Madu

Le Danseur de Ballet Nigérian

Madu : Le Danseur de Ballet Nigérian est un film produit par Disney Original Documentary retraçant le destin extraordinaire d'un adolescent nigérian qui rêvait de devenir danseur.

Madu : Le Danseur de Ballet Nigérian est réalisé par une équipe internationale de grand talent.
Le réalisateur américain Matthew Ogens est ainsi surtout connu pour son court-métrage documentaire Audible : Vaincre sur tous les Terrains de 2021 diffusé sur Netflix, qui a reçu une nomination aux Oscars et qui suit des lycéens sourds de l’école Maryland School for the Deaf. Il a aussi beaucoup travaillé pour ESPN, réalisant les émissions sérialisées The Life et Timeless tout comme le court-métrage ESPN 30 for 30, From Harlem with Love ou encore produisant l’émission sérialisée Why We Fight nommée à un Emmy Award.
Il est ici secondé par le réalisateur nigérian Joel Kachi Benson dont le documentaire Daughters of Chibok dénonçant l’enlèvement de 276 écolières nigérianes par les terroristes de Boko Haram a été récompensé par de nombreux prix.

Il faut souvent un tout petit rien pour que le destin s’emballe. Celui d’Anthony Madu doit ainsi beaucoup à son talent bien sûr mais aussi à la chance qui lui a permis de se mettre en lumière, lui amenant de belles opportunités qu’il a su ensuite saisir au vol. Tout commence donc en juin 2020 lorsque son école de danse au Nigeria le filme dansant dans les rues du quartier d'Ajangbadi, à l'ouest de Lagos. La vidéo est postée sur les réseaux sociaux et très vite repérée par le réalisateur Matthew Ogens. Intrigué, il contacte alors la famille dans l’idée de faire un documentaire sur le garçon. Puis le miracle se produit. La vidéo devient virale lorsque l'actrice Viola Davis la partage avec ses abonnés, une propagation aidée par la période déprimante du début de pandémie, où la grâce et le talent du garçon ont subjugué les internautes du monde entier. Anthony se voit alors offrir d’abord une bourse à l'école Jacqueline Kennedy Onassis de l'American Ballet Theatre mais, restrictions liées au COVID-19 oblige, la formation est censée se dérouler en ligne. Finalement, à sa grande surprise, il obtient une autre bourse pour aller étudier physiquement à l’Elmhurst Ballet School de Birmingham au Royaume-Uni, un rêve qu’il pensait inaccessible. Sans cette vidéo virale, Anthony Madu n’aurait sûrement pas eu le même destin car tous les enfants nigérians n’ont malheureusement pas la chance de se faire remarquer de la sorte.

Dès le début, Madu : Le Danseur de Ballet Nigérian étonne par la qualité de ses images tout comme le fait que les cinéastes ont eu l’air de suivre assez en amont le parcours du jeune Anthony Madu. Avec de nombreux plans aériens, les vues du Nigeria sont tout simplement magnifiques et rendent vraiment hommage au pays. Certains plans sont à couper le souffle et clairement cinématographiques, aidées dans leur restitution par un format large scope. Ils tranchent d’ailleurs avec les images tournées en Angleterre bien plus intimistes ; le climat n’aidant pas non plus à mettre en avant des plans larges, les couleurs en Afrique étant fatalement plus chaudes qu’en Europe, plus encore en hiver. Néanmoins, le documentaire arrive aussi à retranscrire les pensées, les espoirs, les joies, les peines, les doutes du garçon, et souvent sans qu’un mot ne soit prononcé. Le film est d'ailleurs le plus touchant dans ses silences, surtout qu’Anthony n’est pas un garçon très bavard. Son corps retranscrit ses émotions et le documentaire sait parfaitement le faire ressortir.

Le spectateur a donc l’opportunité de rentrer dans l’intimité du garçon. Anthony Madu impressionne par son incroyable résilience. Il a vécu des moments difficiles, notamment le harcèlement qu’il a subi dans son école et son quartier du fait de sa passion pour la danse. Les stéréotypes homophobes sur la danse sont malheureusement légion au Nigeria où il est inconcevable qu’un garçon ait délibérément envie de faire du ballet. Qui plus est, de son propre aveu, son professeur de danse dans sa ville natale avait une méthode d’apprentissage bien trop violente, lui ayant laissé d’ailleurs quelques cicatrices. Et pourtant, malgré toutes ces moqueries et ces difficultés, il garde cette envie viscérale de danser et de réaliser son rêve coûte que coûte. Son incroyable courage est récompensé quand le miracle se produit et qu'il obtient une bourse pour partir étudier à l'étranger, ce qui changera sa vie à jamais.

L'arrivée à Elmhurst Ballet School n'est pas simple pour autant pour Anthony Madu. Comme tout étudiant étranger, le jeune nigérian va devoir passer par toutes les phases de l’adaptation dans un nouveau pays : de l'euphorie de la nouveauté à l'envie de rentrer jusqu'à l'acceptation pour se sentir enfin comme chez lui. Il se pose aussi beaucoup de questions, doutant de ses capacités, étant persuadé qu'il n'a pas sa place et qu'il doit faire ses preuves plus que les autres car il est moins doué que ces camarades. Comme tout nouvel élève dans une nouvelle école, il ne connait personne et doit se faire des amis afin de s'intégrer. Une scène touchante est peut-être son rendez-vous maladroit avec une jeune fille, camarade de son école, qui lui plaît et qu'il va essayer de convaincre de sortir avec lui. Déjà, pour n'importe quel garçon de son âge déraciné, loin de chez lui, tous ces défis sont difficiles à relever et nécessitent beaucoup d'abnégation et de volonté. Mais Anthony Madu va également avoir une très mauvaise nouvelle sur sa santé qui risque d'anéantir tous ses rêves de devenir un danseur professionnel. Encore une fois, le jeune garçon impressionne car il va montrer une incroyable soif de vaincre ; son intelligence et son adaptation compensant son handicap.

Heureusement, dans ces épreuves et ces difficultés, Anthony Madu trouve un havre de paix et un soutien sans borne auprès de sa famille aimante. Fière de lui, elle l’a toujours épaulé et poussé à réaliser ses rêves. Seule sa relation avec son petit frère est devenue tendue, non pas par manque d'amour, mais plutôt car il lui en voulait de l’abandonner. Malheureusement, le manque de communication entre les deux va créer un fossé qu’ils vont avoir du mal à combler, comme le montre parfaitement le film. Il est aussi particulièrement émouvant de voir la réaction de la famille quand le garçon revient durant les vacances de printemps dans son pays. Sa mère, en particulier, ne peut arrêter de l'embrasser de joie et de fierté. Il est alors impossible pour le spectateur de ne pas verser sa petite larme. Durant ces retrouvailles, Anthony montre que son éloignement l'a légèrement changé. Il a perdu son accent nigérian tandis que ses valeurs religieuses ont également évolué. Une scène montre particulièrement ce changement. Lors d'une phase de colère, typique des adolescents de son âge, sa mère lui propose d'aller voir le prophète de sa communauté religieuse quand le garçon veut lui un thérapeute médical mais qu'il ne pourra voir qu'en Angleterre. Pour autant, quand il revient pour les grandes vacances, il a enfin trouvé la sérénité, sachant parfaitement d'où il vient, ayant fait la paix avec son frère, tout en se sentant chez lui aussi bien au Nigeria que dans son école de danse en Europe.

Madu : Le Danseur de Ballet Nigérian est un beau documentaire dépeignant un garçon aussi inspirant que talentueux. Porté par des images superbes, en particulier ceux tournées au Nigeria, les réalisateurs ont parfois du mal à permettre à Anthony Madu de s'ouvrir complètement mais arrivent tout de même à transcender cette difficulté et à magnifier le film lors des silences et des regards de l'adolescent.