Les 12 Travaux d'Astérix
Titre original : Les 12 Travaux d'Astérix Titre USA : The Twelve Tasks of Asterix Production : Studios Idéfix Dargaud Date de sortie USA : 1985 (Vidéo)
Distribution : Walt Disney Home Video Genre : Animation 2D Date de sortie cinéma France : Le 20 octobre 1976 |
Réalisation : René Goscinny Albert Uderzo Musique : Gérard Calvi Durée : 78 minutes |
Disponibilité(s) en France : |
Le synopsis
En 50 avant Jésus-Christ, un petit village gaulois résiste à l'envahisseur romain tant et si bien que certains érudits pensent que ses habitants sont probablement des dieux. Afin de prouver à tous qu'ils sont bien humains, Jules César lance un défi aux Gaulois consistant en douze travaux... |
La critique
Les 12 Travaux d'Astérix n'est pas à proprement parler une production Disney. Il s'agit en réalité d'un film d'animation des Studios Idéfix sorti en France en 1976 et distribué par Walt Disney Home Video en 1985 dans le cadre d'une opération visant à étoffer le catalogue vidéo de Disney à une époque où peu de films sont disponibles. Sont ainsi concernés tous les longs-métrages de Lucky Luke et Astérix produits par Belvision puis les Studios Idéfix. Avant d'être des concurrents en France dans le domaine des parcs de loisirs, Mickey et Astérix étaient donc partenaires outre-Atlantique !
À l'origine, Astérix le Gaulois est la série de bande dessinée française la plus vendue au monde. Créée en 1959 par René Goscinny et Albert Uderzo, elle parait d'abord dans le journal Pilote avant d'être éditée en albums dès 1961. Au milieu des années soixante, alors que la série est au plus fort de son succès, le chercheur Jean Dejoux présente à Goscinny, Uderzo et leur éditeur Dargaud, le procédé de l'animographe qu'il a mis au point. Celui-ci permet de réaliser des films d'animation à moindre coût à l'aide d'un système optique permettant d’animer moins de huit dessins par seconde au lieu de vingt-quatre tout en conservant une fluidité raisonnable. Convaincu par l'invention, Georges Dargaud l'utilise pour faire produire par le studio Belvision une adaptation du premier tome, Astérix le Gaulois, sans toutefois en informer les auteurs qui le découvriront une fois terminé. Le film sera un grand succès et la production du suivant, La Serpe d'Or, est immédiatement lancée. Cependant, peu impressionnés par la qualité artistique du premier long-métrage, Goscinny et Uderzo font annuler la sortie du second (pourtant achevé) et proposent de s'investir dans la direction artistique de l'adaptation d'un autre album, Astérix et Cléopâtre. Tandis qu'Uderzo dessine le storyboard du film, Goscinny, épaulé par Pierre Tchernia, écrit le scénario. Tchernia, inspiré par la qualité musicale des films de Walt Disney, composera également trois chansons pour le film.
Les deux créateurs d'Astérix n'ont jamais caché leur admiration pour Walt Disney : René Goscinny était d'ailleurs parti aux États-Unis au début de sa carrière dans l'espoir vain de rejoindre les Walt Disney Animation Studios et Albert Uderzo aura l'occasion de rendre hommage à Walt des années plus tard avec la planète Tadsylwine de l'album Le Ciel Lui Tombe sur la Tête, sorti en 2005. Aussi, quand ils ont la possibilité de réaliser des films d'animation, espèrent-ils atteindre un niveau de qualité artistique plus élevé que celui des studios Belvision : pour leur troisième film, ils décident ainsi de créer leur propre studio d'animation, en association avec Georges Dargaud : les Studios Idéfix.
Plutôt que d'adapter l'histoire d'une de leurs bandes dessinées, René Goscinny s'attèle à l'écriture d'un scénario original, toujours avec la collaboration de Pierre Tchernia en s'inspirant de la légende des douze travaux d'Hercule. Albert Uderzo réalise les planches de modèles des nouveaux personnages créés pour le film et confie la direction de l'animation à Pierre Watrin et Henri Gruel.
Le bond de qualité est immense ! Là où Astérix le Gaulois et Astérix et Cléopâtre restaient divertissants, bénéficiant de la qualité des œuvres originales dont ils reprennent le scénario, ils pêchaient lourdement de par leur animation très sommaire et leurs graphismes particulièrement grossiers. Dorénavant, non seulement le nombre d'images par seconde sera bien plus élevé, permettant une fluidité bien plus agréable à l'œil (tout en restant en deçà de celle des films de Walt Disney), mais les graphismes des personnages seront extrêmement fidèles aux bandes dessinées. En revanche, l'étape de nettoyage de l'animation semble avoir été éludée, offrant un résultat quelque peu brouillon, semblable aux (Les) Aristochats, mais qui, pour certains spectateurs, apportent un certain charme au tout, renforçant l'aspect artisanal.
L'autre grand atout des (Les) 12 Travaux d'Astérix est son écriture. Tout y est hilarant et la moindre réplique fait mouche, offrant des séquences devenues plus cultes les unes que les autres. Difficile de ne pas rire aux éclats quand Astérix et Obélix tentent d'obtenir le laissez-passer A-38, quand Astérix esquive l'hypnose d'Iris ou quand Obélix refuse de vivre à tout jamais sur l'Ile du Plaisir sous prétexte qu'aucun sanglier n'y vit. À l'image de Kuzco, l'Empereur Mégalo sorti des années plus tard, Les 12 Travaux d'Astérix dispose aujourd'hui de nombreux fans qui connaissent par cœur tous ses dialogues.
Les personnages du film sont tous particulièrement bien définis et attachants. À l'évidence, Goscinny et Uderzo maitrisent leur univers et offre aux deux gaulois principaux, Astérix et Obélix, un traitement de choix. Respectivement doublés par Roger Carel et Jacques Morel, les deux compères rayonnent et chacun a l'occasion de briller lors d'une tâche spécifique, quand ce n'est pas ensemble. Caius Pupus, également doublé par l'infatigable Roger Carel, est le Romain chargé de valider les exploits des deux héros ; son ton monocorde et sa démarche qui rappelle celle d'un pigeon, le rendent hilarant malgré lui. Les personnages classiques de l'univers d'Astérix sont également de la partie tels que Jules César, Abraracourcix, Panoramix et les autres habitants du village gaulois. Par ailleurs, les douze travaux révèlent toute une flopée de personnages secondaires qui emportent tous l'adhésion, malgré une apparition limitée à l'écran : l'hypnotiseur égyptien Iris, la Grande Prêtresse de l'Ile du Plaisir, le Vénérable du Sommet, l'huissier de la maison qui rend fou, le cuisinier Mannekenpix, le lutteur Cylindric le Germain, les fantômes de la Plaine des Trépassés ; tous sont autant de personnages hauts en couleur qui font mouche lors de leur apparition. Enfin, Pierre Tchernia, le narrateur, apporte des touches d'humour bienvenues tout en conservant la voix chaleureuse qui le distingue.
Pour la troisième fois, Gérard Calvi revient à la composition de la musique d'un long-métrage d'Astérix. Il livre d'ailleurs certainement ici le meilleur de lui-même ; le thème principal du film et celui de l'Ile du Plaisir étant particulièrement mémorables.
Les habitués du monde d'Astérix remarqueront que le film ne s'inscrit pas aisément dans la continuité de la saga. Certes, quand le narrateur introduit l'univers et les personnages, il le fait non sans demander s'il y a des personnes dans la salle qui ne les connaissent pas, mais c'est surtout la fin du film qui est étonnante car elle apporte une conclusion définitive aux aventures des célèbres Gaulois. Il convient donc de le considérer comme leur toute dernière aventure, chronologiquement parlant. Il est également amusant de relever les nombreux clins d'œil que recèle le film, de Vénus (caricature de Brigitte Bardot) à la poule pondant un œuf de la forme de Donald Duck.
Fort d'un univers particulièrement riche issu de bandes dessinées de grande qualité, de l'implication de ses deux auteurs alors au sommet de leur art, d'une bonne qualité d'animation et de graphisme et d'une pléiade de gags hilarants écrits par René Goscinny et Pierre Tchernia, Les 12 Travaux d'Astérix remonte le niveau des films d'animation Astérix et constitue une formidable introduction à l'univers du célèbre Gaulois.