Johnny Fedora
(Johnny Cappello)
Date de création : Le 15 août 1946 Nom Original : Johnnie Fedora Autre(s) Nom(s) : Johnny Cappello
Créateur(s) : Joe Grant (Scénario) Phil Duncan (Animateur) |
Apparition : Cinéma Télévision |
Le portrait
En 1946, les studios Disney offrent au public de découvrir un tout nouveau film, La Boîte à Musique, une compilation de dix séquences parmi lesquelles Johnnie Fedora and Alice Bluebonnet ou la romance de deux chapeaux.
L’histoire débute à New York, près du pont de Brooklyn, dans la vitrine d'un magasin de vêtements. Johnny est un fédora en feutre gris du dernier cri auréolé d’un ruban noir trônant près d’une chemise et d’une paire de chaussures montantes en cuir. Près de lui, dans la section réservée aux femmes, il aperçoit Alice, un très jolie chapeau pour dame qui lui fait les yeux doux.
Immédiatement, le charme opère et les deux couvre-chef débutent une belle histoire d’amour. Ensemble, ils rêvent déjà de vivre dans une jolie maison fabriquée avec des cartons à chapeaux où ils pourront élever leurs enfants. Mais la romance est soudain brisée lorsqu’Alice tape dans l’œil d’une cliente. Un essayage plus loin, et la voilà retirée de la vente. Dans la vitrine, Johnny, effondré, assiste au départ de sa dulcinée sans espoir de la revoir jamais...
Dévasté par la perte de l’amour de sa vie, Johnny n'a plus le sourire. Écrasant une larme, il est un jour à son tour vendu. Retapé par son nouveau propriétaire qui, de deux coups secs, lui redonne sa forme, le voilà qui part en vadrouille dans les rues de New York.
Aussi joyeux qu’un rossignol, Johnny savoure cette nouvelle vie au grand air. Sautillant de la tête de son propriétaire, il garde toutefois un œil sur les environs à la recherche de sa chère Alice. Alors qu’il observe au milieu d’une foule dense les bulldozers creuser les fondations d’un futur gratte-ciel de Manhattan, la chance lui sourit enfin lorsqu’il entend au loin la douce voix de sa tendre et chère qui l’appelle.
Johnny tente bien de se détacher de la tête de son propriétaire, mais celui-ci lutte pour ne pas voir son chapeau être emporté par le vent. Une brise lui permet enfin de décoller. Mais Alice disparaît soudain à l’intérieur d’un tramway.
Malheureux comme une pierre, Johnny est désormais seul dans les rues de New York. Manquant de se faire écraser par les bolides, chevaux et autres tramways qui parcourent la chaussée, son existence devient un véritable enfer. Le fédora est chipé par deux chiens qui se le disputent. Un clochard met finalement la main sur lui. Déjà bien amoché, Johnny doit supporter l’immonde fumée de cigarette qui remonte jusqu’à lui. Voilà qu’il se retrouve bientôt dans un bouge infâme. Une bagarre éclate. Envoyé au sol, Johnny manque de se faire piétiner par tout le monde. Caché derrière une poubelle, il laisse le vent l’emporter...
Le vent de l’automne laisse bientôt place au froid glacial de l’hiver. Enfin le printemps revient. Johnny n’est plus que l’ombre de lui-même. Sa toile de feutre est ramollie. Son ruban est déchiré. De retour devant sa boutique, il observe, malheureux, les nouveaux modèles exposés, un haut-de-forme et une jolie tiare de mariée. Un coup de balais plus loin, et le voilà envoyé dans le caniveau avec les feuilles mortes, les papiers gras, les mégots et la poussière de la rue.
Manquant d’être emporté dans les égouts, Johnny est sauvé in extremis par un marchand de glaces qui, armé de ciseaux, taille deux trous dans le feutre. Éreinté par la vie, le pauvre fédora est enfoncé sur la tête d’un cheval. Les yeux fatigués, il n’en peut plus. Quand soudain, miracle ! Sur le destrier voisin, Alice bat des cils. Elle-même abandonnée par sa propriétaire, la belle s’est elle aussi retrouvée entre les mains du même marchand de glaces ! Quelle joie !
Désormais réunis, sans aucune probabilité d’être séparés, Alice et Johnny peuvent ainsi couler des jours heureux pour toujours.
Johnny Fedora est un fédora de feutre gris. Joliment formé, avec sa raie au milieu, il est bordé d’un ruban noir du plus bel effet. Sur le carton de présentation du court-métrage, son nom anglais est orthographié Johnnie Fedora. Dans le second doublage français chanté par Graziella Madrigal et commercialisé en Belgique au sein de la compilation Briseurs de Cœur sortie en 1994, le chapeau est appelé Johnny Cappello ; "cappello" signifiant "chapeau" en italien.
Johnny Fedora fait partie des nombreux objets anthropomorphes qui peuplent depuis des décennies l’œuvre de Disney. Elle inscrit ainsi son nom aux côtés de personnages comme, entre autres, les meubles et les cartes à jouer du cartoon De L’Autre Côté du Miroir avec Mickey, mais aussi les balais ensorcelées de L’Apprenti Sorcier, la Harpe de Mickey et le Haricot Magique, la poignée de porte d’Alice au Pays des Merveilles, le sucrier de Merlin l’Enchanteur, Lumière, Big-Ben, Mrs. Samovar, Zip et les autres objets enchantés dans La Belle et la Bête, le soldat de plomb, la ballerine et le Jack in the Box de Fantasia 2000 ou bien encore les nombreux jouets de la saga Toy Story.
L’apparence de Johnny Fedora s’inspire du célèbre fédora, un modèle de chapeau pour hommes créé en 1891. Tirant son nom d’une pièce de Victorien Sardou écrite pour Sarah Bernhardt choisie pour interpréter sur la scène du théâtre du Vaudeville la princesse Fédora Romanov, le couvre-chef est au départ réservé aux femmes. Porté par les féministes exigeant l’égalité des sexes, il devient bientôt l’un des accessoires masculins les plus courus de la Belle Époque grâce au Prince de Galles, futur Edward VIII, qui le porte dès 1924. Le fédora se diffuse également dans la culture populaire. Chapeau choisi par Al Capone et les représentants de la pègre, le cinéma lui fait une place à part grâce à des comédiens comme Humphrey Bogart, qui le porte dans Casablanca, et des personnages comme Indiana Jones et Freddy Krueger. Walt Disney lui-même est, au début de sa carrière, amateur de fédora.
Dans le générique de La Boîte à Musique, aucun animateur n’est clairement associé à la création de Johnny Fedora. Le carton créé lors de la diffusion de la séquence le 21 mai 1954 indique néanmoins que la séquence fut supervisée par le réalisateur Jack Kinney. Elle s’inspire d’un script écrit dès 1939 par le scénariste et artiste Joe Grant.
Certaines sources mentionnent par ailleurs une animation exécutée par Phil Duncan. Né en 1910 et engagé chez Disney le 4 novembre 1935, il a notamment animé les nains dans Blanche Neige et les Sept Nains avant de travailler sur des films comme Pinocchio, L’Entreprenant Mr Duck, Fantasia, Le Tourbillon, Dumbo et Bambi. Après un passage chez Screen Gems durant la Seconde Guerre mondiale, Duncan participe aux productions de La Boîte à Musique, Coquin de Printemps et de courts-métrages comme Papa Canard, Pluto et Figaro, Mickey et Pluto au Mexique, Pluto et le Bourdon et Les Amours de Pluto. Parmi les créateurs de Lucifer, Javotte et Anastasie dans Cendrillon, il anime Bill le Lézard, le Dodo, la Chenille et les Cartes d’Alice au Pays des Merveilles. Associé à la production des séquences animées du Mickey Mouse Club, Phil Duncan poursuit sa carrière chez UPA où il collabore aux cartoons de Mister Magoo, puis chez Hanna-Barbera, Warner Bros. et les Jay Ward Productions. Sa filmographie est alors complétée avec des titres comme Yogi l’Ours et George de la Jungle. De retour chez Disney au moment de la réalisation de la série Les Gummi, Duncan disparaît en 1988.
Johnny Fedora est de retour à deux reprises au cinéma. Isolée de La Boîte à Musique, la séquence Johnny Fedora and Alice Bluebonnet est en effet projetée en salle à partir du 21 mai 1954. Elle est également incluse à la compilation Music Land en 1955.
Comme sa compagne Alice, Johnny Fedora est évidemment présent dans les différentes adaptations de la séquence en livres et disques. De très belles illustrations accompagnent en particulier le livre-disque édité par Disneyland Records en 1970. Un autre vinyle, Walt Disney Silly Symphonies, sorti en 1971, reprend également cette histoire.
Adventures in Fantasy
Le 7 novembre 1957, avec l'épisode Adventures in Fantasy, Walt Disney explique aux téléspectateurs de Disneyland comment ses dessinateurs parviennent à donner vie à des objets inanimés. Pour illustrer ses propos, il prend alors notamment comme exemple Johnny Fedora.
Mickey Mouse (2018)
Johnny Fedora fait enfin un caméo dans la cinquième saison de la série Mickey Mouse. Dans l’épisode Un Amour de Scooter, le bolide de Minnie lit en effet un livre dont la couverture est ornée d’une image d’Alice et de Johnny.
En 2023, les Walt Disney Animation Studios célèbrent en grande pompe leur centième anniversaire avec Il Était une Fois un Studio, un court-métrage spécial dans lequel sont exceptionnellement rassemblés des centaines de personnages Disney d’hier et d’aujourd’hui. Johnny Fedora apparaît furtivement dans la scène montrant plusieurs protagonistes en train de descendre le grand escalier menant sur l’esplanade du Roy E. Disney Animation Building où Dingo attend pour faire la grande photo de famille. Sur cette dernière, les spectateurs découvrent alors que le chapeau est porté par David Kawena, le fiancé de Nani dans Lilo & Stitch.
Johnny Fedora est un très joli personnage dont l’esprit et l’apparence possèdent tout le charme des productions Disney des années 1940.