 2014). Même si son rôle est ici très différent de l'espionne d'action sexy, Matthew Vaughn souhaitait absolument la compter au casting de Kingsman : Le Cercle d’Or dans la lignée de sa prestation de James Bond Girl dans Meurs un Autre Jour (2002). Champagne, Tequila et Ginger occupent cependant peu de temps l'écran, laissant bien entendu la priorité au développement d'Eggsy, responsable de la mission qu'il tente de concilier avec sa vie de couple, et ses retrouvailles avec Harry, sauvé in extremis d'une mort certaine par les Statesmen mais victime d'amnésie, d'hallucinations et de paranoïa aiguë (compliqué pour un espion).
Davantage de place également pour le nouvel équipier d'Eggsy (avant qu'Harry ne soit à nouveau opérationnel) : l'agent Whiskey. Malgré les nombreux prétendants et tout aussi nombreuses auditions passées, Vaughn souhaite l'offrir depuis le début à Pedro Pascal, acteur chileno-américain né en 1975 à Santiago (Chili), après l'avoir vu dans le rôle principal de la série Narcos (2015/2017). C'est en effet la télévision qui le fait difficilement découvrir, de ses apparitions dans Buffy Contre les Vampires de 20th Television en 1999 et Brothers & Sisters d'ABC Signature en 2011, sa participation à la quatrième saison de Game of Thrones en 2014, avant de devenir le héros casqué de Star Wars : The Mandalorian sur Disney+ dès 2019. Il est également l'un des antagonistes de Wonder Woman 1984 (2020). Véritable icône inspirée de Burt Reynolds dans Cours Après Moi Shérif (1977), Jack Daniels alias Whiskey manie le lasso, le fouet (emprunté à Indiana Jones) et les colts comme personne.

Tout ceci fait que ces nombreuses présentations et ces premiers rebondissements imposent au spectateur quelques longueurs avant d'entrer dans le vif du sujet de Kingsman : Le Cercle d’Or, qui démarre pourtant et littéralement sur les chapeaux de roues dès ses toutes premières secondes, au détour d’une scène d’ouverture qui n’a rien à envier à celles offertes depuis des décennies par l’agent 007 dans laquelle Eggsy se confronte à son ancien rival Charlie (Edward Holcroft). Une séquence détonante, proposant simultanément un combat épique en plans serrés entre les deux hommes en voiture et une course-poursuite haletante en plans larges dans les rues de Londres, qui nécessite à elle seule deux semaines de tournage dans un taxi entièrement démontable, suivies de dérapages contrôlés sur le tarmac du studio avec un véhicule boosté à 600 chevaux (il aurait été impossible d'obtenir l'accord des autorités londoniennes), avant les prises de vues réelles dans les endroits clés de la capitale.
S’il inaugure le long-métrage, Charlie - désormais équipé d’un bras mécanique aux multiples gadgets pour rejoindre le panthéon des ennemis aux particularités physiques si distinctives des films d’espionnage (et qui accessoirement pirate le système de sécurité Kingsman) - introduit également le nouvel ennemi juré des Kingsmen et des Statesmen : Poppy. Valentine passait déjà pour un illuminé à vouloir rendre folle la population mondiale avec ses puces de téléphones portables. Mais Poppy, à la tête du plus grand cartel de drogues nommé le Cercle d'Or, le bat à plates coutures quand elle décide avec un nouveau fléau de société de prendre en otage le monde, quand les utilisateurs de ses produits développent des symptômes mortels dans le but de demander la légalisation de son empire (elle affirme avec grand sérieux que le sucre est une substance légale pourtant bien plus addictive) et réclamer une rançon auprès des grands dirigeants mondiaux en échange de l’antidote.

Pour donner vie à cette antagoniste à la tête de sa propre organisation criminelle et qui adore préparer des hamburgers à base de viande humaine (elle se débarrasse ainsi des hommes de main en qui elle n'a plus confiance), Matthew Vaughn surprend une nouvelle fois en choisissant la sage Julianne Moore, la première à rejoindre officiellement l'affiche de Kingsman : Le Cercle d’Or. Née en 1960 en Caroline du Nord, elle dispose elle aussi d'une jolie carrière à la fois populaire et sérieuse, connue pour sa participation à de grandes sagas avec Le Monde Perdu : Jurassic Park (1997), Hannibal (2001) et les deux parties d'Hunger Games : La Révolte (2014 et 2015), oscarisée Meilleure Actrice en 2015 pour Still Alice (2014). Elle apporte à Poppy un sérieux et un charme froid bienvenu à cet univers invraisemblable et psychédélique, inspirée à la fois par la folie du grand Lex Luthor (la version de Gene Hackman) et la légèreté de sa comparse Miss Teschmacher dans Superman (1978).
Vaughn, lui, la considère comme une Martha Stewart sous crack ! Poppy, qui tire son nom (en anglais) de la plante dont est extrait l'opium, est pourtant bien secouée à sa manière, bloquée dans un idéal des États-Unis du XXe siècle et qui a érigé son monde à l’image de Happy Days et d'American Graffiti au sein de ruines cambodgiennes (qui vaut à l’œuvre une interdiction dans le pays). Une opportunité pour le chef décorateur Darren Gilford (Tron L’Héritage, Star Wars : Le Réveil de la Force) de recréer en partie « Poppyland », une mini ville originale et colorée cachée au beau milieu de la jungle - en réalité sur les extérieurs des studios anglais - mélange de Disneyland pour adulte et de Las Vegas. Composée des classiques bowling, cinéma, salon de beauté, diner, autre stand de hot-dogs et d’un donut géant emprunté aux (Les) Simpson qui orne fièrement le quartier factice, inutile de préciser que cette forteresse (et ses gadgets) sera le terrain de jeu idéal lors du dénouement final.

De son côté, la costumière Arianne Phillips (The Crow), qui a déjà officié sur le premier opus, rempile pour Kingsman : Le Cercle d’Or afin d’offrir une identité aux nouveaux personnages et retranscrire les looks imaginés par Matthew Vaughn. Tel celui de Poppy justement, qui exhibe l’exacte panoplie de la ménagère classique américaine bien sous tous rapports, qui va de pair avec son foyer d'une autre époque. De quoi accentuer le décalage et la contradiction de ce personnage décidément fort réussi ! Les Kingsmen restant fidèle à leur image, la nouveauté vient des Statesmen. Les agents britanniques restent classe en toute circonstance, à côté de leurs « bouseux » cousins. Il est en effet volontairement décidé d'utiliser des éléments considérés comme démodés et caricaturaux de la panoplie parfaite du cow-boy - mais qui fonctionnent à merveille - pour habiller les agents américains tout droit sortis de l'empire dépeint dans l'univers impitoyable de Dallas.
Tels les parapluies londoniens, seuls les manteaux de Tequila et Harry sont de marque Cromford Leather, un créateur de luxe britannique spécialisé dans le cuir. Au niveau des accessoires, les montres sont cette fois-ci estampillées TAG Heuer et les joujoux américains sont à l’honneur, tels que la batte de baseball détecteur de mines ou encore le lasso électrifié que manie Pedro Pascal, entraîné et doublé pour l'occasion par le spécialiste Michael « loop » Rawlins (copie conforme et réelle de Whiskey). Chez les vilains, place à la technologie de pointe avec le bras bionique de Charlie (Vaughn voulait une alternative aux jambes de la défunte Gazelle), les robots-chiens de garde de Poppy (nommés Bennie et Jet à l'image de la chanson d'Elton John), ainsi que Beauty Bot (inspirée du top Claudia Schiffer et épouse du réalisateur dans le civil), le robot du salon de beauté qui tatoue à l'or chaud le cercle d'or sur la peau des nouvelles recrues, mais qui sait également manier les armes.

Kingsman : Le Cercle d’Or est en effet plus ambitieux et démesuré que son prédécesseur. Matthew Vaughn, qui officie pour la toute première fois sur une suite, estime l’exercice difficile car il doit reprendre tout ce qui a fait le succès de Kingsman : Services Secrets sans toutefois se contenter de le copier. Ainsi, pour aller encore plus loin, le film dispose d’un budget plus conséquent s'élevant à 104 millions de dollars (contre 81 millions pour le premier volet) et nécessite de multiples effets spéciaux, qu’ils soient incontournables (pour certains plans irréalisables et les multiples explosions plus vraies que nature) ou plus simples à utiliser que de l'animatronique classique (pour le bras de Charlie et les robots high-tech). Certains effets sont toutefois réels, telle la cabine téléphérique circulaire piégée reconstruite en studios pour les besoins d'une séquence dans les Alpes, qui cloue sans artifice les acteurs aux parois quand la construction avoisine les trente tours par minute sur elle-même.
De très belles séquences sont donc offertes au public et rythment le long-métrage, qui retrouve alors de sa superbe. Quand Harry par exemple veut corriger quelques malfrats lors d’une scène de bar qui fait écho à celle du premier épisode - excepté le fait qu'il n'est pas du tout opérationnel et se fait laminer - avant d'être secouru par Whiskey qui fait preuve de ses talents ou lorsqu'Eggsy et Whiskey affrontent une horde de gardes en montagne (où est secrètement fabriqué l'antidote), avant qu'Harry ne pète les plombs, ou enfin, au moment où Eggsy et Harry reforment leur terrible duo pour prendre d’assaut Poppyland et ses récalcitrants résidents. Tout ceci et comme toujours avec une outrageuse violence et un humour corrosif, sur fond de critique sociale et politique tels le discours faussement déculpabilisant de Poppy et celui faussement bienveillant du Président des États-Unis (aux méthodes abjectes), finalement prêt à sacrifier des innocents pour ne pas négocier.

Si Eggsy et ses acolytes sont censés voir du pays, le tournage est européen. Point de déplacement aux États-Unis ou en Asie ! La majeure partie des scènes sont bien entendu tournées en Angleterre, dans les fameux Pinewood Studios et Warner Bros. Studios, mais également au sein de l’Hammersmith Apollo Theater de Londres. L'équipe pose ses valises sur le Mont Blanc en Italie, et effectue un petit détour par l'Allemagne quand le spectateur pense Eggsy en Suède à la rencontre de ses royaux beaux-parents (il file le parfait amour avec la princesse Tilde - interprétée par Hanna Alström - après l'avoir sauvée de Valentine). Si le laps de temps accordé aux espions pour déjouer les plans de Poppy est très court, les prises de vues débutent en mai pour se terminer en septembre 2016. Mais le plus gros défi de Kingsman : Le Cercle d’Or se rencontre durant le montage. Tant d'ambition, pourtant bienvenue, pose en effet un réel souci qui n’a pas été anticipé par Matthew Vaughn.
Le premier montage avoisine en effet les 3h45 ! Une problématique encore inconnue du réalisateur habitué à ne retirer qu’une trentaine de minutes généralement. Il doit ici sacrifier une heure et demie de séquences tout en combinant parfaitement narration et action (pari ici presque réussi). Surtout pour une suite ! Vaughn a de nombreux nouveaux personnages et un nouvel antagoniste à introduire, sans délaisser son protagoniste principal qui ne bénéficie plus de l’arc de narration classique du parcours initiatique du héros comme canevas. S’il est un très court temps envisagé de faire deux films, l’équipe écarte vite cette idée, l’histoire ne le justifiant tout simplement pas. Parmi les sacrifiés, Ginger et Merlin font les frais de leur amour naissant (piste amusante mais totalement accessoire) et Tequila, en bon bad boy, est victime de petits excès l’empêchant de poursuivre sa mission (à contrecœur puisque que Vaughn a beaucoup apprécié l'énergie apportée par Tatum).

Avec toujours autant d'efficacité par contre, la partition de Kingsman : Le Cercle d’Or - composée de riffs de guitare pour amplifier l’aspect western des Statesmen et de sinistres violons pour souligner la menace que représente Poppy - est une nouvelle fois composée par Henry Jackman (né en 1974 à Hillingdon) et Matthew Margeson (né en 1980 dans le New Jersey), tous deux à l’origine de la musique des (Les) Mondes de Ralph et Captain America : Le Soldat de l'Hiver. Après avoir collaboré sur les musiques additionnelles du deuxième et troisième opus de la saga Pirates des Caraïbes, le premier travaille à maintes reprises pour Disney avec Winnie l'Ourson, Les Nouveaux Héros, Captain America : Civil War, puis The Predator. Membre de la Remote Control Productions de Hans Zimmer, le second collabore avec la firme de Mickey pour Le Secret de la Petite Sirène, Le Chihuahua de Beverly Hills, Prince of Persia : Les Sables du Temps, Pirates des Caraïbes : La Fontaine de Jouvence.
Les musiques additionnelles enjouent et dédramatisent une nouvelle fois le récit. Pour preuve, la scène d'ouverture se fait sur le dynamique Let's Go Crazy de Prince, tandis que le duel final se joue sur le titre funk Word Up! de Cameo (maintes fois repris par différents groupes pop ou rock) ici servi à la sauce country par The BossHoss. Mais c'est sans compter sur le carnage de Poppyland sur le survolté Saturday Night's Alright For Fighting de Sir Elton John lui-même. Encore lui ? Initialement prévu en guest-star parmi tant d'autres pour Kingsman : Services Secrets en tant que prisonnier de Valentine, l'auteur-compositeur-interprète né en 1947 dans le Grand Londres et cinquième tête oscarisée du casting (pour Le Roi Lion) est finalement celui de Poppy. Matthew Vaughn, fan du chanteur depuis les années 70, supplie son agent pour qu'il joue son propre rôle, ce qu'il fait avec beaucoup d'humour et d’autodérision devant Colin Firth et Julianne Moore, honorés de partager quelques scènes avec lui.

Prévu pour faire les beaux jours de l’été 2017, Kingsman : Le Cercle d’Or est décalé à l’automne. Malgré son accent semi ricain, le Royaume-Uni inaugure une nouvelle fois la sortie mondiale du film le 20 septembre 2017, avant d’atterrir au pays de l’Oncle Sam deux jours plus tard le 22 septembre et de faire l’honneur de sa présence en France dès le 11 octobre suivant. Une nouvelle fois, sa classification demeure inchangée, avec une interdiction pour les moins de quinze ans au Royaume-Uni et l’accompagnement d’un adulte pour les moins de dix-sept ans aux États-Unis, alors qu’il reste tout public en France lors de sa sortie cinéma. À l’occasion, le marketing voit les choses en grand. La marque kentuckienne Old Forester sort une édition Stateman de son whisky, tandis que la marque écossaise préférée de Matthew Vaughn GlenDronach sort une édition Kingsman. De leur côté, les plus gourmands (ou courageux) peuvent savourer le Poppy Burger au Hard Rock Cafe.
Niveau performances, la nouvelle équipe formée par les Kinsgmen et les Statesmen ne démérite pas et engrange un peu plus de 39 millions de dollars lors de son premier week-end d’exploitation, dépassant ainsi les 36,2 millions de Kingsman : Services Secrets. Au final, ce sont plus de 100,2 millions de dollars amassés aux États-Unis (contre 128 pour le premier volet), pour un total de 410,9 millions de dollars de recettes mondiales (approchant de peu les 414 du premier opus). Un investissement fort rentabilisé vu son budget augmenté de 23 millions de dollars. Niveau observations, le résultat est en demi-teinte, aussi bien chez les professionnels que les spectateurs qui pointent une certaine redite et un manque d’originalité. Évidemment l’effet de surprise n’est plus là, mais certains s’accordent cependant à dire que cette nouvelle mouture s’avère encore plus folle et cherche à aller toujours plus loin, portée par une qualité visuelle et technique toujours aussi irréprochable.

Kingsman : Le Cercle d’Or est en effet nommé au Saturn Award du Meilleur Film d’Action ou d’Aventure par l’organisation américaine Academy of Science Fiction, Fantasy & Horror Films et remporte l’Empire Award du Meilleur Thriller décerné par le magazine britannique Empire en 2018. Il gagne auparavant la récompense plus spécifique du British Film Designers Guild Award des Meilleurs Décors pour un Film Contemporain - partagé entre le chef décorateur Darren Gilford, la décoratrice Rosemary Brandenburg (Hocus Pocus - Les Trois Sorcières, Coyote Girls, Star Wars : L’Ascension de Skywalker) et le directeur artistique Grant Armstrong (X-Men : Le Commencement, Opération Muppets, Spider-Man : Far From Home). De son coté, Arianne Phillips est une nouvelle fois nommée pour son travail sur les Kingsmen au Costume Designers Guil Award dans la catégorie Film Contemporain, sans toutefois remporter la récompense.
Le plaisir de retrouver Eggsy, Harry et Merlin pour de nouvelles aventures reste tout de même intact, si sont occultées les quelques longueurs dont souffre l’œuvre, fort heureusement rattrapées par des séquences d’action toujours aussi hallucinantes. Découvrir les méthodes américaines est également une très bonne idée, si sont pardonnées les occasions manquées de faire briller les délaissés Halle Berry, Channing Tatum et Jeff Bridges, qui profitent toutefois à Julianne Moore (délicieusement malicieuse et dérangeante) et Pedro Pascal. Peut-être que le succès tout de même au rendez-vous aura l'occasion de corriger cela... car Matthew Vaughn envisage très vite un troisième épisode officialisé en septembre 2018. S'il s’agit finalement d’un prequel baptisé The King's Man : Première Mission (initialement prévu pour novembre 2019, avant d’être reporté à 2020 puis repoussé en 2021 à cause de la pandémie de la COVID-19), le dernier tiers de la trilogie annoncé et attendu devrait suivre…

« C'est (toujours) à ses manières... qu'on juge... un homme ».

Moins surprenant mais plus délirant encore, Kingsman : Le Cercle d’Or ne renouvelle certes pas l'exploit de la nouveauté mais reste un divertissement de très - très - bonne facture aux défauts tout à fait pardonnables, porté par ses scènes toujours plus dingues et sa galerie de personnages allumés de plus en plus étoffée, qui réserve toutefois son lot de surprises et de rebondissements. Plus qu'une énième suite réchauffée dans le monde du cinéma, Matthew Vaughn réussit à offrir ici une réelle continuité à la saga ainsi qu’à son protagoniste Eggsy, à l'image de la saga Star Wars qu'il admire particulièrement. Les fans ont de quoi être satisfaits et les plus fortunés d’entre eux peuvent désormais se mettre dans la peau de leurs héros favoris en visitant la première boutique Kingsman ouverte en septembre 2017 dans le centre de Londres par le détaillant de luxe Mr Porter.

Les Kingsmen, les Statesmen et peut être bien d’autres agents encore méconnus ont de beaux jours devant eux !

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