Benjamin Gates
et le Livre des Secrets
Le synopsis
Partiellement reconstitué, le journal de John Wilkes Booth, l'assassin d'Abraham Lincoln, semble prétendre que l'arrière-arrière-grand-père de Benjamin Gates aurait pris une part active dans la conspiration contre l'ancien Président américain. Mais c'est sans compter sur la détermination du célèbre chasseur de trésors qui entend laver la réputation de son ancêtre de tous soupçons... |
La critique
Le succès surprise de Benjamin Gates et le trésor des templiers caractérisé par ses 173 millions de dollars récoltés au seul box-office américain et plus de 340 millions de dollars dans le reste du monde, a ouvert une voie royale à l'élaboration d'une suite. Rien d'étonnant, dès lors, à voir débarquer sur les écrans, deux ans plus tard, Benjamin Gates et le livre des secrets ! L'alter égo disneyen d'Indiana Jones revient, en effet, en grande forme, pour une aventure, somme toute pas si nouvelle que ça. Il faut dire, pour sa défense, que les mêmes fées se sont penchées sur son berceau, à commencer par le sorcier en production, Jerry Bruckheimer et le magicien en réalisation, Jon Turteltaub, de sorte que le second opus, visible indépendamment du premier, en reprend tous les codes, non sans leurs faire subir au passage un effet grossissant appuyé...
Le scénario conserve donc la trame qui a fait le succès de la première aventure. Il organise, une fois encore, une chasse aux trésors en s'inspirant de faits historiques réels mais en prenant, pour point de départ, un ficelle à l'évidence, trop grosse. Le héros se lance, en effet, corps et âme, dans une quête pour sauver l'honneur d'un illustre aïeul. L'étendue de ses motivations propres est alors inversement proportionnelle au sentiment de grande perplexité qui envahit le spectateur. Une telle débauche de moyens et d'infractions pour un motif aussi léger a de quoi dérouter bon nombre de cartésiens. Ils se consoleront néanmoins vite par les réalités historiques dispensées tout au long du film : là, les circonstances de l'assassinat de Lincoln, ici, les motivations de Booth, son meurtrier, plus loin, la création de la Statue de la Liberté ou, enfin, les dédales des caves du Mount Vernon... Toutes les références à l'Histoire sont bien-sûr prétextes à un lot d'énigmes qui attend patiemment d'être déchiffré par le héros et ses acolytes de toujours. La véritable marque de fabrique de la trilogie qui s'annonce se trouve évidemment là. Sauf que le second opus a visiblement tendance à trop mâcher le travail à son héros, qui trouve ainsi les solutions à une vitesse déconcertante. Et comme rien ne lui résiste, il accumule les audaces à un point qui dépasse l'entendement. D'ailleurs, l'agent du FBI annonce la couleur au tout début du film quand il suppute, non sans humour, que "Benjamin Gates a retrouvé l'Atlantide". A défaut, ce n'est pas moins de deux capitales européennes qu'il honore de ses découvertes. Londres est ainsi l'objet d'une longue séquence, occasion d'une course poursuite spectaculaire tandis que Paris bénéficie, elle, d'un simple intermède amusant où l'aventurier livre aux Américains les clés d'un trésor inestimable : comment s'attirer les faveurs d'un français ? Il suffit pour cela de lui parler de sa culture en faisant montre, pour elle, d'un intérêt appuyé. Les spectateurs hexagonaux découvrent ainsi une utilisation habile de Montesquieu, et les parisiens, eux, un regard neuf sur la réplique de la Statue de la Liberté située au pont de Grenelle...
Si le scénario accumule les grosses ficelles au point de rendre l'ensemble peu crédible, le casting reste lui impeccable. Les producteurs sont, en effet parvenus à convaincre, pour la première fois de sa carrière, Nicolas Cage de signer pour une suite et ont fait d'ailleurs de même avec Jon Voight. Le public retrouve, ainsi, tous les personnages qu'il avait aimés dans le premier opus, presque là où il les avaient laissés. Nicolas Cage reprend donc son rôle de Benjamin Gates avec conviction et sert un numéro de séduction qui fait mouche à tous les coups. Il retrouve avec bonheur les comédiens de la première heure (Jon Voight, Justin Bartha et Diane Kruger) avec lesquels le courant passe visiblement. Les nouveaux venus ont, en revanche, plus de mal à exister même si Helen Mirren (The Queen), qui endosse le rôle de la mère du héros, parvient à tirer son épingle du jeu. Ed Harris (Rock), ne convainc, en revanche, personne et pêche par une transparence incompatible avec son statut de méchant.
Benjamin Gates et le livre des secrets a de quoi déconcerter son public. A classer sans hésiter dans la catégorie des films d'action, il hésite constamment entre un ton adulte et une ambiance bon-enfant. Là où Benjamin Gates et le trésor des templiers assumait sa volonté de séduire des spectateurs aguerris au genre (il devait d'ailleurs, à l'origine, sortir sous le label "adulte" de la Walt Disney Company, Touchstone), le second opus (prévu, dès sa genèse, pour la signature Walt Disney) se perd, lui, dans sa volonté d'être tous publics, désireux de séduire aussi bien les enfants que leurs parents. Le résultat de cette hésitation est de nature à laisser un gout amer au spectateur qui ressort de la projection pas totalement convaincu.
Il n'empêche ! Divertissement efficace, à aborder comme un long-métrage d'action à destination de toute la famille, Benjamin Gates et le livre des secrets cartonne au box-office américain au point de dépasser en quelques semaines les résultats -déjà exceptionnels- de son ainé.