Halloween
20 Ans Après, Il Revient
Titre original : Halloween H20 : 20 Years Later Production : Dimension Films Nightfall Productions Trancas International Date de sortie USA : Le 5 août 1998 Genre : Horreur |
Réalisation : Steve Miner Musique : John Ottman Marco Beltrami Durée : 86 minutes |
Disponibilité(s) en France : |
Le synopsis
20 ans après les événements d’Haddonfield qui ont vu la mort de plusieurs innocents assassinés par le tueur Michael Myers, sa sœur Laurie Strode, devenue mère et enseignante, vit sous une autre identité et tente d’échapper à son passé. Après une violente dispute avec son fils, elle convainc ce dernier de fêter Halloween dans l’enceinte du lycée. Mais Michael a retrouvé leur trace et entend bien faire de nouvelles victimes. |
La critique
Halloween 6 : La Malédiction de Michael Myers n’ayant pas fait d’éclats au box-office, la franchise mettant en scène le tueur au masque blanc et inexpressif, désormais propriété de Dimension Films, était clairement au plus bas. Sorti et mis en chantier à l’occasion du vingtième anniversaire du premier film, Halloween : 20 Ans Après, Il Revient signe alors une petite révolution dans la saga, puisqu’il ignore plusieurs volets et marque le retour d’un personnage iconique présumé mort. Une belle initiative pour un épisode assez réussi, aux influences nombreuses et intelligentes, sans pour autant se démarquer des slashers de l’époque.
L’idée même d’un septième volet germe lors du traitement du scénario d’Halloween 6 : La Malédiction de Michael Myers par Daniel Farrands. L’intrigue se situait immédiatement après les événements dudit film et impliquait Tommy Doyle, découvrant que toute la ville d’Haddonfield était impliquée dans un complot visant à contrôler Michael Myers. Pour ce faire, Farrands se base sur plusieurs œuvres déjà existantes dont les films The Wicker Man, The Hitcher, Rosemary’s Baby, la nouvelle La Loterie de Shirley Jackson et le script rejeté de Dennis Etchison, auteur de romans fantastiques américain, pour Halloween 4 : Le Retour de Michael Myers. D’autres propositions suivront, dont un Halloween 7 : Two Faces of Evil censé sortir directement en vidéo et mettant en scène le tueur tristement célèbre en train de harceler une école de jeunes filles. Le synopsis prévoyait aussi la présence d’un copycat, à l’image du (Le) Silence des Agneaux de Thomas Harris, allant jusqu’à faire de nouveau intervenir Laurie Strode, supposée être morte entre les deuxième et quatrième épisodes.
Toutefois, les coulisses du sixième volet, sa gestation catastrophique et sa réception mitigée découragent Farrands de poursuivre l’aventure, si bien qu'il préfère se consacrer à d’autres projets, expliquant ne plus supporter que son travail soit gâché et modifié sans son consentement après y avoir consacré autant de temps. Cela n’arrête en rien Dimension Films, qui compte bien capitaliser sur sa nouvelle acquisition et offrir une suite, quelle que soit l’intrigue. Et ce sera un film sorti de nulle part qui accélérera le processus de création. Réalisé par l'un des grands maîtres de l’horreur, Wes Craven (La Dernière Maison sur la Gauche, La Colline A Des Yeux, Les Griffes de la Nuit), et scénarisé par Kevin Williamson, Scream constitue en effet le succès surprise de la firme en 1996 et fait office de révolution dans le cinéma horrifique. Bouleversant les codes du slasher, un genre cinématographique où les protagonistes sont éliminés les uns après les autres de manières plus ou moins sanglantes par un tueur dont l’identité et les motivations sont généralement révélées en fin de récit, Scream souffle un vent nouveau et se voit à l’origine d’une multitudes de films qui suivront sensiblement, et avec plus ou moins de succès, le mouvement (Souviens-Toi… L’Été Dernier, Urban Legend, Mortelle Saint-Valentin, Cursed).
Devant ce regain d’intérêt pour le slasher et surtout séduits par ses travaux sur Scream, les dirigeants de Dimension Films proposent aussitôt à Kevin Williamson d’écrire le scénario du nouveau Halloween. Né à New Bern, Caroline du Nord, aux États-Unis, le 14 mars 1965, Kevin Williamson se destine d’abord à une carrière d’acteur tout en suivant des cours sur l’écriture de scénarios à l’Université de Californie à Los Angeles. Il signe alors son premier script, Teaching Mrs. Tingle, qu’il portera à l’écran en 1998. Mais c’est en 1995, lorsque Miramax Films lui achète le scénario de Scream, que vient la consécration. Le nom de Kevin Williamson se voit en effet associé à différents succès auprès du public adolescent, notamment dans le domaine de l’horreur : Souviens-toi… L’Été Dernier (1997), Scream 2 (1997), The Faculty (1998), Halloween : 20 Ans Après, Il Revient (1998). En parallèle, il crée plusieurs séries des années 1990 au 2010, dont les célèbres Dawson (1998-2006), The Vampire Diaries (2009-2017) ou The Following (2013-2015), et d’autres moins remarquées telles L’Île de l’Étrange (2002), Hidden Palms (2007) ou The Secret Circle (2011-2012) sur lesquelles il est également scénariste.
En grand fan d’Halloween, la Nuit des Masques, Williamson accepte la mission sans hésitation, l’auteur s’étant beaucoup inspiré du film de John Carpenter pour la majorité de ses scénarios. Le vingtième anniversaire du premier volet approchant, la sortie de ce nouveau chapitre est prévue pour 1998 et le titre devient Halloween H20, 20 Years Later. L’occasion rêvée donc pour faire revenir Laurie Strode, sœur de Michael Myers et personnage clé des deux premiers films, pourtant déclarée morte au début d’Halloween 4 : Le Retour de Michael Myers. Le projet prend à l’origine pour nom Halloween 7 : The Revenge of Laurie Strode avec Williamson d’abord à l’écriture avant qu'il ne soit promu à la production et que l'opus soit envisagé comme une suite directe aux précédents, conservant la timeline d’origine. Pour expliquer ce retour inattendu, le scénariste envisage alors une intrigue où Laurie Strode aurait feint sa propre mort et pris une autre identité pour échapper à son frère, abandonnant au passage sa fille Jamie Lloyd, héroïne des quatrième, cinquième et sixième épisodes.
Toutefois, devant les difficultés rencontrées pour raccorder l’histoire de Jamie Lloyd avec ce septième épisode, les scénaristes Robert Zappia et Matt Greenberg, qui ont repris le poste de Williamson, décident au final de ne pas en tenir compte. Le film n’est donc pas une suite d’Halloween 6 : La Malédiction de Michael Myers, mais un reboot de la franchise situé après Halloween II (1981), qui s’achevait par la mort supposée de Michael dans l’explosion de l’hôpital de Smith’s Grove, où Laurie Strode avait été placée après son agression et le meurtre de ses amis par le psychopathe. Ce septième épisode ne fait pas non plus intervenir Samuel Loomis, psychiatre de Michael et présent au casting des épisodes 4 à 6, déclaré mort de vieillesse au début du film. Par respect pour son ancien interprète, Donald Pleasance, décédé après avoir tourné le sixième volet, le personnage n’est pas reconduit, ni recasté. Derrière la caméra, John Carpenter, l’homme par qui tout a commencé, est initialement pressenti. Mais ce dernier décline l’offre en raison d’un salaire qu’il jugeait trop bas et ce, bien qu’il ait proposé aux frères Weinstein, alors dirigeants de Dimension Films, de conclure un contrat pour la réalisation de trois films de la compagnie afin de compenser cette faible rémunération.
La réalisation échoue donc à Steve Miner, connu à l’époque dans le milieu du slasher pour avoir collaboré avec le metteur en scène Sean S. Cunningham, notamment en produisant La Dernière Maison sur la Gauche de Wes Craven et Vendredi 13, dont il réalisera la suite, Le Tueur du Vendredi (1981), et le troisième volet Meurtres en Trois Dimensions (1982). Il se fait ensuite une petite réputation dans le cinéma d’horreur puisqu’il sera réalisateur de Warlock (1989), Halloween : 20 Ans Après, Il Revient (1998) et Lake Placid (1999). Steve Miner se tournera également vers la comédie, genre qu’il avait abordé dans la série B d'horreur devenue culte House (1985), et le dramatique. Parmi ses films, Soul Man (1986), À Coeur Vaillant Rien d’Impossible (1991), Forever Young (1992), My Father, ce Héros (1994), remake américain du film français Mon Père, ce Héros (1991) et Le Souffre-Douleur (1996) sont à citer. Steve Miner est depuis devenu réalisateur d’épisodes de séries télévisées dont Smallville, Pysch, Felicity, Dawson pour laquelle il mettra en scène le pilote et quatre autres épisodes de la première saison, mais aussi Wasteland (créations de Kevin Williamson), Diagnostic : Meurtre, ou encore Switched et Chasing Life pour la chaîne Freeform.
Côté casting, Halloween : 20 Ans Après, Il Revient marque évidemment le grand retour de Jamie Lee Curtis au sein de la franchise, dans le rôle iconique de Laurie Strode. Fille des acteurs Tony Curtis et Janet Leigh, Jamie Lee Curtis est l’une des célèbres “scream queens” des années 1980 grâce à sa participation aux films d’horreur Fog (1980), Le Bal de l’Horreur (1980) et Le Monstre du Train (1980), avant de changer radicalement de registre. Suivront divers films dramatiques (Perfect en 1985, Nicky et Gino en 1988), mais surtout des comédies, notamment Un Fauteuil pour Deux (1983), Un Poisson Nommé Wanda (1988), True Lies (1994), Freaky Friday : Dans la Peau de ma Mère (2003), Encore Toi ! (You Again) (2010), tout en jouant dans des séries en tant qu'invitée (NCIS : Enquêtes Spéciales, New Girl) ou régulière (Scream Queens).
Le fils de Laurie Strode, John Tate, est pour sa part incarné par Josh Hartnett. Le jeune comédien a joué dans plusieurs films célèbres au début de sa carrière (The Faculty, réalisé par Robert Rodriguez et écrit par Kevin Williamson, les blockbusters La Chute du Faucon Noir, Pearl Harbor, Virgin Suicides et Sin City) avant de connaître d’autres succès plus modestes au cinéma (Slevin, Le Dahlia Noir, Un Homme en Colère), sans oublier des rôles dans des séries (Penny Dreadful) : il obtient ici son premier rôle sur grand écran.
À leurs côtés, Michelle Williams interprète Molly Cartwell, petite amie de John Tate. Ayant fait ses débuts dans des films familiaux (Lassie, Secrets), c’est son rôle de Jennifer Lindley dans la série Dawson qui la révèle au grand public. La suite de sa carrière sera remplie de films encensés par la critique : The United States of Leland (2003), Le Secret de Brokeback Mountain (2005), Shutter Island (2010), My Week With Marilyn (2011). Récemment, elle figure au casting de plusieurs succès publics : Le Monde Fantastique d’Oz (2013), The Greatest Showman (2017), Venom (2018) et Venom : Let There Be Carnage (2021).
Adam Arkin, connu pour ses rôles à la télévision (le feuilleton Chicago Hope, les séries Touche Pas à Mes Filles !, Life et Sons of Anarchy), campe quant à lui Will Brennan, compagnon de Laurie Strode qui ignore tout de la véritable identité de l’héroïne.
Enfin, parmi les autres acteurs qui composent la distribution, Jodi Lyn O’Keefe (Elle Est Trop Bien, The Crow 3 : Salvation, les séries Nash Bridges, The Vampire Diaries et Hit the Floor) et Adam Hann-Byrd (Jumanji, Diabolique, Ice Storm) sont respectivement Sarah Wainthrope et Charlie Deveraux, camarades de classe de John et Molly, le chanteur et acteur LL Cool J (Peur Bleue, Profession : Profiler, NCIS : Los Angeles) est l’agent de sécurité Ronald “Ronny” James, tandis que la grande Janet Leigh, mère de Jamie Lee Curtis qui avait déjà joué avec sa fille dans Fog, inoubliable Marion Crane de Psychose et Rosie DeLeon de Bye Bye Birdie, est Norma Watson, doyenne du lycée où travaille Laurie/Keri.
Tout semble donc bien s’aligner pour ce (déjà) septième chapitre dont l’ambition est sans conteste de réconcilier les fans avec la saga qui commençait à ne plus avoir aucun sens, ayant beaucoup perdu à la fois en cohérence et en intérêt. Halloween : 20 Ans Après, Il Revient fait ainsi l’impasse sur toute la secte Thorn introduite dans le sixième film, la trilogie Jamie Lloyd et l’enfant de cette dernière, condamnés aux oubliettes et dont les intrigues amorcées ne connaîtront ni suite ni conclusion. Le duel entre Laurie Strode et le tueur au masque blanc laissé en suspens à la fin de Halloween II reprend ainsi de plus belle avec un but précis : faire table rase du passé. Un choix qui ne peut être que bénéfique pour la saga, qui avait grandement souffert des errements des deux précédents films, Williamson et son équipe désirant revenir aux bases et prendre un nouveau départ. Un mal pour un bien tant le film de Steve Miner marque une nette amélioration en termes de qualité, profitant à plein de la présence de Kevin Williamson en coulisses et de celle de Jamie Lee Curtis devant la caméra, tous deux donnant une touche de modernité et un certain cachet à l'ensemble.
Le film s’ouvre donc sur le décès du docteur Loomis, mort avant l’intrigue et qui avait donc survécu à l’explosion de l’hôpital Smith’s Grove à la fin de Halloween II. Ayant suivi son infirmière jusqu’à chez lui, Michael Myers y récupère des informations au sujet de sa sœur, qui se cache depuis leur dernière confrontation il y a 20 ans. Suite aux événements ayant conduit à la mort de plusieurs innocents, Laurie Strode a en effet disparu, simulé sa propre mort et déménagé en Californie sous le faux nom de Keri Tate, dans l’espoir de ne pas être retrouvée et prendre un nouveau départ. Devenue proviseure d’un lycée huppé, mère d’un adolescent prénommé John, mais encore marquée par cette nuit d’Halloween 1978, Laurie craint le retour de son psychopathe de frère. Malgré les réticences de sa mère, obsédée par les règles et la sécurité, John décide d’aller contre ses avertissements et d’organiser une fête pour Halloween dans l’enceinte du lycée. C’est à ce moment que Michael fait le choix de réapparaître. Une nouvelle nuit d’horreur et de meurtres se prépare et Laurie/Keri va devoir protéger sa famille et dès lors affronter sa plus grande peur…
Halloween : 20 Ans Après, Il Revient reprend ce qui faisait le succès des deux premiers films, mais sous d'autres angles : les conséquences d'un traumatisme, la reconstruction après un tel évènement, le passé qui ressurgit. Il n'est plus question de fuir, mais de se battre pour sa survie et ses proches devant un danger. L'heure de la revanche a donc sonné et c'est une Laurie tout d'abord tourmentée que le spectateur retrouve. Au premier abord, le personnage n'a pas tellement changé par rapport à sa dernière apparition. Un développement négatif mais compréhensible aux vues de la gravité de ce dont elle a été témoin et surtout victime. La première partie du film se focalise ainsi énormément sur les répercussions de l'apparition de Michael dans la vie de Laurie et la découverte de leurs liens familiaux sur le quotidien de cette dernière. Si elle s'en est sortie professionnellement, sa vie familiale et amoureuse en a pris un sacré coup. Surprotectrice, ultra-possessive avec son fils, qui ne comprend pas sa peur constante, divorcée et portée sur l'alcool, Laurie n'aura pas véritablement réussi à se remettre de ses émotions et trouve du réconfort seulement dans son travail ou les bras de son compagnon, lequel n’est pas au courant de son passé.
Une évolution peu enthousiasmante pour le personnage, dont les blessures ne sont toujours pas guéries et continuent de lui gâcher la vie et celle de ses proches. L’intérêt du film réside en grande partie sur la psychologie de son personnage, qui continue de subir son passé difficile. L’ancienne survivante croit voir des apparitions de son frère à chaque coin, si bien que le doute plane sur son état mental, le réalisateur s’amusant à insérer quelques plans de Michael afin de semer le trouble. À certains moments, il est en effet difficile de savoir si le tueur est bien présent ou s’il s’agit simplement de l’imagination torturée de Laurie, le métrage jouant avec les hallucinations du personnage. Mais si le doute est permis dans un premier temps, la seconde partie du récit met les choses au clair pour offrir un affrontement digne de ce nom. L’attention n’est plus seulement portée sur la quête meurtrière de Myers, mais sur deux destins condamnés à se croiser jusqu’à une confrontation sanglante et inévitable. Michael Myers, qui avait perdu de son charisme et de son potentiel horrifique depuis quelques films, retrouve ici des couleurs et n’aura jamais été aussi inquiétant. À mille lieues du tueur accumulant les meurtres gratuits, achevant tout ce qui lui passe sous la main comme dans la plupart des suites, Michael se centre uniquement sur son objectif et ne cherche qu’à achever son œuvre. Le scénario fait donc le bon choix de ne pas se limiter à un enchaînement de mises à mort gratuites. Beaucoup mieux construit, il revient aux bases mêmes de la franchise et évite les errements et théories fumeuses sur l’invulnérabilité de Michael véhiculées par Halloween 6 : La Malédiction de Michael Myers.
Là où Halloween : 20 Ans Après, Il Revient gagne des points, c’est aussi par son écriture et la patte de Kevin Williamson au scénario et à la production, même s’il n’est pas crédité au générique. Le film multiplie en effet les clins d’œil aux classiques du cinéma d’horreur, notamment le monstre de Frankenstein pendant le cours donné par Laurie, où Michael est presque comparé à ce dernier, sans oublier Psychose à travers le personnage de Norma, ici interprétée par son actrice principale et dont le prénom évoque celui de Norman Bates ou encore les quelques notes entendues lorsqu'elle rejoint sa voiture, rappelant le score de Bernard Hermann. Le premier volet signé John Carpenter reçoit également quelques hommages, certaines scènes étant reprises et placées dans le contexte du film, dont l’apparition de Michael à travers la fenêtre de la salle de classe, mais cette fois-ci derrière des barreaux, ou encore la première blessure infligée à Laurie Strode dans ce volet : une coupure au bras gauche, tout comme dans le film original. Enfin, difficile de ne pas voir un peu de cynisme ou d’auto-parodie de la part de Williamson lors de cette scène reprenant celle de Scream où les héros regardent Halloween, la Nuit des Masques - qui était déjà une référence dans le film de Wes Craven. Ici, les adolescents sont devant Scream 2. En reprenant la recette classique du slasher avec une touche de modernité héritée des films d’horreur récents, Halloween : 20 Ans Après, Il Revient fait donc oublier les errances de la franchise.
Du point de vue de la distribution, le jeu des acteurs est également assez convaincant. Le retour de Jamie Lee Curtis fait du bien à la saga et sa prestation est parfois meilleure que dans les deux premiers films, l'actrice ayant gagné en expérience et en maturité. La jeune génération apporte son lot de bonnes surprises, notamment Josh Hartnett, dont le personnage essaie de se défaire de l’omniprésence de sa mère et tentera d’échapper à une situation qui le dépasse, et Michelle Williams, aux débuts très prometteurs. La réalisation de Steve Miner, qui, par le passé, a déjà officié sur différentes franchises mythiques elles aussi portées à la fois sur l’horreur et l’humour noir, fait gagner quelques points au métrage. S’il ne révolutionne pas le genre, le metteur en scène livre en effet un film au visuel soigné et agréable à suivre, au suspense maîtrisé et au rythme effréné. L’humour est au rendez-vous, ce qui n’était pratiquement jamais arrivé dans la franchise auparavant, les précédents opus misant beaucoup sur l’aspect cauchemardesque de son tueur vedette. Tout bascule dans la seconde partie, où l’horreur prend place et les mises à mort sont nombreuses. Les codes du slasher y sont respectés à la lettre, bien que les surprises soient relativement absentes et la violence plutôt sage comparée aux précédents volets. C’est à ce moment-là que Michael Myers perd des forces, le psychopathe recevant beaucoup de coups face à une Laurie Strode déchaînée, prête à en découdre avec son ancien bourreau. Le tout jusqu’à un final choc, osé, radical et dantesque, qui aurait pu conclure en beauté une saga en mal de renouvellement, Laurie Strode ayant vaincu ses démons et enfin en paix avec elle-même, avant que Dimension Films ne gâche tout en produisant Halloween : Resurrection.
Malheureusement, le soufflé retombe dans la seconde partie, une fois que Michael part en chasse contre ses principales victimes. Très vite, les personnages que le spectateur a progressivement appréciés finissent par devenir agaçants tant les décisions qu’ils prennent sont souvent ridicules ou insensées. Le scénario se limite à suivre un cahier des charges très précis pour satisfaire les producteurs et la surprise n’est donc plus véritablement au rendez-vous. De même, il est étonnant de voir à quel point la plupart des scènes de meurtre manquent cruellement de violence, surtout dans un film Halloween. Tout est propre, parfois expédié assez vite, comme si l’ensemble avait été contraint pour ne pas risquer une restriction d’âge par la censure et se priver d'une plus grande visibilité. Là où Scream, dont Halloween : 20 Ans Après, Il Revient s’est clairement inspiré, n’avait pas peur de montrer des meurtres sanglants et des scènes choquantes, le film de Steve Miner est bien trop sage, au risque de faire perdre l’intérêt des fans d’horreur. Il faut attendre le dernier quart d’heure pour que le réalisateur se lâche vraiment. Hélas, le final, bien que sympathique et plutôt ambitieux, est frustrant et beaucoup trop rapide, comme s’il manquait une conclusion. Impossible donc de ne pas penser que les producteurs aient raccourci le film pour s’assurer plus de salles de cinéma.
L’autre point faible est la difficulté de l'opus à se démarquer des autres slashers qui ont explosé après la sortie du chef d’oeuvre de Wes Craven. Scream a donné naissance à une nouvelle génération de films d’horreur cherchant à surfer sur la même vague et reprenant certains codes que Craven s’était amusé à détourner pour mieux prendre le spectateur par surprise. Pourtant écrit par le même scénariste, Halloween : 20 Ans Après, Il Revient cherche à faire du neuf avec du vieux comme pour maintenir en vie une saga essoufflée. Difficile de ne pas y voir une copie conforme de Scream et une volonté purement commerciale non assumée afin de réitérer le même succès, la réflexion et l’originalité en moins, le tout en se reposant sur les bases d’une franchise un peu datée. Le traumatisme et l’alcoolisme de Laurie, le développement des personnages et du cadre spatio-temporel sont ainsi vite oubliés et mis de côté pour laisser subitement place à un slasher classique en pilotage automatique. Si Scream parvenait à susciter la peur et conservait assez d’humour noir pour ne pas perdre le spectateur, ce second degré mêlé à de l’angoisse ne sied pas au film de Steve Miner. La franchise Halloween s’étant toujours prise au sérieux et reposée sur la dimension surnaturelle de son tueur vedette, l’auto-parodie et le détournement des codes du film d’horreur ne fonctionnent pas et tout sombre dans la facilité et les grosses ficelles.
La musique du film est signée de John Ottman, compositeur, monteur, réalisateur et producteur américain ayant beaucoup collaboré avec Bryan Singer sur la plupart de ses films dont Usual Suspects, X-Men 2, X-Men : Days of Future Past, X-Men : Apocalypse, ainsi que Jaume Collet-Serra (La Maison de Cire, Esther, Sans Identité), pour lesquels il a assuré le montage et la musique. En 2019, il remporte l’Oscar du Meilleur Montage pour Bohemian Rhapsody. Pour ce nouvel épisode, John Ottman a composé une magnifique partition, reprenant le fameux thème de John Carpenter sur un ton symphonique. Toutefois, cette composition a été gâchée par Dimension Films, les producteurs n’ayant pas particulièrement apprécié son travail et l’ayant tout bonnement remplacé par d’anciens morceaux déjà écrits par Marco Beltrami sur d’autres films produits par la firme (Scream, Scream 2 et Mimic), lors des dernières séances de mixage du film, ce qui a beaucoup déplu à John Ottman. De plus, certaines chansons non présentes dans la première version ont été ajoutées, dont What’s This Life For du groupe de rock Creed, entendue durant une scène de fête et dans le générique de fin. Tantôt réussie, tantôt confuse, la musique du film souffre évidemment de l’intervention douteuse des producteurs et de leurs décisions absurdes, exemple parfait d’une volonté non dissimulée de surfer sur le succès du slasher de Wes Craven. Pour preuve de l’absence totale d’ambition artistique de Dimension Films, aucune bande originale officielle n’a été commercialisée lors de la sortie. Seule une compilation de John Ottman a été mise sur le marché aux États-Unis et en Allemagne sous le label Varèse Sarabande et inclut le score original du film.
Curieusement, Halloween : 20 Ans Après, Il Revient ne sort pas dans les salles américaines pendant la période de la Toussaint, contrairement aux précédents volets, et donc pour le vingtième anniversaire du premier film, mais le 5 août 1998. Tourné pour un budget de 17 millions de dollars, il en rapporte 55 millions dans son pays d’origine après un premier week-end d’exploitation à 16 millions de dollars, pour un total de 75 millions à l’international, un triomphe pour une saga qui avait perdu une grande partie de son public. Dès lors, il devient l’opus le plus rentable de la franchise, jusqu’à la sortie de Halloween (2018), le reboot produit par Blumhouse Pictures, lui aussi porté par Jamie Lee Curtis dans le rôle de Laurie Strode. La critique n’est pourtant pas très tendre avec le film : si elle le juge nettement supérieur aux précédents volets depuis le second sorti en 1981, elle ne cesse de le comparer à l’original de John Carpenter, en grande partie à cause de la présence de Jamie Lee Curtis. L'opus reçoit des avis mitigés à positifs également de la part des fans. Le jeu des acteurs, l’humour noir, les multiples références aux classiques de l’horreur et les scènes de suspense sont applaudis, mais certains pointent du doigt l’absence de surprises, la durée du film jugée trop courte, la caricature et les meurtres parfois trop sages. La réalisation de Steve Miner ne fait pas non plus l’unanimité et les ressemblances avec Scream ne passent pas inaperçues aux yeux de tous.
Halloween : 20 Ans Après, Il Revient aura également une belle carrière en vidéo, bien qu’il ne reçoive aucune récompense ni nomination aux cérémonies de remises de prix. Si la série avait pu s’arrêter là aux vues du dénouement de ce septième chapitre, Dimension Films ne l'entend pas de cette oreille compte tenu du succès commercial. Le studio commande donc une suite qui sortira en 2002 sous le titre Halloween : Resurrection et sera considérée, à juste titre, comme le pire épisode de la saga.
Marqué par le grand retour d’un personnage iconique, Halloween : 20 Ans Après, Il Revient est un bon divertissement, une relecture moderne et originale de la franchise et un honnête film à suspense qui, hélas, manque de personnalité et ne fait pas honneur au premier volet. À trop vouloir coller aux codes des années 1990, le métrage perd en réalité une partie de son identité et manque beaucoup d’audace et de prise de risque. À réserver aux fans de la saga et aux amateurs de films d’horreur soft.