Titre original :
Inside Out 2
Production :
Pixar Animation Studios
Date de sortie USA :
Le 14 juin 2024
Genre :
Animation 3D
Réalisation :
Kelsey Mann
Musique :
Andrea Datzman
Durée :
96 minutes

Le synopsis

La dernière année du collège arrivant à son terme, Riley est désormais une adolescente, ce qui n’est pas sans déclencher un chamboulement majeur au sein du Quartier Cérébral de l'esprit de la jeune fille qui doit faire face à quelque chose d’inattendu : l’arrivée de nouvelles émotions ! Joie, Tristesse, Colère, Peur et Dégoût - qui ont longtemps fonctionné avec succès - ne savent alors pas trop comment réagir lorsque Anxiété débarque. Et il semble qu'elle ne soit pas la seule...

La critique

rédigée par
Publiée le 25 juin 2024

Quand Vice-Versa 2 a été annoncé, nombreux étaient sceptiques. Il suffisait pourtant d'être confiant et de croire à la magie Pixar, qui, même si elle s'est un peu affadie ces dernières années, reste tout de même très forte. Et après visionnage, le spectateur ne peut qu'être rassuré. Le film se hisse immédiatement comme un classique, étant sûrement la meilleure suite Pixar depuis Toy Story 3. Aussi réussi que le premier opus, l'attrait de la découverte a disparu mais l'amour des personnages est toujours intact. L’arrivée de nouvelles émotions dans l'esprit de Riley permet en outre au public d'en ressentir d'autres lui aussi. Enfin, encore plus que son aîné, Vice-Versa 2 est un incroyable outil personnel d’introspection afin d'aider chacun à visualiser ses propres ressentis.

Le premier Vice-Versa est sorti le 19 juin 2015 après avoir eu droit à une avant-première présentée le 18 mai 2015 en sélection officielle, hors compétition, lors du 68e Festival de Cannes. Les critiques plébiscitent alors le film, saluant son inventivité, son univers et ses personnages. Il gagnera d'ailleurs l'Oscar du Meilleur Film d'Animation tout en étant nommé pour celui du Meilleur Scénario Original. Le public n'est pas en reste puisque le long-métrage de Pixar est devenu un immense succès commercial rapportant par moins de 857 millions de dollars dans le monde dont 356 rien qu'aux États-Unis. En France, il rassemble plus de 4,5 millions de spectateurs dans les salles. Au-delà de son triomphe au cinéma, il va aussi rentrer dans l’inconscient collectif auprès de toute une génération qui utilisera ses nombreux concepts pour expliquer ses propres émotions. Les personnages vont ainsi devenir des « mèmes » populaires sur les réseaux sociaux. Pourtant, malgré son succès, il faudra attendre neuf ans pour qu'une suite voit le jour ; le temps que la génération l'ayant découvert grandisse. Le développement de Vice-Versa 2 commence ainsi officieusement en 2020 tandis que le studio annonce officiellement sa mise en chantier en 2022 lors de la D23 Expo.

Pete Docter, réalisateur de Vice-Versa, a pris depuis 2018 le rôle de chef de création au sein des Pixar Animation Studios après le départ forcé de John Lasseter. Son nouveau rôle de management lui accaparant tout son temps, il décide donc de laisser la main pour la suite de son film, passant ainsi le relais à Kelsey Mann.
Ayant vécu sa jeunesse dans le Minnesota, Kelsey Mann sort diplômé de Northern Michigan University en 1998. Il débute tout de suite sa carrière dans l'animation en passant de studio en en studio en tant qu'artiste de storyboard. Il travaille notamment pour Warner Bros. Animation sur la série Duck Dodgers, pour Cartoon Network sur la série Megas XLR, pour Disney Television Animation sur la série Super Marcel Show ou encore pour Lucasfilm Animation sur la série Star Wars : The Clone Wars. En 2009, il rentre chez Pixar en tant que superviseur de scénario. Il est alors chargé des récits de Monstres Academy, Le Voyage d'Arlo et En Avant. En 2014, il se voit également confier sa première réalisation avec le court-métrage, dérivé de Monstres Academy, QG de Soirée. Vice-Versa 2 marque sa toute première responsabilité en tant que réalisateur sur un long-métrage.

Comment faire une suite à un film tant acclamé par le public et les critiques ? Lorsque Pete Docter confie à Kelsey Mann la tâche de la réaliser, l'artiste passe une mauvaise nuit tellement il panique face à la responsabilité qui l'attend. Et sans le savoir, cette émotion qu'il ressent sera un pivot du futur film qu'il va développer. Très vite, il comprend en effet que le nouvel épisode va devoir parler de la puberté comme le laissait entendre d'ailleurs la fin du premier long-métrage. Mais comment prolonger l'univers afin que la suite ne soit pas une redite mais apporte une approche originale et différente ? Ainsi, comme tout bon anxieux, le réalisateur va faire des listes. Il reprend les différentes émotions qui avaient été laissées de côté lors de la conception du premier film afin de trouver les nouvelles qui pourraient être explorées. Il demande également conseil à Dacher Keltner, un professeur de psychologie à l'Université de Californie à Berkeley, près de San Francisco. Ce dernier avait déjà été l'un des principaux experts émotionnels sur le chef-d’œuvre de 2015. Il lui demande donc quelles sont les émotions qui prédominent au début de l'adolescence. Et le psychologue lui répond que ce sont toutes celles qui pilotent l'estime et la conscience de soi.

Vice-Versa 2 centre donc son récit sur l'adolescence de Riley. Le blues de son installation à San Francisco est désormais derrière elle. La jeune fille est en effet parfaitement intégrée dans son collège où elle s'est fait deux nouvelles amies, Bree et Grace, qui adorent comme elle jouer au hockey sur glace. Elles se font même sélectionner pour un stage de hockey dans un camp d'été. Les trois adolescentes sont excitées comme des puces... pourtant leurs choix pour la rentrée prochaine au lycée vont les bousculer et mettre à rude épreuve leur amitié et les sentiments qu'elles éprouvent les unes envers les autres. Le film propose ici une introspection qui parlera autant au jeune public qu'aux adultes qui ont vécu ces moments de doutes. De nombreux éléments sont ainsi abordés dont l'amitié, la confiance en soi, les questionnements sur son avenir, son apparence ou sa personnalité. La suite n'est pas fatalement très innovante sur le sujet mais l'aborde avec justesse et sincérité. Notamment, il est intéressant de voir la réaction de Riley vis-à-vis de Valentina, une populaire joueuse de hockey venant du lycée que la jeune fille va intégrer. Elle est en admiration devant elle, étant tout ce qu'elle voudrait être et n'a qu'une envie, devenir son amie et rentrer dans son cercle. Mais comment y arriver ? Elle va alors se persuader qu'elle doit forcer le trait de son ambition et de son abnégation tout en laissant derrière elle ses anciennes convictions et ses amies qui sont, quoi qu'il arrive, amenées à prendre des chemins différents.

Pour dépeindre la puberté dans l'esprit de Riley, il fallait ainsi des émotions plus complexes que la joie, la tristesse, la peur, la colère et le dégoût. Ainsi, parmi sa liste, le réalisateur porte son choix sur l'anxiété, l'envie, l'ennui et l'embarras. Le passage à l'adolescence est ici illustré de deux façons : d'une part, une exacerbation des émotions primaires entraînant des réactions disproportionnées de Riley ; de l'autre, par l'antagonisme entre les émotions primaires et les émotions complexes, chacune étant persuadée de savoir ce qu'il y a de mieux pour Riley. Si la joie prenait le pas sur les émotions enfantines, l'anxiété prend elle le dessus durant l’adolescence. Cette émotion en particulier essaye toujours d'imaginer, souvent en pire, ce qui peut arriver à la jeune fille ; ceci afin de la préparer à toute éventualité. L'aspect intéressant dans ce deuxième opus est l'inversion de la norme que les émotions tentent d'atteindre. Le premier opus était un film éminemment nostalgique insistant sur les souvenirs du passé, ou au contraire sur leur oubli, influant alors sur la psyché de Riley notamment lors de sa tentative de fugue ou la disparition de son ami imaginaire. Vice-Versa 2, lui, se plonge plus sur le futur potentiel en imaginant tous les destins possibles de l'adolescente, ce qui va la plonger dans un profond désarroi. Dans les deux cas, les films concluent qu'il est important de profiter du temps présent tout en ne laissant pas une émotion, plus qu'une autre, prendre le contrôle de son esprit.

Pour construire sa thématique, plus mature et plus adulte, Vice-Versa 2 choisit de ne pas prendre de risque sur sa structure de récit. Le canevas global est en effet le même avec une partie des émotions qui sont chassées malgré elles du Quartier Cérébral de l'esprit de Riley et doivent retrouver coûte que coûte le chemin vers leur point d'origine afin de remettre de l'ordre dans les sentiments de l'adolescente. Car celles qui sont restées dans le Quartier Cérébral mettent en effet à rude épreuve l'équilibre psychique de la jeune fille ! Ce procédé balisé pour les spectateurs permet au réalisateur d'apporter subtilement des idées nouvelles sans bouleverser fondamentalement l'univers du premier opus. Il sera apprécié par exemple la vallée du sarcasme, la montagne des mauvais souvenirs cachés, la Chambre Forte de mémoire où les anciennes passions honteuses sont mises au secret ou encore le Système de Croyance qui tissent les fils de la personnalité construit en fonction des expériences vécues afin de former l'Estime de Soi. Le film propose aussi de faire évoluer quelques concepts du classique de 2015 comme, par exemple, cette scène percutante, et superbement métaphorique, où Anxiété coopte le centre névralgique du Monde de l’Imaginaire pour montrer à Riley ce qui pourrait arriver dans le futur si elle rate son stage de hockey.

Les spectateurs passeront eux aussi du rire aux larmes. Encore plus que dans le premier, Vice-Versa 2 offre beaucoup d'humour grâce à différents procédés. L’interaction entre les personnages fonctionne à merveille, proposant de nombreuses réparties, répliques ou jeux de mots bien sentis. Le film va aussi à cent à l'heure, surtout dans sa deuxième partie, faisant que l'ennui n'a jamais sa place à la différence de son incarnation, Ennui, aux interventions rares mais truculentes. Que dire aussi des personnages de la Chambre Forte, que ce soit cet avatar de vieux jeu vidéo ou encore ce souvenir de héros de série télé parodiant à merveille Tourniquet de La Maison de Mickey si ce n'est qu'ils sont particulièrement drôles. Mais ce qui fait la force du long-métrage, le faisant rentrer dans le panthéon des grandes réussites Pixar, est sûrement son dernier acte aussi touchant que bouleversant. La crise de panique que vit Riley est totalement saisissante et d'une justesse incroyable. Ceux qui ont vécu ce genre de moments sont certains de se retrouver dans ce que vit la jeune fille, transformant le film en thérapie imagée afin d'avoir les clés pour dépasser ses propres états de détresse. Vice-Versa 2 parvient également à se poser dans des scènes-clés lorsqu'elles partent dans des réflexions philosophiques avec le public, comme par exemple quand Joie perd espoir et ne sait plus comment arrêter Anxiété. Le personnage se demande alors, totalement abattue, si en grandissant, il est plus difficile de ressentir de la joie...

Une nouvelle fois, la force des personnages de Vice-Versa 2 joue un grand rôle dans la réussite de l'ensemble.
En qualité de suite, le film permet de revoir les héros du premier film. C'est donc avec plaisir que le public retrouve les émotions que sont Joie, Tristesse, Colère, Peur et Dégoût. En anglais, si Amy Poehler, Lewis Black et Phyllis Smith continuent à faire respectivement les voix de Joie, Colère et Tristesse, Mindy Kaling (Dégoût) et Bill Hader (Peur) n'ont pas voulu reprendre leur rôle à cause d'un problème de contrat et d'un cachet pas assez important à leurs yeux. Ils sont donc remplacés par Liza Lapira et Tony Hale. En français, aucun changement n'est à déplorer puisque le spectateur reconnaît Charlotte Le Bon (Joie), Gilles Lellouche (Colère), Mélanie Laurent (Dégoût), Pierre Niney (Peur) et Marilou Berry (Tristesse). Les cinq émotions sont dès lors toujours autant attachantes, surtout que leur dynamique évolue un peu puisque Colère, Peur et Dégoût suivent cette fois Joie et Tristesse en dehors du Quartier Cérébral, permettant davantage d'interactions et de situations drôles et amusantes.

Côté humain, Riley est naturellement de retour et a évidemment sa voix qui change d'un film à l'autre en raison du temps qui sépare les deux opus. La grande réussite du personnage de l'adolescente est que ce qui lui arrive dans la suite... est étrangement plus commun que dans le film de référence. Certes, participer à un stage de hockey afin de rentrer dans l'équipe de son lycée peut paraître anecdotique mais c'est justement cette idée qui fait que le processus d'identification fonctionne à plein. Qui n'a jamais eu l'ambition pour soi-même de réussir telle ou telle activité quitte à envisager toutes les façons possibles et imaginables pour y arriver et finalement prendre le plus mauvais choix possible ? Adultes ou adolescents vivent régulièrement ce genre d'évènement que ce soit au travail, dans les études ou même dans la vie de tous les jours. Le long-métrage dépeint ainsi à merveille, à travers Riley, le processus chaotique de décision et la manière dont les émotions submergent tout un chacun. Nombreux vont alors se retrouver dans le personnage, pouvoir se comparer à lui, et en apprendre sereinement sur eux afin de corriger leurs propres erreurs.
Les deux parents de Riley, Madame et Monsieur Andersen, sont, quant à eux, aussi de retour même s'ils ont ici de tout petits rôles.

Qui dit suite, dit nouveaux personnages. Ce sont ainsi quatre nouvelles émotions sophistiquées qui font l'apparition dans le Quartier Cérébral.
La plus importante et le cœur du film est clairement Anxiété. Jouée merveilleusement en anglais par Maya Hawke ou en français par Dorothée Pousséo, le personnage est sans conteste la plus grande réussite de Vice-Versa 2 car elle est à l'origine non seulement de l'action mais aussi de l'émotion du film, devenant en plus l'antagoniste du récit. Elle est persuadée que Riley, étant désormais adolescente, a besoin d'émotions plus complexes afin de la préparer à la vie qui l'attend. Elle définit d'ailleurs à merveille ce qu'elle est en se comparant avec Peur. Ce dernier protège la jeune fille de tous les dangers qu'elle voit venir alors qu'Anxiété la protège de tous les dangers qu'elle anticipe en imaginant tous les scénarios possibles. Elle veut bien faire mais ne se rend pas compte du désordre qu'elle provoque, étant persuadée que Riley se doit de changer radicalement de personnalité si elle veut que tout se passe bien à l'avenir.

Les trois autres personnages sont moins présents même si deux d'entre eux ressortent du lot. Embarras, interprété par Paul Walter Hauser en anglais et Maxime Hoareau en français, est touchant à souhait et certain de faire chavirer le cœur des spectateurs. Ennui, dont le rôle est tenu aussi bien en anglais qu'en français par l'actrice française Adèle Exarchopoulos, est particulièrement amusante. Les artistes Pixar trouvent en effet de façon assez cocasse que le fait d'être blasé ou de pratiquer le sarcasme est un comportement typiquement... français ! Il est alors très drôle d'entendre le personnage prononcer des mots dans la langue de Molière dans un accent très prononcé en version originale. Malheureusement, cet aspect disparait de la VF. Envie (Ayo Edebiri en anglais et Kaycie Chase en français) est, en revanche, un peu plus transparente. Elle travaille en binôme avec Anxiété afin d'offrir à Riley toute l'admiration qu'elle ressent pour les autres afin de leur ressembler.

D'un point de vue technique, Vice-Versa 2 a une animation exemplaire et magnifique. Pixar n'a vraiment plus rien à prouver si bien qu'aucune innovation technique ou stylistique mis à part quelques éléments en animation 2D bien trouvés n'est à souligner. Pourtant, certaines scènes sont de toute beauté comme celles du Système de Croyance. Il faut aussi saluer le travail sur les textures, notamment celles des personnages des émotions que ce soit leur peau ou leur cheveux pelucheux. Autre petit détail, le format d'image change entre les deux films. Là où il était un simple 16/9 dans le premier, il est passé dans le second à un format scope. Ce choix se justifie d'après le réalisateur par la présence de nombreuses émotions, ceci afin qu'elles s'insèrent parfaitement dans les plans et ne paraissent pas trop étriquées dans les décors. Là où le film se démarque, en revanche, c'est sans doute dans son admirable montage. Le dernier acte, notamment dans son climax, est parfaitement orchestré et le va-et-vient entre l'esprit de Riley et son corps permet de parfaitement comprendre comment les mécanismes psychiques influent sur le physique, et vice-versa.
Au rayon des bémols, la musique de la suite est certes efficace, soulignant magnifiquement l'action ou l'émotion, mais bien moins impactante que celle du premier opus. La compositrice Andrea Datzman, une collaboratrice de longue date de Michael Giacchino, n'a à l'évidence pas le même talent que son mentor qui lui a laissé ici les rênes. C'est la troisième fois, et la première pour un long métrage, qu'elle compose pour les studios Pixar ayant déjà collaboré à la série Bienvenue Chez Doug ainsi qu'au court-métrage Le Rendez-vous Galant De Carl.

Vient après la difficile question de savoir si Vice-Versa 2 est meilleur ou moins réussi que son film de référence. Fatalement, l'effet de surprise et de nouveauté a naturellement et évidement disparu. En revanche, les émotions provoquées par le long-métrage dépendront elles du vécu de chacun. L'auteur de ses lignes ne s'était pas retrouvé dans le drame de la fugue ou la disparition de l'ami imaginaire qui l'avaient laissé de marbre. Ainsi, si Vice-Versa était objectivement une réussite artistique, il n'était pas parvenu à le toucher comme l'avaient fait auparavant d'autres chefs-d’œuvre de Pixar. Dans la suite, il s'est au contraire totalement retrouvé dans le parcours adolescent de Riley, notamment dans son effort de vouloir rentrer dans le moule pour plaire et s’intégrer comme il l'avait fait lui-même dans sa jeunesse. Mais surtout, l'anxiété est encore pour lui, même adulte, une émotion très présente. Le second opus accomplit alors l'incroyable exploit de mettre des mots sur les maux ; la fin l'ayant ainsi ému aux larmes. Impossible dans ces conditions de ne pas penser que Vice-Versa 2 est sûrement la meilleure suite du studio à la lampe... depuis Toy Story 3 !

Après le déjà lointain succès de Toy Story 4, Pixar est rentré dans une mauvaise passe dont il a du mal à sortir. Pete Docter prédisait d'ailleurs avant la sortie de Vice-Versa 2 que si la suite était un échec, c'est tout le modèle du studio qu'il faudrait revoir. La pandémie mais aussi le départ de son créateur John Lasseter ont en effet déstabilisé profondément les studios animés d'Emeryville. Si Pete Docter a réussi à installer une ambiance plus bienveillante et inclusive, le succès et la reconnaissance du public ne sont plus au rendez-vous. Il faut dire qu'En Avant, qui est sorti au cinéma juste pendant le premier confinement, s'est vu couper l'herbe sous les pieds d'un point de vue financier. The Walt Disney Company prend alors la décision mortifère de proposer les trois films Pixar suivants, Soul, Luca et Alerte Rouge, directement sur la plateforme Disney+, zappant alors la case cinéma et leur ôtant donc tout ce qui faisait leur prestige et leur côté événementiel en étant vus sur grand écran. Buzz l'Éclair a droit lui à une sortie cinéma mais signe malheureusement un démarrage très mitigé aux États-Unis avant de s’effondrer dans le reste du monde. Preuve de l'impact de cet échec, The Walt Disney Company, alors en difficulté financière avec une action malmenée en bourse, décide pour la seconde fois de l'histoire du studio à la lampe de licencier des artistes. La première fois avait en effet eu lieu en 2013 lorsque Pixar s'était séparé de 30 artistes à la suite du retard du (Le) Voyage d'Arlo. Cette fois-ci, ce ne sont pas moins de 75 personnes qui sont remerciées. En 2023, la sortie d'Élémentaire démarre très mal et fait craindre le pire pour Pixar, mais heureusement l'excellent bouche-à-oreille mondial permet au dernier film du studio à la lampe d'être un succès modeste en rapportant presque 500 millions de dollars. Cela n'empêche pas Disney de procéder à une troisième vague de licenciement de 175 personnes, officiellement pour se concentrer sur le cinéma en abandonnant les productions - et donc le staff - dédiées à Disney+. C'est pour cela qu'avec Vice-Versa 2, Pixar comme Disney ne peuvent se permettre une nouvelle contre-performance qui pourrait annoncer des heures encore plus sombres pour le studio pionnier de l'animation 3D.

Heureusement, Vice-Versa 2 semble rapidement promettre un joli succès à Pixar et à Disney. Les critiques sont très majoritairement enthousiastes, actant certes l'absence de surprises mais saluant les nouvelles émotions qu'amène le film. Mais il se produit un miracle cinématographique comme il y en a peu, seulement un ou deux par an : un film explose les prévisions et reçoit un plébiscite dithyrambique du public. Lors de son premier week-end, Vice-Versa 2 rapporte ainsi 155 millions de dollars aux États-Unis soit le deuxième démarrage, hors inflation, du studio juste derrière les 182 millions de dollars des (Les) Indestructibles 2 en 2018. Il rapporte en même temps 140 millions de dollars dans le reste du monde alors qu'il n'est sorti que dans 38 territoires, soit au total près de 300 millions. Une semaine plus tard, le succès colossal ne se dément pas, dépassant les 720 millions dans le monde en à peine douze jours. Il est ainsi certain de dépasser à ce rythme très rapidement le milliard de dollars. Ce qui n'était plus arrivé à Pixar depuis Toy Story 4 en 2019 ! Il a même de grandes chances d'obtenir bien plus que les 1,2 milliards de dollars dans le monde des (Les) Indestructibles 2 et donc de devenir le plus gros succès de l'histoire du studio. Cela valide en tout cas la stratégie de Bob Iger de se consacrer sur des suites de qualité afin que les films des studios retrouvent la route du succès après 2023, annus horribilis.

Mais comment expliquer des chiffres aussi vertigineux que personne, même Disney, n'avait vu venir ? Les raisons sont multiples mais tiennent à plusieurs éléments-clés : sa réussite artistique, le temps qui sépare les deux films et surtout son timing de sortie. Mais surtout, Vice-Versa 2 se retrouve être le long-métrage thérapeutique de toute une génération, celle qui a découvert le premier opus en étant enfant en 2015, puis a grandi avec ses personnages devenus iconiques. Cette génération, devenue adulte, vit un confinement très dur durant le COVID, et ce dans le monde entier, dont il est désormais su qu'il a été particulièrement difficile à vivre pour les enfants et les adolescents, engendrant pour certains des problèmes psychologiques comme l'angoisse. Le dernier acte de Vice-Versa 2 a ainsi dû servir de catharsis pour nombre d'entre eux, leur donnant les clés pour comprendre et surmonter leurs propres troubles émotionnels. L'engouement du film, amplifié par nombre d'adultes qui se sont aussi retrouvés dans ce long-métrage, doit beaucoup aux scénaristes de Pixar qui ont su brillamment parler à chacun des spectateurs, tout en les rassurant sur eux-mêmes.

Vice-Versa 2 réussit l'exploit d'être la meilleure suite de Pixar depuis bien longtemps. D'une qualité équivalente à son aîné, le second opus a certes perdu la surprise qu'apportait la découverte de son univers mais gagne en maturité en proposant des émotions plus complexes mais paradoxalement aussi des moments plus facilement identifiables par le public. Cette nouvelle pépite du studio à la lampe fait passer le spectateur du rire aux larmes pour son plus grand bonheur. Un film qui remue les émotions et fait du bien du moral, tout simplement !

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