Inquisitorius

L'Éveil de la Lame Rouge

Inquisitorius : L'Éveil de la Lame Rouge est un roman qui permet d'approfondir un personnage rencontré dans le comics Dark Vador : Le Seigneur Noir des Sith.

Le roman est écrit par Delilah S. Dawson, une auteure prolifique pour Star Wars. Elle est en effet choisie notamment pour écrire les romans pour adultes Phasma, Black Spire et Inquisitorius : L'Éveil de la Lame Rouge et propose plusieurs scénarios pour des comics destinés à la jeunesse : Star Wars Adventures et Star Wars : Forces du Destin. Elle signe enfin quelques nouvelles : La Brûlure dans le magazine Star Wars Insider ; The Perfect Weapon racontant l'histoire d'un personnage de Star Wars : Le Réveil de la Force, Bazine ; The Secrets of Long Snoot dans le recueil From a Certain Point of View ; She Will Keep Them Warm publiée dans From a Certain Point of View : The Empire Strikes Back ; Return to a Shattered Planet offerte en bonus de la version poche de Black Spire et, pour finir, Worthless présente dans Stories of Jedi and Sith.

Une fois n'est pas coutume, le roman s'inspire de personnages tertiaires d'un comics, les issues #19 et #20 de Dark Vador : Le Seigneur Noir des Sith pour être exact, scénarisés par Charles Soule. Celui-ci raconte comment deux Inquisiteurs, la Treizième Sœur à la peau rouge et le Twi'lek Tualon Yaluna, sont massacrés par Dark Vador. Lors d'une mission, il remarque en effet que les deux adeptes du Côté Obscur ont des sentiments l'un pour l'autre et entretiennent une relation intime. Tout attachement étant pour lui preuve de faiblesse, il décide alors de massacrer les deux Inquisiteurs qui n'ont pas à être dans son équipe d'élite de tueurs. S'ils parviennent à s'enfuir dans les rues de Coruscant, ils sont vite rattrapés par le Seigneur Noir des Sith qui a alors le cynisme cruel de forcer le geste des deux amants pour qu'ils retournent leurs sabres laser l'un contre l'autre, s'embrochant mutuellement, devenant donc chacun responsable de la mort de l'être aimé. Peu de choses sont finalement sus sur cette fameuse Treizième Sœur, ni son espèce, ni son passé, ni son origine. Le roman de Delilah S. Dawson vient donc combler ces lacunes. Si le livre est anecdotique du point de vue de l'histoire galactique globale, il est en revanche passionnant d'un point de vue philosophique non seulement sur l'Ordre Jedi mais également sur l'Inquisitorius.

Le roman raconte donc le destin d'Iskat Akaris, une Padawan devenue Jedi puis passée Inquisitrice. Le livre commence ainsi un peu avant la Guerre des Clones, c'est-à-dire quelques temps avant la bataille de Geonosis, évènement raconté dans le film Star Wars : L'Attaque des Clones. La jeune Iskat a bien du mal à plaire à son Maître Sember Vey qui essaye de lui apprendre à trouver la sérénité, le tout en lui faisant parcourir la Galaxie à la recherche d'artefacts liés à la Force. Mais la Padawan se sent mal à l'aise. Elle ne connaît rien de son passé, mis à part qu'elle est une Pkori, a priori la seule de son espèce dans la Galaxie. Elle ressent aussi de la méfiance vis-à-vis des autres jeunes Jedi, Novices ou Padawan. Il faut dire que tous lui font ressentir des sensations négatives à son égard, mélanges de rejet et de crainte. Surtout, elle a l'impression, sans trop savoir pourquoi, d'avoir une puissance mal utilisée qui ne demande qu'à s'exprimer. La seule chose dont elle est sûre, c'est que le calme, la méditation, le fait de passer des heures dans une bibliothèque ou encore de partir à la recherche de vieux objets sans intérêt ne l'intéressent pas. Ce qu'elle veut, elle, c'est de l'action et des combats !

La frustration d'Iskat est particulièrement intéressante car elle met le doigt sur le gros problème de l'Ordre Jedi à la fin de son règne. En gommant les individualités, en voulant que chaque Jedi rentre dans le moule des préceptes, les Jedi ne font que créer de la méfiance et du ressentiment tout en bridant le potentiel de certains candidats. Au lieu de canaliser la violence qui est en elle, son Maître et les autres Jedi vont la forcer à être ce qu'elle n'est pas. Pire, ils vont lui cacher ses origines pour la protéger d'elle-même alors que cela ne fait que générer des ressentiments. Mais surtout, alors que la Guerre des Clones éclate, l'Ordre Jedi montre ses propres contradictions et autres hypocrisies. Les Jedi acceptent en effet d'être des généraux de guerre pour la République au lieu d'être des protecteurs des populations opprimées par les batailles incessantes. Et au fur et à mesure que la guerre se prolonge, leur nombre diminue, obligeant à s'assoir encore plus sur leur idéaux pour continuer un conflit qui les dépasse désormais. Ainsi, ce qui était inacceptable devient tolérable. Et c'est ainsi qu'Iskat, promue très vite Chevalier, a les moyens de vivre pleinement ce qu'elle est, tout en frôlant de plus en plus le Côté Obscur.

Naturellement, le lecteur se doute bien que cette Jedi, appréciant un peu trop la violence, ne passe pas inaperçue auprès d'un certain Sith qui va donc la surveiller et la manipuler. Quand vient l'Ordre 66, elle est gardée en vie puis se voit proposer un poste d'Inquisitrice. Et si elle trouve une certaine liberté lui permettant enfin d'être qui elle est vraiment, elle va petit à petit se rendre compte qu'elle est passée d'un extrême à un autre, d'une prison à une autre. Si les Jedi étaient hypocrites et condescendants, les adeptes du Côté Obscur sont brutaux, solitaires et tous des ennemis potentiels. La vie est une lutte de chaque instant, où n'importe quel membre peut l'attaquer en traître, par simple colère ou ambition, simplement pour se débarrasser d'un concurrent. Il n'y a jamais de camaraderie. Mais cela ne gêne pas Iskat qui peut enfin utiliser la Force comme elle s'en sent capable. Et surtout, elle découvre la vérité sur elle-même : ses origines, son passé et ses capacités. La jeune femme aime la violence et aime tuer. C'est simplement à la fin de sa vie qu'elle se rend compte qu'elle n'a, en réalité, jamais été libre malgré ce qu'elle croyait. Elle est simplement passée d'une prison de non-dits à celle de la violence à l'état pur. Et là de se poser la question : quelle aurait été sa vie si elle n'avait pas été confiée à son Maître alors qu'elle était encore toute jeune ?

L'auteure arrive ainsi à rendre son personnage d'Iskat Akaris vraiment passionnant car le lecteur comprend totalement sa frustration et son basculement vers le Côté Obscur. Il ressent même de l'attachement pour elle car Iskat n'est pas fatalement mauvaise à l'origine, et va même rester très ambivalente sur ses valeurs jusqu'à la fin de sa vie. Certes, elle aime la violence, elle aime tuer et se sent bonne à cela. Mais elle n'est pas du tout à la recherche de pouvoir, du mal absolu ou du contrôle des autres personnes. Ce qu'elle veut, c'est simplement se battre pour être elle-même d'une certaine façon. Et surtout, elle veut comprendre enfin qui elle est et quelle est véritablement son histoire, notamment concernant le secret qui entoure sa naissance.

Même si le roman est centré principalement sur la Pkori, quelques autres personnages ressortent du récit à commencer par le Maître Sember Vey, une humaine qui fait de son mieux pour canaliser la personnalité de son apprentie mais ne s'avère pas très sympathique avec elle, déstabilisant sa jeune Padawan. Tualon Yaluna est aussi intéressant car il est à l'origine un Jedi doué et droit et se retrouve à devenir un Inquisiteur impitoyable. Mais si Iskat est passé du Côté Obscur de son plein gré via une lente évolution, le Twi'lek a lui été torturé et reconditionné pour forcer ce changement. Le roman permet aussi de retrouver quelques personnages déjà croisés dans la Saga à commencer par Dark Sidious, Dark Vador, le Grand Inquisiteur, Mace Windu ou encore Yoda.

Inquisitorius : L'Éveil de la Lame Rouge est un roman passionnant qui permet un magnifique effet miroir entre l'Ordre Jedi et celui des Inquisiteurs à travers une utilisatrice de la Force qui ne rentre dans aucune case, clairement pas d'un côté mais pas vraiment non plus de l'autre.