Où l'Ombre s'Abat
L'Escadron Alphabet - 2
Titre original : Shadow Fall Éditeur : Pocket Date de publication France : Le 12 août 2021 Genre : Science-fiction Label : Star Wars - Univers Officiel |
Auteur(s) : Alexander Freed Autre(s) Date(s) de Publication : Del Rey (US) : Le 23 juin 2020 Nombre de pages : 572 |
Le synopsis
La critique
L'Escadron Alphabet - 2 : Où l'Ombre s'Abat est le second volet d'une trilogie qui se déroule juste après Star Wars : Le Retour du Jedi.
Cette trilogie est confiée à Alexander Freed, un auteur surtout connu pour avoir été scénariste des arcs du comics Légendes The Old Republic : Le Sang de l'Empire dans les numéros #4 à #6 mais aussi Soleils Perdus des numéros #7 à #11. Il a également scénarisé le comics Légendes Le Poing du Tyran de La Purge des Jedi et publié trois nouvelles : une relevant de l'Univers Légendes (The Last Battle of Colonel Jace Malcom) et deux de l'Officiel (One Thousand Levels Down et La Fin de l'Histoire). En 2015, il signe aussi son premier roman dans l'Univers Officiel, Battlefront : Twilight Company, dont le récit adapte le jeu vidéo sorti la même année avant d'enchaîner en 2017 sur la novélisation de Rogue One : A Star Wars Story.
L'Escadron Alphabet - 2 : Où l'Ombre s'Abat possède les mêmes défauts que le premier opus ; à la différence près qu'il n'a pas droit ici à des circonstances atténuantes comme celui d'être un tome introductif. Alexander Freed a en effet, pour le lecteur, un style d'écriture qui passe ou qui casse. Il a ainsi tendance à étirer en longueur son histoire et à épaissir inutilement son récit sans que le lecteur n'arrive fatalement à discerner le superflu au point que l'ensemble paraisse long et ennuyeux. Le souci est ailleurs : il vient peut-être de la propension de l'écrivain à apprécier particulièrement - et donc développer à outrance - les scènes de guerre, qu'elles soient spatiales mais surtout terrestres. Et que pour le lecteur qui n'aime pas ce genre de récit, les descriptions de batailles urbaines et de combats de guérillas à n'en plus finir conduisent au mieux à un désintérêt poli. Certes, le livre se lit globalement facilement mais impossible d'imprimer tout ce qu'il se passe tant rien n'est vraiment palpitant ou enthousiasmant. Découpé en deux parties de même longueur, il faut tout de même avouer que la première est la plus captivante. Elle a l'avantage de présenter le fameux Escadron Alphabet comme une vraie équipe où chaque membre interagit avec les autres. Cette introduction qui ne dit pas son nom est également celle qui propose le plus de révélations. Par contre, la deuxième moitié est soporifique à souhait. Non seulement, la plupart des personnages sont séparés les uns des autres mais en plus, les batailles spatiales ont disparu pour céder leur place à des opérations terrestres étouffantes et longuettes. La lecture devient alors très laborieuse.
L'auteur avait utilisé le premier tome pour présenter et épaissir ses personnages. Le souci est que malgré ses tentatives, aucun des membres de cet Escadron Alphabet n'arrivait à se rendre sympathique. Et ce deuxième opus confirme malheureusement cette impression. À commencer par le personnage d'Yrica Quell. Cette ancienne impériale était membre de l'escadron 204e, surnommé l'Escadre de l'Ombre, et à l'origine de nombreux massacres qu'elle avait pratiqués pour la croisade menée sous le nom de code d'« Opération Cendres ». Dégoûtée par tant de violence, elle déserte l'Empire, se fait capturer par la Nouvelle République pour qui elle va traquer ses anciens coéquipiers en mettant en place le fameux Escadron Alphabet. Sauf qu'elle reste enfermée dans sa culpabilité et surtout sa peur que le peu de monde qu'elle côtoie, dont son escadre et ses supérieurs du renseignement, apprennent son véritable passé et les horreurs qu'elle a commises. Elle sait que dans ce cas-là, seule une condamnation à mort l'attend de la part des responsables politiques de la Haute République. Ainsi, même si le personnage est plus qu'antipathique, le parcours d'Yrica est sûrement le plus intéressant du roman. Entre le début et la fin du récit, elle évolue d'ailleurs énormément non seulement dans sa situation en tant que chef d'escadron de la Nouvelle République mais également dans ses sentiments profonds, les acceptant enfin tels qu'ils sont et réagissant en conséquence.
Wyl Lark est le second personnage à se voir proposer un beau parcours évolutif. Le petit jeune de l'Escadron Alphabet est le plus gentil et affable du groupe. Originaire de la planète Polyneus, il s'est juré d'y retourner un jour. Plutôt transparent, il est aussi d'une naïveté confondante en étant persuadé qu'il arrivera à percer la carapace de ses ennemis grâce au contact qu'il a établi secrètement avec l'une des membres de la 204e. Mais de déception en désillusion, il finit par être séparé d'une bonne partie de son escadron. Pris au piège sur la planète qu'il était censé défendre, au beau milieu d'une guérilla, il va devoir trouver les ressources en lui pour devenir un commandant et un leader alors qu'il se considère toujours comme le petit jeune du groupe. Et chose étonnante et surprenante pour lui, il arrive finalement à motiver et à diriger des soldats bien plus aguerris que lui qui acceptent ses ordres sans rechigner. Le personnage de Wyl gagne ainsi en maturité au fur et à mesure du récit en même temps que ses responsabilités augmentent.
Le seul membre de l'Escadron Alphabet qui accompagne Wyl est en réalité Nath Tensent. Lui aussi est plutôt décevant dans ce roman. Plus âgé que son coéquipier, il ne se voit plus prendre un commandement comme il a pu le faire dans le passé et se décharge sur le gamin en l'envoyant au charbon. Pour sa défense, il est persuadé que Wyl a toutes les compétences pour assumer ce rôle mais continue tout de même à garder un œil sur le jeunot, lui servant parfois de mentor surtout quand il le sent sur le point de prendre une mauvaise décision. Enfin, même s'il s'engage à fond dans les combats, il donne tout de même l'impression d'être un simple spectateur du délitement de son escadron sans qu'il essaye de rafistoler quoi que ce soit auprès de ses coéquipiers. Les défauts que le personnage avait dans le tome précédent ainsi que ses côtés menteurs et manipulateurs, sont en revanche ici un peu gommés. Pour autant, il est assurément le personnage des cinq membres de l'Escadron Alphabet dont le développement est le plus léger dans l'opus. Il est certes un peu plus attachant que dans le premier tome mais son histoire semble faire du sur-place et sa présence ne se justifie que pour jouer les grands frères avec Wyl.
Chass na Chadic, une Theelin qui adore piloter avec de la musique à fond dans son cockpit, va aussi beaucoup changer. Le lecteur en apprend ainsi plus sur son passé et les blessures psychiques qui en découlent. Il comprend enfin pourquoi le personnage est tellement à fleur de peau. Ayant du mal à accorder sa confiance, elle déteste donc plus que tout la trahison. Souvent plongée dans l'alcool quand elle ne pilote pas, elle cherche alors à comprendre sa place mais surtout craint son avenir, une fois la guerre terminée. Au milieu du roman, elle affronte finalement l'Escadre de l'Ombre dans le Système Cerberon mais se retrouve séparée du reste de la troupe. Alors que Wyl et Nath sont sur la planète urbaine Troithe, elle s'écrase en effet sur Catadra, une planète abritant de nombreuses sectes. L'auteur a ainsi l'idée assez étrange d'envoyer la pilote à l'écart de la bataille où s'affronte l'Empire et la Nouvelle République. Certes, son parcours est intéressant car il permet au personnage de voir ses certitudes s'ébranler. Pour autant, les gens et les événements amenant à cette introspection semblent vraiment sortis de nulle part ; presque hors-sujet. Le lecteur ne peut s'empêcher de penser que les péripéties que vit Chass freinent clairement la dynamique principale du roman.
Enfin, le cinquième et dernier membre de l'Escadron Alphabet a également droit à quelques révélations. Le lecteur connaissait en fait bien peu de choses de Kairos, mis à part qu'il s'agissait d'une humanoïde de sexe féminin. Dans cet opus, le voile est un peu levé même si les informations ne sont pas données directement par le personnage mais par des tiers. De plus, elle reste l'une des héroïnes principales la moins présente dans cet opus. En étant utilisée à peine pendant la moitié du roman, impossible, encore une fois pour le lecteur, de s'attacher à elle.
Tandis que les coéquipiers de l'Escadron Alphabet sont ici globalement peu intéressants, l'auteur s'en sort étonnamment beaucoup mieux avec les personnages secondaires. Il parvient par exemple à bien traiter Caern Adan, le responsable des renseignements, dont le destin touchera particulièrement le lecteur. De même, il donne une humanité incroyable à IT-O, le droïde de torture impérial transformé en psychiatre pour la Nouvelle République. Pour autant, la plus belle réussite du roman est sans conteste le personnage de Soran Keize. L'ex-mentor au sein de l'Escadre de l'Ombre d'Yrica Quell avait également déserté de l'Empire pour finalement se décider à revenir dans son ancienne escouade. Il reprend donc la tête du 204e suite à la mort de la précédente commandante, Grand-Mère. Il compte ainsi offrir à ses coéquipiers une revanche sur leur ennemi. Et l'impérial s'avère particulièrement dangereux car il ne se fait aucune illusion sur les chances de l'Empire de gagner la guerre ou n'éprouve aucune fascination pour le culte ridicule qui entoure l'Empereur défunt. Il veut juste rétablir l'honneur de ses coéquipiers en frappant un grand coup contre la Nouvelle République.
Si l'auteur se loupe grandement dans son traitement des personnages, sa capacité à imbriquer son récit dans les précédents romans de l'Univers Officiel se situant dans la période après Star Wars : Le Retour du Jedi, notamment la trilogie Riposte, fait des merveilles. Il fait en outre plaisir pour réintroduire certains personnages vus dans son précédent roman, Battlefront : Twilight Company, et cerise sur le gâteau, utilise à nouveau le personnage d'Hera Syndulla, l'héroïne de la série Star Wars : Rebels même si elle reste ici éloignée de l'action une bonne partie du roman.
L'Escadron Alphabet - 2 : Où l'Ombre s'Abat a de quoi décevoir. Le roman est littéralement plombé par des personnages peu attachants, des situations laborieuses et le style de l'auteur décidément trop besogneux. Heureusement, la première partie ainsi que certains personnages secondaires soutiennent l'attention du lecteur.