Marvels
Éditeur : Panini Comics Date de publication France : Le 04 mars 2015 Collection : Marvel Icons |
Auteur(s) : Kurt Busiek (Scénariste) Alex Ross (Dessinateur) Nombre de pages : 191 |
Le sommaire
• Marvels #0 (1994) • Marvels #1 (1994) • Marvels #2 (1994) • Marvels #3 (1994) • Marvels #4 (1994) |
La critique
De la création de la Torche Humaine (l'androïde, pas le membre des Quatre Fantastiques), à la mort de Gwen Stacy, en passant par, entre autre, l'essor des mutants et leurs places dans la société, Marvels propose aux lecteurs de plonger et (re)découvrir l'histoire des publications de la Maison des Idées et de ses plus grands héros en suivant la vie du photographe Phil Sheldon.
Le récit commence ainsi, quand, en 1939 à l’aube de la Seconde Guerre Mondiale, le professeur Phineas Horton met au point le premier androïde : Jim Hammond. Malheureusement, l'expérience ne sera pas une franche réussite ; le corps de la création, bien que fonctionnel, s’embrasant au contact de l’air. Il présente alors sa découverte lors d’une conférence de presse sous le nom de la Torche Humaine. Deux jeunes journalistes assiste à l'événement : Phil Sheldon et J. Jonah Jameson. L’assemblée est rapidement horrifiée par ce qu’elle voit et promet à Horton une campagne de dénigrement s’il ne détruit pas la monstruosité dont il se revendique le créateur. Quelques semaines plus tard, la Torche réapparaît pourtant tandis que concomitamment un autre surhomme fait surface : Namor. L’un maîtrise donc le feu quand l’autre est le prince des océans. Le premier n’aspire, en réalité qu’à une vie simple quand le second est rempli d’une colère folle. Le face-à-face est inévitable. Sheldon suit alors ses événements et le lecteur se voit transposé dans l’état d’esprit des gens qui assistent à l’avènement des métahumains et se questionnent sur la place de l’humain basique.
Kurt Busiek est donc le conteur à l’origine de cette fresque.
Scénariste américain né à Boston en 1960, il commence sa carrière par l’écriture d’une histoire accompagnant Green Lantern #162 pour DC Comics en 1983. Il écrira ensuite pour Marvel Comics, Eclipse Comics et Harris Comics principalement avant de connaître la gloire avec Marvels en 1994. A partir de là, sa carrière se déroule principalement entre les Big Two avant de créer, chez Image, avec notamment Alex Ross, la maxi série Astro City.
Alex Ross est, quant à lui, un peintre et illustrateur américain né en 1970 à Portland. Après avoir découvert les super-héros grâce au dessin animé Spider-Man diffusé durant l’émission The Electric Company et approfondi le sujet au cours de ses études à l’American Academy of Art de Chicago, il commence sa carrière en illustrant Terminator : The Burning Earth chez NOW Comics en 1990. Son style ultra réaliste lui vaudra bien vite une comparaison avec Norman Rockwell. Après le succès de Marvels en 1994, son rythme de parution s'accélère. Il crée avec Busiek sur Astro City un titre indépendant, puis chez DC Comics avec Mark Waid, la maxi série Kingdom Come, qui dévoile un futur possible de Batman et autres héros DC. Toujours chez l’éditeur aux deux lettres et sous la plume de Paul Dini, il dessine une série de comics rendant hommage aux plus grands héros de DC Comics et revisitant leurs origines. Actuellement, son travail s’admire principalement chez Marvel où il réalise les couvertures de The Amazing Spider-Man et The Avengers. Mais son oeuvre se contemple en dehors du format papier des comics, avec des créations d’artworks pour des jeux vidéo, des créations de costumes (non utilisés) pour les films Spider-Man de Sam Raimi, des pochettes d’albums (pour le groupe Anthrax notamment) et l’affiche de la 74ème cérémonie des Oscars, dans un style super héroïque.
Alors que Marvels est vendu comme une relecture des débuts de l’univers Marvel avec ses premiers super-héros comme Namor, la Torche ou encore l’arrivée des mutants, le récit va, en réalité, beaucoup plus loin. Publié en 1994, le principe est simple et toujours intéressant car il permet aux néophytes de découvrir les origines les plus lointaines des héros et les plus populaires, et par là, les bases de la Maison des Idées. Mais ce n'est pas tout. Le coup de génie de Busiek est, en effet, de déplacer le point de vue du narrateur. Au lieu d’être neutre et simple observateur de l’action qui se déroule, le lecteur se place dans la peau d’un photographe de presse et découvre les pensées et interrogations d’un individu lambda idéalement placé au cœur de l’action grâce à son métier, dans un monde en pleine mutation. Les principales réflexions et doutes de Phil Sheldon, quand il voit deux métahumains débarquer de nulle part et s’affronter en pleine rue ou encore qu'il assiste à l'apparition et l’intégration d’individus représentant l’avenir les Homos Superior, sont aisément transposables à l’époque moderne offrant une seconde lecture à l'opus avec d'autres pistes d'analyses. L’idée de faire équipe avec Alex Ross et son style découlant du mouvement hyper réaliste est dès lors parfaite. Le but de l’histoire étant de faire pénétrer le lecteur pleinement dans l’univers Marvel, lui faisant découvrir ses changements et le questionnement, le dessinateur fait ici des merveilles. Et c'est d'autant plus vrai que son talent dans le découpage et son utilisation parfaite des pleines pages donnent aux lecteurs l'opportunité de profiter totalement de son chef d’oeuvre.
Les médias et la presse en général comme le Daily Bugle ainsi que son rival le Daily Globe font partie intégrante de l’histoire de la Maison des Idées. Employeur de Peter Parker alias Spider-Man, élément-clef dans la création de Venom ou dans la saga Le Scoop pour Daredevil, de multiples rôles pivots ont été donnés par Marvel au quatrième pouvoir. Plus qu’un intervenant ici, il devient le personnage principal emmenant le lecteur sur chaque moment fondateur de l’histoire de Marvel, le transformant en témoin et juge d’une époque plongée en plein bouleversement.
Marvels est au final un chef d’oeuvre intemporel qui met ses deux créateurs Kurt Busiek et Alex Ross sur la route du succès et de la reconnaissance de l’industrie, avec notamment à la clé, trois Eisner Awards.