La Lame

La Haute République

La Haute République : La Lame est un comics adulte formant une mini-série de quatre issues publiés aux États-Unis par Marvel et faisant partie de la Phase II de La Haute République.

La saga de La Haute République continue ici avec la Phase II d'un projet de cross-média littéraire qui en comprend trois au total. Il a ainsi été construit sur plusieurs années et s'articule sur trois périodes nommées La Lumière des Jedi, puis La Quête des Jedi et enfin Les Épreuves des Jedi. Après une première phase réellement grandiose, la seconde fait le choix, à l'image des films, d'opérer un bond dans le passé. En remontant 150 ans avant le début de Phase I, la saga contextualise ainsi les origines de son grand méchant Marchion Ro en racontant la vie de son arrière grand-mère. En plus des cinq auteurs de la Phase I (Charles Soule, Claudia Gray, Justina Ireland, Cavan Scott et Daniel José Older), quatre s'ajoutent désormais à la liste : Zoraida Córdova, George Mann, Tessa Gratton et Lydia Kang. Les éditeurs de la Phase II restent quant à eux les mêmes aussi bien aux États-Unis qu'en France à l'exception notable d'IDW qui est remplacé par Dark Horse pour les comics jeunesse de l'autre côté de l'Atlantique. Côté contenu, cette deuxième phase est plus ramassée, ne comportant que deux vagues au lieu de trois, mais reste toujours aussi variée dans ses médias avec des romans adultes, des romans jeunes adultes, des romans jeunesse, des comics adultes, des comics jeunesse, un audiodrama et un manga.

Le scénariste du comics n'est autre que Charles Soule, l'auteur qui avait justement débuté la saga avec le roman La Haute République : La Lumière des Jedi. Diplômé en droit à l’université Columbia de New York en 2000, Soule exerce d'abord en tant qu’avocat puis décide d’exprimer sa fibre artistique en publiant en 2009 le roman graphique Strongman. Dès 2013, il écrit des séries de comics pour les maisons concurrentes DC Comics et Marvel. Il s’installe rapidement au sein de la Maison des Idées et travaille notamment sur Inhuman, She-Hulk ou Daredevil, qu’il marque par un long run entre 2015 et 2019, achevé avec Daredevil Legacy - Tome 3 : La Mort de Daredevil. Il devient vite une référence des comics Star Wars chez Marvel en signant les mini-séries Lando : Le Casse du Siècle, Obi-Wan & Anakin : Réceptifs et Hermétiques et Star Wars : L’Ascension de Kylo Ren ainsi que les séries Poe Dameron, Dark Vador : Le Seigneur Noir des Sith et la relance de Star Wars narrant les événements situés entre les Épisodes V et VI. Sa passion pour la saga intergalactique dépasse le cadre des comics et le voit écrire le roman La Haute République : La Lumière des Jedi inaugurant lors de sa parution le 5 janvier 2021 aux États-Unis ce nouveau cycle tant attendu.

La Haute République : La Lame raconte en réalité la jeunesse d'un personnage tertiaire découvert dans le roman La Haute République : La Lumière des Jedi et dont l'auteur, comme les lecteurs, se sont pris d'affection : le Maître Jedi Porter Engle. Surnommé la « Lame de Bardotta », il a été créé comme l'archétype du vieux guerrier, proche de la retraite, qui préfère être aux fourneaux que prendre les armes. Naturellement, quand le devoir l'appelle, son instinct et son expérience reprennent alors le dessus. Suite à cette première apparition, le personnage est ensuite revenu dans la Phase I dans un autre roman adulte ainsi que dans quelques comics, aussi bien jeunesse qu'adultes. Ceci étant dit, pour apprécier le présent comics, nul besoin d'avoir lu les précédentes œuvres autour du personnage. Le récit s'avère en effet non seulement indépendant de la Phase I de La Haute République puisqu'il parle de la jeunesse d'un seul personnage mais, dans les faits, aussi de la Phase II. Mises à part quelques allusions aux évènements se déroulant dans les romans, notamment le conflit entre les deux planètes jumelles Eiram et E'ronoh, l'histoire aurait pu, il est vrai, se dérouler à n'importe quelle ère où intervient l'Ordre Jedi. Surtout que le scénariste fait étrangement le choix de ne pas raconter justement d'où vient le surnom de « Lame de Bardotta » du personnage qui aurait pu ainsi le lier davantage au reste de La Haute République.

Charles Soule préfère ainsi explorer plus profondément le passé du personnage, plongeant à une époque où il formait un duo avec sa « sœur » de cœur, Barash Silvain. Les deux Jedi ne sont en effet pas du même sang, ni même de la même espèce. Si Porter Engle est un Ikkrukkian, Barash est, quant à elle, une Kage. Ils se sont rencontrés durant leur apprentissage Jedi et sont devenus amis. Leur amitié est si forte et si profonde qu'ils se considèrent un peu comme un frère et une sœur. Les deux Jedi sont de plus parfaitement complémentaires : lui est doué pour le combat au sabre laser tandis qu'elle se fie plus à la Force, cherchant toujours à ressentir ce qu'il se passe autour d'elle avant de prendre une décision. Le récit du comics mélange alors des flashback de leur enfance avec une mission dans le présent voyant les deux Chevaliers être appelés en tant que médiateurs dans un conflit planétaire. L'enquête n'a rien de vraiment inédit entre ville assiégée, couple princier déchiré dans un amour impossible à cause de la rivalité entre leurs deux patries, manipulation, trahison et intervention de mercenaires extérieurs. Pourtant, malgré une construction déjà-vue, le comics arrive tout de même à passionner le lecteur grâce à cette relation si particulière entre les deux personnage Jedi, décidément bien écrits, en particulier Barash qui est tout aussi charismatique que douce.

Côté graphique, La Haute République : La Lame possède un découpage assez étrange. Le premier issue est ainsi confié à l'italien Marco Castiello, un dessinateur qui a déjà travaillé sur Star Wars, dans l'Univers Légendes, notamment sur l'arc Évasion du comics Chevalier Errant, l'arc Le Poing du Tyran du comics La Purge des Jedi ou encore sur la mini-série L'Arnaque Rebelle, tout ceci chez l'éditeur Dark Horse. Il revient plus tard dans la saga galactique, cette fois-ci chez Marvel, et dessine en plus du comics La Haute République : La Lame , les issues #19 à #24 de Star Wars (2020) ainsi que #23 à #28 de Dark Vador (2020). Ici, étonnement, il ne réalise que le premier issue intégralement puis la moitié du second avant de passer la main à un collègue, même s'il réalise également quelques planches dans le troisième issue. Il est donc secondé par le philippin Jethro Morales, nouveau venu dans la saga Star Wars puisque c'est là son premier projet pour l'univers de George Lucas. Par la suite, il dessinera le one-shot Empire fêtant les 40 ans de Star Wars : Le Retour du Jedi. Les dessins des deux artistes sont plutôt réussis, bien que ceux de Castiello sont un peu plus rugueux que ceux de Morales. Même si leurs styles s'accordent plutôt bien, le passage de l'un à l'autre est plutôt perturbant, surtout quand il se produit en plein milieu d'une issue. Le titre est malheureusement symptomatique de l'industrie du comics qui a souvent du mal à garder une cohérence sur l'ensemble d'un titre. Le comble reste ici que c'est sur une mini-série de seulement quatre numéros. Incroyable tout de même que Marvel n'ait pas réussi à s'organiser pour qu'un seul dessinateur puisse faire l'ensemble du titre !

La Haute République : La Lame est un comics qui vaut principalement pour la relation entre ses deux protagonistes principaux alliée à un récit certes déjà-vu mais qui se suit avec plaisir. Le lien avec La Haute République est en revanche plus que ténu, rendant sa lecture dispensable dans le projet de cross-média.