Les Muppets, Le Retour
L'affiche du film
Titre original :
The Muppets
Production :
Walt Disney Pictures
Date de sortie USA :
Le 23 novembre 2011
Genre :
Marionnettes
Réalisation :
James Bobin
Musique :
Bret McKenzie
Christophe Beck
Durée :
103 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

Sur le point de perdre les mythiques studios des Muppets, convoités par un homme d’affaires véreux, Kermit sur les conseils de la marionnette Walter, de son frère humain Gary et de la petite amie de ce dernier, Mary, imagine organiser un téléthon pour récolter les dix millions de dollars nécessaires au rachat. Mais d’abord, il lui faut reconstituer toute la troupe en partant à la recherche de ses anciens compagnons de scène…

La critique

rédigée par

Les Muppets, Le Retour marque le retour au cinéma des créatures de Jim Henson formant dans les années 2010 une franchise, considérée par de nombreux spécialistes et spectateurs, comme moribonde. Les studios Disney ont décidé, en effet, de faire confiance à Jason Segel, grand fan des Muppets devant l’Eternel, pour prendre la tête du film qui pourrait les relancer. Pari qu’il remporte haut-la-main tant l’opus est assurément le meilleur film de Kermit et ses amis. Les Muppets, Le Retour est sans aucun doute le long-métrage qui a parfaitement compris l'essence même du show télé originel, mêlant un humour appuyé entre blagues, caméos, scènes cocasses et répliques savoureuses, à des numéros musicaux jouissifs et bien menés ; le tout au milieu d’un joli parterre d’invités, placés au sein d’un univers gentiment nostalgique. Du pur bonheur !

Le Muppet Show (The Muppet Show) est une série télévisée américano-britannique en 120 épisodes de 24 minutes, créée par Jim Henson. Elle est diffusée entre le 25 septembre 1976 et le 6 août 1981 sur le réseau de télévision privé ITV1 au Royaume-Uni et sur CBS aux États-Unis. Chaque semaine, Kermit la grenouille et ses amis animent le "Muppet Show" dans un théâtre déjanté où une foule de spectateurs, dont certains sont de vrais habitués, assiste à un programme de variété dont il est permis de se demander s'il va pouvoir être mené à son terme tant le délire est permanent.
En France, la série fait son apparition sur la deuxième chaine publique, Antenne 2 (l’ancêtre de l’actuelle France 2), en 1979. Son succès dans l'hexagone est très important. Il est, d'ailleurs, largement dû au doublage impeccable d'acteurs de talent qui ont su donner à chacun des Muppets, une "épaisseur" incroyable. Roger Carel (Kermit), Micheline Dax (Piggy), Francis Lax (Fozzie) et Gérard Hernandez (Gonzo) ont ainsi tellement marqué de leur empreinte le show que les spectateurs s'en souviennent encore aujourd'hui.
Les personnages des Muppets sont si populaires qu'ils vivent au delà de leur série. Déjà, ils s'exportent au cinéma à travers trois films Les Muppets, Ça C'est du Cinéma ! (1979), La Grande Aventure des Muppets (1981) et Les Muppets à Manhattan (1984). Ils reviennent ensuite à la télévision pour une deuxième série, animée cette fois-ci (Les Muppet Babies diffusée de 1984 à 1991) ainsi qu'un téléfilm, Le Noël des Muppets, en 1987.

Alors que la construction de l'attraction Muppets Vision 3D du parc Disney's Hollywood Studios à Walt Disney World Resort en Floride n'est pas encore achevée, Jim Henson et la Walt Disney Company annoncent, en août 1989, le rachat, par cette dernière, de tous les droits et licences couvrant les Muppets. Hélas, un blocage juridique et le décès prématuré de Jim Henson, en mai 1990, rendent, moins d'un an plus tard, l'accord caduc. Cette situation, pour le moins instable, explique ainsi que Disney n'ait, en fait, produit que les quatrième et cinquième films des Muppets, à savoir : Noël Chez les Muppets en 1992 et L'Ile au Trésor des Muppets en 1996 mais aussi le petit téléfilm Les Muppets à Walt Disney World en 1990. Ils auront également distribué le premier long-métrage produit directement pour la vidéo, Muppet Classic Theater. Ensuite, les Muppets voleront de leur propres ailes notamment avec une troisième série, Les Muppets (1996 - 1998), un sixième film de cinéma, Les Muppets dans l'Espace (1999), un téléfilm, Joyeux Muppet Show de Noël (2002) et un deuxième film sorti directement en vidéo, Kermit, les Années Tétard (2002). Il faudra attendre, enfin, prés de quatorze ans après la mort de leur créateur, en avril 2004, pour voir Disney mettre définitivement la main sur le catalogue de Jim Henson et sceller à jamais la filiation entre Mickey et Kermit.

Depuis ce fameux rachat, le studio du grand Walt semble n'avoir toujours pas trouvé comment exploiter "ses" délirantes marionnettes. Il agit, en effet, avec elles, au coup par coup, sans véritable politique, ni éditoriale, ni commerciale. Seul le média de diffusion (la télévision) semble, en fait, stabilisé. Ainsi, en 2005, Le Magicien d'Oz des Muppets, un téléfilm (du reste fort sympathique) débarque sur le petit écran et réalise un score d'audience tout à fait honorable. Tout le monde pense alors - les fans, les premiers - que le retour en force de Kermit et ses amis est enfin arrivé. Que nenni ! Plus rien ne se passe, il est vrai, pendant plusieurs années. Oubliant le sol américain, une expérience est même tentée en France, au gré d'une opportunité due au présentateur alors en vogue, Sébastien Cauet.
Muppets TV débarque donc sur TF 1 à la fin de l'année 2006 pour seulement dix petits épisodes ; le show est depuis sous black-out, n'ayant même pas eu l'honneur d'une édition DVD...
Retour aux USA, deux ans plus tard, les 3 août et 5 octobre 2008, où deux émissions spéciales sur Disney Channel, intitulées Studio DC : Almost Live, voient toute la troupe des Muppets interviewer les stars maison de Disney Channel dont Selena Gomez et Miley Cyrus. En France, les deux shows sont découpés en épisodes de cinq minutes puis diffusés sous le titre de Disney Channel Muppet Show.
Un peu plus tard, toujours en 2008, les studios Disney livrent un téléfilm, dit de Noël, affichant une durée de moins d'une heure, A Muppets Christmas : Letters to Santa. Contre toute attente, ils le font diffuser sur NBC, filiale d'Universal et grande concurrente d'ABC devant l'Eternel...

En 2008, Jason Segel, acteur connu pour son rôle de Marshall Eriksen dans la série How I Met Your Mother, grand fan de Kermit et ses amis, se rapproche de la Direction des studios Disney afin de proposer un script pour relancer la franchise des Muppets au cinéma. Le staff de Mickey est emballé et lui donne le feu vert. Non seulement il écrit le scénario mais produit également le film dans lequel il se réserve le premier rôle - humain – allant même jusqu’à chanter dans l’opus. Une véritable prouesse d'artiste polyvalent ! Il avoue bien volontiers qu’il s’agit là, en réalité, d’un rêve d'enfant qui se réalise tout en étant une tâche extrêmement rude à accomplir. Il se doit, en effet, de rendre les marionnettes de nouveau funs - alors même que nombreux dans le métier sont ceux qui les pensent à tout jamais ancrées dans la naphtaline - tout en étant parfaitement respectueux de l'héritage de Jim Henson. A ce sujet, des bruits, survenus lors du de l'exposition du D23 en 2009 laissaient à penser que les studios Disney utiliseraient pour Les Muppets, Le Retour un ancien script écrit par Jim Henson lui-même dès 1985 et imaginé sous le titre The Cheapest Muppet Movie Ever Made !. L’avenir prouvera le contraire : Disney conserve bien le script original de Jason Segel et change de titre en cours de route, passant, en V.O. de The Greatest Muppet Movie of All Time !!! au simplissime The Muppets. Si le Québec et la Belgique ont choisi de conserver cette appellation, Disney France (qui, elle, a refusé de le proposer en salles) a décidé, pour sa sortie Blu-Ray, de le sous-titrer avec la mention Le Retour qui permet de bien le distinguer de la série de 1996. Il s’agit là, également, de ne pas reproduire l’erreur markéting commise sur Winnie l’Ourson, un film boudé par le public français en bonne partie parce que les gens pensaient avoir à faire à une « rediffusion » d’une œuvre déjà vue par ailleurs, et notamment à la télévision, alors même qu’il s’agissait bien d’un inédit total.

Jason Segel a donc l'idée-force de revenir à ce qui fait l'essence même des Muppets. C'est assurément là que résident sa plus grande réussite et son plus grand talent : il connait, en effet, parfaitement ce que les Muppets représentent pour toute une génération et maitrise les fondamentaux de la franchise. Tout d'abord, il abandonne le concept, maintes fois utilisé par les studios Disney, qui consiste à faire jouer un rôle au Muppets. Noël Chez les Muppets, L'Ile au Trésor des Muppets ou Le Magicien d'Oz des Muppets sont, il est vrai, fort sympathiques mais détournent les célèbres marionnettes de leur environnement original. En interprétant des histoires classiques, certes de façon convaincante, elles s’éloignent, il est vrai, de ce qu’elles sont réellement et brouillent finalement leur image. Jason Segel veut ainsi que les Muppets soient les Muppets ! Pour autant, il évite soigneusement de tomber dans le piège du tout ou rien et décide de mélanger des genres finalement bien différents : la loufoquerie du (Le) Muppet Show mais aussi l'émotion des films tels que Les Muppets, Ça C'est du Cinéma ! ; le tout sur fond d’une bonne dose de nostalgie.

Le film se divise ainsi en deux parties : la première, tout en dinguerie et la seconde, tout en tendresse. Les Muppets, Le Retour consiste donc, d’abord, à réunir les différents membres de la troupe que le destin a séparés. L'humour est bien sûr omniprésent, toujours saupoudré généreusement d’une loufoquerie jouissive. Jason Segel aidé du réalisateur James Bobin s’amuse visiblement à placer, ça et là, des incohérences qui trouvent ensuite une justification aussi improbable que totalement rationnelle à l’exemple de la pluie torrentielle qui s’invite dans une chanson romantique ou des chœurs bibliques dans une scène à forte émotion. Chaque délire trouve de la sorte une explication métaphysique le plan d'après. C'est le « double effet Kiss Cool » permanent : la loufoquerie est drôle à souhait et son explication, tout autant !
La deuxième partie des (Les) Muppets, Le Retour se concentre, elle, essentiellement sur l'émotion avec un rythme plus doux et un point d'orgue : la soirée du téléthon. Elle conserve toutefois, comme la première, sa foultitude de références ou ses situations cocasses et distille, comme elle, une forte dose de nostalgie. En réalité, le film tout entier donne aux spectateurs l'impression de retrouver des amis perdus de vue depuis des années. L'émotion est à son comble quand la troupe chante à la fin du spectacle la chanson The Rainbow Connection, reprise du titre d'ouverture du premier film Les Muppets, Ça C'est du Cinéma !. Difficile alors de ne pas laisser échapper une petite larme...

Les allusions aux précédentes œuvres des Muppets sont d’ailleurs légions. S’il est difficile de toutes les lister, quelques unes sont néanmoins à relever. De nombreux épisodes du (Le) Muppet Show avec des invités prestigieux comme Steve Martin ou Julie Andrews sont, en effet, rappelés soit, via des clips à la télévision, soit, via des photos. Le théâtre est également reproduit avec le retour du fameux générique de la première saison, resté gravé dans l’inconscient collectif avec sa chanson et sa chorégraphie. Il est d'ailleurs troublant et amusant de voir ce décor de colonnes d'un autre angle que celui de face, vu et revu dans les années 80. Les Muppets, Ça C'est du Cinéma ! sert également beaucoup de références au film. En plus de la chanson d'ouverture et de la voiture utilisée pour le roadmovie, le contrat de la fin du premier opus est, en effet, réutilisé par le méchant qui veut s’emparer des studios. L'allusion au mariage de Kermit et Piggy vient, elle, des (Les) Muppets à Manhattan tandis que d'autres clins d'œil sont opérés, via des objets, aux (Les) Muppet Babies et aux (Les) Muppets dans l'Espace.

Une aventure des Muppets ne serait pas digne de ce nom, si la musique n’y était pas prépondérante. Inutile de faire la leçon à Jason Segel qui, en véritable pur fan, maitrise cette règle d’or. Il en connait d’ailleurs le premier (et seul) alinéa : la parodie doit aussi être chez elle dans la bande-son ! Les Muppets, Le Retour respecte donc, bien-sûr, cette exigence. Déjà, trois chansons sont reprises des précédentes œuvres des Muppets : bien évidemment le thème de la série télé mais aussi Me and Julio Down by the Schoolyard et The Rainbow Connection venue des (Les) Muppets, Ça C'est du Cinéma !. Le film s'amuse aussi à parodier certaines chansons connues comme Smells Like Teen Spirit de Nirvana chantée a capella par des barbiers ou Forget You de Cee Lo Green chantée par des... poules ! We Built This City, célèbre titre des années 80, est également utilisé pour servir d’accélérateur au récit ; un artifice carrément annoncé par les Muppets eux-mêmes. Inédit, le reste des chansons, toutes de belle qualité, est écrit ou produit par l'artiste Bret McKenzie spécialement pour le film. Life's a Happy Song, reprise en final, se moque goulument des comédies musicales façon Broadway avec son rythme super punchy et ses paroles enjouées ; son air (qui reste dans la tête des spectateurs bien au-delà du film) a été maintes fois récompensé dans des festivals. Sur un tout autre registre, Pictures in My Head, entonné par un Kermit poignant qui se rappelle les années phare des Muppets, fleure bon la nostalgie émouvante. La ballade Man or Muppet où Walter et Gray s'interrogent sur eux-mêmes apporte, elle aussi, son lot d’émotions : elle est d’ailleurs justement nommée pour l'Oscar de la Meilleure Chanson offrant à Disney l'une des deux seules nominations de l'année 2011 avec La Luna, hors films live Dreamworks distribués par Touchstone... Plus enjouées, Amy Adams et Piggy, jouent pour leur part, un joli numéro de duettistes endiablées dans Me Party alors que le méchant se livre lui, dans Let's Talk About Me, à une parodie de rap complètement déjantée en présence de danseuses sorties de nulle part, où plus exactement de... la salle de pause ! Enfin, restent à souligner The histling Caruso écrite par Andrew Bird et interprétée par lui-même sous les traits de Walter ; et, pour le générique de clôture, la fameuse chanson identitaire Mahna Mahna.

Réalisant décidément un sans-fautes, Jason Segel réserve aux (Les) Muppets, Le Retour un casting de choix.
Le premier héros du film est Walter, une Muppet qui vit dans la petite ville de Smalltown, perdue au fin fond des Etats-Unis. C'est d’abord et avant tout le plus grand fan des Muppets qui ne rêve que d'une seule chose : rencontrer ses idoles et visiter leurs studios mythiques. Mais au fond de lui-même, il se demande surtout qui il est vraiment et s'il est bien à sa place, dans la vie qui est la sienne. Walter est une Muppet inédite, créée spécialement pour le film et qui signe ici sa toute première apparition au cinéma.
Jason Segel s'est, quant à lui, attribué le rôle de Gary, grand-frère de Walter. Complètement loufoque, l'idée est tellement bien présentée à travers une introduction se déroulant à toute vitesse que le public l’accepte sans rechigner. Gary est à l’évidence un personnage faire-valoir, destiné à déclencher chez les spectateurs un regard nostalgique. Le fait que cela soit un adulte qui suive les aventures des Muppets et non un enfant provoque, en effet, un processus d’identification qui dédouane n’importe quel fan des Muppets. Ce ressenti est d’autant plus vrai que Jason Segel joue l'adulescent sans une once de cynisme mais avec, au contraire, une vraie candeur et une fraicheur exemplaire.
Amy Adams, connue des fans Disney pour son rôle de Giselle dans Il Était une Fois, incarne, elle, Mary, la petite amie de Gary qui a bien du mal à trouver sa place entre Walter et son frère. Apportant une touche féminine à ce monde de fans homme-enfant malgré eux, elle permet surtout de donner le point de vue d'une compagne qui reste un peu hermétique à la passion de son fiancé. Jason Segel a trouvé pour ce rôle l'actrice idéale : ravissante et charmante, maitrisant la danse et le chant, Amy Adams peut être, en effet, à la fois sage et candide ou partir dans le grand n'importe quoi comme lorsqu'elle pousse la note dans un grave, façon crooner !
Chris Cooper (L'Homme Qui Murmurait à l'Oreille des Chevaux) est Tex Richman, le méchant de l'histoire. S’inscrivant dans le ton des vilains des premiers films des Muppets, l'acteur cherche plus à être bête et intransigeant que véritablement méchant et effrayant. Il en résulte quelques scènes hilarantes comme celle de la chanson où il refuse de vendre les studios à Kermit.
Le dernier humain de l'histoire est Rashida Jones (connue pour son rôle de Karen Filippelli dans The Office) qui tient, le plus naturellement du monde, le rôle de Veronica, la directrice des programmes de CDE, une chaine de télévision américaine imaginaire.
Autour de ces personnages inédits, gravitent bien évidemment les Muppets historiques à commencer par Kermit, Piggy, Gonzo et Fozzie. Si toute la galerie de la grande époque est bien sûr à leurs cotés, il serait fastidieux de vouloir ici tous les nommer. Plusieurs remarques sont toutefois à formuler. Les Muppets, Le Retour fait ainsi la part belle aux Muppets de la première heure. Pépé la crevette ne dispose ainsi que d’une courte scène tandis que Rizzo le rat ne fait, lui, que de la figuration ! D’ailleurs, fait marquant, toutes les marionnettes n’ont pas le temps d'avoir une exposition en rapport avec leur statut. Le sentiment de frustration n’est pas loin même s’il faut se rendre à l'évidence : il aurait été suicidaire le temps d’un film de donner la meilleure exposition possible à tout le monde. Un mal nécessaire en quelque sorte car le bonheur de les revoir est somme toute bien là d’autant que toutes les apparitions, courtes et moins courtes, sont justifiées, pertinentes et respectueuses de l’identité des Muppets concernés. A ce titre, l'évolution de la relation entre Kermit et Piggy est à souligner. Elle est clairement plus adulte avec une teneur mélancolique sur le temps qui passe, perdu ou difficile à rattraper. Ce ton est certes nouveau mais amené da façon plutôt habile, avec en apothéose, la scène de la ballade à Paris faussement déjà vue avec son lot de scènes au romantisme cinématographique plagié ici ou là, à ce détail près : c’est la toute première fois qu’il est donné de voir une cochonne et une grenouille roucouler dans la capitale française.

Le casting est complété, comme dans chaque œuvre des Muppets, de nombreuses guest stars. Jack Black (L'Amour Extra-Large, Les Voyages de Gulliver) joue ainsi son propre rôle en tant qu'invité malgré lui du show. Jim Parsons (le fameux Sheldon dans The Big Bang Theory) endosse, quant à lui, à merveille la version humaine de Walter tandis que Jason Segel a convié Neil Patrick Harris de How I Met Your Mother pour une apparition fort sympathique. Emily Blunt reprend, elle, son rôle de standardiste à La Diable s'Habille en Prada pour l’édition parisienne de Vogue dirigée par Piggy. Mickey Rooney, le fameux Lampie de Peter et Elliott le Dragon, fait pour sa part une petite apparition dans la petite ville de Smalltown que les téléspectateurs des Gilmore Girls n’auront pas de mal à reconnaitre... Whoopi Goldberg (Sister Act) annonce qu’elle se devait d'être là alors que de jeunes acteurs de Disney Channel comme Selena Gomez (Les Sorciers de Waverly Place) et Sterling Knight (Sonny) ou d'ABC comme Rico Rodriguez (Modern Family) sont, eux, plus perplexes quant à leur venue. Enfin, Zach Galifianakis (Very Bad Trip) ainsi que des artistes pas forcément très connus en France (Alan Arkin, James Carville, Bill Cobbs, Feist, Donald Glover, Dave Grohl, Judd Hirsch, Ken Jeong, John Krasinski, Kristen Schaal et Sarah Silverman) sont également de la partie...

Les Muppets, Le Retour avait clairement pour objectif de relancer la franchise. Si le budget alloué au film est sage (45 millions de dollars) Disney US a, en revanche, mis le paquet pour en promouvoir la sortie. Elle a d’abord commencé par inviter Kermit à la première de Pirates des Caraïbes : La Fontaine de Jouvence.. Ensuite, elle a eu l'excellente idée de proposer sur le net des bandes annonces parodiques soit sur des types de films (genre : comédie romantique...) soit sur des blockbusters en passe de sortir au cinéma la plupart du temps chez les concurrents. Enfin, au cours de l'automne 2011, elle rend les Muppets omniprésents sur le petit écran américain, allant jusqu’à les faire participer à l'émission phare d’ABC, Dancing with the Stars.
Les critiques américaines, qui n'attendaient pas grand chose de l’opus - certaines raillant le côté ringard de la franchise - vont vite réviser leurs jugements. Les Muppets, Le Retour va ainsi obtenir le score exceptionnel de 96 % d'avis positifs en devenant le film le mieux noté de tous les opus sortis par la Walt Disney Company en 2011, Dreamworks live compris.
Le markéting, les excellentes critiques et le bouche-à-oreille font le reste et permettent à Kermit et ses amis de signer un joli score rapportant, rien qu'aux Etats-Unis, 89 millions de dollars soit le double du budget initial. Avec la sortie internationale, le film est le troisième long-métrage le plus rentable en 2011 des studios Disney après La Couleur des Sentiment et Pirates des Caraïbes : La Fontaine de Jouvence. C'est aussi le meilleure score pour un film des Muppets à dollars constants. Une réussite artistique doublée d'une réussite commerciale !

Disney France a, elle, choisi de ne pas sortir Les Muppets, Le Retour au cinéma doutant de la capacité commerciale du film. Cette décision (tout comme les voltefaces l’entourant : un jour, l’opus apparaissait sur le planning de sortie cinéma de Disney, un autre non ; et ainsi de suite) a provoqué l’ire des fans français dont Chronique Disney s’est fait le fer de lance au détour d’un billet d’humeur ayant entrainé une demande de droit de réponse de Jean-François Camilleri, en personne.
Car, Disney France n’a jamais su vendre la franchise des Muppets depuis qu’elle en a récupéré les droits. Elle s’est déjà auto-persuadée que la diffusion de Muppets TV sur TF 1 en 2006 était un échec. Or, au point de vue de l’audience, ce n’est pas le cas ! La case n’a pas reculé par rapport à Vidéo Gag, dont les chiffres étaient pourtant élevés. TF1 a arrêté les frais uniquement parce que l’émission était trop chère à produire pour sa grille du dimanche après-midi. La véritable déception n’est ainsi pas à rechercher dans l’audience, la qualité du programme ou l’accueil du public fait à Kermit et ses amis mais uniquement au format choisi (45 minutes, c’est trop long : les Muppets donnent, en télé, tout leur potentiel sur 20 minutes et pas plus !) et sa fenêtre de diffusion.
En 2009, de même, Disney France sort en catimini, sans presqu’aucune publicité, les deux premières saisons du Muppet Show historique. La sortie tourne vite au fiasco commercial marquant en cela l’incapacité de Disney France d’avoir, pour les séries de son catalogue, un modèle de vente de niche. Là où Déclic Images parvient à faire son beurre en sortant des collections comme Les Minipouss ou Jeanne et Serge, Disney France, elle, se plante lamentablement. Elle déprogramme ainsi la sortie des derniers coffrets (frustrant les consommateurs qui se désolent de ne pas pouvoir avoir la fin). Pire, elle finit de s’auto-convaincre que les Muppets ne se vendent pas en France ! A partir de là, elle ne fait pas l’effort de doubler le téléfilm de Noël, A Muppets Christmas : Letters to Santa ; ne ressort pas en DVD les deux premiers films dont elle a pourtant récupéré les droits ; et ne proposera pas plus en DVD la série diffusée sur Disney Channel, Disney Channel Muppet Show.
Alors - avec le recul - dans sa décision de ne pas sortir en salles Les Muppets, Le Retour, Disney France a-t-elle fait preuve d’une prudence raisonnable fruit d’un sens professionnel courageux ou s’est-elle fourvoyée dans une incompétence coupable et une incapacité flagrante à soutenir une franchise que sa maison-mère entend pourtant relancer ?
Il est impossible de répondre de manière aussi tranchée à cette question même si la deuxième réponse est celle que nombre de fans, aveuglés par leur amour inconditionnel des Muppets, veulent entendre. Déjà, une chose est sure, la qualité du film n’est pas à remettre en cause : il est clairement réussi et, à ce titre, a de quoi ravir ses spectateurs et produire ainsi un bouche-à-oreille positif. En revanche, il est exigeant dans son approche et entraine de fait une autre question cruciale : quels spectateurs vise-t-il ? Et là, à l’évidence, une autre chose semble sure : le public adolescent ne viendra pas spontanément. Les Muppets sont des inconnus au bataillon pour les ados contemporains. Alors qui d’autres : le public nostalgique du show télé originel diffusé dans les années 80 et la fameuse (et nouvellement définie en sociologie) génération Y (dont les fans sont majoritairement issus). Ces jeunes adultes, tout juste trentenaires ou ces jeunes matures tout juste quarantenaires dont l’adulescence (autre nouvelle définition sociologique) est le point commun. Et où les trouver ? Essentiellement dans les centres urbains et les grandes agglomérations. Donc, pour Chronique Disney, Les Muppets, Le Retour aurait pu sortir au cinéma en France mais dans un réseau de salles restreints, préalablement identifiées et limitées à quelques grandes villes quadrillant l’hexagone : Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux, Nantes et Lille... Les Muppets, Le Retour méritait une sortie sur-mesure en quelque sorte. Mais, voilà, Disney France, toute tournée qu’elle est vers le public de masse, ne sait plus (ou n’a plus l’ambition) organiser des sorties catégorielles. Dès lors, si elle est à blâmer c’est sur ce point (et sur le fait de ne pas avoir commandé un doublage français, se contentant de la version en québécois dit « international »), et non sur le fait de ne pas avoir cru dans la capacité commerciale du film. Car, même si cela fait mal aux oreilles des fans, Les Muppets, Le Retour, n’a pas les ressources suffisantes pour rameuter massivement des foules de spectateurs, ni rentabiliser, dans le cadre d’une sortie nationale normale, les lourds frais de markéting qu’entraine un telle distribution même si, (mais là, l’analyse se fait après coup), le film aurait assurément fait mieux que le four de La Clé des Champs à Noël 2011 et ses 58 000 entrées sur toute sa carrière...

Les Muppets, Le Retour est une véritable pépite. Une ode à la joie, à la bonne humeur, à la nostalgie, à la loufoquerie le tout marqué par une modestie respectueuse. Les Muppets ont finalement trouvé une vision lucide de leur statut de personnages un peu dépassés, portant un regard critique sur le cinéma hollywoodien des années 2010 empli de 3-D et d'effets spéciaux. Ici, les marionnettes parlent au plus profond du cœur de leurs spectateurs pour leur montrer qu’il est possible d’être divertis autrement. Que les émissions d'antan ne sont pas à remiser au placard sur le seul critère de l’âge. Les Muppets, Le Retour est parfait car il allie de façon magique l'héritage des Muppets au cynisme d'aujourd'hui, avec cette nostalgie d'une époque où le divertissement était fait de bric et de broc sans oublier pour autant l'originalité et la fraicheur.

Pour tout cela que Les Muppets, Le Retour est un petit bijou à chérir : « Et maintenant que la fête commence sur le plus illustrissime, fantastiquissime, superchantissime, et muppetissime show de tous les shows : Le Muppet Show ! »

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