Les Secrets du Tombeau du Christ

Titre original :
Secrets of Christ's Tomb : Explorer Special
Production :
National Geographic
NGC Network US
Pioneer Film and Television Productions
Date de diffusion USA :
Le 3 décembre 2017
Genre :
Documentaire
Réalisation :
Robert Strange
Musique :
Audio Networks
Durée :
44 minutes
Disponibilité(s) en France :

Le synopsis

À Jérusalem, une équipe d’archéologues et de scientifiques s’affaire autour du tombeau de Jésus Christ afin de le sauver d’une destruction imminente. Situé à l’intérieur de l’église du Saint-Sépulcre, celui-ci repose en effet sous un édicule dont l’état de conservation est si dégradé qu’il menace de s’effondrer. Il est donc urgent de renforcer au plus vite le bâtiment avec, en filigranes, trois contraintes majeures : l’obligation de ne pas endommager davantage le sanctuaire, la nécessité de mettre d’accord toutes les autorités religieuses en charge du site, sans oublier le risque inhérent de découvrir lors des travaux de nouveaux éléments pouvant potentiellement remettre en cause deux millénaires de croyances…

La critique

rédigée par
Publiée le 20 avril 2025

Certains sites historiques possèdent aujourd’hui une valeur universelle inestimable. C’est en particulier le cas de Jérusalem, la « Ville trois fois sainte » qui, en sa qualité de « capitale » des trois plus grandes religions monothéistes, contient des dizaines de lieux sacrés attirant chaque année des millions de croyants, Juifs, Chrétiens et Musulmans. Parmi les nombreux sanctuaires, figure notamment l’église du Saint-Sépulcre qui, selon la tradition chrétienne, abrite en son sein le tombeau de Jésus Christ.

La ville de Jérusalem est profondément associée à l’histoire de Jésus dont l’existence est surtout connue grâce à des documents produits par les Chrétiens eux-mêmes des années, voire des décennies après son exécution par les Romains. La source chrétienne la plus complète demeure Le Nouveau Testament constitué, entre autres, des Évangiles, des Actes des Apôtres et les Épîtres de Paul dans lesquelles se trouve la mention la plus ancienne de la mort et la résurrection de Jésus. Les textes religieux sont par ailleurs complétés par les écrits laissés par des non-Chrétiens tels que Flavius Josèphe, historien romain de confession juive ayant vécu au premier siècle, puis Pline le Jeune, Tacite, Suétone qui ont témoigné pour leur part durant le IIe siècle.

Selon les textes, Jésus serait né à Bethléem entre l’an 7 et l’an 5 av. J.-C., sous le règne du roi de Judée Hérode le Grand. Supposément conçu par la « Vertu du Saint-Esprit », il grandit dans le village de Nazareth, aux côtés de sa mère, Marie, et du compagnon de cette dernière, Joseph, un descendant lointain du roi des Hébreux David. Peu d’informations évoquent son enfance et son adolescence. Il a environ trente ans lorsqu’il fait la rencontre de Jean le Baptiste, un prédicateur qui lui administre le baptême dans les eaux du Jourdain. Jésus prodigue ensuite son enseignement et promet l’accès au Royaume de Dieu avec le soutien de douze disciples, les apôtres. Son discours et les rumeurs parlant de miracles lui attirent bientôt l’hostilité d’une partie du clergé de Jérusalem qui le dénonce aux autorités romaines. Sur ordre de Ponce-Pilate, le gouverneur qui craint un soulèvement populaire, Jésus est arrêté et condamné à la flagellation puis à la crucifixion, la punition généralement réservée aux voleurs. Après avoir transporté sa croix hors de la ville, jusqu’à la colline du Golgotha, il est mis à mort. Son corps est rapidement enseveli. Les textes religieux parlent alors de sa résurrection.

Si l’épisode de la résurrection appartient à la seule croyance, la mort de Jésus et l’histoire de son tombeau sont documentés. Il est ainsi inhumé dans la cavité d’une ancienne carrière de pierres située à proximité du Golgotha. Transformée en chambre funéraire et initialement prévue pour Joseph d’Arimathie, elle est constituée d’un vestibule, d’une chambre et d’une pierre roulante qui en ferme l’accès. Au IVe siècle, Eusèbe de Césarée précise que le site devient rapidement un lieu de dévotion pour la communauté chrétienne. En 135, l’Empereur Hadrien décide alors de faire disparaître toutes les traces de la sépulture en rasant la colline, en la remblayant et en édifiant par-dessus un forum et un temple dédié à la triade capitoline, Jupiter, Junon et Vénus.

Il faut attendre l’accession au trône de Constantin pour que l’endroit soit rendu aux Chrétiens. L’Empereur romain, comme son épouse Hélène, s’est converti au Christianisme en 312. Vers 325-326, il ordonne que le site soit découvert. Il peut compter sur la tradition orale qui a toujours perpétué le souvenir de l’emplacement du tombeau du Christ. L’architecte Zénobie est chargé d’y bâtir un sanctuaire, l’église du Saint-Sépulcre dédiée au culte le 13 septembre 335. Une rotonde de trente-six mètres de haut percée par un oculus surplombe les restes de la grotte dans laquelle Jésus avait été inhumé. Un petit bâtiment, l’Édicule, est ajouté à l’intérieur-même de l’église, par-dessus la sépulture, afin de la protéger. Un pèlerinage s’organise ensuite vers la tombe, devenu le lieu le plus précieux de la religion chrétienne. L’édifice ne tarde toutefois pas à subir les affres de l’histoire. Après avoir conquis la Terre Sainte, la dynastie musulmane des Abbassides fait néanmoins en sorte de protéger l’église en interdisant son saccage et sa destruction. La nature, en revanche, est moins clémente. Plusieurs séismes et incendies ravagent Jérusalem et endommagent le bâtiment en 746, au début du IXe siècle, en 841, en 938…

L’arrivée au pouvoir de la dynastie des fatimides est cruelle pour les Chrétiens. Le Saint-Sépulcre et l’Édicule sont démolis. C’est l’une des causes des Croisades lancées dès 1095 par le pape Urbain II. À la faveur d’un accord avec les autorités musulmanes, les Chrétiens sont autorisés à reconstruire leur église suivant le plan de la croix. Un nouveau groupe, l’Ordre du Saint-Sépulcre, est créé par les Croisés pour protéger la tombe. La plupart des rois de Jérusalem sont eux-mêmes ensevelis dans le Saint-Sépulcre. Lorsque Jérusalem est conquise par Saladin, les Chrétiens sont chassés, à l’exception de ceux d’Orient chargés de prendre soin du site. Reprise par l’empereur Frédéric II au XIIIe siècle, la ville est de nouveau pillée par les Turcs en 1244. Les Chrétiens sont massacrés. Le Saint-Sépulcre est dévasté. Le culte n’y est autorisé de nouveau qu’en 1335 grâce à l’entremise de Robert d’Anjou. L’ordre des Franciscains investit l’église. Les nombreux pèlerinages ayant pour cause la dégradation de la tombe du Christ, une plaque de marbre est placée par-dessus en 1345.

Au XVe siècle, les conflits entre Chrétiens et Musulmans conduisent à de nouveaux ravages. Progressivement, le site n’est plus entretenu. En ruine, l’Édicule est reconstruit en 1555. Le dôme est restauré à son tour un siècle plus tard, en 1648. Les travaux de consolidation s’étirent sur plus de soixante-dix ans. Mais un incendie survenu en 1808 provoque son effondrement. L’Édicule est une nouvelle fois rebâti sous la direction de l’architecte grec Nikolaos Kommenos entre 1809 et 1810. Des crampons de fer, aussi disgracieux qu’indispensables, sont ajoutés pour soutenir les pierres. D’autres rénovations et travaux sur la structure de l’édifice ont lieu durant les XIXe et XXe siècles, ce qui n’empêche pas celui-ci de s’abîmer.

C’est dès lors à l’intérieur d’une église dégradée que Robert Strange pose ses caméras pour le compte de National Geographic. Après avoir suivi une formation de journaliste, il débute dans l’univers de la presse écrite en se spécialisant notamment dans l’étude des crimes. Un peu plus de dix ans plus tard, il bascule à la télévision. Scénariste, producteur et réalisateur, il dirige alors plusieurs documentaires diffusés sur Discovery Channel, History Channel, Channel 4, BBC et National Geographic. Vainqueur d’un Du Pont Award en 2012, sa filmographie compte des titres comme Into Alaska With Jeff Corwin (2007), How the Earth Was Made (2009), Japan Tsunami: How It Happened (2011), UFO Europe: The Untold Stories (2012-2013), Aux Origines de l’Humanité (2011-2013), Escape to the Chateau (2016) et Mission to the Sun (2019). Robert Strange est également l’auteur des ouvrages Looking for Lucan (1994) et Who Sank the Titanic? The Final Verdict dans lequel il se penche sur le naufrage tragique du Titanic survenu en 1912 (2012).

Avec Les Secrets du Tombeau du Christ, Robert Strange met la lumière sur la mission de la dernière chance mise en place en 2016 par une équipe de l’Université d’Athènes afin de sauver l’Édicule du Saint-Sépulcre dont l’effondrement paraît imminent. La venue chaque année de millions de visiteurs et l’usage de cierges dégageant chaleur et fumée ont profondément détérioré le bâtiment, au point que celui-ci est devenu dangereux. De nombreuses fissures sont apparues. Supposées tenir l’édifice, les colonnes dévient désormais de la verticalité. Antonia Moropoulou, la directrice scientifique de l’Université d’Athènes, a plusieurs fois tiré la sonnette d’alarme. La structure est amenée à s’effondrer. Sa destruction ne sera pas progressive, mais bien soudaine, entraînent dans son sillage la mort des personnes qui se trouveront à l’intérieur ou à proximité. Le risque est tel que l’accès à l’Édicule est fermé par les autorités israéliennes en 2015 pour des raisons de sécurité évidentes.

Si la restauration d’un édifice tel que l’Édicule paraît aisée, le documentaire pointe néanmoins du doigt un problème de taille. Rien ne peut être décidé, ni réalisé sans le consentement unanime des autorités religieuses chargées de garder le site. Depuis 1767, le Saint-Sépulcre est en effet géré conjointement par l’Église orthodoxe de Jérusalem, le Patriarcat arménien de Jérusalem et la Custodie franciscaine de Terre Sainte, tous signataires d’un statu quo. S’ajoutent d’autres responsables issus de l’Église orthodoxe grecque, de l’Église catholique romaine, de l’Église apostolique arménienne ou bien encore des branches orthodoxes basées en Éthiopie et en Syrie. Or, au fil des siècles, les communautés ont rarement réussi à s’entendre et aucune partie du bâtiment ne peut être rénovée sans le consentement de tous. La preuve en est cette échelle en bois placée sur le bord d’une fenêtre en 1785 et qui, faute d’accord sur les maigres travaux à mener pour consolider une corniche, n’a jamais été retirée depuis… Dans un autre registre, les patriarches en sont venus à plusieurs reprises aux mains, parfois pour des broutilles telles qu’une porte mal fermée, une parole maladroite, une cérémonie à la mauvaise heure…

Les querelles intestines des autorités religieuses ont elles-mêmes contribué à la dégradation rapide de l’église. Fort heureusement, sous la pression des scientifiques qui ont alerté sur le risque d’effondrement, ces dernières sont enfin arrivées à un accord en mars 2016 afin de lancer une campagne de rénovation du sanctuaire et du tombeau du Christ. Les travaux sont dirigés par Antonia Moropoulou et une petite équipe de l’Université d’Athènes qui, quelques mois plus tôt, avaient déjà œuvré sur l’Acropole puis à l’intérieur de l’église Sainte-Sophie d’Istanbul. Fort de leur expérience, tous sont épaulés par les équipes de National Geographic notamment représentées par l’archéologue Fredrik T. Hiebert et le documentariste Tim Samuels.

Pour étudier l’église, plusieurs technologies novatrices sont mobilisées, telles qu’un géoradar et des caméras robotisées utilisés pour voir les couches structurelles du bâtiment. Deux-cent-cinquante scans de pierres sont réalisés. Quelques maigres échantillons sont envoyés en laboratoire. À partir des analyses, les alertes lancées par Antonia Moropoulou se confirment. Pire, le mortier est littéralement tombé en poussière au fil du temps. Bon gré, mal gré, les patriarches sont évidemment contraints d’accepter l’organisation de travaux d’urgence. Ils exigent néanmoins que tout soit réalisé dans les neuf mois, à temps pour la cérémonie du feu sacré prévue au moment des célébrations de Pâques.

Le chantier consiste à consolider les colonnes avec des tiges de titane et à renforcer les parois de l’Édicule. À l’occasion, les contreforts en acier placés là par les Anglais en 1947 sont sciés. Des ventilateurs permettent en outre de lutter contre l’humidité des murs, saturés d’eau à cause des canalisations et des écoulements situés dans les entrailles du Saint-Sépulcre. Surtout, il s’agit de jointoyer la maçonnerie en remplaçant le mortier millénaire par du ciment plus résistant. Nouveau problème, il faut absolument protéger le tombeau du Christ qui pourrait être endommagé par les coulures sur le lit funéraire. Pour les éviter, il faut ouvrir la tombe pour y placer des protections. Et une fois encore, les autorités religieuses rechignent…

Après d’âpres négociations, elles acceptent finalement de laisser les archéologues et les scientifiques ouvrir le tombeau. La professeur Joan Taylor est à son tour associée au projet. Du 26 au 28 octobre 2016, la dalle de marbre protégeant le lit funéraire original est poussée pour la première fois depuis sa mise en place au IVe siècle. L’émotion est immense au moment de découvrir l’intérieur de la tombe, caché depuis plus de mille-cinq-cent ans. Deux carcans subsistent malgré tout. Les patriarches ne laissent qu’une fenêtre de soixante jours pour achever toutes les études et consolidations nécessaires. La promiscuité du lieu empêche par ailleurs de retirer la dalle de marbre. Seule une petite partie de la stèle initiale est par conséquent visible. Une mystérieuse petite croix gravée dans la pierre est une trouvaille incroyable.

Réalisés à l’automne 2016, les travaux sur l’Édicule ont coûté la bagatelle de 3,5 millions d’euros. Grâce à cette somme, l’un des endroits les plus précieux de la religion a été sauvé. Bien sûr, en regardant Les Secrets du Tombeau du Christ, les spectateurs qui espèrent apercevoir ne serait qu’un fragment de la précieuse tombe, voire le corps du Christ ou ce qu’il en reste, seront déçus. Comme il est d’usage dans ce genre de documentaire, il s’agit en effet davantage de valoriser l’engagement des archéologues et de commenter leur travail que de réellement répondre à l’une des questions initiales, à savoir de confirmer ou non que la tombe de Jésus est bel et bien présente à l’endroit des recherches.

Les Secrets du Tombeau du Christ est monté en suivant un cahier des charges typique des productions National Geographic. Tous les poncifs du genre sont en effet repris. Une dose de suspense est distillée dans le commentaire qui insiste sur l’urgence de protéger un bâtiment millénaire comme s’il allait s’effondrer dans la seconde. La musique aide à créer une atmosphère parfois anxiogène. Le documentaire se présente alors comme une succession de rebondissements, la solution à un problème entraînant un nouveau problème… Faute de temps pour développer le propos, les conclusions s’avèrent hâtives et parfois aléatoires.

Pourtant, Les Secrets du Tombeau du Christ est un film à ne pas négliger. Il s’agit même d’un très bon documentaire qui permet de mettre en exergue un site souvent méconnu ou fantasmé par le grand public. Chacun est en effet en droit de s’imaginer une tombe magnifique pour le « Fils de Dieu », un lieu majestueux empli de richesses possédant une aura incroyable. Les caméras de Robert Strange permettent en réalité de montrer à quel point l’endroit est petit, sombre, noirci par le temps et désolé. À la place d’une sépulture monumentale, le spectateur découvre en fait un recoin dans lequel pas plus de trois ou quatre personnes peuvent pénétrer en même temps, non sans être obligées de courber l’échine, faute de place.

Les Secrets du Tombeau du Christ révèle également une information souvent peu connue du grand public, à savoir les querelles intestines entre les communautés religieuses qui, pour des raisons parfois grotesques, ne cessent de se confronter et de se battre depuis des siècles. La conséquence en est l’abandon de l’un des sites pourtant majeurs au sein de leur propre religion. Le Saint-Sépulcre et son Édicule ne seraient pas dans cet état-là si les patriarches étaient parvenus à s’entendre pour mener régulièrement les travaux nécessaires à la préservation du site. Les Secrets du Tombeau du Christ permet ainsi de montrer à quel point des hommes parfois trop exigeants et bornés peuvent mettre en péril un patrimoine ancestral appartenant pourtant à l’humanité tout entière et qui mérite mieux qu’une guéguerre stérile dont les causes peuvent se résumer à une simple chaise mal placée dans une pièce obscure !

Enfin, Les Secrets du Tombeau du Christ possède une ultime qualité, celle de mettre en valeur le métier d’archéologue qui, lorsqu’il n’est pas totalement ignoré, est souvent fantasmé. Durant quarante minutes, chacun peut entrevoir la passion de ces scientifiques qui, loin d’être aussi romanesques qu’Indiana Jones et Benjamin Gates, cherchent à sauver la moindre parcelle de notre passé oublié, et ce tout en devant faire face aux éléments et aux carcans imposés par les uns et les autres. Le documentaire de Robert Strange s’apparente à un avertissement au monde. Les archéologues ne peuvent rien lorsqu’ils doivent faire face à la bêtise humaine. Le patrimoine est précieux et les caprices de certains le mettent désormais indéniablement en danger.

Conçu comme une course contre le temps pour sauver l’héritage du monde, Les Secrets du Tombeau du Christ est diffusé pour la première fois aux États-Unis le 3 décembre 2017 sur la chaîne National Geographic. Passé inaperçu en France, le documentaire est accessible via la plate-forme Disney+ à partir du 7 avril 2020.

Véritablement passionnant, Les Secrets du Tombeau du Christ est au final un beau documentaire qui, contrairement à ce que son titre indique, dévoile en réalité peu d’informations concernant la tombe de Jésus. Toutefois, deux secrets sont bel et bien révélés, à savoir que notre patrimoine universel est en danger, et que la cause demeure trop souvent l’intransigeance et la fébrilité des autorités quelles qu’elles soient.

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