The Looming Tower

The Looming Tower
L'affiche
Titre original :
The Looming Tower
Production :
Wolf Moon Productions
South Slope Pictures
Jigsaw Productions
Legendary Television
Date de mise en ligne USA :
28 février 2018 - 18 avril 2018 (Hulu)
Distribution :
Hulu
Genre :
Drame
Création :
Dan Futterman
Alex Gibney
Lawrence Wright
Musique :
Will Bates
Durée :
492 minutes
Disponibilité(s) en France :

Liste et résumés des épisodes

1. Now it Begins
C’est Parti…
Genre : Épisode
Série : The Looming Tower
Saison 1 Épisode 1
Date de diffusion USA : 28 février 2018
Réalisé par : Alex Gibney
Durée : 50 minutes
L’agent Ali Soufan rejoint l’équipe de John O’Neill au FBI…
2. Losing My Religion
Perdre la Foi
Genre : Épisode
Série : The Looming Tower
Saison 1 Épisode 2
Date de diffusion USA : 28 février 2018
Réalisé par : John Dahl
Durée : 50 minutes
Le FBI enquête en Afrique de l'Est après les attentats des ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie…
3. Mistakes Were Made
Les Erreurs Commises
Genre : Épisode
Série : The Looming Tower
Saison 1 Épisode 3
Date de diffusion USA : 28 février 2018
Réalisé par : John Dahl
Durée : 50 minutes
Le FBI met la main sur un suspect lié aux attentats…
4. Mercury
Mercure
Genre : Épisode
Série : The Looming Tower
Saison 1 Épisode 4
Date de diffusion USA : 7 mars 2018
Réalisé par : Ali Selim
Durée : 50 minutes
Martin Schmidt est renvoyé de l’Alec Station après avoir refusé de transmettre des informations au FBI…
5. Y2K
L'An 2000
Genre : Épisode
Série : The Looming Tower
Saison 1 Épisode 5
Date de diffusion USA : 14 mars 2018
Réalisé par : Ali Selim
Durée : 46 minutes
Une menace terroriste pèse sur les festivités du passage à l’An 2000…
6. Boys at War
Les Soldats
Genre : Épisode
Série : The Looming Tower
Saison 1 Épisode 6
Date de diffusion USA : 21 mars 2018
Réalisé par : Michael Slovis
Durée : 49 minutes
La CIA continue de dissimuler des renseignements importants au FBI…
7. The General
Le Général
Genre : Épisode
Série : The Looming Tower
Saison 1 Épisode 7
Date de diffusion USA : 28 mars 2018
Réalisé par : Michael Slovis
Durée : 50 minutes
O’Neill et Sufan enquêtent au Yémen suite à l’attentat contre l’USS Cole…
8. A Very Special Relationship
Un Lien Particulier
Genre : Épisode
Série : The Looming Tower
Saison 1 Épisode 8
Date de diffusion USA : 4 avril 2018
Réalisé par : Craig Zisk
Durée : 49 minutes
John O’Neill fait face aux conséquences de son erreur…
9. Tuesday
Mardi
Genre : Épisode
Série : The Looming Tower
Saison 1 Épisode 9
Date de diffusion USA : 11 avril 2018
Réalisé par : Craig Zisk
Durée : 48 minutes
La cellule terroriste dirigée par Atta se prépare…
10. 9/11
11/9
Genre : Épisode
Série : The Looming Tower
Saison 1 Épisode 10
Date de diffusion USA : 18 avil 2018
Réalisé par : Craig Zisk
Durée : 50 minutes
Après les attentats, Soufan poursuit l’enquête au Yémen et la CIA dévoile enfin des renseignements...

La critique

rédigée par
Publiée le 11 septembre 2021

Saisissante, The Looming Tower permet de comprendre les défaillances administratives et humaines qui ont permis aux terroristes déterminés d’Al-Qaïda de commettre les attentats du 11 septembre 2001. Bénéficiant d’un scénario rigoureux et des performances excellentes de son casting, la mini-série constitue un document essentiel sur cet événement majeur dont les causes doivent être connues, à l’heure où ses conséquences guident encore l’équilibre du monde.

Le matin du 11 septembre 2001, entre 08h46 et 10h03, 19 kamikazes de l’organisation terroriste Al-Qaïda font 2 977 victimes en dirigeant quatre avions de ligne contre les tours du World Trade Center à New York, dont elles provoquent la destruction, contre le Pentagone près de Washington, D.C. et dans un champ près de Pittsburgh en Pennsylvanie. Le choc parcourt instantanément la planète qui reste tétanisée devant des écrans de télévision diffusant en boucle les images d’une horreur inimaginable. Le 11 septembre 2001 modifie définitivement l’équilibre géopolitique du monde et conduit les États-Unis à lancer plusieurs interventions militaires plus ou moins légitimes en Afghanistan et en Irak. Alors que chacun s’interroge sur les défaillances qui ont pu permettre à ces attentats odieux de se produire, de multiples œuvres racontent ces événements.
Les documentaires produits sur la tragédie sont ainsi nombreux, le plus impressionnant d’entre eux étant certainement New York : 11 Septembre (2002) des frères Jules et Gédéon Naudet et de James Hanlon, tourné au cœur de l’intervention des pompiers new-yorkais en plus de présenter la seule captation de l’avion percutant la Tour Nord. Outre des docu-fictions télévisées à la qualité souvent discutable, plusieurs films de fiction montrent le vécu des héros de cette journée, à l’image de World Trade Center (2006) d’Oliver Stone ou de Vol 93 (2006) de Paul Greengrass.

Des tentatives de montrer la genèse de ces attaques ont également été réalisées. The Path to 9/11 (Destination 11 Septembre), un téléfilm diffusé sur ABC les 10 et 11 septembre 2006, en constitue certainement la première et la plus ambitieuse. Il est alors censé s’inspirer des conclusions du rapport rendu le 22 juillet 2004 par la Commission Nationale sur les attaques terroristes contre les États-Unis, formée en novembre 2002 par le Président George W. Bush et le Congrès et composée paritairement de parlementaires démocrates et républicains. La Commission du 11/09 est ainsi chargée de faire la lumière sur les attentats, le rôle de leurs auteurs et les défaillances de l’administration américaine.
Cependant, l’œuvre en deux parties déçoit en étant pénalisée par ses approximations et le manque de rigueur de son scénario par rapport aux faits, et ce, malgré une ambition initiale très importante illustrée par son budget de 40 millions de dollars. Ces manquements provoquent même la polémique, le directeur de la CIA George Tenet demandant la suppression d’une séquence tandis que des agents du FBI refusent d’être crédités en tant que consultants en raison de divergences par rapport au contenu du scénario. La controverse est même politique, le téléfilm étant accusé de désigner l’administration Clinton comme responsable. En conséquence, The Path to 9/11 (Destination 11 Septembre) ne fait l’objet d’aucune rediffusion et reste introuvable en DVD ou sur les services de vidéo à la demande.

La même année, le journaliste du New Yorker Lawrence Wright sort le livre La Guerre Cachée : Al-Qaïda et les Origines du Terrorisme Islamiste (The Looming Tower: Al-Qaeda and the Road to 9/11 en version originale). L’auteur reprend avec les termes “Looming Tower” (une tour qui émerge, se profile) une expression présente dans le Coran qui aurait été citée par Oussama ben Laden lors d’un mariage ayant précédé de peu le 11 septembre 2001 (“Où que vous soyez, la mort vous trouvera, y compris si vous êtes dans des tours dressées”). Wright développe dans son ouvrage les racines de l’islamisme radical et les parcours de personnalités clés d’Al-Qaïda ou ceux des responsables de l’antiterrorisme américain. Cette enquête approfondie démontre également les dysfonctionnements de l’administration américaine et les lacunes importantes dans la coopération entre la CIA et le FBI. Considéré par son auteur lui-même comme “probablement l’une des choses les plus importantes qu’il aura faites en tant que journaliste”, le livre reçoit de nombreuses récompenses, dont un prix Pulitzer en 2007.
En 2011, l’ancien agent du FBI Ali Soufan publie The Black Banners: The Inside Story of 9/11 and the War Against al-Qaeda, dans lequel il raconte ses années à combattre le terrorisme en tant que l’un des rares agents arabophones du FBI (et le seul de l’antenne de New York !) aux côtés de son supérieur, John O’Neill.

Durant des années, Lawrence Wright et Ali Soufan ont été sollicités à plusieurs reprises afin d’adapter leurs ouvrages en œuvres audiovisuelles. Après avoir rejeté des offres ne leur inspirant pas confiance, les deux hommes rencontrent le producteur et réalisateur Alex Gibney, avec qui Wright avait déjà collaboré pour les documentaires My Trip to Al Qaeda (2010) et Scientologie, Sous Emprise (2015). Ils décident de travailler avec lui, Wright lui faisant en effet confiance pour traiter de questions délicates devant être abordées avec nuance, son expérience du documentaire garantissant son attachement à la réalité factuelle. Ils recrutent ensuite le scénariste Dan Futterman, principalement reconnu pour avoir signé le script du biopic Truman Capote (2005).
Après avoir ébauché une trame, les quatre hommes contactent la chaîne HBO et les plateformes Netflix et Prime Video afin de vendre leur projet. Ils proposent également The Looming Tower à Hulu sans réellement envisager cette solution, la plateforme ayant à l’époque davantage vocation à proposer les séries produites pour les studios qui composent la joint-venture la possédant. Contre toute attente, le service alors détenu à hauteur de 30% par The Walt Disney Company (cette part s’élevant lors de la publication de la présente critique à 67%) commande la mini-série et la finance largement. Au-delà de la question pécuniaire, Hulu s’engage à garantir une totale indépendance aux créateurs de la série, y compris face à d’éventuelles pressions des agences de renseignement. Ces critères déterminants conduisent Wright et ses collègues à signer avec la plateforme.

Il faut dire que The Looming Tower n’hésite pas à mettre les pieds dans le plat et traite sans retenue de sujets particulièrement délicats et embarrassants pour les institutions ainsi que pour les acteurs de cette tragédie eux-mêmes, avec une rigueur journalistique qui ancre pleinement le récit dans la réalité. La mini-série présente des faits, certes de manière fictionnalisée comme le rappelle le message apparaissant au début de chaque épisode, mais de manière suffisamment neutre et objective pour montrer la part de responsabilité des uns et des autres dans ces événements.
Cette volonté de vérité est salvatrice, alors que les complotistes se sont emparés des attentats du 11 septembre pour développer les théories les plus fantaisistes postulant un dessein funeste du gouvernement américain. The Looming Tower montre une réalité crédible, où la responsabilité des États-Unis n’est à rechercher que dans le résultat malheureux des comportements individuels et des dysfonctionnements bureaucratiques.

Est ainsi mise en lumière la rivalité entre la CIA et son Alec Station et la section antiterroriste new-yorkaise I-49 du FBI menée par John O’Neill. La volonté de l’agence de Langley de préserver - et de cacher - des renseignements cruciaux, sous prétexte d’une volonté d’en préserver le potentiel face à des interventions hâtives ou des ingérences du FBI, est présentée comme pleinement coupable. La série masque ainsi mal son parti pris malgré toutes les meilleures volontés d’objectivité, mais les faits sont trop accablants pour lui en vouloir. Pour les appuyer, sont présentées en guise de fil rouge des reconstitutions et des images réelles des auditions des différents protagonistes devant la Commission du 11/09 en 2004. La nuance est néanmoins présente, des membres de la CIA étant montrés en train de douter ou d’apporter de la contradiction dans le but de partager les renseignements avec l’agence chargée de la sécurité intérieure.
La mini-série évoque également la responsabilité politique en n’épargnant personne. L’affaire Monica Lewinsky est notamment présentée comme une diversion des affaires véritablement importantes pour l’administration Clinton. Sous l’ère de George W. Bush, le rôle de Condoleezza Rice, qui n’a accordé qu’un temps restreint aux agents l’ayant alertée sur une menace qu’elle a largement minimisée, est notamment pointé du doigt. Sont également mis en avant les liens étroits entre le pouvoir américain et l’Arabie Saoudite, ainsi que le zèle important de la CIA pour protéger les intérêts saoudiens. Il en va de même pour la volonté du gouvernement des États-Unis, dès les premières minutes suivant l’attaque, de faire porter le chapeau au régime irakien de Saddam Hussein contre toutes les évidences. Ces faits, déjà évoqués dans le pamphlet Fahrenheit 9/11 (2004) de Michael Moore, interrogent sur les priorités de ces acteurs dans un tel contexte.

L’œuvre n’oublie cependant pas de désigner les seuls et uniques auteurs de ces attentats que sont les terroristes d’Al-Qaïda. L’organisation apparaît comme déterminée à frapper et impossible à anéantir, telle l’Hydre de Lerne dont les têtes repoussent immédiatement après avoir été coupées. Sont ainsi montrés les camps de l’organisation terroriste et ses différents acteurs majeurs. Ayman al-Zawahiri, son co-fondateur qui a succédé à Oussama ben Laden à la tête de l’organisation, est notamment présenté parmi d’autres membres du groupe. L’introduction du sixième épisode le voit expliquer le sens du combat mené par Al-Qaïda dans une scène glaçante. La série suit également le commando composé de Khalid al-Mihdhar et Nawaf al-Hazmi, qui ont détourné avec trois autres terroristes le vol 77 ayant frappé le Pentagone. Bien que les événements réels aient différé, les deux hommes sont montrés aux côtés de Mohamed Atta, leader des pirates de l’air du 11 septembre qui s’est assuré de la réussite de l’opération durant les semaines précédant les attaques, avant d’y participer lui-même dans le vol 11 ayant percuté la tour nord du World Trade Center. 
Ces séquences, qui montrent des hommes souvent immatures encadrés par des idéologues extrémistes aussi calmes que dangereux, font froid dans le dos. Aux moments de vie banals succèdent en effet des sessions de simulateur de vol ou d’entraînements à la neutralisation violente des passagers et membres d’équipages des avions.

The Looming Tower tient sa crédibilité, indispensable pour traiter de ces sujets, dans son aspect authentique. L’utilisation de la langue arabe sous-titrée en version originale y contribue et lui permet de se différencier de divertissements destinés à être accessibles au grand public américain comme 24 Heures Chrono (2001-2014). Cette crédibilité est renforcée par l’utilisation d’images d’archives parfaitement insérées dans le montage au milieu des images tournées pour la série. Plus qu’un effet de style, ce choix renforce le poids du propos en rappelant régulièrement au spectateur qu’il assiste à la terrible réalité. 
À ce titre, et dès le premier épisode, la séquence de l’interview d’Oussama ben Laden diffusée en mai 1998 par le journaliste John Miller sur ABC est marquante. Voir le dirigeant d’Al-Qaïda proférer ses menaces à l’encontre des Américains avec son vrai visage est ainsi impressionnant, d’autant plus que son interlocuteur est ici un personnage, interprété par C. J. Wilson, qui intervient par ailleurs plus tard dans une scène. Le terroriste est ainsi un personnage à part entière de la mini-série qui s’assume dès lors instantanément comme un récit historique s’éloignant de la fiction. Doit également être cité le rappel saisissant fait dans l’épisode 9 sur les auditions de George Tenet, le directeur de la CIA, et Condoleezza Rice, conseillère à la Sécurité Nationale du Président Bush. Après une reconstitution de ces auditions avec les comédiens, l’épisode s’achève sur la retransmission réelle des enregistrements de la Commission du 11/09. L’effet est aussi réussi que poignant et provoque le dégoût et la peine du spectateur.

La crédibilité de la mini-série tient également dans la diversité et la qualité de ses décors. La production s’installe ainsi au Maroc qui tient lieu de Yémen, tandis que les plans aériens de l’Afghanistan sont tournés dans le Pakistan voisin. Par sa variété de paysages urbains et désertiques, Johannesbourg en Afrique du Sud accueille les scènes se déroulant au Kenya, en Tanzanie, en Angleterre, en Albanie et même à Las Vegas, au prix de quelques aménagements. L’illusion est parfaite, les séquences se déroulant au Yémen retranscrivant notamment une certaine désolation qui sert largement le récit de l’attentat contre l’USS Cole et l’enquête qui s’ensuit.
Le décor new-yorkais est également réussi. Avant leur fin tragique, les tours jumelles du World Trade Center sont donc aussi omniprésentes que fondues dans le décor, se profilant simplement comme le laisse entendre le titre. Précisément, l’écran-titre présent au début de chaque épisode donne le ton, les lettres composant le nom de la mini-série projetant une ombre ressemblant aux sillons de métal iconiques des deux bâtiments. Les tours sont visibles dans le décor de Manhattan, les réalisateurs et le directeur de la photographie Fred Elmes attachant une importance particulière à leur présence dans le cadre et à leur impact sur la lumière retranscrite à l’image.

Au-delà de ces réussites, The Looming Tower repose sur un casting hautement qualitatif.

John O’Neill, le responsable de l’unité antiterroriste new-yorkaise du FBI, est incarné par Jeff Daniels qui succède ainsi à Harvey Keitel (Pulp Fiction, Smoke, Une Nuit en Enfer) qui interprétait ce personnage fil rouge de The Path to 9/11 (Destination 11 Septembre). Né le 19 février 1955 dans l’État de Géorgie, Daniels est notamment connu pour son rôle dans Dumb and Dumber (1994) aux côtés de Jim Carrey ou dans la série The Newsroom (2012-2014). Chez Disney, il est Roger dans le film en prises de vues réelles de 1996 Les 101 Dalmatiens. Après O’Neill, il retrouve un membre du FBI avec le rôle-titre de la mini-série The Comey Rule (2020) narrant la relation entre le directeur James Comey et le Président Trump.
Jeff Daniels retranscrit à merveille le charisme naturel dont était vraisemblablement doté John O’Neill. Ce dernier, recruté en 1976 par le FBI, a gravi les échelons pour être nommé coordinateur de la lutte antiterroriste, un poste qu’il assumait avec exigence et une personnalité forte qui l’a vu se créer de nombreux ennemis au sein des administrations américaines et de sa hiérarchie mais qui lui a également valu le respect de nombre de ses collaborateurs et contacts. La mini-série comporte ainsi de nombreuses scènes de coups de gueule et montre le parcours d’un homme pénalisé par une administration favorisant davantage l’obéissance servile et silencieuse à l’audace. Daniels livre un O’Neill véritablement attachant, rendant sa fin tragique encore plus douloureuse.

Ali Soufan est quant à lui interprété par le Français Tahar Rahim. Né le 4 juillet 1981 à Belfort, l’acteur est révélé en 2009 dans Un Prophète de Jacques Audiard. Sa carrière le conduit à jouer en France ainsi que dans des productions internationales indépendantes, dont Désigné Coupable (2021) qui le voit jouer un détenu mauritanien à Guantanamo. 
Rahim est véritablement impressionnant dans The Looming Tower. Son habilité à parler parfaitement anglais et arabe le rend totalement crédible dans le rôle de l’agent du FBI né au Liban en 1971 et ayant émigré avec sa famille aux États-Unis avant d’y faire ses études à l’université Mansfield de Pennsylvanie. Encadré au FBI par John O’Neill, l’agent fait ses armes dans la lutte contre Al-Qaïda et enquête notamment contre l’attentat de l’USS Cole au Yémen, avant d’apprendre après le 11 septembre que la CIA a dissimulé des informations cruciales.

Outre leur complicité d’abord professionnelle puis progressivement personnelle, O’Neill et Soufan partagent dans The Looming Tower des difficultés communes liées à leur travail et à leurs histoires personnelles. Ces points de rapprochements, qui dépassent leurs divergences apparentes, apportent de la profondeur et de la nuance à la série, intéressante quand elle traite ces aspects plus personnels. Les deux hommes connaissent en effet des relations sentimentales contrariées, bien que ceci se matérialise de manière opposée. Si Daniels surjoue peut-être légèrement les relations de son personnage avec plusieurs femmes, il semble qu’O’Neill était effectivement dans la réalité un séducteur patenté, ayant même eu des soucis avec le FBI pour avoir fait entrer une maîtresse dans une planque. De son côté, Ali Soufan est dépeint comme luttant pour parvenir à conserver un rapport normal avec une petite amie, ses rendez-vous avec Heather, interprétée avec justesse par Ella Rae Peck (Gossip Girl), étant constamment interrompus par des obligations professionnelles l’envoyant pour plusieurs semaines dans des contrées et vers des missions qu’il doit tenir secrètes.
O’Neill et Soufan partagent également des interrogations par rapport à leur foi, la série traçant alors un parallèle passionnant. Tandis qu’O’Neill tâche de retrouver le chemin de la foi catholique pour y trouver une morale de vie qui semble lui avoir échappée, Soufan souffre de voir sa religion dévoyée par les Islamistes radicaux. L’agent du FBI vit un islam contemporain qu’il revendique et dans lequel il cherche du réconfort, alors que ses collègues le discriminent consciemment ou non pour ses origines et son appartenance religieuse. Surmontant cette souffrance, il parvient à utiliser ses connaissances religieuses étendues pour déconstruire les croyances erronées des terroristes qu’il interroge.

À côté de ces deux figures historiques du FBI, le personnage de Diane Marsh incarne la rigueur mal placée de la CIA. Interprétée par l’actrice Wrenn Schmidt (Boardwalk Empire, The Americans), elle est la disciple de Martin Schmidt, qui dirige l’Alec Station avant d’en être renvoyé et de lui laisser la place. Ce dernier est quant à lui joué par Peter Sarsgaard (Garden State). Ces deux personnages ont la particularité d’être fictifs et d’être une composition de plusieurs personnalités réelles. Marsh est ainsi la synthèse de trois agents de la CIA au moins, dont Alfreda Frances Bikowsky qui prit la tête de l’Alec Station en 2003 après avoir succédé à Michael Scheuer, qu’elle a épousé en 2014. Scheuer a lui-même inspiré le personnage de Martin Schmidt, lui donnant son antagonisme avec John O’Neill et son approche agressive de la traque d’Oussama ben Laden.
Les deux acteurs excellent dans ces compositions et sont détestables à souhait. Ils dépeignent des personnes antipathiques n’hésitant pas à être odieuses avec leurs collaborateurs ou avec des relations professionnelles du FBI, y compris lorsqu’elles travaillent sous le même toit. L’attirance entre Marsch et Schmidt provoque le malaise, le jeu des comédiens accentuant l’aspect malsain de cette relation sentimentale entre un gourou et sa disciple sans pour autant trop en faire.

Le reste du casting de The Looming Tower est également pleinement satisfaisant. Bill Camp (12 Years a Slave, Vice) parvient à émouvoir dans le rôle du personnage imaginé de Robert Chesney, agent du FBI loyal et proche de la retraite, notamment lorsqu’il se prend d’affection pour l’agent de l’ambassade américaine au Kenya Deborah Fletcher. Louis Cancelmi (Boardwalk Empire) et Jamie Neumann (The Deuce) composent un duo convaincant d’agents du FBI positionnés en liaison au sein de l’Alec Station, et rendent inadmissible la position dans laquelle leurs personnages sont placés. Le jeune Mohamad Ashraf est excellent en tant que Walla, enfant condamné à un destin funeste de chair à canon par les djihadistes après avoir survécu à une frappe aérienne américaine. Du côté des pontes, Michael Stuhlbarg (Doctor Strange, Fargo) joue le rôle de Richard A. Clarke, conseiller national sur la sécurité intérieur et coordinateur, auprès du Président Clinton, des questions relatives au terrorisme. La performance du comédien lors d’une scène du dernier épisode se déroulant lors de l’audition du personnage devant la Commission du 11/09 est notamment mémorable. Alec Baldwin (Pearl Harbor, Clerks) est quant à lui et comme toujours impeccable dans l’interprétation du directeur de la CIA George Tenet.
La mini-série dispose, aux côtés de ces quelques personnages secondaires majeurs, d’une liste importante de seconds rôles et de figurants, qu’ils soient issus des rangs de l’administration américaine, d’Al-Qaïda ou des administrations des États traversés. Aucune performance ne ressort négativement, contribuant ainsi au caractère riche et authentique de cette fresque historique.

The Looming Tower est mise en ligne aux États-Unis sur Hulu entre le 28 février et le 18 avril 2018 après avoir connu des projections en avant-première à New York et lors du Festival International du Film de Berlin. Dans le reste du monde, et notamment en France, elle est accessible à compter de mars 2018 sur la plateforme Prime Video.
La mini-série rencontre des critiques favorables qui louent tant son écriture que le jeu des comédiens. La presse remarque que tout en disposant d’une rigueur journalistique sur les faits, elle offre un véritable thriller haletant, The Hollywood Reporter la comparant même à la série pleinement fictionnelle Homeland (2011-2020), dont elle estime que The Looming Tower est supérieure à sa septième saison diffusée concomitamment.

The Looming Tower offre un nouveau regard sans concession sur les événements ayant conduit à la tragédie du 11 septembre 2001. Rigoureuse dans la réalité factuelle de son récit, elle propose une reconstitution passionnante et réussie portée par des comédiens convaincants, Tahar Rahim en tête. Bouleversante, la mini-série doit être vue tant pour le devoir de mémoire que pour disposer d’une meilleure compréhension de cette tragédie.

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