Aliens vs. Predator
Requiem
Titre original : Aliens vs. Predator : Requiem Production : 20th Century Fox Davis Entertainment Company Brandywine Productions Dune Entertainment Date de sortie USA : Le 25 décembre 2007 Genre : Science-fiction |
Réalisation : Greg Strause Colin Strause Musique : Brian Tyler Durée : 94 minutes |
Le synopsis
Lors du voyage retour vers sa planète d'origine, un vaisseau Predator et son équipage sont attaqués par une créature, résultat d'une hybridation entre un Alien et un Predator. Après un atterrissage en catastrophe sur Terre, celle-ci prend la fuite avec d'autres monstres ayant survécu à l'accident en direction de la ville voisine, Gunnison, dont les habitants se retrouvent menacés par ces êtres maléfiques... |
La critique
Suite au relatif succès d’Alien vs. Predator, 20th Century Fox n’allait pas s’arrêter en si bon chemin et voit l’opportunité d’élargir les possibilités de franchises et de crossovers en proposant aussitôt une suite à la rencontre entre les deux monstres de son écurie. L’objectif : capitaliser sur le xénomorphe et le chasseur extraterrestre afin de raconter autant d’histoires que possible. Après la version de Paul W. S. Anderson, à la qualité discutable mais ambitieuse et assez divertissante, Aliens vs. Predator : Requiem avait donc pour tâches de rehausser le niveau et d'apporter une nouvelle pierre à l’édifice. Les deux créatures reprennent ainsi les armes pour un combat sans merci et non pas seulement dans un lieu isolé, mais au beau milieu d’une petite ville américaine. Mais voilà, avec la meilleure volonté du monde, le film est plutôt décevant, aussi prévisible qu’ennuyeux, un sombre produit conçu uniquement à des fins commerciales.
Alien vs. Predator s’achevait dans un bain de sang, malgré la victoire de l’alliance entre les Predators et Alex Woods, unique rescapée humaine de l’expédition menée par Charles Bishop Weyland contre les Aliens. Chaque espèce reprenait ensuite son chemin, les chasseurs retournant dans leur vaisseau avec à son bord la dépouille d’un de leurs soldats mort au combat. Mais une petite erreur s’est glissée dans leur calcul : ledit soldat a été préalablement imprégné par un facehugger et une petite créature a grandi dans son corps, le temps que les Predators emportent le cadavre de leur camarade à bord. Le film se terminait ainsi sur une fin ouverte, le spectateur assistant à la naissance d’un hybride entre les deux monstres, surgissant de la cage thoracique du Predator décédé, aussi vorace que ses géniteurs : le Predalien. Ayant pourtant conçu Alien vs. Predator comme un métrage solo, Paul W. S. Anderson n’a donc pas pu résister à l’envie de glisser dans son scénario un petit cliffhanger en conclusion, afin de pousser les producteurs à commander une suite, qui devait initialement voir le retour d’Alex Woods pour affronter le Predalien. Hélas, tout ne s’est pas passé comme prévu.
Étant donné les recettes honorables au box-office d’Alien vs. Predator et en dépit des critiques mitigées à sa sortie, 20th Century Fox souhaite remettre le couvert et lancer le chantier d'une suite à la guerre menée par les deux mythiques créatures. Les dirigeants doivent toutefois se heurter à l’indisponibilité d’Anderson, déjà occupé par les tournages et l’écriture des films Resident Evil : Extinction et Death Race. Ce dernier passe donc son tour, autant derrière la caméra qu'à la rédaction du script, sans laisser non plus quelques pistes sur ce qu’il avait prévu avec sa la fin ouverte. Le scénariste Shane Salerno, qui avait assisté Anderson sur l’écriture du précédent volet, est alors appelé à la rescousse pour pencher sur l’intrigue de cette séquelle. Après réflexion, Salerno propose deux synopsis à Fox, l’un se déroulait en Afghanistan au beau milieu d’une guerre entre l’armée américaine et des terroristes avec pour point d’orgue le crash du vaisseau Predator provoqué par le Predalien, l’autre reprenait peu ou prou le même scénario, mais dans une petite ville américaine aussitôt coupée du monde suite au crash et où d’innocents civils se retrouvent pris au piège.
Les producteurs jettent donc leur dévolu sur ce deuxième scénario et se lancent à la recherche d’un réalisateur. Après avoir décliné la proposition des créateurs des effets spéciaux Tom Woodruff Jr. et Alec Gillis de mettre en scène ce nouveau film, Fox se tourne vers les frères Colin et Greg Strause, également superviseurs d’effets spéciaux. Ces derniers ont emménagé à Los Angeles dans le but de percer dans l’industrie cinématographique. Malgré une tentative infructueuse de trouver un emploi chez Industrial Light & Magic, les deux frères ont travaillé sur The X-Files - Le Film (1998) et fondent leur propre société d’effets visuels, Hydraulx. La firme a produit des effets spéciaux pour plusieurs blockbusters tels que Volcano, Le Jour d’Après, Poséidon ou encore Marvel's Avengers. Ils ont entre autres réalisé des publicités et des clips musicaux pour des artistes, en particulier des groupes de rock et de métal : Linkin Park, Nickelback, Disturbed, Flyleaf. Outre leurs travaux dans les effets visuels et la réalisation d’Aliens vs. Predator : Requiem, les frères Strause feront une nouvelle incursion au cinéma en tant que metteurs en scène avec le film de science-fiction Skyline (2010), dont ils produiront les suites (Beyond Skyline et Skylines).
Aliens vs. Predator : Requiem n’est pas le premier contact des frères Strause avec la saga. Grands amateurs d’Aliens, le Retour, ils avaient proposé à 20th Century Fox une idée de film, dont ils écrivirent en partie le scénario et dont l’action se déroulait entièrement dans l’espace, pour le premier film Alien vs. Predator. Dès que le script de Salerno fut rédigé, les producteurs pensèrent donc immédiatement à eux après l’avoir lu, notamment en raison de leur expérience dans les effets visuels et aux vues du budget envisagé. Les deux frères sont donc engagés au printemps 2006 et ont l’autorisation d’apporter quelques changements au scénario, parmi eux une scène prenant place sur la planète des Predators. Ils n’ont toutefois pas le temps de prendre leurs aises, le tournage étant prévu pour le mois de septembre de la même année. Avec 40 millions de dollars de budget, soit beaucoup moins que pour le précédent opus, Colin et Greg Strause sont contraints d’effectuer quelques coupures, tandis qu’avec le manque de temps et une échéance aussi courte, les concepteurs d’effets et des créatures n’ont d’autres choix que d’employer les moules utilisés pour Alien vs. Predator et Alien, la Résurrection afin de créer les animatroniques et costumes des xénomorphes et du Predalien.
Le tournage du film, qui, à ce moment-là, a pour titre Alien vs. Predator : Survival of the Fittest, démarre comme prévu en septembre 2006 à Vancouver pour une durée réduite de 52 jours. Les frères Strause doivent à nouveau faire au plus vite, le calendrier imposé leur laissant, ainsi qu’aux acteurs, peu de temps pour répéter et faire plusieurs prises, ce qui les force régulièrement à improviser et aller à l’essentiel.
Les prises de vues sont malgré tout bouclées dans les temps et la date de sortie du film est prévue pour décembre 2007, mais cette fois sous le titre Aliens vs. Predator : Requiem. Les deux frères se chargent ensuite des effets numériques avec leur société Hydraulx.
Le casting, quant à lui, est composé essentiellement d’acteurs connus des téléspectateurs ou de seconds couteaux : Reiko Aylesworth (les séries On ne Vit Qu’une Fois, 24 Heures Chrono, Scorpion) dans le rôle du soldat Kelly O’Brien, John Ortiz (les films Fast and Furious 4 et Fast and Furious 6, American Gangster, Rendez-vous l’Été Prochain, Kong : Skull Island et Bumblebee, la série Will Trent) dans celui du shérif Eddie Morales, Steven Pasquale (les séries Rescue Me, The Good Wife, Bloodline et American Horror Story : The People v. O.J. Simpson) campant Dallas Howard, un ancien criminel tout juste sorti de prison, Johnny Lewis (les séries Les Quintuplés, Newport Beach et Sons of Anarchy), incarnant Ricky, le frère de Dallas, ou encore Kristen Hager (les séries Valemon, Being Human, Condor, Chicago Med, les films Wanted : Choisis ton Destin et Leslie, My Name is Evil) dans le rôle de Jesse, une amie de Ricky, ou encore Chris William Martin (les séries Felicity, The L Word et Tom Stone) dans celui du policier Ray Adams.
Les frères Strause voulaient également que l’acteur Adam Baldwin reprenne son rôle d’agent Garber, présent dans Predator 2, mais ce dernier était indisponible. De même, alors que le volet précédent avait pour tâche d’attirer les cinéphiles, ainsi que les fans des franchises, toute l’équipe souhaitait que le film s’adresse exclusivement aux fans d’Alien et de Predator, avec de nombreuses références aux sagas disséminées pendant le métrage. Colin et Greg Strause ne se sont pas non plus retenus pour exprimer tout le mal qu’ils pensaient du film de Paul W. S. Anderson et ont insisté sur leur volonté de revenir aux sources des deux sagas et de mettre l’accent sur l’horreur sans délaisser les personnages humains et les obstacles qu’ils devront franchir pour rester en vie.
Le récit débute donc là où l’opus précédent s’était achevé. Lors du voyage retour sur la planète des Predators, le Predalien s’extrait du torse de l’un des chasseurs morts après le combat contre les aliens. Pendant cette traversée, la petite créature grandit jusqu’à atteindre une taille imposante et assassine tous les membres de l’équipage. Le vaisseau s’écrase alors dans une forêt du Colorado, près de la petite bourgade de Gunnison. Après cet accident, le dernier Predator encore en vie envoie un message de détresse aux siens, avant d’être exécuté à son tour par l'hybride, qui s’enfuit et prend la direction de ville, accompagné de facehuggers transportés par le vaisseau. Lorsqu’un certain nombre d’entre eux commencent à imprégner les humains et le Predalien à s’attaquer aux habitants, un autre Predator appelé à la rescousse par ses pairs arrive pour remettre de l’ordre. Pour les citoyens sans défense de Gunnison, pris dans une guerre sans merci entre les deux espèces, une longue nuit de violence et de terreur se prépare, alors qu’ils tentent par tous les moyens de quitter la ville en un seul morceau.
Avec des cinéastes passionnés déterminés à ramener les deux sagas à leurs racines horrifiques et un scénario qui promettait d’amener sur grand écran le Predalien, créature fantasmée par une majeure partie des amateurs, après que celui-ci a été introduit dans les adaptations en bandes dessinées et en jeux vidéo, beaucoup d’attentes étaient posées sur ce nouveau volet, sans compter les multiples critiques formulées par les réalisateurs à l’encontre du film d'Anderson. Annoncé en grandes pompes, ce nouveau volet est pourtant malheureusement le plus faible des deux franchises réunies. Avec toute la bonne volonté du monde, Aliens vs. Predator : Requiem ressemble à un mauvais film d’horreur pour adolescents. Le scénario se résume une fois de plus à des combats d’extraterrestres, avec des humains pris au milieu. L’approche est très générique et fatiguée, ce qui donne une intrigue terne et oubliable. Or, il y avait pourtant de quoi faire avec un Predator infecté et la naissance d’une créature hybride encore plus dangereuse et meurtrière que ses géniteurs : mais voilà, rien n’a de sens dans cet opus, qui semble avoir été conçu uniquement dans un but commercial.
Si Alien vs. Predator avait déjà des difficultés à s’inscrire dans la chronologie des deux franchises , son successeur n’arrange pas la situation. Censé faire suite au film d’Anderson, qui se situait déjà avant les événements de la saga Alien, et précéder Alien, le Huitième Passager, le métrage des frères Strause n’est pas avare en incohérences, ne serait-ce que pour son exploitation balourde des créatures. Les Aliens atterrissent ainsi sur Terre au beau milieu d’une petite ville américaine, s’attaquent à la population et font des dizaines de victimes, l’armée est dépêchée sur place tout comme les forces gouvernementales, alors que dans le film de Ridley Scott, l’humanité n’a jamais entendu parler des xénomorphes. Le scénario tente de cacher cette contradiction en faisant croire que le Predator efface toutes les preuves de son passage, mais cet élément est tellement forcé qu’il en est invraisemblable.
Passé ce détail, les quelques éléments nouveaux ne sont pas très bien amenés. Le film déplace pour la première fois l’action dans une petite ville américaine contemporaine. Concernant les créatures, si leur charme est toujours infaillible, elles semblent moins intimidantes et plus caricaturales, ce qui enlève du réalisme et de l’impact à leurs rencontres. Connus pour leur capacité à s’adapter rapidement à leur environnement, les Aliens sont ici en totale roue libre, attaquent de front au moindre signe de vie plutôt que d’attendre le moment propice et paraissent vaguement ridicules. En plus de ne pas respecter le temps de gestation des xénomorphes, Aliens vs. Predator : Requiem ne leur rend pas justice puisque le scénario les limite à des monstres avides de chair humaine, de simples bêtes de foire à l’intelligence réduite, alors qu’ils ne cherchent qu’à se reproduire de base, quand ils ne sont pas inoffensifs voire craintifs lorsque le Predator se dresse sur leur chemin. Si cet élément a le mérite de reprendre le concept du film précédent selon lequel les Aliens étaient utilisés par les Predators lors de rituels, cela nuit entièrement à leur côté terrifiant. Le chasseur extraterrestre, quant à lui, s’en sort à peine mieux que son ennemi, tant ses scènes censées générer de l’action sont réduites à des fusillades musclées mais brouillonnes, où la gestion de l’espace est ratée et la tension furtive bien que présente. Cela pourrait fonctionner si le film adoptait un ton léger à l’image de Predator 2, mais à la place, les frères Strause ont opté pour une approche exagérément sérieuse du début à la fin, là où le volet réalisé par Anderson faisait parfois preuve de second degré et d’humour noir, ce qui permettait d’apprécier la relative bonne tenue de l’ensemble.
L’autre attraction principale du film est donc le Predalien, union des deux créatures aux caractéristiques inédites. Plus grand que l’Alien, il dispose de griffes plus longues et de mandibules propres au Predator. Il conserve les tentacules en forme de dreadlocks, qui le ridiculisent légèrement et gâchent son design, sans toutefois ne rien enlever à sa nature menaçante et dérangeante. Assez bien conçu, doté d’une vision infrarouge et de réflexes foudroyants, le Predalien féconde également directement ses victimes, s’accrochant à leur visage avec ses mandibules et insérant des embryons extraterrestres dans leur estomac avec une langue creuse. Cet hybride a donc un indéniable potentiel horrifique et dérangeant, mais le film ne sait pas vraiment quoi en faire ni le mettre en valeur. La majorité de ses apparitions, notamment les combats, sont en effet mal éclairées, le cadre est très serré, l’image sombre et le tout filmé si grossièrement que le spectateur se retrouve noyé dans un flot d’actions, rendant ses scènes totalement illisibles, au point qu’il est souvent impossible de profiter du physique de ce nouveau-né et de ses capacités hors normes.
Si la volonté des cinéastes était de créer un sentiment de tension et de peur en gardant les extraterrestres et le prédateur dans l’obscurité, le résultat fait qu’une grande partie de l’action est difficile à suivre. Il devient frustrant pour le public d’essayer de comprendre ce qui se passe à l’écran, ce qui entraîne une déconnexion avec les personnages et un manque d’investissement dans l’histoire. Le métrage donne alors le sentiment qu’il n’est pas confiant dans ses effets spéciaux, ou bien que l’équipe du film a cherché à camoufler les scènes de violence en post-production avec un filtre obscur afin que le métrage ne pâtisse pas d’une interdiction aux mineurs non accompagnés, et ainsi maximiser le nombre d’entrées dans les salles de cinéma. Les combats demeurent impressionnants et le spectateur amateur d’action sera comblé, mais le coeur n’y est pas vraiment et progressivement, le film se suit du coin de l’oeil et sans entrain. Quant au rythme, il est évident que les frères Strause veulent aller trop vite dans ce qu’ils racontent afin de maintenir le public en haleine, si bien que le climat de peur a du mal à s’installer véritablement. Tout s’enchaîne à une allure hystérique, chaque scène se superposant à une autre frénétiquement, rendant parfois le visionnage épuisant.
Aliens vs. Predator : Requiem se rattrape en partie sur ses effets gores plutôt réussis, le métrage ne lésine pas sur les scènes choquantes et éprouvantes pour les plus sensibles, mais qui raviront sans aucun doute les amateurs d’horreur. Cet aspect du film lui donne un certain rythme, en particulier une scène dans une maternité qui risque de choquer même les plus téméraires. Toutefois, il est impossible de ne pas voir dans ce festival de violence une façon pour les frères Strause de cacher la pauvreté du scénario. Les précédents volets n’étaient pas exempts de sang et de gore, mais ces éléments étaient utilisés avec parcimonie et généraient une certaine frayeur basée sur des couloirs sombres et effrayants et des monstres à peine aperçus. Aliens vs. Predator : Requiem ne fait lui pas dans la dentelle et fait couler l’hémoglobine, à coups de sang acide projeté sur les visages, des poitrines et des estomacs qui éclatent, des bras démembrés et des têtes qui explosent. Si les trucages sont convaincants et instaurent une angoisse constante, chaque coin d’ombre laissant poindre une attaque suivie d’une mise à mort épouvantable, les enjeux dramatiques demeurent vains et le destin des personnages humains, peu attachants et pétris de clichés, laisse le public indifférent. Ces accès de violence particulièrement excessifs et permanents sont au final sans intérêt et ne cherchent que le sensationnalisme.
Du côté des humains, le film ne fait pas beaucoup d’efforts pour se rattraper. Les performances des acteurs sont une déception majeure dans Aliens vs. Predator : Requiem. Ils ne sont, en effet, pas vraiment aidés tant leurs personnages manquent de profondeur et de développement. Les conditions de tournage, sans compter la courte échéance afin de livrer le film au plus tôt, peuvent également expliquer le manque d’implication ou de temps pour adapter leurs jeux d’acteurs. Au mieux supportables, au pire oubliables, les héros sont génériques et répondent aux mêmes codes que des personnages de slashers, dont ils adoptent presque des comportements similaires. Chacun répond à une catégorie de clichés et seuls le soldat Kelly O’Brien et sa famille attirent la sympathie. De retour à la vie civile après avoir servi son pays, Kelly doit gérer le ressentiment de sa petite fille Molly, distante envers sa mère absente. L’apparition des monstres sera une opportunité pour elle de renouer le lien avec son enfant et de lui prouver qu’elle tient à elle coûte que coûte en la protégeant et en lui sauvant la vie à plusieurs reprises. Si cet arc narratif permet à l'opus de ne pas sombrer entièrement dans la caricature de film de monstres bourrin et décérébré, il n’est pas assez exploité et, surtout, ne trouve pas de conclusion réellement satisfaisante.
Les autres personnages semblent uniquement présents pour remplir le cahier des charges, entre le repris de justice qui cherche à retrouver sa place dans une société qui le rejette, le jeune homme amoureux qui veut impressionner la belle fille du lycée déjà en couple avec une brute, le policier qui tente de maîtriser la situation mais ne comprend pas ce qui se passe et la force armée composée de gros bras. Le public n’a pas vraiment l’occasion de s’attacher à eux et de se préoccuper de leur sort tant leurs intrigues sont dignes d’une fiction pour adolescents. Soit une poignée de personnages caricaturaux, écrits à la va-vite. Finalement, ils ne servent que de chair à canon pour les monstres, disparaissant de l’intrigue pour les besoins du script de diverses manières soudaines et violentes. Les dialogues sont souvent niais, maladroits et peu inspirés, avec des répliques génériques et des interactions clichées qui ne font pas grand-chose pour ajouter de la tension ou de l’excitation quant aux événements du film. Les acteurs suivent donc le mouvement et font ce qu’ils peuvent avec le peu de matière que le scénario veut bien leur donner, livrant des performances peu convaincantes qui ne parviennent pas à donner vie à leurs personnages.
Malgré ses défauts, Aliens vs. Predator : Requiem a quelques qualités rédemptrices. Le film tient sa promesse en séquences d’action intenses, avec beaucoup de violence sanglante et de carnage pour satisfaire les fans des deux franchises. Les batailles d’extraterrestres et de prédateurs sont assez passionnantes à regarder, même si elles sont souvent éclipsées par les lacunes techniques du film. Le métrage s’apprécie encore plus s’il est sorti de son contexte et du reste de la série, comme un petit film d’horreur cruel qui n’a pas peur de tester et repousser les limites de son public et des deux franchises, bien qu’il soit toujours l’entrée la plus faible pour chacune d’elles. L'opus contient en outre quelques idées intéressantes, notamment le fait de n’avoir qu’un seul Predator comme personnage principal. S’il n’est pas tout à fait le protagoniste de l’histoire, bien qu’il aurait dû l’être, se concentrer sur un anti-héros moralement ambigu rend le film un peu plus intelligent. Il s'agit également du premier volet où les xénomorphes se déchaînent sur la civilisation humaine, avec des créatures voraces dévastant la communauté autrefois tranquille de Gunnison. Les scènes où le Predalien dirige cette infestation extraterrestre sont indéniablement passionnantes et efficaces, avec beaucoup de gore et de meurtres cruels faisant preuve d’un sadisme encore jamais vu dans les deux sagas. Ces moments ultra violents ne conviendront pas à tous, mais permettent à l’opus de rivaliser avec les films d’horreur les plus brutaux et de mettre en scène les Aliens et les Predators dans ce qu’ils ont de plus horrible. Enfin, les dernières minutes, haletantes, font oublier les errements du scénario et tirent l’audience de sa torpeur.
Concernant la musique, celle-ci est assurée par Brian Tyler, qui effectue un bon travail en utilisant le style des bandes originales d’Alien et de Predator, en particulier la première, bien qu’aucun des thèmes préexistants des deux franchises ne soit présent. Le compositeur, qui a travaillé sur les partitions d’une majeure partie des volets de Fast and Furious, puis se fera un nom dans le domaine des blockbusters (la trilogie Expendables, Iron Man 3, Insaisissables, Thor : Le Monde des Ténèbres, Avengers : L’Ère d’Ultron, Rambo : Last Blood, Super Mario Bros), a également remplacé Jerry Goldsmith, célèbre compositeur d'Alien, le Huitième Passager, sur Prisonnier du Temps. Dans Aliens vs. Predator : Requiem, la musique de Tyler enchaîne les morceaux héroïques, les airs gigantesques et symphonies emplies de rage, soulignant la violence des affrontements et accentuant les scènes de peur par des sons fracassants, au risque de parfois frôler le tintamarre. Le musicien rend également hommage aux films précédents, reprenant quelques samples d’Aliens, le Retour et des deux premiers Predator en les modernisant pour les rendre plus inquiétants. Le film étant énormément centré sur l’action, la partition se déchaîne à coups de cordes frénétiques, de grondements de cuivres menaçants et de percussions puissantes provoquant la surprise et la terreur. Pour la peine, le travail de Brian Tyler est plutôt réussi et fait partie des maigres points forts du métrage.
Lancé en fanfare par les frères Strause et vendu comme la rencontre ultime entre les deux créatures Aliens vs. Predator : Requiem est d’abord présenté en avant-première à la convention de comics et de science-fiction de Los Angeles le 4 novembre 2007 avec la présence des réalisateurs et d’une partie du casting, avant une sortie au cinéma aux États-Unis le 25 décembre 2007 dans 2 563 salles, avec une concurrence plutôt moindre pour une période de fêtes de fin d’année. L’équipe est alors convaincue du succès à venir du film et insiste énormément sur la qualité supérieure de ce dernier par rapport au précédent volet. Il est toutefois classé R pour sa violence, la présence de scènes gores et le langage, contrairement à son prédécesseur, qui a reçu une classification PG-13, soit interdit aux mineurs de moins de 13 ans non accompagnés d’un adulte.
Il rapporte tout de même 9,5 millions de dollars le jour de sa sortie, soit une moyenne de 3 707 dollars par salle et reste en salles jusqu’à fin mai 2008 dans son pays d’origine, amassant jusqu’à 41 millions de dollars de recettes. Malheureusement, il réalise moitié moins que son prédécesseur sur le seul sol américain, et ce malgré un temps d’exploitation en salles similaire, un peu plus de trois mois. Le film des frères Strause se rattrape à l’international, il rapporte ainsi 5 millions de dollars en Australie, 9 millions au Japon et au Royaume-Uni et 7 millions en Russie, pour un total, États-Unis compris, de 128 millions de dollars. Tourné pour un budget inférieur à celui de son aîné, le film demeure un succès commercial pour les studios en dépit d’un résultat moindre au box-office.
Si le public est au rendez-vous dans les salles, l'opus reçoit des critiques assassines à sa sortie, aussi bien de la part des spécialistes que des amateurs de la saga. L’augmentation de gore et de la violence fait partie des nombreux points reprochés à Aliens vs. Predator : Requiem, quand ce ne sont pas son montage haché, son éclairage excessivement sombre et le manque de nouvelles idées qui lui sont imputés. La presse américaine assimile le film à « une orgie de violence insensée », « un enchaînement aléatoire de corps ensanglantés », « un carnage baveux conçu pour séduire les adolescents de 13 ans et laisser le reste du public se demander quand les deux franchises sont devenues aussi bruyantes et mauvaises » ou encore à « un film d’action ennuyeux qui ressemble à un mauvais jeu vidéo ». Le public non plus n’est pas séduit par le film et lui réserve un accueil glacial, les spectateurs l’estimant plus mauvais que son prédécesseur voire comme le pire volet des deux sagas réunies. Quelques critiques positives, mais assez rares, sortent du lot et considèrent Aliens vs. Predator : Requiem comme un « film de série B qui mérite vraiment son statut », qui fournit « suffisamment de frissons bon marché et de suspense modeste pour secouer les fans du genre » et bien que « n’étant pas de la science-fiction pure comme Alien, le Huitième Passager a pu l’être, constitue une entrée respectable dans la saga ». Cela n’empêche pas le film de recevoir deux nominations aux Golden Raspberry Awards, ou Razzie Awards, de 2008 dans les catégories Pire préquelle ou suite et Pire excuse pour un film d’horreur, qu’il perdra néanmoins face à I Know Who Killed Me et École Paternelle 2 respectivement.
Ce festival de mauvaises critiques ne décourage pourtant pas les frères Strause, qui pendant la promotion du film penchent déjà sur un troisième volet de la saga Alien vs. Predator suite à la fin ouverte laissée par Aliens vs. Predator : Requiem dans laquelle intervient un personnage jusqu’ici invisible depuis le film de Ridley Scott, mais dont le nom fait partie des plus connus de la saga Alien. L’apparition de ce personnage devait servir à préparer le terrain pour une éventuelle suite, et il était présent dans une précédente version du scénario d’Alien vs. Predator puisqu’il était un associé de Peter Weyland qui l’encourageait à partir pour l’exploration de la pyramide en Antarctique tout en envoyant un assassin à ses trousses.
La suite de Aliens vs. Predator : Requiem devait se dérouler sur la planète des Aliens où une équipe de scientifiques et de soldats américains a été envoyée, avec en sa possession la technologie des Predators après qu’une de leurs armes a été trouvée sur les ruines de Gunnison. Les Predators arrivaient sur la planète et devaient prendre en chasse un Roi Alien, une immense créature capable de voler. Mais le manque d’intérêt de 20th Century Fox pour mettre en chantier une nouvelle suite à la franchise parallèle face au succès en demi-teinte de Aliens vs. Predator : Requiem douche les espoirs des frères et la suite planifiée est suspendue définitivement. Les réalisateurs reprendront quelques éléments de leur projet avorté pour écrire leur film Skyline, sorti deux ans plus tard.
La franchise Alien vs. Predator se poursuivra en bandes dessinées, livres et jeux vidéo, mais plus du tout au cinéma. Elle tentera toutefois un retour par la petite porte grâce à la télévision. En mai 2023, une série animée intitulée Alien vs. Predator : Annihilation, produite par 20th Century Fox et prévue pour une diffusion sur la plateforme de streaming Netflix, avait en effet été achevée avant le rachat de Fox par Disney. Composée de dix épisodes, l’action se situait après les événements d’Alien, la Résurrection et racontée du point de vue d’un clan de Predators alors qu’ils traquent des xénomorphes à bord d’un vaisseau. La série demeure toujours inédite et en attente d’une éventuelle date de sortie, mais la compagnie de Mickey désormais en possession des droits de chaque saga ne semble pas vouloir lui donner sa chance aux vues des mauvais souvenirs laissés par les crossovers.
Enfin, devant la descente aux enfers provoquée par les deux crossovers, un retour aux sources était nécessaire, chacune des franchises reprenant sa route jusqu’à de potentielles retrouvailles.
Dans l’ensemble, Aliens vs. Predator : Requiem est une entrée décevante et un point final médiocre pour les deux franchises, dont les chemins se séparent de manière bien terne. Bien qu’il offre des moments divertissants d’action et de gore, le film est freiné par son mauvais éclairage, son scénario maigre, ses performances d’acteurs médiocres et ses personnages moyennement écrits. Les fans de la série trouveront peut-être un certain plaisir à regarder leurs créatures préférées s’affronter à l’écran, mais en fin de compte, le film laisse une désagréable sensation de promesses non tenues.