Bonkers

He's Bonkers

Bien décidés à surfer sur le succès de Qui Veut la Peau de Roger Rabbit, les studios Disney créent dans la foulée un personnage de télévision (Bonkers) dont la vie est proche de celle du fameux lapin, à quelques nuances près. Il partage ainsi avec lui un goût pour la folie au moins égal, travaille dans un studio de Toon (il est d'abord acteur puis policier) et évolue aussi en dehors des plateaux de cinéma.
Sa carrière comme son processus de création n'ont pas été - c'est un euphémisme ! - un long fleuve tranquille... Sa toute première apparition sur le petit écran se fait ainsi dans la série, Raw Toonage. Elle a la double particularité d'être totalement inconnue du public français, n'ayant jamais été diffusée dans l'hexagone et d'être oubliée des téléspectateurs américains qui l'ont rejetée en bloc. Et pour cause ! Sa gestation comme sa programmation sont ubuesques. Dans l'espoir d'attirer une tranche d'âge différente de celle habituellement conquise par leurs séries animées, les studios Disney décident, en fait, de proposer sur CBS dans la case horaire du samedi matin, Raw Toonage. Les bandes annonces promotionnelles positionnent directement le programme comme détonnant, empruntant un ton radicalement différent de celui caractérisant Disney. La série débarque ainsi le 19 septembre 1992 et se poursuit jusqu'au 5 décembre 1992. Le public, curieux dans un premier temps, déserte la chaine au fil des semaines, dans des proportions impressionnantes. L'échec est retentissant. Seuls douze épisodes sont produits au total ; le treizième prévu étant purement et simplement annulé.

La série prend, en réalité, des airs d'ovni dans le catalogue Disney. Elle s'articule en trois segments, l'ensemble étant présenté par un personnage emblématique ou non du studio (Dingo, Picsou, Bonkers, Donald Dingue...). Les trois séquences sont autant de miniséries. La première, Totally Tasteless Videos, est une parodie de séries télé ; la seconde, Marsupilami, est la première adaptation télé du fameux personnage de Franquin ; la troisième et dernière He's Bonkers, met, quant à elle, Bonkers, le toon marchant dans les traces de Qui Veut la Peau de Roger Rabbit, à l'affiche de différents rôles.

L'arrêt brutal de Raw Toonage ne décourage pas complètement Disney. Le studio estime, en effet, que deux personnages offrent un joli potentiel : Marsupilami et Bonkers. Chacun d'eux accède donc à sa propre série, recyclant pour l'occasion les épisodes diffusés originairement dans Raw Toonage. Marsupilami ne transformera pas l'essai : ses aventures s'arrêtent au bout de seulement 13 épisodes (diffusés du 18 septembre 1993 au 11 décembre 1993 toujours sur CBS) ; Bonkers affiche, lui, un bien meilleur bilan avec un total de 65 épisodes.

La série Bonkers était en réalité déjà en préparation quand il fut décidé de créer la minisérie He's Bonkers en vue de l'inclure dans Raw Toonage. L'idée est alors de proposer dans cette dernière les cartoons dans lesquels le toon Bonkers est censé avoir tourné "virtuellement", dans son studio d'animation, avant de se faire virer et d'obtenir un job dans la police où il devient le partenaire d'un inspecteur humain. C'est d'ailleurs cette "deuxième vie" qui se voit traitée dans la série autonome Bonkers.

Sa production est chaotique. Elle possède ainsi deux parties distinctes sans grand rapport entre elles : même l'apparence du personnage principal y change ! Chronologiquement, les 42 premiers épisodes proposent, en effet, les aventures de Bonkers avec son partenaire humain Lucky Piquel tandis que les 19 restants voient Bonkers faire équipe avec Miranda Wright. Sauf que... Les 19 épisodes ont été produits avant les 42 et, qui plus est, par une équipe différente ! En outre, l'aspect du personnage Bonkers est plus proche de Raw Toonage dans la partie de Miranda alors que son apparence change subtilement dans la partie de Lucky.

Ces atermoiements plombent finalement l'aura de la série qui, si elle se maintient en diffusion du 4 septembre 1993 au 23 février 1994, n'en reste pas moins vite délaissée par le public.
Pour en rajouter à la confusion, Bonkers est proposée pour la première fois au public par le biais d'un court-métrage, prévu pour le cinéma, Ça C'est le Bouquet. Il est inclus par la suite à un épisode de la série Bonkers et jumelé avec d'autres de Raw Toonage. Il présente, en outre, la particularité d'être le premier cartoon à ne pas être produit par Walt Disney Animation Studios mais par sa filiale télévisée Walt Disney Television Animation et d'être animé en France, aux feus studios de Disney à Montreuil ; tout cela ne l'empêchant pas d'avoir les honneurs du grand écran, en première partie du film Touchstone, Ninja Kids.

Une fois cette longue remise en contexte effectué, il a été décidé de changer d'aborder l'analyse de la série par rapport aux habitudes de Chronique Disney. Le site a, il est vrai, pour principe de suivre soit l'édition vidéo d'une série, soit son ordre de diffusion. Ici, la première solution n'est pas possible puisque Bonkers n'a pas droit à une sortie vidéo ; quant à la seconde elle aurait rajouté à la complexité chronologique. Finalement, Chronique Disney a opté pour une présentation logique. La première partie se centrera sur les quatre épisodes compilations reprenant la minisérie He's Bonkers ; la deuxième sur les épisodes avec Lucky Piquel et la troisième sur les épisodes avec Miranda Wright.

Les épisodes de He's Bonkers représentent en fait les rôles qu'a tenu Bonkers dans les Wackytoons Studios avant de se faire virer d'Hollywood et de se retrouver embauché dans la police. Il y interprète différents rôles du plombier au cowboy en passant par détective. Dans ces épisodes, son apparence est celle d'un lynx à la fourrure orange avec des points marrons ; il possède également des yeux bleus, des oreilles en forme de club de golf et une petite queue avec un bout blanc. Complètement déjanté, les cartoons ressemblent, en moins Tex Avery, à ceux de Roger Rabbit : Bobo Bidon, Lapin Looping et Panique au Pique-nique. Comme dans les aventures du lapin, des personnages récurrents y évoluent. Parmi eux, se trouve d'abord, Jitters, le chien, une sorte de Droopy malchanceux qui dit dans chaque épisode qu'il déteste sa vie. Ensuite, Grumbles Grizzly, l'ours, l'employeur de Bonkers qui a la fâcheuse habitude de toujours crier sur lui. Enfin, Fawn Deer est la touche féminine des aventures de Bonkers qui tombe à chaque fois sous son charme, cherche à l'impressionner et se ramasse toujours...

Les 11 épisodes de Raw Toonage et le court-métrage cinéma défilent sans transition. Pour former un épisode de 22 minutes, les quatre compilations des trois aventures y sont d'ailleurs complétées par un mini épisode de 3 minutes. Les plus avertis remarqueront alors que Bonkers y arbore sa nouvelle apparence ; ses points passant du marron ou noir tout comme ses yeux qui abandonnent le bleu tandis que ses oreilles sont désormais en pointe et sa queue rayée à la Tigrou.

Les quatre épisodes compilations de Bonkers, tirés des épisodes de Raw Toonage, sont certes sympathiques mais manquent vraiment de consistance. A l'évidence, ils ne pourraient « vivre » isolément. Dès lors, il faut les voir comme une belle introduction au personnage que le spectateur a hâte de voir évoluer dans la vraie vie...