The Faculty
Titre original : The Faculty Production : Dimension Films Date de sortie USA : Le 25 décembre 1998 Genre : Horreur |
Réalisation : Robert Rodriguez Musique : Marco Beltrami Durée : 104 minutes |
Disponibilité(s) en France : |
Le synopsis
Herrington High est un lycée américain comme les autres, du moins en apparence. Peu après la découverte d'un organisme d'origine inconnue sur le campus, un groupe d'étudiants constatent en effet le changement brutal de comportement de leurs camarades et de certains de leurs professeurs au point d'en devenir inquiétants. Ils les soupçonnent alors d'appartenir à une espèce extraterrestre. Pour lutter contre l'invasion, ils décident donc d'unir leurs forces et de sauver ce qui peut l'être... |
La critique
Sorti à la fin des années 1990, The Faculty s'inscrit dans la parfaite lignée des films adressés au public adolescent à cette époque, à l'instar de Scream ou de Souviens-toi.. l'Été Dernier. Produit par Dimension Films, filiale appartenant à Disney entre 1993 et 2006, jusqu'à son rachat par The Weinstein Company, ce film est un hommage réussi et assumé à un genre particulièrement apprécié au cinéma, la science-fiction, le tout porté par un casting appelé à devenir mondialement connu et une réalisation joliment soignée.
The Faculty est réalisé par Robert Rodriguez, dont le parcours dans l'industrie du cinéma remonte à la toute fin des années 1980. Il commence, dès l'âge de sept ans, à mettre en scène des petits courts-métrages avec ses frères et soeurs. Recalé à l'école de cinéma, il finit par étudier à l'université du Texas, tout en poursuivant son rêve de devenir réalisateur. Une fois son diplôme obtenu, son court-métrage Bedhead, tourné en 1991, lui permet de sortir de l'anonymat en remportant quatorze récompenses dans divers festivals. L'année suivante, il écrit, produit, met en scène et monte El Mariachi, tourné en espagnol, avec seulement 7 000 dollars en poche. Le fim fait un tabac au festival de Sundance et lui ouvre les portes des grands studios. Robert Rodriguez enchaîne alors les films à succès, notamment dans le domaine de l'action : les plus célèbres sont Desperado (1995) et Une Nuit en Enfer (1996), dans lequel il dirige George Clooney et Quentin Tarantino. Après un passage par la science-fiction avec The Faculty (1998), il fonde, en 2001, sa propre société de production et d'effets spéciaux : Troublemaker Studios. Sortent ainsi sur les écrans Spy Kids et ses suites, sortis respectivement en 2001, 2002 et 2003, Il Était une Fois au Mexique (2003), mais aussi Sin City (2005), adapté de la bande dessinée de Frank Miller, et le diptyque Planète Terreur/Boulevard de la Mort (2007) pour lesquels il collabore avec Quentin Tarantino. Les années 2010 confirment la popularité de Robert Robriguez : il scénarise et produit Predators (2010), troisième volet de la célèbre franchise de science-fiction, puis réalise Machete (2010), sa suite Machete Kills (2013), ainsi que Sin City : J'ai Tué Pour Elle (2014).
The Faculty est, avant tout, un film de commande. Jusqu'ici habitué à prendre en charge toutes les opérations, Robert Rodriguez, se contente donc du seul poste de réalisateur. De même, il fait là sa première incursion dans le domaine de la science-fiction, son début de carrière étant plutôt marqué par les films d'action et de gangsters. Une première version du scénario est écrite par David Wechter et Bruce Kimmel en 1990. Malheureusement, aucun studio ne se montre intéressé et le projet est abandonné. Ce n'est que six ans après, à la suite du succès de Scream, que Miramax les contactent et acceptent de porter le scénario de The Faculty à l'écran. Mais Bob et Harvey Weinstein, directeurs de la compagnie, ne sont pas totalement convaincus par le potentiel du scénario et décident de procéder à des modifications, dont la réécriture des dialogues et l'ajout de nouveaux personnages.
Pour cela, ils font appel à Kevin Williamson, scénariste en vogue à l'époque pour ses travaux sur Scream et plus tard Souviens-Toi... l'Été Dernier, les séries Dawson, The Vampire Diaries et The Following. À l'origine, Williamson était également pressenti pour réaliser le film, mais il finit par décliner la proposition, préférant s'atteler à l'écriture de Mrs. Tingle, dont il sera également le réalisateur. Robert Rodriguez n'est donc qu'un choix par défaut des producteurs. Bien que limité dans ses prérogatives, le cinéaste américain d'origine mexicaine bénéficiera malgré tout d'une grande liberté derrière la caméra.
À mi-chemin entre la science-fiction et l'horreur, The Faculty peut être considérée comme une relecture moderne et adolescente de L'Invasion des Profanateurs de Sépulture de Don Siegel, l'invasion extraterrestre prenant place cette fois dans le lycée de Herrington High. Ceci dit, le duo Rodriguez-Williamson réussit à s'affranchir de cette référence en livrant une oeuvre sympathique proche du huis clos horrifique. L'idée de départ est pourtant simple : regrouper des lycéens aux personnalités opposés, appartenant à des univers différents et les unir afin de combattre le mal. Le scénariste Kevin Williamson avait déjà exploré ce concept avec Scream où il revisitait avec brio les codes du slasher. Il l'adapte cette fois-ci au thème de la science-fiction, en y ajoutant une intrigue proche du surnaturel.
Le point de départ est donc sans réelle surprise : l'opus n'échappe ainsi pas aux stéréotypes et présente une galerie de personnages répondant tous aux codes du film d'adolescent : la pom-pom girl secrètement intelligente, le souffre-douleur, le capitaine de l'équipe de foot, le dealer, la gothique solitaire, et enfin la nouvelle élève qui tente de s'intégrer. The Faculty démarre de fait sur des bases éculées qui pourraient déconcerter, voire même décevoir le fan de science-fiction face à tant de banalités. Et pourtant, avec The Faculty, le réalisateur Robert Rodriguez ignorait qu'il allait parler à toute une génération d'adolescents et de jeunes adultes !
Et quoi de mieux pour attirer une public cible que de réunir un casting de jeunes premiers qui deviendront par la suite des acteurs reconnus ?
Elijah Wood est Casey Connor, un élève discret qui est malmené par ses camarades. Il assiste malheureusement à quelque chose qu’il n’aurait pas dû voir et tente sans succès d’alerter ses camarades de ce qu’il se passe à Herrington High. Cantonné aux films familiaux au début de sa carrière (Les Aventures d’Huckleberry Finn, Flipper), c’est avec la trilogie du Seigneur des Anneaux de Peter Jackson (2001) et son incarnation du hobbit Frodon Saquet qu’Elijah Wood accède au rang d’icône. Également tête d’affiche de la série Wilfred, il privilégie les rôles principaux dans les thrillers et films à suspense (Grand Piano, Maniac, Open Windows).
Josh Harnett incarne Zeke Tyler, adolescent rebelle et dealer, qui cache pourtant une grande intelligence et une sensibilité à rude épreuve. Ayant fait ses débuts dans le cinéma fantastique (The Faculty, Halloween, 20 ans Après), l’acteur enchaîne ensuite les rôles dramatiques dans de plus grosses productions (La Chute du Faucon Noir, Pearl Harbor, Virgin Suicides) et surtout dans le genre policier (Slevin, Sin City, Le Dahlia Noir), ainsi qu’à la télévision (Penny Dreadful)
Stan Rosado, joueur de football populaire mais mal dans sa peau, est interprété par Shawn Hatosy, connu pour ses seconds rôles au cinéma (Ivresse et Conséquences, Mauvaises Influences). Alpha Dog sorti en 2007, signé de Nick Cassavetes et retranscrivant un célèbre fait divers américain, lui permet de se faire un nom. Sa carrière plutôt orientée vers la télévision le conduit à jouer dans les séries Reckless : La Loi de Charleston ou encore Animal Kingdom, adaptée d’un film de gangsters australien.
Le casting féminin n’est évidemment pas en reste. Ainsi, Jordana Brewster est Delilah Profitt, rédactrice pour le journal du lycée et également chef des cheerleaders. En apparence froide et énigmatique, Delilah est pourtant témoin d’une transformation et se joint sans hésitation à la lutte contre les envahisseurs. Repérée dans le feuilleton américain La Force du Destin, Jordana Brewster devient, après The Faculty, bien connue des amateurs de cinéma d’action pour son rôle de Mia Toretto dans la saga Fast and Furious. À la télévision, elle prête ses traits à Elena Ramos dans la nouvelle version de Dallas (2012-2014), et à Kate Warner dans la série d’anthologie Secrets and Lies (2016). Depuis cette même année, elle fait partie du casting de la série d’action L’Arme Fatale.
Clea DuVall est Stokely « Stokes » Mitchell, une gothique solitaire cachant à son entourage une homosexualité qu'elle peine à assumer. Après un passage à la télévision (Buffy Contre les Vampires, Urgences), Clea DuVall décroche son premier rôle dans The Faculty. L’actrice s’essaie alors au drame (Une Vie Volée, 21 Grammes, Argo) et au cinéma fantastique (Ghosts of Mars, The Grudge), avant de passer derrière la caméra avec The Intervention (2016).
Enfin, Laura Harris est Marybeth Hutchinson, une nouvelle élève, naïve et introvertie, qui essaie tant bien que mal de se faire une place et dont l’intégration ne sera pas sans heurts suite à l’invasion d’êtres venus d’ailleurs. D’abord animatrice pour enfants à la radio alors qu'elle était encore toute jeune, puis actrice à la télévision canadienne, Laura Harris partage sa carrière entre cinéma (Suicide Kings, The Calling, Officier Down), téléfilms et séries aux États-Unis (Dead Like Me, 24 Heures Chrono, Women’s Murder Club).
Du côté des adultes, les fans de la saga X-Men reconnaîtront certainement la sublime Famke Janssen dans la peau du professeur Elizabeth Burke. L’interprète de la mutante Jean Grey campe ici une enseignante timide et réservée qui, au contact de la créature extraterrestre, joue soudainement les femmes fatales, prête à en découdre avec quiconque se met sur son chemin, allant jusqu'à séduire ses élèves. L’actrice met ici tout son talent au service d’un personnage décidément trop peu présent et pourtant aussi charismatique que glaçant.
Robert Patrick est le coach Joe Willis. Brutal et taciturne, il n’a pas peur de tyranniser non seulement ses élèves, mais aussi ses collègues. Ainsi, chacune de ses apparitions suffit à créer l'effroi. Abonné aux rôles de méchants au cinéma (le robot T-1000 dans Terminator 2 : Le Jugement Dernier, 58 Minutes Pour Vivre, Copland), l’acteur est aussi connu pour son personnage de John Doggett dans la série X-Files.
Les amateurs de cinéma d’horreur ont en outre le plaisir de retrouver Piper Laurie, célèbre de mère de Carrie White dans le film Carrie au Bal du Diable et interprète de Catherine Martell dans la série Twin Peaks. Pour The Faculty, elle joue Karen Olson, simple professeur de littérature qui se trouve être à la tête des envahisseurs.
Deux acteurs phares de la télévision font également partie de la distribution : Bebe Neuwirth, connu pour son rôle de Lilith Sternin dans la sitcom Cheers et son spin-off Frasier, et Daniel von Bargen, célèbre Commandant Edwin Spangler de la série Malcolm. Quelques guests viennent enfin étoffer le casting comme Salma Hayek (Bandidas, Frida, Une Nuit en Enfer), grande amie de Robert Rodriguez, ou bien encore le chanteur Usher, qui campe ici un étudiant.
S’il apparaît comme un énième teen movie à suspense, il est injuste de s'arrêter sur les bases de The Faculty, tant le film est efficace et surprend grâce à un scénario maîtrisé de bout en bout. Son rythme est ainsi très bien géré et prend le temps d'installer progressivement un climat d’effroi et d'oppression, tout en s'évertuant au fur et à mesure à présenter les personnages principaux. Il devient alors facile de s'attacher à eux, de comprendre leurs rêves, leurs aspirations, pour finalement les suivre dans leur aventure, rendant le spectateur témoin voire complice de leur périple afin de stopper une invasion imminente.
Le scénario de Kevin Williamson reprend ici ce qui a fait le succès de Scream : présenter un groupe de jeunes gens aux personnalités différentes auxquels chaque spectateur peut facilement s'identifier et les confronter à un phénomène qui les dépasse et dont ils sont censés être les seuls à pouvoir y mettre un terme avant d'en être eux-mêmes victimes. Le spectateur retrouve alors les thèmes chers au scénariste : le difficile passage à l'âge adulte, l'incompréhension du monde des adultes, la soif de popularité, l'isolement, le refus de grandir et cette volonté d'affirmation et d'indépendance. C'est dire si le film, en plus d'offrir un divertissement de qualité, a su trouver comment séduire son public en s'adressant directement à lui et à quel point Kevin Williamson savait de quoi il parlait.
The Faculty est en revanche un film un peu à part dans la carrière du réalisateur, une oeuvre qui ne se prend pas au sérieux et qui adopte un style proche des séries B. Bien qu'il ne soit pas familier avec la science-fiction, le réalisateur mexicain a déjà prouvé avec Une Nuit en Enfer qu'il était un grand fan de cinéma d'horreur en injectant ce qu'il faut d'humour, de suspense et d'angoisse. Robert Rodriguez se permet alors toutes les folies possibles et imaginables dans sa façon de filmer et de faire avancer l'histoire, frôlant parfois la caricature sans toutefois tomber dans le ridicule. Il suffit, pour s'en convaincre, de voir les héros s'injecter une drogue synthétique de leur conception pour se prouver qu'ils ne sont pas contaminés.
Comme à son habitude, Robert Rodriguez part d'un concept éculé pour en faire une oeuvre "délire" pleine de second degré et de trouvailles surréalistes, allant même jusqu’à tourner en dérision les classiques de la SF dont The Thing de John Carpenter ou Independence Day de Roland Emmerich. En apparence inoffensif, The Faculty se moque donc ouvertement du public auquel il semble s'adresser mais reste toutefois attachant par son intrigue et la façon dont elle est amenée. Le spectateur retrouve alors le rythme à la fois nerveux et hystérique du réalisateur, ses effets de style réussis et originaux, notamment dans la présentation des protagonistes sans oublier une tension palpable et constante tout au long de l'opus.
L'autre point fort est sans aucun doute l'ambiance, proprement angoissante, qui peut aisément faire peur. En témoigne la scène d'ouverture, qui entre directement dans le vif du sujet et annonce le ton sombre et effrayant que le film souhaite adopter. Le suspense est donc bien réel, progressif, mais pas immédiat. The Faculty fait patienter le spectateur, ce qui lui permet de plonger plus facilement dans l'histoire. La dernière partie est, quant à elle, terrifiante et fun à souhait, livrant des scènes dignes des grands films d’horreur, en particulier lors de la poursuite dans les couloirs, pendant la scène du bus, ou bien encore au moment de la confrontation finale. Il est un peu regrettable cependant de devoir s'accrocher dès le départ pour apprécier l'opus à sa juste valeur, ce qui est, hélas, l'un de ses points faibles.
Heureusement, la photographie et l’ambiance froide et austère qui règne entre les murs de Herrington High suffisent à accrocher le public, jouant intelligemment la carte du huis clos à la manière de Shining. De même, les effets spéciaux ne déméritent pas et valent clairement le coup d’œil, notamment la créature, dont le nom et le design font ouvertement écho à la « Reine » d’Aliens, le Retour de James Cameron. Le spectateur sera tout de même déçu que le film soit avare en effets horrifiques, The Faculty contenant,il est vrai, très peu de scènes sanglantes dignes du genre, se contentant d'une simple suggestion graphique : une fois démasqués, les extraterrestres ayant pris forme humaine ne saignent pas, mais se liquéfient seulement.
La musique est, elle, signée par Marco Beltrami, compositeur américain ayant déjà collaboré avec Kevin Williamson et le maître de l’horreur Wes Craven sur Scream et ses trois suites, à qui il doit le fait d'être connu du grand public. Il a ensuite livré la partition de nombreux films fantastiques et thrillers, dont Resident Evil, Hellboy, I, Robot, La Dame en Noir ou World War Z. Nommé à deux reprises aux Oscars de la meilleure musique pour 3h10 pour Yuma en 2007 et Démineurs en 2010, il a aussi composé les scores de quelques films Marvel dont Wolverine, le Combat de l'Immortel, Les Fant4stiques et Logan. Dans The Faculty, Marco Beltrami reproduit alors ce qui avait fait la force de ses travaux sur Scream, sorti deux ans plus tôt : une musique inspirant non seulement la peur, mais aussi une légèreté propre aux teen movies, faisant alors la part belle aux ambiances scolaires. Ainsi, la bande originale est une véritable ode à l’adolescence, avec des morceaux bien sentis entre colère et ennui, langueur et fureur de vivre. Sortent ainsi du lot : Another Brock on The Wall de Pink Floyd, School’s Out d’Alice Cooper, Medication de Garbage et Maybe Someday de Flick.
The Faculty arrive en salles aux États-Unis le 25 décembre 1998 et fait un carton au box-office. Tourné pour seulement 15 millions de dollars, il en rapporte un peu de plus 40 millions et ce malgré des critiques mitigées voire négatives. La presse le considère comme une oeuvre mineure dans la carrière de Robert Rodriguez et un ersatz de film de science-fiction pour adolescents. Les journalistes reprochent également à Kevin Williamson de faire du Scream à la sauce SF, sans la subtilité ni l'originalité de son modèle. Enfin, un détail créé la polémique : le parti pris du film fait réagir les associations de protection de l'enfance, pour qui le stratagème inventé par les héros pour identifier et anéantir leur ennemi - l'injection d'une drogue artisanale - aurait une mauvaise influence sur les jeunes spectateurs, et plus précisément les adolescents. Fort heureusement, les critiques seront beaucoup plus positives avec le temps, The Faculty étant aujourd'hui perçu comme un film "amusant, effrayant, parfois gore et très divertissant", les amateurs du genre allant jusqu'à l'assimiler à une version lycéenne de The Thing de John Carpenter.
The Faculty est un film de science-fiction décidément culte. Bien ancré dans son époque et bénéficiant d'un duo de réalisateur/scénariste talentueux, il souffre de quelques défauts vite balayés par des acteurs charismatiques, une dose d'humour bienvenue, des effets spéciaux réussis et une ambiance particulièrement terrifiante. À redécouvrir d'urgence !