The Great Milenko
Éditeur : Hollywood Records Date de sortie USA : Le 17 août 1997 Genre : Hip Hop |
Artiste(s) : Insane Clown Posse Durée : 67 minutes |
Liste des morceaux
Toutes les chansons ont été composées par Mike E. Clark & Insane Clown Posse
01. Intro - 2:00 |
La critique
Toutes les chansons ont été produites par Mike E. Clark & Insane Clown Posse
01. Intro
L’album s’ouvre sur la voix d’Alice Cooper qui annonce que trois cartes viendront hanter les gens qui écoutent ce morceau. Une introduction censée permettre à l’auditoire de pénétrer dans l’univers des ICP !
02. Great Milenko
Sous des samples de rires maléfiques, Great Milenko épouse des airs de foire et cirque en reprenant des mélodies connues des années remixées sur des sons très hip-hop. Les paroles abordent le cas du Grand Milenko et annoncent qu’ « il vient vous hanter et prendre votre âme ». Un morceau plutôt entrainant qui s’inscrit dans la mouvance hip-hop des années 80.
03. Hokus Pokus
Toujours dans l’univers musical du cirque, la chanson se veut une suite à
Great Milenko
: elle lui ressemble malheureusement beaucoup trop au point de lasser
l'auditoire dès sa première minute.
04. Piggy Pie
Le titre ouvre sur la mort d’un porc censé constituer le repas du soir. Pour parler de la société dans laquelle il évolue, le groupe utilise ainsi des paroles très violentes et crues servant le projet de révolution d’une génération mal comprise. Musicalement, Piggy Pie
comprend également des scratch et des bruits de police qui, alliés aux
paroles, en font un morceau réussi.
05. How Many Times?
Chanson beaucoup plus lente que les quatre premières de l’album, How Many Times?
est un mélange hip-hop et rock mis au service de paroles de mort et de
violence. Un titre finalement assez ennuyeux.
06. Southwest Voodoo
La chanson s'ouvre sur le rugissement d'un lion avec des rythmes africains,
puis très rapidement tourne au hip-hop rebelle avec des paroles une fois de
plus mortifères « Personne ne va t'entendre quand tu vas te pendre... c’est ça, la magie noire ». Une chanson très sombre mais trop répétitive pour convaincre.
07. Halls of Illusion
Halls of Illusion reprend les mêmes règles que celles régissant les chansons des années 80 dans le hip-hop et parait dès lors bien vieillotte pour sa génération proche des années 2000 (le titre est sorti en 1997).
08. What Is a Juggalo?
Chanson créée spécialement pour les fans, What Is a Juggalo? est un joli hommage aux personnes qui soutiennent le groupe malgré ses paroles encore une fois très crues « Un Juggalo c’est quelqu’un qui n’en a rien à foutre ; comme une pétasse violente, il pend ses ennemis ». Curieuse façon de donner envie d’être un Juggalo
!
09. House of Horrors
« Bienvenue dans la Maison des Horreurs ! » Une très bonne accroche pour une
chanson très violente dans ses paroles et sa mélodie très grunge. L'air est
finalement trop répétitif tandis que le propos passe trop facilement du coq à l'âne.
10. Hallelujah
Cette chanson qui parle d’égorgement et de viol d’enfants
de façon ironique s'oublie très vite. Et c'est heureux !
11. Down with the Clown
Une autre chanson qui parle des fans des ICP : le groupe explique se moquer
des critiques qui les trouvent vulgaires et sombres. Le résultat est plutôt
amusant et très agréable à écouter.
12. Just Like That
Simple interlude, Just Like That est un coup de gueule contre la mort : une chanson trop simple pour convaincre.
13. Pass Me By
Dernière chanson de l’album, le titre conclut l’opus de très belle manière plaçant le groupe face au démon des cartes qui lui révèle qu’à la fin « Tout le monde va mourir
».
The Great Milenko est le quatrième album du groupe hip-hop américain Insane Clown Posse, sorti le 12 août 1997 chez Hollywood Records en association avec Psychopathic Records. L’opus est le quatrième de la série Dark Carnival, une mythologie créée par ICP autour de la notion de joker. Les paroles de l’album tournent ainsi autour du quatrième joker, Great Milenko, un fameux illusionniste qui trompe des individus en les incitants à pécher.
Insane Clown Posse ou ICP (comprendre bande de clown fous en anglais) est un duo de hip-hop américain originaire de Detroit dans le Michigan faisant partie du mouvement horrocore (un genre sombre centrée sur les histoires de meurtres et de légendes). Les ICP portent un maquillage de clown noir-et-blanc
: il est composé de deux rappeurs, Shaggy 2 Dope et Violent J. Le duo signe
deux albums de platines et cinq disques d'or.
Connu d’abord sous le nom de JJ Boyz et d’Inner City Posses, le groupe mêle le monde du super-naturel au monde de la musique, en surfant sur le thème de l’horreur aux paroles sanglantes. Il crée ainsi son propre label indépendant avec l’appui de son manager Alex Abbiss et commence d’abord à s’aventurer dans le monde du cinéma en produisant et jouant dans les films Big Money Hustlas en 2000 et Big Money Rustlas
en 2010. Il lance parallèlement sa propre marque de catch, nommée Juggalo
Championship Wrestling, et fait venir à lui beaucoup de rock stars
renommées.
Insane Clown Posse développe également une large base de fans qui créent leur propre communauté appelée les Juggalos.
Après la sortie de leur album Ringmaster en 1994, les ICP se font remarquer depuis Detroit. Leur chiffre de vente est en effet croissant si bien que beaucoup de maisons de disque leur font les yeux doux dont Jive Records. L’année d’après, le groupe signe ainsi avec le label Battery, une filiale de Jive chez qui il
sort son troisième album Riddle Box. Curieusement, la maison de disque n’investit pas sur le projet et se contente d’une petite promotion lamentable. Le manageur des ICP, Alex Abbiss, décide donc d’aller voir ailleurs et négocie un contact avec Hollywood Records une filiale de The Walt Disney Company. Le label débourse ainsi la somme d’un million de dollars pour racheter le contrat avec Battery/Jive Records.
L’arrivée chez Hollywood Records et une bonne promotion derrière constituent une excellente opération pour les ICP : les fans croissent à la vitesse grand V et leur dynamisme inspire beaucoup le groupe qui signe notamment les titres What Is a Juggalo ? et Down With the Clown.
La plupart des paroles des chansons du groupe ont pour thème la mythologie du Dark Carnival destinée à chasser les mauvaises ondes. Les âmes sont en effet envoyées dans les limbes avant d’être jugées pour atterrir en enfer ou au paradis. The Great Milenko est, dans ce contexte, le symbole de la quatrième carte de joker. C’est un illusionniste qui mène dans l’erreur chaque personne qu’il rencontre, toute personne le croisant sont alors maudites. D'après la mythologie du groupe et toujours dans l'esprit du personnage qui ruse ses adversaires, les paroles de l'opus parlent d'illusion, de péché et de vice. Le joker a ainsi le pouvoir prendre le pire des gens et de les rendre plus vicieux encore.
Le genre musical de The Great Milenko mélange en outre des airs de rock avec des interventions de légende comme Alice Copper, Steve Jones (des Sex Pistols) ou encore Slash (Guns N’ Roses) tout en conservant le style habituel de Midwest hip hop d’Insane Clown Posse.
L’album regorge ainsi de références au rock, s’ouvrant d’ailleurs sur une narration d’Alice Cooper suivi d’un solo de guitare de Steve Jones et Slash dans les chansons Piggy Pie et Halls of Illusions. Il faut dire que les ICP ont engagé spécialement sur l’opus leur ami de toujours, DJ Mike E. Clark, qui influence radicalement leur signature musicale en passant du métal au rock, avec des airs de hip-hop et le recours massif aux scratchs mixés avec du heavy metal.
L’enregistrement de l’album commence en 1996. Bruce mentionne aussitôt le nom de The Great Milenko
en hommage au catcheur Dean Simon et son nom de ring Dean Malenko, estimant
qu'il sonnait très carnaval.
Le groupe fort de sa nouvelle notoriété peut alors se permettre de faire venir à lui de grands artistes du rock et signer avec eux quelques duos ; l’un des patrons de Hollywood Records
Julian Raymond, appelant lui-même Slash, Steve Jones et Alice Cooper qui
acceptent l'offre du groupe confessant en être eux-mêmes de très grands
fans.
À la fin de l’enregistrement, plusieurs producteurs d’Hollywood Records manifestent pourtant leur fort mécontement devant le résultat obtenu. Ils exigent le retrait de plusieurs chansons dont The Neden Game, Under the Moon et Boogie Woogie Wu (qui finiront dans la version non-censurée de l'album) en raison de leurs paroles trop crues sur le viol, le meurtre ou même l’égorgement d’enfants. Disney demande également que les paroles de la chanson Piggy Pie à charge contre les policiers soient changées. Le label va jusqu’à menacer le groupe de ne pas sortir l’album si les ajustements demandés ne sont pas réalisés. Après plusieurs phases de négociations, le groupe accepte les demandes de Disney : il faudra donc attendre plusieurs années avant que la version non-censurée de Piggy Pie soit entendue (dans l’album Forgotten Freshness Volume 1 & 2). Plusieurs chansons comme House of Wonders enregistrées pour The Great Milenko atterrissent en outre dans d’autres futurs albums du groupe notamment Mutilation Mix en 1997.
Deux singles sortent pour soutenir les ventes de l’album. Mais voilà, Halls of Illusions et Hokus Pokus se ramassent partout, sauf en Angleterre.
Il faut dire que la promotion de The Great Milenko connait bien des péripéties. Alors qu’Hollywood Records prévoyait 100 000 copies de l’opus lors de son lancement, le label décide de retirer les CD des magasins le jour de sa sortie ! Le groupe se retrouve ainsi à signer des autographes dans un centre commercial dont l’album avait été retiré ! Les ICP sont également informés quelques heures plus tard que leur tournée est annulée et que leur single Halls of Illusions (qui arrivera à la première place de la chaine The Box) est purement et simplement retiré des télévisions. Le plus gros coup dur sera l’annonce en fin de journée par Hollywood Records de son abandon du groupe qui perd, de fait, son label.
ICP paie là les frais d’une campagne active menée aux États-Unis par Convention Baptiste du Sud, une église chrétienne américaine. Elle est vent debout contre le disque mais aussi les Gay Days de Disneyland et même le coming-out d’Ellen DeGeneres qui a annoncé son homosexualité dans la série ABC Studios, Ellen. Pour contenir le problème, Disney déclare alors publiquement que « l’album ne respecte pas sa vision du monde ». Hollywood Records demande alors à tous les magasins de ne pas mettre en rayon le CD même si certains refusent comme l’Harmony House qui réussit à écouler plus de 1 700 CD le jour de sa sortie.
La fin du contrat avec Hollywood Records ne signifie pas pour autant la mort des ICP. Plusieurs labels tels Interscope ou Geffen Records propose en effet de signer le groupe, mais c’est finalement Island Records qui emporte la mise et décide de surfer sur la controverse en sortant même une version non censurée de l’album (avec les seize chansons originales et non seulement treize comme l’édition d’Hollywood Records) en plus de la réédition des deux premiers albums Joker du groupe. The Great Milenko sort ainsi sous quatre couleurs : rouge, vert, violet et doré. Chaque couleur contient un secret qui permettait de décrypter un code qui annonce le titre du cinquième album The Amazing Jeckel Brothers. Plusieurs clip vidéos sont ensuite tournés et soutiennent la nouvelle promotion de The Great Milenko comme Halls of Illusions, How Many Times et Piggy Pie.
Même si les critiques sont plus que négatives sur lui (Allmusic parle d’un « pur produit fait pour les ados blancs rebelles qui ont des problèmes de drogues » tandis qu’Entertainment Weekly juge un « album puéril qui donne une mauvaise image du hip-hop »), l’opus parvient à la soixante-troisième place des charts américains. En 1998, il réussit le tour de force de se voir certifié disque d’Or par le RIAA !
En pleine promotion, les ICP reviendront sur la polémique en taclant sévèrement Disney : « La faute commise par Disney en nous laissant dans la m***e contre des dollars est immonde ! Nous demandons à nos fans d’aller à Disneyland et de bruler le parc ! » Une vidéo montre même le groupe s’acharnant sur un homme déguisé en Mickey Mouse. « Nous ne voulons plus jamais entendre parler de cette compagnie ».
The Great Milenko est une œuvre mal née : elle ne correspond ni au groupe qui le porte, ni au label qui le supporte. Hollywood Records s’est pris les pieds dans le tapis en le sortant tandis que les ICP ont choisi des sonorités trop années 80 pour servir un discours à la portée visiblement mal maitrisée.