Titre original :
Stuntman
Production :
Driven Pictures
Seven Bucks Productions
Date de mise en ligne USA :
Le 23 juillet 2021 (Disney+)
Distribution :
Disney+
Genre :
Documentaire
Date de sortie cinéma USA :
Le 23 septembre 2018 (Los Angeles Film Festival)
Réalisation :
Kurt Mattila
Musique :
Jeremy Zuckerman
Durée :
84 minutes

Le synopsis

Sans le soutien financier d'un gros sponsor, le cascadeur professionnel Eddie Braun veut honorer l'héritage de son idole d'enfance, Evel Knievel. Lorsque l'occasion se présente de franchir à nouveau le Snake River Canyon en fusée, il décide de consacrer ses économies à son rêve de toujours...

La critique

rédigée par
Publiée le 22 février 2022

Stuntman est un film documentaire diffusé en exclusivité sur Disney+ narrant le rêve peu commun d'un homme qui met sa vie en danger tous les jours.

Stuntman raconte ainsi l'histoire du cascadeur professionnel Eddie Braun qui va risquer sa vie afin de réaliser un rêve d'enfant. Ce dernier commence donc sa carrière au début des années 1980 en travaillant d'abord pour la télévision, notamment sur des séries comme Shérif, Fais-moi Peur !, V ou L'Homme qui Tombe à Pic. Son professionnalisme, son sens de la réussite, sa motivation et son incroyable gentillesse font qu'il va vite grimper les échelons et travailler pour le cinéma en devenant l'un des meilleurs de son métier, salué par toute la profession, que cela soit ses alter ego cascadeurs mais aussi les acteurs et les réalisateurs. Sa carrière à Hollywood durant plus de quarante ans est dès lors prolifique et comprend plus de 260 longs-métrages ou séries télévisées. Il double alors pour les cascades de nombreux acteurs de renom comme Robert De Niro, Brad Pitt, George Clooney, Ashton Kutcher ou Charlie Sheen. Il est d'ailleurs étonnant de le voir, lui si sérieux, comprenant parfaitement le risque de son métier, partir dans un projet aussi fou que celui présenté dans le documentaire qui lui est ici consacré.

Pour bien comprendre sa démarche, il faut s'avoir qu'Eddie Braun est devenu cascadeur professionnel dès l'âge de 17 ans afin de ressembler à son idole, Evil Knievel, le légendaire casse-cou et pilote de moto qu'il rencontra durant son enfance. Si la carrière d'Evil Knievel a été riche et emplie de réussites, il a néanmoins vécu un échec emblématique : le saut en fusée à travers le Snake River Canyon. L'engin est construit par l'ingénieur aéronautique Robert Truax qui lui donne le nom de Skycycle X-2. La fusée, propulsée par un moteur à vapeur, est donc conçue pour envoyer le cascadeur de l'autre côté du canyon de la rivière Snake. Le saut a lieu le 8 septembre 1974 sous l'œil des caméras de télévision mais malheureusement, le moteur surchauffe et le parachute stabilisateur se déclenche trop tôt. Au final, la fusée se crashe quelques mètres après le lancement au bord de la rivière. Heureusement, Evil Knievel s'en sort avec des blessures mineures mais l'échec cinglant restera une tache indélébile dans sa carrière. Mais l'histoire ne s'arrête pas là : le fils de l'ingénieur, Scott Truax, décide en effet après la mort de son père en 2010 de finir ce qu'il avait commencé en reprenant ses calculs et réadaptant l'engin de l'époque. Eddie Braun apprend alors la nouvelle et insiste pour être le pilote de ce nouveau saut afin de rendre hommage à son idole d'enfance.

L'exploit d'Eddie Braun est filmé pendant tout le projet par le réalisateur Kurt Mattila. Né et élevé en Nouvelle Angleterre, Kurt Mattila s'installe en Californie au milieu des années 1990 où il débute sa carrière professionnelle en tant que monteur pour des écrans-titres de films. Il se fait ensuite remarquer en créant les séquences obsédantes de rêves des Precogs dans le film Minority Report de Steven Spielberg. Il réalise ensuite quelques campagnes publicitaires pour des marques comme Ford, Gap ou Red Bull tandis qu'il est aussi monteur notamment sur les séquences d'ouverture des premiers films Marvel Studios, Iron Man et L'Incroyable Hulk. Kurt Mattila fait finalement ses débuts en tant que coréalisateur en 2006 sur le long-métrage The Alibi pour Sony Pictures Entertainment. En 2011, il se charge seul de la réalisation, du montage et du scénario du court-métrage Tron : The Next Day en bonus du Blu-ray de Tron : L'Héritage. Kurt Mattila rencontre durant cette période Eddie Braun alors qu'ils travaillent tous deux sur une publicité. Le réalisateur est alors tout de suite impressionné par le professionnalisme du cascadeur. Ce dernier lui parle de son rêve de saut en fusée et Kurt Mattila lui propose d'immortaliser son aventure sur pellicule en le suivant régulièrement, des prémices du projet jusqu'à son accomplissement final. Stuntman devient sans aucun doute le plus grand projet du cinéaste et il l'est encore à ce jour. Comme pour le protagoniste de son documentaire, le long-métrage s'avère être le pari de sa carrière, l'occupant durant plusieurs années de sa vie sans aucune assurance sur le résultat final. Il n'était d'ailleurs pas certain d'arriver à finir le film quand il en débute le tournage...

Stuntman démarre de façon logique, surtout vu le titre du film. Le long-métrage commence par brosser le portrait du cascadeur Eddie Braun, du début de sa carrière où il commence à se faire un nom à la rencontre avec sa femme. À travers quelques interviews, le spectateur découvre un peu le métier de cascadeur à travers les risques calculés pris par les professionnels afin de proposer des divertissements que ce soit pour le cinéma, la télévision ou la publicité. Nombre de spectateurs ne se rendent en fait pas compte de leur présence mais leur rôle est primordial ; les grandes stars étant souvent doublées sur les scènes d'action. Les témoignages dans Stuntman sont impressionnants car de temps à autres, les cascadeurs, notamment Eddie Braun, sont blessés, certains même mortellement. Il est en réalité très rare de passer quarante ans dans ce métier comme l'aura finalement fait le héros du film. Et cela rend Eddie Braun un peu unique ! Étonnamment, ce qui frappe le plus ici est l'incroyable sérénité de cet homme qui ne se prend absolument pas pour un casse-cou ou un super-héros. Calme, sérieux, toujours attentif à la sécurité, il avoue qu'il fait ce métier pour payer les factures et faire vivre sa famille. Et le plus admirable dans tout cela est que, malgré tous les films auxquels il a participé, il garde toujours la tête sur les épaules tout en ne semblant pas rouler sur l'or. L'autre point où le public ne peut être qu’impressionné, c'est la façon dont sa famille, sa femme et ses quatre enfants ont confiance dans le fait que leur père va revenir de son travail. Ils ne montrent presque aucune inquiétude même s'ils savent que le moindre coup de téléphone peut signifier une annonce tragique.

Après quinze minutes, Stuntman déjoue les pronostics dus à son titre et s'éloigne assez vite des anecdotes sur le métier de cascadeur qui ne servaient en fait que d'introduction. Le sujet central du film est bien en réalité le projet de saut en fusée d'Eddie Braun. La caméra le suit alors tout au long de son aventure, de la découverte de la fusée en février 2014 jusqu'au saut lui-même le 16 septembre 2016. L'explication du contexte de ce saut et du pourquoi est alors assez abrupte tandis que les préparatifs sont eux un peu rébarbatifs. Le documentaire montre en effet la réhabilitation de la fusée de Robert Truax et les différentes étapes nécessaires par son fils Scott pour arriver à son lancement. Le point le plus crucial et qui demandera le plus de temps est la recherche de financement. Ce qui est incroyable par rapport à 1974, c'est que les investisseurs vont se montrer dans un premier intéressé puis se désister au dernier moment. Une chaîne de télévision propose de filmer l'évènement en direct pour finalement annuler au dernier moment la diffusion, repoussant alors le lancement le temps de trouver une solution de remplacement. Même chose avec un producteur de télévision pour un tournage en vue d'une diffusion en différé. Rien d'étonnant à tous ces refus ! Tous trouvent, à raison, que l'entreprise est particulièrement risquée et que la mort du cascadeur est une possibilité non négligeable. Personne ne veut alors associer son nom ou sa marque à un potentiel drame. Eddie Braun décide finalement de financer en grande partie par ses économies le projet, voulant aller au bout de ce qu'il a commencé et de ce qu'il s'est promis. Car par dessus tout, il souhaite accomplir son rêve d'enfant !

En voyant les images de Stuntman, le spectateur ne sait pas trop quoi penser. Dans une mentalité purement américaine, le dépassement de soi, la prise de risque et le fait d'aller au bout de ses rêves sont des valeurs particulièrement mises en avant et célébrées dans le documentaire. Et bien sûr, il est difficile de ne pas être sensible à cette morale positive. Mais il est aussi impossible de ne pas se demander à quoi bon ? Cet exploit n'a en effet aucun intérêt scientifique, technique ou pécuniaire. Il s'agit juste de réparer la blessure d'ego d'un père du côté de Scott Truax et l'échec d'une idole d'enfance de l'autre pour Eddie Braun. Est-ce que tout cela mérite de mettre en danger la vie d'un homme, même de façon volontaire ? Avec son métier, Eddie Braun est habitué aux risques. Mais est-ce que sa famille doit subir le stress immense de savoir que leur père ou mari peut mourir pour un projet aussi futile ? Le documentaire se garde d'ailleurs bien d'interviewer seuls les membres de la famille, ne permettant donc pas de savoir ce qu'ils ressentent réellement. L'unique chose que le spectateur comprend est qu'ils soutiennent le cascadeur dans toutes ses décisions. Le réalisateur est en fait resté focalisé sur l'exploit d'Eddie Braun sans insister - et c'est fâcheux - sur la façon dont l'entourage a vécu toute cette aventure ; d'autant que pour bien rester concentré, le père a demandé à sa famille de l'attendre... à la maison ! Étrangement, le moment le plus poignant du documentaire arrive, le jour du lancement, quand Kurt Mattila demande que faire du film en cas d'échec ou de tragédie. Eddie Braun lui répond alors avec détermination que le long-métrage doit être montré quel que soit le résultat.

Le tournage de Stuntman dure donc plusieurs années, comme le raconte très bien le documentaire notamment à cause des décalages et des difficultés de financement. La réalisation est dès lors loin d'être un long fleuve tranquille. Pour autant, une fois le projet du cascadeur mené à son terme, il reste à terminer et sortir le film. Sans investisseurs, le montage s'éternise jusqu'à ce que Kurt Mattila, grâce à ses talents de monteur, trouve comment faire passer le ton juste dans son dernier acte. Il essaye ensuite de vendre son films en commençant par le circuit des festivals. La première a ainsi lieu le 20 septembre 2018 au LA Film Festival où il obtient le prix du public du meilleur documentaire. Entre-temps, le réalisateur trouve un producteur exécutif en la personne de Dwayne “The Rock” Johnson via sa société Seven Bucks Productions. Celle-ci était d'ailleurs l'une de celles qui devaient produire l'émission de télévision mais qui s'est finalement retirée comme les autres. L'acteur de Jungle Cruise, grâce à ses bonnes relations avec The Walt Disney Company, arrive à vendre le film pour une diffusion sur Disney+ ; une opportunité inespérée pour Kurt Mattila qui ne pensait pas que son long-métrage aurait un potentiel d'audience si large. Il était en effet persuadé que le studio de Mickey ne s'intéressait pas aux documentaires indépendants...

Ceux qui pensaient avoir une rétrospective complète sur la carrière de cascadeur d'Eddie Braun en seront pour leurs frais. Stuntman est en réalité l'histoire d'un homme qui accomplit son rêve. Pour autant, malgré l'exploit courageux, le public ressort du visionnage en se posant la question de savoir si l'aventure méritait une telle prise de risque. Chacun répondra à la question en fonction de ses valeurs et de son tempérament.

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