Titre original : Float Production : Pixar Animation Studios Date de sortie USA : Le 26 septembre 2019 (El Capitan Theatre) Le 12 novembre 2019 (Disney+) Série : Genre : Animation 3D |
Réalisation : Bobby Rubio Musique : Barney Jones Durée : 7 minutes |
Le synopsis
Un père découvre que son fils est différent des autres enfants. Pour le protéger des jugements, il choisit ainsi de le recouvrir d'une capuche et de le garder à l'abri des regards jusqu'au jour où ses capacités sont dévoilées en public. |
La critique
L'Envol est le quatrième court-métrage Pixar de son nouveau programme intitulé SparkShorts.
En 2017, John Lasseter, alors toujours responsable de Pixar, impressionné par le court-métrage Piper qui vient de gagner l'Oscar du Meilleur Court-Métrage, choisit de renforcer la production de courts-métrages. Il décide ainsi que les studios de Luxo Jr. mettent en place un tout nouveau programme de réalisation de cartoons, intitulé SparkShorts. Le but est de permettre à chaque membre du studio, qu'il soit réalisateur, animateur ou technicien, d'avoir la possibilité de réaliser son propre dessin animé personnel. Pixar offre dans cette optique à chaque artiste six mois et quelques ressources techniques et financières pour mettre en œuvre son projet. La nouvelle série SparkShorts offre donc un ton spécifique et une vision artistique différente de ce qu'a produit l'ADN de Pixar jusque-là. Si les studios à la lampe de bureau s'étaient, il est vrai, déjà fait remarquer en laissant des artistes venus de diverses cultures proposer des courts-métrages sortant des sentiers battus à l'exemple de Sanjay et sa Super Équipe ou Bao, ici, les cartoons vont encore plus loin, se permettant aussi de viser, de temps en temps, un public différent de celui de Pixar : oubliée la cible familiale, les SparkShorts peuvent aussi proposer des cartoons qui ne parlent qu'aux adultes.
Les trois premiers SparkShorts, Purl, Écraser et Ramasser et Chatbull, sont d'abord proposés au cinéma durant une semaine, à partir du 18 janvier 2019, mais uniquement dans la salle du El Capitan Theatre à Los Angeles ; ce cinéma mythique d'Hollywood appartenant à The Walt Disney Company. Tous sont ensuite mis en ligne sur YouTube au rythme d'un par semaine, en commençant par Purl le 4 février 2019. Trois autres cartoons sont annoncés dans la foulée, L'Envol, Loop et Wind, mais, eux, sont prévus de sortir directement et uniquement sur la plateforme Disney+ qui ouvre sur le marché américain le 12 novembre 2019. Au final, ils sont diffusés également dans la salle du El Capitan Theatre à partir du 26 septembre 2019 tandis qu'au lancement de Disney+, quatre sont finalement proposés : Purl, Écraser et Ramasser, Chatbull ainsi que L'Envol.
L'Envol est donc imaginé et réalisé par Bobby Rubio. L'artiste débute sa carrière au sein des Walt Disney Animation Studios en étant intervalliste notamment sur quasiment tous les films produits par le studio entre Pocahontas, une Légende Indienne (1995) et La Ferme se Rebelle (2004). Il quitte ensuite Disney pour aller travailler chez Nickelodeon Animation Studios sur la série Avatar, le Dernier Maître de l'Air (2005) en tant que storyboarder. Il arrive finalement chez Pixar à la fin des années 2000 où il œuvre sur les storyboards de Tokyo Martin (2008), Là-Haut (2009), Rebelle (2012), Monstres Academy (2013), Vice-Versa (2015) et Les Indestructibles 2 (2018).
Le récit de L'Envol est une histoire incroyablement personnelle du réalisateur. Il s'agit presque d'un cri du cœur d'un père vis-à-vis de son fils, comme si l'artiste avait besoin d'exorciser ses pensées et ses émotions. À travers ce court-métrage bouleversant, il revient en effet sur le regard qu'il a eu envers son fils autiste. Il aborde son incroyable amour à ses débuts, puis ses sentiments vacillant à cause du regard des autres et du poids de la société. Finalement, il comprend qu'il doit aimer son fils pour ce qu'il est, peu importe ce que les autres pensent de lui. Il retrouve alors le chemin du bonheur et de l'amour inconditionnel. Alors bien-sûr, dans le cartoon, il ne parle pas d'autisme mais imagine un pouvoir qui permet à son garçon de voler, apportant ainsi encore plus de poésie au message que véhicule le court-métrage. De même, sur l'insistance de ses collègues, il décide de faire des personnages des Américains originaires des Philippines comme lui, là où il était parti sur des caucasiens à l'origine. En procédant de la sorte, il ancre encore plus le récit du cartoon dans sa propre histoire, donnant à l'ensemble une incroyable sincérité.
L'Envol n'est, en revanche, pas le cartoon de la collection des SparkShorts le plus innovant techniquement. Il n'y a dedans aucune nouveauté visuelle. Il convient toutefois de saluer le travail des couleurs et des expressions des personnages. L'éclairage accentue, en effet, beaucoup l'humeur du père : éclatant au début pour montrer son allégresse, particulièrement sombre quand il est chez lui à l'image de son humeur dépressive et dépassée, pâle presque flou quand il arrive au parc comme s'il ne voulait pas que les autres parents les voient lui et son fils, pour finir par une lumière mélancolique quand il se rend compte qu'il a été abominable avec lui. Les expressions du visage du père reflètent à merveille cette évolution : rayonnant et bien coiffé au commencement, sombre et plein de rage aux cheveux mal coupés et à la barbe mal rasée à la fin. La phrase qu'il dit à son fils quand le regard des parents se fait le plus pesant est notamment terrible. Le spectateur, comme lui-même d'ailleurs, se rend compte qu'il a fini par haïr son rejeton à cause du jugement de la société sur lui. En réapprenant à aimer son fils pour ce qu'il est, plus que pour ce qu'il aurait aimé qu'il soit, il découvre enfin la sérénité et le chemin de la joie.
L'Envol est un cartoon bouleversant qui est sûr de faire chavirer le cœur de tous ses spectateurs tellement les émotions décrites y sont pures et sincères.