Il Était une Fois Disney & la France
Titre original : Il Était une Fois Disney & la France Production : C. Productions Date de diffusion France : Le 8 décembre 2023 Genre : Documentaire |
Réalisation : Cécile Bonneau François Chaumont Durée : 85 minutes |
Le synopsis
Walt Disney est un passionné de la France, son histoire et ses arts : preuve en est, ses nombreuses visites, ses inspirations artistiques et ses productions cinématographiques sont autant de preuves d’amour pour l’Hexagone à qui il doit nombre de ses succès et même… ses racines ! |
La critique
D’un jeune Walt Disney dans le rôle d’un ambulancier à la caricature facile à Paris pendant la Première Guerre mondiale en passant par la création d’un premier - et unique ! - Resort Disney en Europe sur des terres seine-et-marnaises ou les innombrables influences françaises dans les productions des Studios Disney, The Walt Disney Company et son créateur vouent une admiration sans limites pour la France. Cet amour inconditionnel et réciproque qui remonte à la jeunesse de Walt Disney s’est traduit dans la carrière du père de Mickey Mouse sous de multiples aspects, tous reflétant avec respect et passion le patrimoine historique, architectural et même gastronomique du Pays des Lumières. Mais comment est née cette fascination pour les arts à la française ? Pourquoi Blanche Neige et les Sept Nains n’aurait peut-être jamais vu le jour sans un voyage dans l’Hexagone ? Et surtout, à quand remontent les origines normandes de Walt Disney ? Toutes ces questions ainsi que leurs réponses - et plus encore ! - sont décryptées et dévoilées dans le plus grand soin dans Il Était une Fois Disney & la France, un programme faisant toute la lumière sur la plus grande entreprise de divertissement et son affection toute particulière avec le Pays des contes de fées aux 45 000 châteaux.
Produit par C. Productions, société de production et filiale du groupe M6 et diffusé en deuxième partie de soirée le vendredi 8 décembre 2023 sur M6, Il Était une Fois Disney & la France est un documentaire réalisé par Cécile Bonneau et François Chaumont. Après avoir décroché son Master de Journalisme International de City University à Londres en 2008, Cécile Bonneau commence sa carrière dans le domaine de la radio, notamment chez Vallée FM et BBC Radio. Elle devient journaliste rédactrice-réalisatrice chez C. Productions en 2011 et travaille sur des émissions d'investigation comme Enquête d'Action (dès 2005) pour W9. Les années suivantes, elle est tantôt journaliste pour Arte (Jardins d'Ici et d'Ailleurs, 2016) et France 3 (Comme une Envie de Jardins, 2016) puis rédactrice en chef sur France 3 (Comme une Envie de Jardins, 2018) et France 2 (Bons Baisers de Vienne, 2018-2019, Secrets d'Histoire, 2019). Forte d'une expérience en tant que réalisatrice pour le groupe M6 de 2012 à à 2018 sur des émissions d'enquête (Capital, 66 Minutes), elle prend tout naturellement les rênes de la réalisation du documentaire Il Était une Fois Disney & la France en 2023 aux côtés de François Chaumont.
Né en 1976, François Chaumont a porté de nombreuses casquettes durant sa carrière, de rédacteur en chef pour France 2 (La Grande Battle, 2011) à auteur réalisateur de documentaires notamment spécialisé dans les stars de la musique (Claude François, la Revanche du Mal Aimé, France 3, 2017, Mike Brant, l’Étoile Filante, France 3, 2021, Disco, la Révolution Française, France 3, 2022). Avec à son actif plus d’une dizaine de productions documentaires, il co-réalise avec Cécile Bonneau, en 2023, Il Était une Fois Disney & la France. Loin des documentaires sensationnalistes habituels de la société de production qui biberonne son audimat aux programmes aux tons accusateurs voire provocateurs à l’instar de Zone Interdite depuis 1993 ou Enquête Exclusive débutée en 2005, Il Était une Fois Disney & la France propose un regard frais et sans mauvais esprit sur un sujet peu évoqué - celui du lien étroit entre The Walt Disney Company et la France - par le biais d’images d’archives parfois inédites et soigneusement choisies et d'invités faisant référence dans le domaine.
Fait étonnant, la première partie de l’émission ne revient pas aux origines de Walt Disney et son lien avec l’Hexagone, un sujet relégué en deuxième partie, mais se focalise plutôt sur une production des Pixar Animation Studios, Ratatouille, sorti en 2007, mettant à l’honneur avec ingéniosité le joyau tant convoité qu’est la gastronomie française. Ainsi, par le biais d’images inédites du voyage d’études des animateurs Pixar à Paris, organisé pour la préparation du huitième film d’animation du Studio à la lampe, l’équipe de production comme Brad Bird, réalisateur, mais aussi Robert Anderson, directeur de la photographie, Harley Jessup, chef décorateur ou encore Jim Capobianco, scénariste, raconte comment ils ont relevé le défi de mettre sur grand écran une cuisine française connue - et reconnue ! - à l’international, tout en visitant la ville lumière et ses nombreux restaurants, ses égouts mythiques et ses échoppes atypiques, comme la boutique du dératiseur de la Maison Aurouze, rue des Halles à Paris !
Pour compléter cette séquence d’introduction, trois chefs étoilés français, comme Guy Savoy, Thomas Keller ou encore Hélène Darroze, partagent leurs affinités avec le film et comment ils ont pu participer à sa création. Cette dernière, par exemple, raconte comment les animateurs de Pixar l’ont étudiée et disséquée dans son environnement de travail et révèle même qu’elle est l’inspiration de l’un des personnages du film, Colette, la cuisinière au talent indéniable et à l’ambition assurée. La cuisine de son restaurant, Le Marsan dans le 6e arrondissement de Paris, devient alors un terrain d’investigation et d’inspiration sans limites, tant est si bien qu’il inspire l’arrière-cuisine du film. D’autres grands établissements de renom de la capitale feront leur apparition dans des plans du film, comme la salle du restaurant, rappelant celle du (Le) Train Bleu à la Gare de Lyon ou encore la façade de Chez Gusteau, réminiscence de l’extérieur de l’adresse gastronomique La Tour d’Argent au Quai de la Tournelle.
La suite du documentaire reprend un déroulé plus naturel en se concentrant sur l’origine de la fascination de Walt Disney pour la France, et rien n’est laissé au hasard ! Ainsi, à l’aide d’images d’archives trop peu vues dans les programmes du genre, la réalisation revient sur la venue de Walter Elias Disney en 1918 au Havre en Normandie juste après la signature de l’Armistice de la Première Guerre mondiale pour être engagé comme conducteur d’ambulance. Sa toute nouvelle profession le fait traverser les villes et villages de France, de Saint-Cyr à Neufchâteau en passant par la capitale. Pour couvrir cette partie, des participants de renom interviennent pour apporter leur expertise comme Didier Ghez, historien spécialiste de Disney et écrivain du très convoité Disneyland Paris : De l’Esquisse à la Création (2002), Rebecca Cline, directrice des Archives Disney (déjà vue dans d’autres productions éducatives estampillées Disney+ comme Les Coulisses des Attractions sorti en 2021) ou encore Fox Carney et son accent américain qui témoigne depuis les locaux tenus secrets des archives des animations Disney où il officie en tant que documentaliste en chef.
Ils ne font pas l’impasse sur le retour de Walt Disney en France au milieu des années 30 où il fait découvrir à sa famille les endroits dont il était tombé amoureux plus jeune, visitant l'Île-de-France (Paris, Le Bourget) et diverses autres régions environnantes comme le Grand Est (Verdun), les Hauts-de-France (Compiègne, Château-Thierry) et même l'Alsace où il s’émerveille devant les automates de l’horloge astronomique de la Cathédrale Notre-Dame de Strasbourg. Encore une fois, les images d’archives documentant cette incursion dans la culture française et présentées dans le programme sont de véritables bijoux tant elles sont d’un poids historique colossal. Ce voyage réparateur en bien des points est aussi celui qui l’a conforté dans l’idée de produire un long-métrage d’animation pour le cinéma lorsqu’il découvre certains de ses courts-métrages condensés et présentés sous le nom de L’Heure Joyeuse de Mickey et attirant les foules au cinéma Lord Byron sur les Champs-Élysées : il est maintenant convaincu grâce aux français que Blanche Neige et les Sept Nains saura trouver son audience !
Dès lors, le Vieux Continent devient une source d’inspiration majeure pour les studios Disney. Il revient de son voyage en Europe les valises remplies de plus de trois-cents livres dont quatre-vingt-dix venant de France, certains sortis de leur lieu de conservation exclusivement pour le documentaire par Fox Carney qui, soigneusement ganté, est fier de tourner les pages de ces précieux ouvrages comme les Fables de la Fontaine avec les Dessins de Gustave Doré ou Vieilles Rondes et Chansons de France. Le narrateur rappelle alors que Walt Disney va miser sur un conte français pour son premier long-métrage d’animation après la Seconde Guerre mondiale : Cendrillon, écrit par Charles Perrault et publié en 1697. Au-delà des mots du conteur, c’est la France qui infuse dans les pinceaux des animateurs du studio lors de cette production. Ainsi, les châteaux de la Loire comme Saumur, Chenonceau ou encore Chambord prêteront leur architecture au château du Prince, la Cité de Carcassonne donnera ses murs d’enceinte à la demeure royale et le style pictural des Très Riches Heures du Duc de Berry, manuscrit médiéval d’inspiration gothique, dictera l’esthétique générale du film.
Fait rare et prouvant, s’il fallait encore le faire, le sérieux du programme, la réalisation va jusqu’à diffuser un extrait du très rare Laugh-O-Gram Cinderella, cartoon sorti en 1922, et montrant l’amour déjà présent au tout début de la carrière de Walt Disney pour ce conte français. De Charles Perrault à Jules Verne dont il adapte le roman 20000 Lieues Sous les Mers dans le film Live éponyme de 1954, Walt Disney non seulement adule la France mais il vénère aussi ses auteurs et la langue française qu’il avoue encore moins manier « que le touriste américain moyen » dans une interview le 7 décembre 1962 dans l’émission Cinq Colonnes à la Une avec Pierre Tchernia, un extrait étant montré dans le documentaire.
La disparition brutale du Maître en 1966 ne va pas pour autant mettre un frein à cet amour inconditionnel pour la France et The Walt Disney Company va au cours des années suivantes honorer ce lien indéfectible sous de nombreuses façons. Il Était une Fois - Disney & la France rappelle que l’un des derniers projets lancés par Walt Disney dans le domaine de l’animation n’est autre que Les Aristochats (1970), mettant en scène un Paris des années 1910 chic et raffiné. Les Studios Disney traversent par la suite une longue période trouble et qui aurait pu voir la fin d’un empire. La France va alors encore jouer un rôle dans ce sauvetage in extremis. En effet, dès 1989 avec la sortie de La Petite Sirène, les Walt Disney Animation Studios rentrent dans une période dénommée par les experts comme la Renaissance Disney, un regain d’intérêt du public pour la compagnie aux grandes oreilles notamment à travers des productions inspirées de contes européens et français comme La Belle et la Bête (1991) ou Le Bossu de Notre-Dame (1996). Pour ces films, les animateurs introduisent le concept de « voyage d’étude » où ils vont s’inspirer des cultures en visitant des lieux qui transparaîtront ensuite dans leurs histoires. Le premier voyage initiatique, dont des images inédites sont diffusées dans Il Était une Fois - Disney & la France, se fera donc en France, notamment dans la Vallée de la Loire par les équipes de production de La Belle et la Bête qui enchaînent visites de châteaux et tables gastronomiques.
Interviewé, Don Hahn, animateur du film, explique que le but de ce voyage est avant tout de « capturer l’essence [de la France] et reproduire l’ambiance, la musique, les décors, les costumes » et ainsi en donner une image fidèle et convaincante sans pour autant tomber dans la caricature grotesque. Plus que de visiter la France, les animateurs Disney vont s’y installer ! The Walt Disney Company acquièrent alors les studios de Montreuil en Seine-Saint-Denis et font confiance aux frères Brizzi pour une partie des séquences du (Le) Bossu de Notre-Dame. Les équipes du documentaire sont alors allées chercher Paul Brizzi, co-réalisateur de l’adaptation cinématographique du roman de Victor Hugo, pour donner des détails sur la réalisation et son ressentiment sur cette période qu’il considère comme « la plus sympa » de sa longue carrière.
Évidemment, tout documentaire de cette trempe qui se respecte, ne peut s’empêcher de nommer Disneyland Paris dans son contenu mais il faut avouer que sa mention y est ici totalement légitime. En effet, le Resort parisien est un énième lien - si ce n’est ultime ! - tangible et inaliénable entre la compagnie américaine de divertissement et le Pays des Lumières. Pour autant, Il Était une Fois - Disney & la France ne s’y attarde pas non plus, rappelant très succinctement quelques-unes des nombreuses références à la culture française au sein de Disneyland Paris en quelques minutes seulement. De plus, le reportage ne fait pas mention des tensions lors de l’annonce de l’arrivée de Mickey dans les champs de betteraves de la région parisienne ni même des difficultés financières des débuts du Resort car le propos doit rester ici positif dans le but de mettre à l’honneur les liens du pays avec la société de Mickey. Le sujet respecté, l’exposé s’ensuit vers Isigny-sur-Mer pour rappeler les origines bien plus profondes de Walt Disney avec la France. Le maire explique alors fièrement les racines normandes de Walt, son nom même étant une déformation à travers les siècles de « D’Isigny », devenu par la force du temps « Disney ».
Pour conclure, Il Était une Fois - Disney & la France s’attache à véritablement ancrer la France dans une culture de l’animation au sens large dont les institutions comme le Festival International du Film d’Animation d’Annecy et les nombreuses écoles de dessin à travers le pays à l’instar des (Les) Gobelins à Paris lui donnent sa notoriété et légitimité. Comme le souligne Sébastien Durand, historien spécialiste de Disney : « Il y a trois pays d’animation : le Japon, les États-Unis… et la France ! ».
En plus de proposer un sujet original et presque jamais étudié auparavant dans des documentaires télévisuels, Il Était une Fois - Disney & la France tient véritablement sa force dans le choix des intervenants et leur expertise dans le domaine. Entre animateurs de renom (Don Hahn, Paul Brizzi), spécialistes de l’histoire de la compagnie aux grandes oreilles (Sébastien Durand, Didier Ghez) et employés Disney du département des archives (Rebecca Cline, Fox Carney), le documentaire renforce son propos par des interventions pertinentes et justifiées, allant même jusqu’à aller chercher des acteurs annexes au sujet mais dont le lien se fait remarquer très rapidement comme la cheffe Hélène Darroze sur la conception du film Ratatouille (2007) ou Éric Barbanchon, maire de la ville d’Isigny-sur-Mer depuis 2014 rappelant les origines normandes de Walt Disney.
Pour paraphraser les dires des participants, la réalisation a fait le choix judicieux d’utiliser de nombreuses images d’archives comme rarement vues dans un programme télévisé de cette trempe, d’un Laugh-O-Gram de 1922 aux vidéos du voyage d’étude pour La Belle et la Bête (1991) en passant par la remise de la Légion d’Honneur à Walt Disney en 1936. Les téléspectateurs ont ainsi droit à une sélection d’images choisies avec soin et illustrant à la perfection les sujets évoqués. C’est bien simple, ces témoignages du passé sont partout dans le documentaire : en images d'archives ou sous forme de véritables artéfacts sortis tout droit des coffres-forts des archives des studios Disney par les mains expertes de Fox Carney !
Enfin, un dernier détail - et pas des moindres ! - la narration de ce documentaire inédit, les téléspectateurs retrouvent une voix singulière, celle de Richard Darbois. Au-delà d’être la voix française de Harrison Ford, Richard Gere ou Jeff Goldblum, l’acteur franco-canadien né à Montréal en 1951 n’a pas été choisi par hasard par la production car lui aussi a un lien particulier avec Disney : il est en effet la voix de nombreux personnages des films d’animation des studios comme l’excentrique Génie d’Aladdin (1992), le téméraire Buzz l’Éclair de l’univers de Toy Story ou encore le crocodile jazzman Louis dans La Princesse et la Grenouille (2009) ! Cet ultime clin d’œil à une audience déjà conquise à la cause Disney n’est que des plus savoureux, la voix de Darbois rappelant pour une partie leurs héros préférés et pour d’autres les berçant d’une tessiture rauque des plus appréciables.
Au sujet fédérateur et captivant, Il Était une Fois - Disney & la France est diffusé le vendredi 8 décembre 2023 en deuxième partie de soirée à 23h10 après Les Indestructibles 2, pour la première fois en clair sur M6. Si le film Pixar réunit plus de 1,89 million de téléspectateurs (soit 10,8% de part de marché), plaçant la chaîne en seconde position pour la soirée, la chaîne n'a pas communiqué sur le score du documentaire, laissant à penser que l’horaire tardif n’a pas joué en sa faveur et ne lui a pas permis de briller à la hauteur de son casting et de la qualité du traitement de son sujet.
Reportage d’exception sur les rapports entre la France et The Walt Disney Company, Il Était une Fois - Disney & la France propose un sujet inédit dans le paysage télévisuel à grands renforts d’un casting d’experts venus de tous les horizons. Par le biais d’utilisations d’images d’archives exceptionnelles et d’un traitement approfondi du sujet, ce documentaire mérite d'être découvert pour tout savoir des liens entre la plus grande entreprise divertissement sur Terre et, évidemment, le plus beau pays du monde !