Présentation d'Alita : Battle Angel
En Présence de Robert Rodriguez
L'article
Chronique Disney a été convié le lundi 10 décembre 2018 à une projection exceptionnelle d’extraits du film Alita : Battle Angel, en présence du réalisateur Robert Rodriguez et du producteur Jon Landau deux mois avant sa sortie française prévue elle le 13 février 2019. C'est ainsi l'occasion de présenter à tous les invités près de trente minutes de séquences exclusives en 3D et en IMAX, avant de partager un moment privilégié avec les deux créateurs durant une quinzaine de minutes.
Alita : Battle Angel est l'adaptation cinématographique du célèbre et incontournable manga Gunnm créé par Yukito Kishiro et paru dans les années 90. Il raconte la renaissance d'un cyborg amnésique à l'apparence d'une jeune fille nommée Gally, en quête de réponses et de désir d'humanisation dans un futur apocalyptique, sous un régime totalitaire.
Malgré une variation de titre entre les deux œuvres, les fans ayant vu les bandes annonces qui envahissent la toile depuis plusieurs mois reconnaissent aussitôt la plus humaine des mécananthropes à ses grands yeux, tandis que les novices et les plus curieux mènent leur petite enquête pour comprendre… En effet, là où Gunnm signifie « rêve d'une arme » en japonais, Alita : Battle Angel tient son nom de la version américaine du manga : Battle Angel Alita, dans lequel Gally a tout simplement été rebaptisée Alita.
Robert Rodriguez et Jon Landau arrivent sans fioriture et souhaitent rapidement la bienvenue à l’audience impatiente, avant que la salle ne s’éteigne pour laisser place au visionnage. James Cameron, ici producteur, prend la parole lors d’une introduction vidéo dans laquelle il s’excuse de ne pas être présent, avant d’exposer la genèse de ce projet fou. Il acquiert les droits de Gunnm - l’un de ses mangas préférés - au début des années 2000 en vue d’une conversion pour le grand écran. Trop occupé avec sa franchise Avatar, il décide alors de déléguer sa réalisation. Il remet à Robert Rodriguez, intéressé par le projet, un premier script de 600 pages empli d’annotations. En retour, le réalisateur expose à son tour sa propre vision de l’œuvre, en totale adéquation avec celle de Cameron. Après des années d’attente, le projet intitulé Alita : Battle Angel se concrétise.
Les mots laissent place aux images tant attendues. Les huit extraits, brièvement replacés dans leur contexte en quelques phrases et judicieusement choisis, alternent intelligemment scènes intimistes et scène d’actions. Des séquences pas trop longues pour (p)réserver son lot de surprises lors de la future sortie en salles, mais suffisamment explicites pour susciter l’envie…
Durant les scènes narratives, le public assiste au réveil et aux premiers pas maladroits d’Alita (Rosa Salazar), encore étonnée et chamboulée de sa présence, avant de faire la connaissance du Docteur Ido (Christoph Waltz) qui lui a redonné vie. Alita découvre ensuite le monde extérieur et les rues du bidonville d'Iron City, dans lesquelles elle sauve un petit chien d'un robot négligeant et fait la connaissance de son futur ami Hugo (Keean Johnson). Puis, plongée en pleine forêt avec ses nouveaux compagnons, Alita découvre un vaisseau et un corps mécanique auxquels elle semble étrangement connectée, dont elle veut prendre possession contre l'avis du Docteur Ido. Enfin, un tête-à-tête romantique pluvieux entre Alita et Hugo se déroule, ne faisant nul doute sur les sentiments partagés entre les deux personnages ; Alita se questionnant alors sur son humanité et sa différence.
Entre ces quatre séquences, l'action est elle aussi mise en avant et le spectacle monte crescendo. Alita s’échauffe avec sa toute première partie de Motorball, sport violent et emblématique de l’œuvre originale dont elle découvre les rudiments dans la rue grâce à Hugo, faisant alors preuve d'une dextérité et d'une rapidité hors-norme déjà prometteuses. Puis elle découvre ses aptitudes au combat lorsqu’elle défend le Docteur Ido contre des cyborgs malveillants durant une chasse nocturne. Elle semble ensuite prendre son destin en main et faire ses propres choix en s’attaquant à un monstre mécanique géant, dans une scène tout simplement hallucinante visuellement. La projection se conclut par une séquence fracassante de dangereuse et véritable partie de Motorball, durant laquelle Alita, cible de tous les concurrents, ne se laisse pas impressionner...
Les premières images nécessitent un petit temps d’adaptation, plus particulièrement concernant le design de la protagoniste, au premier abord perturbant. Les proportions de son visage défient, il est vrai, la physique et sont proches du manga (avec ses grands yeux). Alita semble donc factice. Mais elle est après-tout un cyborg et les règles de la génétique humaine ne s'appliquent guère à elle... Une fois le visuel du personnage adopté (ou pas), le spectateur ne peut que reconnaître la beauté de l’univers (les décors et les paysages futuristes sont sublimés), pourtant mainte fois dévoilée dans les diverses bandes-annonces. L’émotion semble bien présente, mais il est difficile de se projeter uniquement devant quelques extraits du film visionnés, qui plus est hors de leur contexte. De même, la réflexion relative à la présence de la machine parmi l’Homme et la question de l’humanité, qui sont le fondement de l’œuvre, paraissent totalement intégrées au long-métrage.
Intense, Alita : Battle Angel le sera sûrement. Grandiose, le film promet de l'être assurément ! Pas de doute quant à la présence et la réussite des scènes d’action, dont le nombre de moments épiques reste encore à définir. Tout comme leur originalité ! Difficile de repousser les limites et offrir au public du jamais vu. Les séquences présentées sont tout simplement efficaces, rythmées et, l'espace d'un instant, à couper le souffle (mention spéciale à la véritable partie de Motorball). Ralentis bien placés mais pas abusifs, et accélérations dynamiques mais non frénétiques sont au rendez-vous. Du moins, la véracité de cette affirmation est à espérer sur l’intégralité de l’œuvre… La technologie 3D et IMAX - bien évidement propice à ce genre de blockbuster - réalise de véritables prouesses techniques.
La salle se rallume. L’audience est impressionnée et les applaudissements fusent. Robert Rodriguez et Jon Landau, dont Alita : Battle Angel est leur première collaboration, reviennent sur la scène pour le jeu habituel et promotionnel des questions/réponses. Après ces images, la curiosité est en effet bien éveillée…
Né au Texas en 1968, Robert Rodriguez s’intéresse très tôt au cinéma et commence sa carrière par la réalisation de films à petits budgets tel Une Nuit en Enfer (1996). S’en suit une longue collaboration avec la filiale Disney Dimension Films. Il enchaîne avec le film de science-fiction pour adolescents The Faculty (1998), avant de se consacrer à la saga pour enfants Spy Kids (2001, 2002, 2003 puis 2011). Il revient à un cinéma plus adulte avec l'adaptation de Sin City (2005) co-réalisée avec Frank Miller et la réalisation de Planète Terreur (2007) dans le cadre du diptyque Grindhouse qui rend hommage aux vieux films d’exploitation, et dont découlent également les deux volets de Machete (2010 et 2013). Son retour est attendu depuis Sin City : J'ai Tué pour Elle sorti en 2014.
Donc, réalisateur, scénariste, monteur, compositeur, producteur et tant d'autres métiers du cinéma, Robert Rodriguez confie en outre à sa société de production Troublemaker Studios Alita : Battle Angel.
Né à New York en 1960, Jon Landau est, pour sa part, un producteur de cinéma, vice-président exécutif de la production de longs-métrages de 20th Century Fox au début des années 90. Il produit notamment pour Disney Chérie, J’ai Rétréci les Gosses (1989) et Dick Tracy (1990) sous la filiale Touchstone. Il collabore par la suite avec Fox et produit avec le réalisateur James Cameron : Titanic (1997), Solaris (2002) et Avatar (2009).
[Presse] James Cameron était censé tourner le film et décide de le déléguer. Il vous dit que vous êtes l'homme de la situation. Qu'avez vous donc fait plus précisément ?
[Robert Rodriguez] J'ai lu le tout premier script qui était très complet. James connaît l’œuvre d'origine par cœur et voulait tout inclure. Mais c'était beaucoup trop long, alors il m'a demandé d'écrire ma propre vision. J'ai conservé tout l'esprit d'hommage que James voulait rendre au manga, et gardé ce qui à mes yeux de réalisateur était essentiel à ses yeux de scénariste originel.
[Presse] Comment avez-vous choisi où vous arrêter dans le manga ? Quelles scènes retenir et quelles ont été les interventions du mangaka Yukito Kishiro dans le processus de production ?
[Jon Landau] En écrivant le script, James Cameron voulait vraiment couvrir l'histoire des trois premiers volumes du manga. Il voulait absolument introduire le Motorball dès le départ alors qu'il n’apparaît que vers la fin du troisième tome. Il s'est rendu à Tokyo pour rencontrer le mangaka avant d’acquérir les droits et lui parler de sa vision. Puis Yukito Kishiro est venu pendant la phase de préproduction pour rencontrer Robert, mais il s'est toujours gardé d'intervenir dans le processus du film. Pendant le tournage, il a visité le plateau, n'a pas dit grand chose, mais avait un grand sourire qui voulait tout dire. En rencontrant ce jour-là Rosa Salazar (l'héroïne principale) qui est venue le saluer, il s'est reculé, l'a observé et n'a dit qu'un mot en la désignant : Alita !
[Presse] Vous avez adapté les trois premiers tomes de Gunnm. Cela veut -il dire que d'autres films vont suivre ? Quelles en sont les conditions pour envisager un Alita : Battle Angel 2, 3, 4, 5... ?
[Jon Landau] Cela dépend de vous, le public ! Yukito Kishiro a créé un monde composé de tellement d’histoires. Robert Rodriguez et James Cameron ont parlé d'autres aventures potentielles. L'engouement du public le dira.
[Presse] Évidement c'est un travail d'adaptation, avec un script original de James Cameron. Dans tout cela, quelle est votre approche pour vous accaparer cet univers ?
[Robert Rodriguez] Quand vous prenez des décisions au jour le jour, vous devez avoir votre propre vision. Mais j'aime parfois partager celles des autres, comme celle de Kevin Williamson sur The Faculty ou celle de Quentin Tarantino. Pour Sin City, par exemple, je suis resté très fidèle à la vision de Franck Miller. Alita, c'était ma chance de faire un film avec James Cameron. Ce film l'a attendu pendant des années pour être mis en œuvre. Hélas, pour des raisons d'emploi du temps, il ne pouvait passer à la réalisation, étant retenu sur d'autres projets. Il me l'a donc confié. Mais je n'ai pas voulu me l'approprier. Pour moi c'était un film de James Cameron que je réalisais. Je me suis donc mis dans la peau d'un spectateur qui voulait voir un film de James Cameron, pas du tout dans la peau d'un réalisateur qui le remplaçait.
[Presse] La 3D d'Avatar a-t-elle aidée sur le film ?
[Robert Rodriguez] On a voulu très tôt tourner en réelle 3D, on ne voulait pas de conversion. C'est une manière de tourner, d'envisager un plateau très différente et je voulais vraiment l'utiliser.
[Jon Landau] Cameron a créé les cameras il y a presque 10 ans pour pourvoir s'affranchir de ces aspect techniques et Robert les a utilisées comme si James avait filmé lui-même. Il a voulu créer l'expérience la plus immersive possible. Ne pas regarder ce monde à travers la fenêtre d'un écran, mais être directement dans ce monde.
[Presse] Comment avez vous réagi après le premier trailer et le petit bad buzz qu'on a pu voir sur internet, notamment au niveau des yeux d'Alita ? Comment la production et James Cameron ont réagi ?
[Jon Landau] À la sortie du premier trailer d'Avatar, tout le monde ne parlait que des Schtroumpfs bleus.
[Robert Rodriguez] La première bande-annonce est sortie très tôt au tout début de la post-production. Le film devait sortir initialement l'été et Fox voulait un premier trailer pour Noël, alors que le travail était encore en cours. Des scènes ont donc été filmées spécialement pour la bande-annonce, alors que la direction artistique n'était pas tout à fait terminée. Et les gens ont réagi à ces yeux trop grands. Leur travail a depuis été finalisé. Ceux-ci sont même légèrement plus grands encore que sur les premières images, à la demande de James. Cependant, la composition de l’œil est plus travaillée et mieux proportionnée, avec un iris plus grand. Ainsi, le résultat est bluffant de réalisme. C'est le génie de James, il suffit de croire en James !
[Presse] En tant que réalisateur, quelle est la difficulté de passer d'un film à l'autre ? Comment travaillez-vous ?
[Jon Landau] Vous pensez que Robert termine un projet avant de commencer à penser à un autre, mais ce n'est pas le cas. Comme James, il écrit et réalise, il n'a donc pas à attendre qu'on lui présente un script pour commencer à travailler.
[Robert Rodriguez] Un bon exemple : James m'a fait lire un script alors que je terminais Desperado, une histoire nommée Avatar qu'il venait de finir d'écrire, plus de dix ans avant de faire le film. Des fois, vous avez des projets qui prennent des années. Quand c'est le bon moment, que vous avez les bonnes personnes, vous ne pouvez plus attendre. J'ai au moins dix bonnes histoires que j'ai envie de porter à l'écran.
[Presse] Pensez-vous adapter d'autres mangas après Alita ? En règle générale, les lives adaptés de mangas sont des catastrophes et là semblent au contraire prometteur.
[Jon Landau] Robert a de la chance car le monde crée par Yukito Kishiro est écrit pour le cinéma. Il n'a pas livré une histoire que pour la culture asiatique. Ses protagonistes peuvent être n'importe où, de n'importe quelle culture. Ils sont universels comme les thèmes que l'histoire aborde. L'adaptation a donc été facile.
[Presse] Puisque vous êtes là Jon Landau, quand peut-on espérer voir les premières images d'Avatar 2 ?
[Jon Landau] Ce siècle !
L’événement touche déjà à sa fin. Jon Landau et Robert Rodriguez remercient ce super public (ce sont leurs mots) et lui donnent rendez-vous à Paris en janvier pour voir l'intégralité du film, avant de quitter la salle sous des applaudissements nourris.
Encore un peu d’attente avant de se ruer dans les salles obscures pour découvrir l’intégralité d’Alita : Battle Angel. À coup sûr, le spectacle devrait être à la hauteur et réserver son lot de surprises ! Émotion, réflexion et action devraient être au rendez-vous. Ne reste plus qu’à savoir si les attentes des fans inconditionnels du manga seront comblées. Tout comme les espérances du fidèle public de Robert Rodriguez - qui le suit depuis deux décennies maintenant et attend son retour depuis presque cinq ans - seront récompensées, avec ce qui est sûrement son plus gros projet et son plus grand défi.