Pépé le Grillon
(Herman)
Date de création : Le 22 août 1947 Nom Original : Bootle Beetle Autre(s) Nom(s) : Herman Créateur(s) : Jack Hannah |
Apparition : Cinéma BD Télévision Voix Originale(s) : Dink Trout |
Le portrait
Donald ne serait pas Donald s'il n'affrontait pas des adversaires aptes à le faire sortir de ses gongs. À ce jeu là, les plus petits sont souvent, pour ne pas dire toujours, les meilleurs. Le coléoptère Pépé le Grillon est à l'évidence un cas d'école. Pour autant, de tous les petits adversaires que va connaître le canard colérique, il est assurément celui qui a eu la carrière la plus courte.
Jack Hannah, le réalisateur responsable des cartoons de Donald, est le premier à avoir l’idée de créer le personnage. Le petit insecte doit, ainsi, entre autre, son nom au réalisateur dont l'épouse possédait un cheval dénommé "Beetle Bootle". Le mari inverse les deux mots et baptise Pépé le Grillon, en anglais, Bootle Beetle.
Embauché aux studios Disney en 1933 en tant qu'intervalliste d'animation sur les séries Mickey Mouse, Silly Symphonies et Donald Duck, Jack Hannah réalise sa première animation pour Gulliver Mickey en 1934. En 1939, il est promu scénariste et travaille en étroite collaboration avec Carl Barks. C'est en 1943 qu'il devient le réalisateur attitré de Donald Duck auprès duquel il va introduire de nombreux acolytes, rendant ses cartoons tout simplement mémorables. Dans les années cinquante, il se charge de quatorze émissions pour la télévision mettant ainsi en vedette Donald pour le show Disneyland. Il quittera le studio en 1959. Jack Hannah est assurément le réalisateur qui offre au célèbre canard de Disney son plus grand nombre de cartoons incontournables. Pas moins de
soixante-cinq courts-métrages s'affichent, au total, à son compteur ; huit étant nommés aux Oscars et notamment, Donald et les Fourmis (1948),Donald et son Arbre de Noël (1949), et Chasse Gardée (1955).
Jack Hannah
Pépé le Grillon bénéficie de la voix de Francis "Dink" Trout. Né le 18 juin 1898, la plus grande partie de sa carrière se fera à la radio où il participera à des séries de fiction radiophoniques comme The Dennis Day Show, The Adventures of Ozzie ou The Life of Riley. L'acteur apparaîtra également au cinéma de 1936 à 1949 mais souvent sans être crédité. Son plus grand rôle est celui de Pliny Pickett dans Scattergood Baines en 1941 ainsi que dans deux de ses suites. Pour les studios Disney, il aura fait la voix de Pépé le Grillon dans ces quatre apparitions ainsi que celle du Roi de Cœur dans le film d'animation Alice au Pays des Merveilles. L'acteur ne pourra même pas voir son dernier film terminé puisqu'il meurt le 26 mars 1950 à l'âge de 51 ans à Burbank à la suite d'une opération qui s'est mal déroulée.
Dink Trout
La première apparition de Pépé le Grillon a donc le lieu dans le cartoon du 22 août 1947 nommé fort à propos, Pépé le Grillon. Ezra, un jeune coléoptère, écoute attentivement la mésaventure de son aîné, vécue à l'occasion de sa rencontre avec Donald Duck, alors collectionneur d'insectes... Dans ce premier court-métrage, les deux coléoptères, le jeune comme le plus âgé, sont véritablement attachants et Donald, comme à son habitude, atteint des sommets de drôlerie. Des deux insectes, seul le vieux Pépé a néanmoins la parole ; le jeune Ezra ne faisant qu'écouter sans jamais prononcer un mot. Il est également amusant de noter que Pépé dans sa jeunesse ressemble exactement au jeune Ezra à qui il raconte ses souvenirs.
Pépé le Grillon (1947)
Sa seconde prestation se fait dans Donald Marin le 8 avril 1949. Pépé le Grillon (qui gagne ici une paire de lunettes) se rappelle le temps où il était naufragé sur une île déserte avec Donald... L’alliance formée avec le canard dans ce court-métrage évolue. Les deux compères sont, il est vrai, désormais partenaires et non plus adversaires contrairement au précédent cartoon. Sauf que la relation est franchement déséquilibrée ! Donald se sert en effet de l’insecte pour survivre et ne manifeste pas une profonde amitié. En fait, Donald est ici un camarade parasite qui a tendance à martyriser plus faible que lui et affiche une amitié juste pour satisfaire uniquement ses propres besoins. Pépé, lui, ne semble pas s’être rendu compte du côté toxique de son "ami", puisque des années plus tard, il est toujours son partenaire rappelant aux spectateurs l’origine de leur rencontre…
Donald Marin (1949)
Le 14 octobre 1949, Jardin Paradisiaque marque la dernière réunion de Donald et de Pépé le Grillon dans un même court-métrage. Le cartoon reprend le même principe que le tout premier, avec un vieux Pépé qui fait la leçon à Ezra en lui racontant son passé et sa rencontre avec Donald. La différence se trouve ainsi dans le fait que Pépé loge dans la décharge à côté du jardin de Donald et que le récit est bien plus accès sur le coléoptère ; le canard faisant juste de la figuration. C’est donc le vieux Pépé qui joue les conteurs à son petit fils et lui explique combien le jardin de Donald, certes regorgeant de nourritures, est risqué. Il lui narre pour cela les dangers qu’il a affrontés étant jeune rien que pour manger un peu de pastèque, entre Donald le pourchassant mais aussi les poules et autres moineaux. L’expédition pour un peu de sucrerie s’est d’ailleurs révélée si périlleuse qu’il a préféré s’installer dans le terrain vague d’à côté.
Jardin Paradisiaque (1949)
Pépé le Grillon, jeune ou agé, est un personnage simple et attachant, pas de doute là dessus. Le problème est qu'il l'est beaucoup trop au point de voir sa carrière stoppée bien vite. Il faut dire qu'il est né en tant que némesis de Donald sauf qu'à la différence de Tic & Tac, Spike l'Abeille ou Louie le Lion, il est bien trop gentil. Le jeune coléoptère est, en effet, naïf et bienveillant sans une once de méchanceté, ne cherchant jamais la vengeance ou l'affrontement. Le vieux Pépé est, quant à lui, une réminiscence de Jiminy Cricket, une sorte d'insecte indéfinissable à l'apparence affable avec un côté de conscience professorale. Pépé le Grillon souffre dès lors d'un profond manque de personnalité et d'aspérité de part son côté linéaire. Transparent dans ses actions, son capital-sympathie lui vient surtout de son superbe doublage et de son visuel avenant. Sa profonde gentillesse amène d'ailleurs indirectement Donald à avoir le mauvais rôle en étant presque tout le temps méchant avec lui. Si le premier cartoon du duo fonctionne bien, les deux autres sont, il est vrai, plus décevants tant ils sont déséquilibrés dans la relation des deux toons. Les artistes de Disney vont alors choisir d'arrêter les frais et de ne plus les faire apparaître ensemble. Il faut par contre souligner la beauté des décors des trois courts-métrages réalisés par Thelma Witmer et Ralph Hulett qui arrivent à merveille à retranscrire la petitesse du personnage tout en se mettant dans la perspective de l'insecte en proposant soit une végétation luxuriante, soit des décors agrandis.
Morris, le Petit Élan (1950)
La dernière apparition au cinéma de Pépé le grillon se fait donc le 24 novembre 1950 dans le cartoon Morris, le Petit Élan. Son récit raconte l'histoire de Morris, qui, malgré d'imposants bois, est un élan pas comme les autres : il a, en effet, une toute petite taille. Son apparence physique lui vaut ainsi d'être la risée de ses congénères. Mais tout change quand il rencontre Polo, un élan qui a, lui, de minuscules bois... Ce cartoon Special est, en réalité, narré par le coléoptère de Donald. Le procédé est ainsi le même que dans deux de ses trois précédentes productions : le vieux Pépé raconte une histoire à plus jeune que lui. Sauf qu'ici, deux différences notables sont à souligner. La première est qu'il est entouré non pas d'un mais de deux jeunes insectes. La seconde est, qu'à la différence des trois précédents cartoons, Pépé le Grillon, jeune ou vieux, n'est que le narrateur et n'apparaît qu'en début et fin de court-métrage sans jamais interagir avec l'élan Morris.
La carrière cinématographique du personnage s'arrête ici. Il fera tout de même une apparition timide à la télévision en devenant le compère temporaire de Donald Dingue mais sous un nouveau - et étrange - nom d'Herman. Il sera ainsi vu dans trois épisodes de l’émission d’anthologie de Walt’s Disney Wonderful World of Disney : L'Instinct de Chasse en 1961, Trois Histoires Invraisemblables en 1963 et The Truth About Mother Goose en 1963. Enfin, dans l'épisode diffusé en 1966, Music for Everybody, où Donald Dingue aborde différents types de musique comme la symphonie classique, le jazz, le Dixieland, la samba, le ballet ou l'opéra dramatique, il demande à ses amis insectes, qui ressemblent étrangement à Herman, d’assurer l'orchestre pour son concert. Cette prestation marque la toute dernière apparition animée de Pépé le Grillon.
Pépé le Grillon a néanmoins accès à une petite carrière en comics. En dehors de deux courtes adaptations sur papier des cartoons Pépé le Grillon et Donald Marin, il rejoint, en effet, Junkville et vit des aventures avec Bucky Bug et ses amis. Il connaît ainsi pas moins de douze histoires dans le magazine Walt Disney's Comics and Stories de 1947 à 1950 sous le crayon de nombreux dessinateurs dont Ralph Heimdahl et Tony Strobl. Sa carrière sur papier aux États-Unis s'arrête, en revanche, en même temps que celle au cinéma. Étonnamment, les Pays-Bas vont faire revivre le personnage dans les années 80 et 90 avant d'accélérer sa production dans les années 2000 : neuf histoires sont produites avec lui ce qui donne l'idée d'une résurrection aux États-Unis pour une histoire dessinée par Noel Van Horn dans le Walt Disney's Comics and Stories #677.
Pépé le Grillon est l'un des nombreux petits adversaires de Donald. Sa trop grande gentillesse et sagesse le rendent malheureusement vite transparent au point de s'affadir à l'excès et de ne jamais réussir à embrasser une carrière digne de ce nom. Grillé, le grillon !