Le Fantôme des Cyprès
Titre original : The Ghost of Cypress Swamp Production : Walt Disney Productions Date de diffusion USA : Le 13 mars 1977 Genre : Comédie dramatique |
Réalisation : Vincent McEveety Musique : Jimmie Haskell Durée : 90 minutes |
Le synopsis
Dans les marécages de Géorgie, le chien de Lonny est attaqué par une panthère appelée Patte-Molle. Le garçon est, lui, ensuite capturé par un vieil ermite que tout le monde croyait mort et qui vit caché dans les marais... |
La critique
Le Fantôme des Cyprès est un téléfilm diffusé, en 1977, sur NBC, dans l'émission hebdomadaire, nouvellement renommée, The Wonderful World of Disney et héritière du show d'ABC créé en 1954 par Walt Disney lui même et intitulé Disneyland. Il s'agit ici du tout premier long-métrage télévisé de Walt Disney Productions ; avant cela, les longs récits étaient tous diffusés dans l'émission d'anthologie en étant découpés en deux parties ou plus. C'est ainsi la première fois qu'un programme inédit de The Wonderful World of Disney a droit à un temps d'antenne de deux heures, là où habituellement l'émission tourne autour de soixante minutes. Néanmoins, la pratique de diffuser certains films cinéma ou d'anciens téléfilms sur une case de deux heures n'est pas fatalement nouvelle dans l'émission d'anthologie puisqu'elle remonte en réalité à quelques années plus tôt, en octobre 1975, avec le passage à la télévision du long-métrage sorti en salles en 1972 Pas Vu, Pas Pris.
Le Fantôme des Cyprès est une adaptation du roman Les Prisonniers du Marais de Linda Cline publié en 1975. Son titre est assez trompeur car il n'est ici nullement question de spectres et autres revenants mais plutôt de présences mystérieuses dans des marais difficiles d'accès situés dans l'État de Géorgie aux États-Unis. Même si le but du téléfilm n'est absolument pas de faire peur, il possède tout de même quelques séquences inquiétantes, du moins au début. En réalité, il y a deux fantômes qui se croisent dans ces marais, très différents l'un de l'autre, mais tout aussi fascinants. Ces deux menaces font que le récit semble parfois écartelé entre deux directions divergentes tout en lui donnant au final un ton assez ambitieux. Étonnamment, le téléfilm possède beaucoup de sous-intrigues, chose assez inhabituelle pour une production Disney destinée au petit écran. De nombreux thèmes sont en effet proposés, offrant une histoire riche et foisonnante. Le téléfilm parle notamment de l'amitié d'un garçon avec son chien - thème cher au label Disney à l'époque - mais aussi de l'affrontement avec une bête féroce, du syndrome de Stockholm, de l'apprentissage de la vie d'un adolescent qui doit savoir prendre des décisions et apprendre à s'affirmer, sans compter des passages sur le deuil, la maladie ainsi qu'une petite histoire d'amour.
Le premier des deux fantômes est bien sûr Patte-Molle. Cette panthère noire est particulièrement dangereuse, n'hésitant pas à s'attaquer aux chiens ou aux hommes. Elle se cache dans les marais et représente une vraie menace pour la communauté, que ce soit le bétail ou les habitants. Quand le chien de Lonny, Bill, est attaqué par le terrible félin, l'adolescent est logiquement tétanisé et n'arrive pas à tirer pour sauver son animal. Ce dernier meurt des morsures de la panthère, laissant le garçon avec ses remords. Il n'est d'ailleurs même pas capable d'annoncer à son père la mort de son chien tellement la culpabilité le ronge. Il va ensuite tout faire pour racheter sa faute, non seulement en traquant le terrible félin mais également aussi en prenant soin de son nouveau chien afin qu'il obéisse d'avantage que le précédent et ainsi ne reproduise pas la même erreur. En parallèle de ce thème, tout un discours sur le fait de grandir, de prendre ses responsabilités et de savoir vaincre sa peur est présent dans le téléfilm. Cela prend d'ailleurs plusieurs formes dans le récit. Car au-delà de son affrontement avec le félin, le caractère du garçon fait qu'il doit aussi affronter trois brutes, humaines cette fois-ci, qui le maltraitent dès qu'il les croise dans le village. Lonny doit donc faire montre de patience face aux provocations des trois idiots mais également apprendre à se défendre quitte à prendre des risques qui pourraient le blesser voire pire.
L'autre fantôme du téléfilm est le personnage de Tom Stone. Ce dernier est un ermite qui vit seul caché dans les marais depuis seize ans. Tout le monde dans le village pense qu'il est mort alors qu'il est juste resté à l'abri des regards pour une raison qui lui est propre et qui est d'ailleurs expliquée indirectement à la fin du long-métrage. Il veut donc que personne ne sache qu'il est encore en vie. Ainsi, lorsqu'il tombe nez à nez avec Lonny, il n'a d'autre choix selon lui que de l’assommer et de le kidnapper. Il va alors détenir l'adolescent pendant de nombreuses semaines, le laissant bâillonné et attaché à un arbre, le libérant à peine pour lui donner à manger. Petit à petit, Lonny gagne sa confiance et se prend étonnamment d'amitié pour lui. Il se crée alors une relation assez étrange de respect mutuel, surtout quand le garçon sauve l'ermite d'une morsure de serpent et qu'en retour l'homme finit par ramener l'adolescent chez lui après que ce dernier souffre de la fièvre des marais, uniquement soignable en ville. Toute cette séquence est assez étonnante car elle débute comme un thriller un peu effrayant à cause de l'attitude violente de l'ermite mais se termine par une leçon de vie où Lonny va finir par comprendre le point de vue de Tom au point de garder le secret de l'ermite. L'ambiance est d'autant plus mystérieuse que les décors dans les marais sont superbes et particulièrement dépaysants.
Le Fantôme des Cyprès étonne aussi de par son thème de la famille brisée. Il y a d'abord la sœur de Tom, Ma Landers, qui pense que son frère est mort et qui a eu une vie difficile en ayant été veuve deux fois, devant s'occuper des trois garnements d'un premier mariage, Bucky, Morton et Big Bob, alors qu'ils sont presque devenus des hommes, et d'une fille Shirley un peu plus jeune d'un second mariage. Mais chose encore plus touchante, le spectateur apprend que la famille de Lonny est en réalité une famille recomposée. La mère de Lonny est venue à mourir quand il était tout petit, plongeant alors son père dans le chagrin. Sa belle-sœur Louise, cadette de son épouse, lui rappelle que son jeune fils a besoin de toute son attention ; cette évidence rendant au père sa joie de vivre. Finalement, il épouse Louise et forme alors avec elle et Lonny une nouvelle famille aimante. Le deuil est ainsi beaucoup présent dans le téléfilm, surtout que les parents de Lonny pensent à un moment que leur fils est mort après avoir fait en vain une battue dans les marais pendant des jours pour le retrouver. Ils lui érigent même une pierre tombale et lui font une cérémonie d'adieu, étant convaincus de son décès. Le moment où le père part dans les marais pour un dernier son d'adieu à son fils avec sa corne de vache est notamment une scène vraiment déchirante. Suite à cela, la joie des retrouvailles un peu plus loin dans le téléfilm se ressent clairement. Et chose encore plus touchante dans un beau parallèle du passage à l'âge adulte, Lonny doit à son tour pousser le même son à la fin du long-métrage. Ce n'est néanmoins pas le même sentiment qu'il ressent. Plus qu'un chagrin d'adieu, il éprouve la tristesse d'un au revoir...
Les acteurs dans Le Fantôme des Cyprès sont plutôt bons.
Jeff East est ainsi convaincant dans le rôle de Lonny Bascombe. Le jeune acteur arrive en effet à rendre son personnage attachant de par sa droiture mais aussi ses fragilités. Il s'agit ici de sa dernière participation à un téléfilm Disney après avoir été vu dans Return of the Big Cat (1975) et The Flight of the Grey Wolf (1976).
Tom Stone est interprété lui par Vic Morrow. Sa prestation est convenable même si elle manque un peu de subtilité, surtout au début du téléfilm. Heureusement, il gagne en nuance au fur et à mesure du récit. S'il ne jouera plus pour Disney, il réalisera tout de même pour le label un téléfilm en 1980, The Secret of Lost Valley.
Le rôle du père de Lonny, Pa Bascombe, est tenu par Tom Simcox. Il campe un personnage qui aime particulièrement son fils et l'élève du mieux qu'il peut. L'acteur travaillera une deuxième fois pour Disney dans The Secret of Lost Valley (1980).
Parmi le reste du casting, il sera aussi apprécié Jacqueline Scott (Smoke, The Boy and the Bronc Buster) qui interprète Louise, la femme de Pa Bascombe, et la mère de substitution de Lonny ou encore Louise Latham (Les Fantômes de Buxley Hall) qui est la pauvre sœur de Tom Stone que la vie n'a pas aidée.
Derrière la caméra, se retrouve un réalisateur connu des studios Disney, Vincent McEveety, qui se charge de mettre en image l'histoire de cette comédie dramatique. S'il propose une réalisation convenue, il sait néanmoins parfaitement jouer avec cette ambiance mystérieuse des marais.
Vincent McEveety est né le 10 août 1929. Il se fait un nom dans le monde de la télévision pour avoir signé de nombreux épisodes de séries cultes comme Les Deux Font la Paire, Supercopter, Les Incorruptibles, Star Trek, Magnum, Columbo, Arabesque, Huit, ça Suffit, Perry Mason, Bonanza... Les studios Disney remplissent toutefois l'essentiel de sa carrière. Ainsi, il commence pour eux à la télévision en 1964 avec Les Tribulations d'Hector le Chien et travaille ensuite aussi bien sur des longs-métrages cinéma comme La Cane aux Œufs d'Or (1971), Les Aventures de Pot au Feu (1972), Charley et l'Ange (1973), Superdad (1974), Un Cowboy à Hawaï (1974), L'Homme le Plus Fort du Monde (1975), Gus (1976), Le Trésor de Matacumba (1976), La Coccinelle à Monte-Carlo (1977), Le Retour du Gang des Chaussons aux Pommes (1979) ou La Coccinelle à Mexico (1980), des téléfilms tels Smoke (1970), Menace on the Mountain (1970), Le Fantôme des Cyprès (1977) ou Ask Max (1986), mais aussi des séries télévisées à l'exemple d'Herbie, un Amour de Coccinelle (1982) et du (Le) Chevalier Lumière (1986).
Le Fantôme des Cyprès est un téléfilm au récit assez riche qui aborde de nombreux thèmes. Cette visite des marais avec le jeune Lonny s'avère ainsi étonnante même si le ton et le rythme du long-métrage sont typiques des productions Disney des années 1970, nostalgiques mais un peu datés.