Captain America
Les Élus
Éditeur : Panini Comics Date de publication France : Le 26 mars 2014 Collection : Marvel Hors Collection |
Auteur(s) : David Morrell (Scénariste) Mitch Breitweiser (Dessinateur) Nombre de pages : 144 |
Le sommaire
• Captain America : Les Élus Chapitre 1 (Captain America : The Chosen #1) (2007) • Captain America : Les Élus Chapitre 2 (Captain America : The Chosen #2) (2007) • Captain America : Les Élus Chapitre 3 (Captain America : The Chosen #3) (2007) • Captain America : Les Élus Chapitre 4 (Captain America : The Chosen #4) (2007) • Captain America : Les Élus Chapitre 5 (Captain America : The Chosen #5) (2007) • Captain America : Les Élus Chapitre 6 (Captain America : The Chosen #6) (2007) |
La critique
Au début des années 2000, Marvel Comics souhaite donner un coup de jeune à ses principaux personnages. Leurs aventures se sont en effet multipliées depuis près de six décennies tant et si bien qu’avec le temps, elles sont devenues complexes et peu accessibles aux lecteurs novices. Sous l’impulsion de Joe Quesada, nouveau rédacteur en chef, et de Bill Jemas, Président de Marvel Enterprise, la Maison des Idées crée l’Univers Ultimate qui permet de recréer des histoires en faisant fi du passé. Dans le même temps, elle inaugure un autre projet. Baptisé The End, il s’agit de raconter via des récits one-shot et des mini-séries la fin des plus grands héros de la Maison des Idées. Hulk ouvre la danse dès août 2002 avec Hulk : The End de Peter David et Dale Keown. Jusqu’en 2010, suivent Wolverine, le Punisher, les X-Men, les Quatre Fantastiques, Iron Man et Spider-Girl. En 2007, Marvel Comics confie la mort de Captain America à David Morrell et Mitch Breitweiser. Initialement intitulé Captain America : The End, le projet change de titre et devient Captain America : Les Élus.
Captain America est certainement l’un des personnages les plus emblématiques de l’écurie Marvel. Apparu dans le premier numéro de Captain America Comics le 20 décembre 1940, le héros est une création de Joe Simon et Jack Kirby pour Timely Comics, l’ancêtre de Marvel Comics. A l’époque, la guerre fait rage en Europe. Les armées s’affrontent et la situation des Juifs devient catastrophique. L’idée est alors de créer un personnage patriotique portant les couleurs et les valeurs des Etats-Unis. Apparaissent également dans la même histoire Bucky, le partenaire du héros et Crâne Rouge, son ennemi nazi. Pendant le conflit, le succès est immédiat, jusqu’aux années 1950, où les ventes commencent à diminuer jusqu’à l’arrêt de la série. Il faut attendre 1963 pour que Jack Kirby redonne vie à Captain America, retrouvé en état d’hibernation par les Vengeurs. Guerre Froide, affaire du Watergate, attentats du 11 septembre 2001, le Super-soldat traverse année après année les frasques de l’Histoire avec plus ou moins de réussite. En 2007-2008, le personnage meurt à deux reprises. Liquidé par Crossbones dans Captain America Vol. 5 #25, la suite de Civil War, il est également laissé pour mort à la fin de Captain America : Les Élus. Les aventures du patriote se poursuivent cependant avec Bucky qui reprend son costume. Steve Rogers réapparaît en juillet 2009 sous la plume d’Ed Brubaker et Bryan Hitch dans Captain Amerca : Reborn. En 2014, il cède finalement sa place à Sam Wilson, Le Faucon. Personnage mythique de comics, les aventures de Captain America sont adaptées dès 2011 sur grand écran avec Captain America - First Avenger, suivi en 2014 de Captain America : Le Soldat de l’Hiver.
Steven Rogers est le premier Captain America. Né dans la décennie 1920 à New York, sa famille et lui sont victimes de la Grande Dépression. Orphelin après la mort de son père alcoolique, Joseph, puis de sa mère Sarah, victime d’une pneumonie, il suit une scolarité chaotique. L’enfant est chétif et bouc-émissaire des autres élèves. Devenu dessinateur, il se met en tête de combattre le nazisme. Mais jugé trop gringalet, le garçon est refusé par les services de recrutement de l’armée américaine. Il est néanmoins repéré par le Docteur Erskine qui lui propose de participer au projet Super-Soldat. Grâce à un sérum spécial et une irradiation, il gagne du muscle et de la force. Surnommé Captain America et habillé d’un costume aux couleurs des Etats-Unis, le héros parade, vend des bons de guerre et participe à des spectacles aux armées. Bien décidé à se battre en Europe, il convainc ses supérieurs de l’envoyer sur le champ de bataille où il combat avec son allié Bucky. A la fin de la guerre, alors qu’il tente de neutraliser un missile lancé sur les Etats-Unis, il coule au fond des eaux glacées de l’Océan Arctique. Laissé pour mort, il est repêché par les Vengeurs dans les années 1960 et décongelé. Gardé vivant grâce au sérum de Super-Soldat, il poursuit la lutte dans le contexte de la Guerre Froide. A l’aube des années 2000, refusant la loi obligeant les super-héros à révéler leur identité, il prend la tête d’une rébellion. Assassiné par Crossbones, il survit et reprend ses armes en 2009.
C’est Steve Rogers que le lecteur découvre dans Captain America : Les Élus. Luttant pour la liberté et la justice depuis près des décennies, le héros n'est cependant plus ce qu'il était. Veillé par le Président des États-Unis et une armée de médecins, le Super-Soldat est mourant… Tombé malade, seule sa tête continue de fonctionner. Branché à des capteurs, Rogers parvenait encore à donner des renseignements sur les ennemis des Etats-Unis grâce à la force de son esprit et son talent pour le dessin. Capable de s’insinuer dans les pensées des terroristes et de voir à distance, il reproduisait leurs camps sur des feuilles utilisées ensuite par l’armée. Mais son corps a cédé. Steve Rogers est désormais un légume allongé sur une table, à bout de force. Il continue cependant d’utiliser son esprit pour trouver son remplaçant. C’est ainsi qu’il parvient à communiquer avec le Caporal James Newman de l’U.S. Marine, coincé dans une grotte afghane avec ses collègues blessés, loin de sa femme et de son bébé.
C’est cette rencontre « spirituelle » que raconte Captain America : Les Élus, imaginé par David Morrell et mis en image par Mitchell (Mitch) Breitweiser.
Né le 24 avril 1943 à Kitchener au Canada, David Morrell trouve sa voie à la fin de son adolescence en découvrant la série Route 66 diffusée sur CBS dans les années 1960. S’imaginant devenir écrivain, il décroche son diplôme de l’Université Saint-Jerome en 1966, quitte son pays, gagne les Etats-Unis et devient docteur en littérature américaine après des études à l’Université de Pennsylvanie. Elève de l’auteur de science-fiction William Tenn, Morrell devient professeur à l’Université de l’Iowa. C’est là qu’il prend la plume et qu’en 1972, il publie Premier Sang qui raconte les aventures de John Rambo adaptées au cinéma avec Sylvester Stallone dans le rôle-titre. Multipliant les best-sellers, dont la suite des aventures du héros de la Guerre du Vietnam, adaptées des films en 1985 et 1988, il co-fonde l’International Thriller Writers Organization et met un pied dans l’univers de la bande dessinée en 2007. Collaborant avec Marvel, il est ainsi chargé d’écrire la mort de Captain America.
Mitchell (Mitch) Breitweiser est, quant à lui, né le 20 mai 1978 à Little Rock, dans l’Arkansas. Obtenant une licence en arts à l’Université de Harding, il débute sa carrière en 2002 avec les épisodes 8 et 9 d’Agent X, écrits par Buddy Scalera pour Marvel. Il enchaîne ensuite d’autres projets dont la série Noble Causes : Extended Family avec Brian K. Vaughan, Digital Webbing Presents N°11 et Phantom Jack, sa première série régulière en 2004, avant de revenir au sein de la Maison des Idées en 2005. Il travaille alors sur Drax the Destroyer avec Keith Giffen puis en 2006 sur Ultimate Fantastic Four avec Greg Lang et Mark Millar. Associant son nom à des séries comme Iron Fist, Hulk, Uncanny X-Men, The Amazing Spider-Man, il dessine pour la première fois Captain America, son personnage préféré, en 2007 avec Captain America : Les Elus. Il retrouve le Super-Soldat dans les années suivantes avec Captain America : Theater of War - Operation Zero-Point, Captain America 607, 615.1 et 619, puis Captain America – Patriote.
Initialement intitulée Captain America : La Fin, Captain America : Les Elus est une histoire à part dans la bibliographie du héros à la bannière étoilée. En effet, le récit doit être considéré comme une œuvre à part, d’autant plus qu’à l’époque où David Morrell écrit la fin du Super-Soldat, celui-ci vient déjà d’être tué sur les marches d’un tribunal par Crossbones. Il est, en fait, contacté en 2004 par Andy Schmidt, éditeur chez Marvel Comics, qui lui propose, en qualité d’auteur de Rambo, de produire une histoire en six épisodes sur le soldat patriote. L’idée de Morrell est alors de raconter les effets de soixante ans de lutte pour la liberté sur le héros, de voir les effets psychologiques des attentats du 11 septembre, de Londres ou de Madrid sur un Captain America à bout de forces. L’idée est aussi de remonter aux origines du personnages pour mener le lecteur à son dernier souffle.
Captain America : Les Élus possède indéniablement une qualité principale. L’histoire peut être lue et comprise par l’ensemble des lecteurs. Quelqu’un qui ne connaît rien des aventures passées du Super-Soldat peut appréhender le récit confortablement, d’autant plus que les nombreux flashbacks retraçant les origines du héros permettent de comprendre son passé simplement. Débutant par des combats acharnés en Afghanistan, la majorité du propos alterne entre une grotte dans laquelle le caporal Newman et ses collègues sont coincés et la table d’opération sur laquelle le Captain est allongé, mourant. Le parallèle entre le soldat coincé dans sa grotte et l’esprit du héros coincé dans un corps inerte est intéressante.
Néanmoins, Captain America : Les Élus possède quelques défauts. Mettant en avant les valeurs de liberté, de courage, d’honneur, de loyauté et de sacrifice, ce qui est tout à son honneur, le récit est franchement manichéen. Les bons américains contre les méchants terroristes afghans, pour ne pas dire contre les méchants arabes… L’histoire post-11 septembre, qui demeure bien entendu une fiction sur fond de réalité historique, prend le parti d’une dualité somme toute réductrice. Surtout, le gros problème du comics est sa traduction calamiteuse signée Laurence Belingard. Le lecteur n’a pas tourné deux pages qu’il se retrouve en "Afganistan", sans H. Une faute d’orthographe pouvant se concevoir, elle peut encore être perçue comme une simple coquille sans gravité. Mais là où le discours devient pénible à lire, c’est que les négations dans les propos de Captain America et du Caporal Newman ne sont jamais ou rarement écrites correctement. Tout élève sortant de primaire sait qu’une formule négative se compose de deux mots : Ne et Pas. Or, ici, la première partie de la négation n’est presque jamais écrite. Ainsi, le héros sort à tout bout de champ des phrases du genre « J’ai jamais autant craint pour ma vie » ou « Tu es ni ordinaire ni seul ». Chacun peut comprendre que dans une situation de guerre, les protagonistes ne cherchent pas à faire une phrase en bonne et due forme. Mais il est curieux de voir le plus grand héros de l’Amérique parler comme le premier soldat inculte de l’armée. Dommage donc de troubler le lecteur avec de telles fautes.
Captain America : Les Élus demeure au final une histoire intéressante qui se lit d'une traite tant le récit est facile d'accès et bien écrit. Néanmoins, la version française tend à casser un peu de rythme du lecteur qui peut être choqué par des traductions hasardeuses, voire grammaticalement incorrectes. Passé cela, il ne faut pas bouder son plaisir de découvrir une fin possible aux aventures du héros à la bannière étoilée.