Titre original : Geri's Game Production : Pixar Animation Studios Date de sortie USA : Le 25 novembre 1997 Série : Genre : Animation 3D |
Réalisation : Jan Pinkava Durée : 5 minutes |
Le synopsis
Un vieux monsieur joue seul aux échecs... |
La critique
Après Knick Knack, les studios Pixar prennent la décision d'abandonner la réalisation de courts-métrages pour se consacrer à des projets publicitaires, une activité très rémunératrice mais moins exposée artistiquement parlant. Le chantier de leur premier long-métrage, Toy Story, les accaparent ensuite entièrement si bien qu'ils n'ont plus l'occasion de travailler à nouveau sur un cartoon. Les aventures de Woody et Buzz une fois portées à l'écran, Ed Catmull et John Lasseter décident toutefois de relancer un ambitieux programme de courts-métrages. Plusieurs raisons à cela : d'abord, car le genre fait partie de l'héritage de Pixar ; ensuite, car il permet de mettre le pied à l'étrier à de jeunes pousses afin de leur donner plus de responsabilités sur un projet moins risqué qu'un long-métrage, enfin, car il offre l'opportunité de tester des défis techniques réutilisables ou non pour une œuvre de plus grande ampleur.
Pour relancer la fabrication de courts-métrages, le staff de Pixar se met
donc à la recherche du candidat idéal quand le nom de Jan Pinkava fait
rapidement consensus.
Jan Pinkava est fils de Václav Jaroslav Karel Pinkava, psychologue,
mathématicien nouvelliste et poète tchèque, connu sous son pseudonyme Jan
Křesadlo. Il s'intéresse très tôt au cinéma et à l'animation, mais prend vite
conscience des difficultés pour intégrer ce monde somme toute assez fermé. A
côté de ça, il se trouve qu'il est aussi attiré par l'univers numerique
et décide donc d'effectuer des études d'ingénierie informatique et robotique au
pays de Galles, tout en restant proche des processus de Computer Graphics,
outils de création d'images par ordinateur. Il fait ses premières armes à
Digital Pictures Ltd, un studio londonien, où il réalise des spots TV, puis,
de là, imagine envoyer sa candidature à Pixar. Il est aussitôt engagé sur le
premier long-métrage de la firme,
Toy Story puis travaille ensuite
sur 1001 Pattes (a bug's life),
Toy Story 2 et Monstres & Cie
avant d'être promu réalisateur du huitième film d'animation des studios Pixar,
Ratatouille. Un problème lors de
la production du film le fait toutefois renoncer et céder sa place à Brad Bird,
le réalisateur des (Les)
Indestructibles, qui le remplace au pied levé. Vexé, (il avait déjà écrit
toutes les lignes directrices du scénario et inventé les principaux personnages
et décors du film !) il décide alors de quitter les studios Pixar...
Avant d'en arriver à cette extrémité et en début de parcours chez Luxo Jr, Jan Pinkava se voit donc confié l'opportunité de relancer au sein de Pixar la production de courts-métrages, en signant la réalisation du (Le) Joueur d'Échecs. Il a, à l'époque, carte blanche pour le scénario avec une seule contrainte : l'exigence de la présence d'un personnage humain dont l'animation reste alors le point faible de l'animation 3D et dont le studio veut absolument améliorer le rendu. Il arrive ainsi avec l'idée d'un vieil homme qui joue, seul, aux échecs. Elle lui vient en réalité de son propre grand-père véritable passionné de ce jeu. L'avantage d'avoir un vieillard présente également plusieurs atouts : d'abord, de par ses rides, le personnage peut être légitimement caricatural. Ensuite, ses mouvements peuvent et se doivent même d'être saccadés pour montrer l'état de fatigue, et ce, sans courir le risque, au niveau de l'animation, d'une critique sur le rendu. Enfin, d'aspect fondamentalement simple, la texture des vêtements peut recevoir toutes les attentions pour éviter les affres de l'impression de plastique que donnaient jusque là les humains de Toy Story.
Le Joueur d'Echecs pose ensuite les bases des clins d'œil dont Pixar a su faire sa marque de fabrique avec, par exemple, ici, la présence sur la boite de cigares servant de range-pièces, de la mention "Pt. Richmond Hand Made Pixar Shorts", un hommage à la ville où sont alors domiciliés les studios (Pont Richmond en Californie). De même, le public français appréciera le ton donné au court-métrage par la musique très parisienne façon bal musette de Gus Viseur, Flambée Montalbanaise...
Le bon en avant technique entre Le Joueur d'Echecs et Toy Story est tout bonnement impressionnant, alors même que seulement deux ans les séparent l'un de l'autre. Sa qualité de réalisation alliée à son histoire, aussi touchante qu'efficace, en font ainsi une pépite pixarienne, logiquement auréolée de l'Oscar du Meilleur Court-Métrage mais également du prix du réalisateur au Festival International du Film d'Animation d'Annecy.