Alice de l'Autre Côté du Miroir

Titre original :
Alice Through the Looking Glass
Production :
Walt Disney Pictures
Date de sortie USA :
Le 27 mai 2016
Genre :
Fantastique
IMAX
3-D
Réalisation :
James Bobin
Musique :
Danny Elfman
Durée :
110 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Alice retourne au Pays des Merveilles en traversant un miroir. Là, elle y retrouve ses anciens amis dont le Chapelier Fou qui s’avère très malade. Elle décide pour le sauver de retourner dans le passé et part donc rencontrer le Temps lui-même...

La critique

rédigée par
Publiée le 30 mai 2016

Alice de l'Autre Côté du Miroir est sympathique. Mieux écrit qu'Alice au Pays des Merveilles de Tim Burton, il en possède néanmoins les même défauts. Ainsi, les spectateurs ayant aimé le premier conserveront assurément les mêmes sentiments pour le second ; les autres le conspueront. Il n'empêche ! Cette suite sait éviter le manichéisme tout en proposant un univers aussi bariolé que fantaisiste. Le rajout de la notion du temps est en outre une vraie bonne idée. Mais voilà, comme dans le premier opus, il manque ce zeste de folie qui caractérise si bien les écrits de Lewis Carroll mais aussi le film d'animation de Walt Disney de 1951. Et c'est difficilement pardonnable.

Comme son nom l'indique, Alice de l'Autre Côté du Miroir s'inspire du deuxième livre des aventures d'Alice écrit par Lewis Carroll. Né Charles Lutwidge Dodgson, troisième fils d'un pasteur, ce dernier passe sa jeunesse dans le Yorkshire. Très vite, il se singularise en aimant monter des spectacles de marionnettes. En 1851, il entre à l'université d'Oxford et obtient un diplôme de mathématiques. Il y entame alors une carrière d'enseignant et se fait parallèlement ordonner diacre en 1861. En plus de ses travaux pédagogiques, il écrit des nouvelles dans le magazine The Train sous le pseudonyme de Lewis Carroll. En 1865, il publie l'œuvre qui restera sa plus célèbre Alice au Pays des Merveilles, un récit surréaliste ayant pour héroïne une petite fille. Il lui donne une suite en 1872 sous le titre de De l'Autre Côté du Miroir. Mais, force est de constater que la société victorienne passe à côté de son œuvre phare voire la boude. Alice, conte moderne élevant l'enfant au-delà de la mièvrerie en le rendant capable de saisir le ridicule des adultes et la prison de leurs conventions, est, en effet, tout bonnement ignoré. Initialement destinées à la jeunesse, les œuvres de Carroll ont, depuis, pris une autre dimension résolument adulte, tant leurs discours sont complexes.

Alice au pays des Merveilles et les studios Disney ont une longue histoire d'amour...
De son vivant, Walt Disney voue, en effet, un véritable culte à l'œuvre de Lewis Carrol. Il tient ainsi beaucoup à son adaptation. Très vite, dès 1923, il réalise, en partie, son rêve, avec sa série des Alice Comedies dans laquelle une petite fille réelle se voit projetée dans Cartoonland, le pays des dessins animés. En 1937, il signe également, De l'Autre Côté du Miroir, un cartoon de Mickey, librement inspiré du roman de Lewis Carroll, De l'Autre Côté du Miroir. Mais le Maître de l'Animation ne veut pas se contenter de ce qu'il aime à considérer comme de simples tâtonnements. Il désire absolument réaliser un long-métrage basé sur l'œuvre emblématique de son auteur fétiche. En 1933 déjà, il a de sérieuses discussions avec Mary Pickford pour participer à une adaptation d'Alice au Pays des Merveilles mélangeant univers animé et monde réel. En 1945, il envisage même Ginger Rogers dans le rôle principal. Enfin, un an après, lors de la sortie de Mélodie du Sud, il pense confier le rôle d'Alice à Luana Patten, la nouvelle jeune star alors sous contrat avec ses studios, pour finalement décider, la même année, que le long-métrage serait exclusivement animé. Le film d'animation sort en 1951. Boudé à l'époque par la Critique, Alice au pays des Merveilles est considéré aujourd'hui comme un des chef d'œuvres de Walt Disney. En 2010, les studios Disney décident de faire un remake du classique d'animation de 1951 en confiant la réalisation au talentueux Tim Burton.

Alice au Pays des Merveilles devient alors un succès surprise, aussi bien pour les critiques que pour Disney. Avec 1,025 milliard de dollars aux box office mondial dont 334 millions rien qu'aux États-Unis, le carton donne vite l'idée au studio de Mickey de continuer à adapter ses grands classiques d'animation en film à prises de vues réelles aboutissant à Maléfique en 2014, Cendrillon en 2015 et Le Livre de la Jungle en 2016. Comment expliquer un tel succès ? La critique avait pourtant été divisée sur le long-métrage de Tim Burton, que certains considèrent comme le moins bon du réalisateur. Pourtant, plusieurs facteurs ont aidé l'opus à plaire au public. D'abord, la rencontre entre Disney et Tim Burton dans l'adaptation d'un roman plein de folie avait tout pour fonctionner sur le papier. Ensuite, la star Johnny Depp est à l'époque un acteur qui fait déplacer les foules sur son seul nom, surtout quand il se grime. Enfin, le film est le deuxième à proposer de la 3-D après le succès historique et planétaire d'Avatar se contentant néanmoins d'une 3-D convertie et non native. Tous ces éléments ont ainsi favorisé la destinée d'Alice au Pays des Merveilles alliés au fait que le public est résolument demandeur de voir Disney revisiter ses grands classiques.

Alice de l'Autre Côté du Miroir est, pour sa part, une suite d'un remake d'un des longs-métrages d'animation des studios Disney. Le succès du premier opus explique assurément sa mise en chantier même si l'histoire du précédent ne nécessitait pas forcément de continuation. Une suite inutile diront donc certains ! Et le projet a été long à lancer : six ans pour réaliser une suite d'un tel succès est, en effet, une période hors norme. Ce délai est dû au fait que Tim Burton lui-même ne voulait pas le réaliser même s'il a pris le poste de producteur dessus. Il cède donc la place derrière la caméra à James Bobin. Ce dernier, d'origine anglaise, s'est fait remarquer lors de ses débuts au cinéma en réalisant les deux derniers films des Muppets : les excellents Les Muppets, Le Retour et Opération Muppets. Il livre ici une prestation réussie même s'il n'a manifestement pas le génie de son prédécesseur.

C'est toujours Linda Woolverton, comme pour le premier film, qui s'occupe d'écrire le scénario. Et force est de constater qu'elle s'est mieux débrouillée sur la suite. Le premier volet souffrait, en effet, d'allers et retours inutiles dans un script poussif qui se terminait sur un combat digne de l'Heroic Fantasy, très loin de la folie que le spectateur était en droit d'attendre d'une adaptation de Lewis Carroll. Dans Alice de l'Autre Côté du Miroir, elle a la bonne idée de ne prendre que l'élément emblématique du livre, le miroir, et de construire une intrigue totalement inédite autour. En cela, le film propose une aventure originale. Elle reprend les personnages centraux du premier opus en essayant d'approfondir leur passé et leur histoire. Elle a également choisi d'abandonner le manichéisme d'Alice au Pays des Merveilles. Les méchants ne le sont pas tant que ça et les gentils pas forcément parfaits. Le procédé rend évidemment les personnages globalement plus intéressants. La seule chose qu'il sera reproché est peut-être le manque de folie, un défaut déjà remarqué sur le premier volet. Il est encore plus flagrant ici où les seuls personnages un peu loufoques du Pays des Merveilles sont la bande d'Alice comme le Loir, le Lièvre de Mars, le Chat de Cheshire ou Tweedledee & Tweedledum. Les autres sont humains, presque normaux, trop banals...

L'autre bonne idée est clairement le traitement du Temps. Personnifié, le Temps est ici un personnage à part entière. Ainsi, la trame principale utilise la notion du temps qui passe comme axe d'aventure. Alice doit le remonter pour essayer de sauver son ami le Chapelier Fou qui se meurt. L'utilisation du temps amène ainsi de nombreuses trouvailles visuelles à commencer par le château du Temps et ses immenses aiguilles qui tournent autour des douves. L'intérieur du palais n'est pas en reste avec ses rouages et ses horloges. Les serviteurs de l'entité temporelle sont en outre de petits êtres mécaniques qui s'appellent des Secondes. En cas de danger, elles ont la capacité de s'agglomérer et de devenir... des Minutes. Le temps qui passe est dépeint comme un océan de moments tandis que la mise en image de la fin des temps est tout simplement superbe avec ses effets de rouilles statiques. Enfin, toutes ces utilisations du temps sont l'objet de jeux de mots souvent bien amenés. Clairement, le temps dans le film est assurément ce qui lui réussit le mieux, plein d'imaginaire et de fantaisie !

Visuellement, Alice de l'Autre Côté du Miroir joue en terrain connu. Toujours aussi coloré, acidulé et numérique, ceux qui ont adoré le premier opus seront tout autant charmés ; ceux qui avaient détesté, continueront à bouder. Mais, encore une fois, toute la représentation du temps est superbe ainsi que la partie se passant dans le monde d'Alice. L'introduction et le retour rapide au milieu du film sont aussi superbement mis en image. Etonnamment, le spectateur retrouve un peu l'ambiance d'un autre film fantastique Disney de 1985, Oz, un Monde Extraordinaire. Le majordome du Temps rappelle de loin Tik-Tok tandis que comme Dorothy, Alice se retrouve dans un institut psychiatrique... Pour le reste, l'opus est empli de couleurs et le numérique plutôt bien utilisé formant un visuel certes pétant mais au demeurant plutôt joli.

Parmi les personnages du film, se remarquent au final peu de nouveaux. Le spectateur retrouve ainsi Mia Wasikowska dans le rôle d'Alice Kingsleigh. L'actrice a vraiment pris du galon : elle est manifestement plus sure d'elle et porte vraiment le long-métrage sur ses épaules. Le reste du casting semble moins impliqué que cela soit Johnny Depp dans le rôle de Tarrant Hightopp, le Chapelier Fou ; Helena Bonham Carter dans celui d'Iracebeth, la Reine de Coeur ; ou Anne Hathaway dans celui de Mirana, la Reine Blanche. Les petits personnages emblématiques du Pays de Merveilles sont aussi de retour : Absolem, le Papillon (dont la voix est tenue en anglais par Alan Rickman dans son dernier film, qui lui est d'ailleurs dédié à la fin), le Chat de Cheshire (Stephen Fry), le Lapin Blanc (Michael Sheen), Bayard, le Chien (Timothy Spall), le Loir (Barbara Windsor), le Lièvre de Mars (Paul Whitehouse) et Tweedledum & Tweedledee (Matt Lucas).
Parmi les nouveaux personnages, Sacha Baron Cohen joue le Temps. Apportant un petit grain de folie au personnage, il s'en sort plutôt bien, le rendant en plus ambivalent dans ses objectifs. Méchant ou gardien de l'ordre établi ? La frontière est floue... Il est aidé dans sa tâche par un majordome, Wilkins, vraiment sympathique dont la voix en anglais est prêtée par Matt Vogel.

Côté musique, Danny Elfman reprend le rôle de compositeur qu'il avait déjà dans le premier opus. Il propose ici une partition efficace qui sait parfaitement souligner l'action et le côté magique de l'univers retranscrit. Enfin, la chanteuse P!nk signe une chanson pour le générique de fin, Just Like Fire, remarquable.

Alice de l'Autre Côté du Miroir est finalement très mal accueilli par la critique, aussi bien américaine que française, lui reprochant l'absence de Tim Burton mais aussi la futilité d'une suite et un scénario mal écrit. Une charge somme toute un peu dure. Le problème est que le public se désintéresse aussi du film ! Sortant le week-end du Memorial Day 2016 aux USA, en confrontation frontale avec X-Men : Apocalypse, non seulement il perd son duel mais également réalise un démarrage proche du flop, en dessous de celui d'A la Poursuite de Demain, l'année précédente qui avait déjà été considéré comme un échec. L'opus ramène ainsi 28 petits millions de dollars lors de son premier week-end alors que les prévisions l'attendaient au minimum à 50 millions. Aux Etats-Unis, il ne devrait donc pas dépasser les 100 millions au total. Au niveau mondial, c'est guère mieux puisqu'il engrange 60 millions sur son premier week-end comprenant 72% de ses territoires. Les 170 millions de budget, pourtant se situant en dessous du premier opus, vont de la sorte être difficilement remboursés. Décidément, le week-end du Memorial Day est une mauvaise période pour sortir un film Disney. La question reste de savoir pourquoi le studio n'a pas repoussé son film quand il a vu que X-Men : Apocalypse prenait la même date que lui. Disney a sans doute voulu jouer la carte de la contre-programmation ? Pari risqué et perdu : avec ce genre de projet dispendieux, il vaut mieux, en effet, s'assurer que son public ne se disperse pas... Effet collatéral, l'échec du film risque d'avoir des conséquences sur les suites tardives des remakes à prises de vues réelles des classiques d'animation.

Alice de l'Autre Côté du Miroir est un long-métrage dont le bilan artistique est meilleur que son prédécesseur. Mieux écrit, avec des idées plus conformes à ce que le spectateur attend du Pays des Merveilles, il possède néanmoins le même défaut que le premier opus : le manque de folie. Il reste pourtant la vision du temps qui regorge de bonnes idées aussi bien visuelles que scénaristiques.
Au final, Alice de l'Autre Côté du Miroir propose une bonne dose de fantaisie dans un monde fantasmagorique. Sympathique mais dispensable.

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