La Petite Maison
Titre original : The Little House Production : Walt Disney Animation Studios Date de sortie USA : Le 8 août 1952 Série : Genre : Animation 2D |
Réalisation : Wilfred Jackson Durée : 8 minutes |
Disponibilité(s) aux États-Unis : |
Le synopsis
Une jolie petite maison de campagne se retrouve vite entourée de buildings et de pollution urbaine... |
La critique
La Petite Maison est assurément l'une des pépites des Walt Disney Animation Studios qui non seulement reste gravée à jamais dans les souvenirs des spectateurs qui l'ont découvert mais qui est également représentatif de l'art des studios du Maître de l'Animation. Qui mieux que les artistes Disney auraient pu en effet alors donner vie à une maison et la rendre si attachante auprès du grand public ?
Le cartoon est exceptionnel à plus d'un titre. Tout d'abord, La Petite Maison est un formidable exemple de qualité d'écriture des studios Disney. En se basant sur un célèbre livre pour enfants de Virginia Lee Burton, les scénaristes Bill Peet et William Cottrell racontent, en effet, une superbe histoire sur le temps qui passe, les conséquences du progrès, l'opposition de la campagne avec la ville, l'urbanisation à outrance mais aussi les regrets et les désespoirs. Et tout cela, via le simple regard d'une petite maison qui va être témoin de l'évolution de son environnement. Le plus incroyable est ainsi la narration poétique et subtile offerte au spectateur à la manière d'une douce balade ou d'un conte développé par un Sterling Holloway, bien connu chez Disney pour avoir déjà assumé des voix de nombreux courts et longs-métrages du studio dont Alice au Pays des Merveilles ou le personnage de Winnie l'Ourson. L'idée - excellente ! - d'anthropomorphiser la maison en se servant de deux fenêtres pour les yeux et de la porte d'entrée pour la bouche, permet ainsi de faire passer un nombre incroyable d'émotions. L'effet est ici encore plus saisissant que dans le cartoon précédent, Susie, Le Petit Coupé Bleu, où des voitures avaient été animées avec des yeux à la place du pare-brise.
Mais surtout, La Petite Maison est assurément l'œuvre qui rend le plus
compte du talent de Mary Blair.
Née le 21 octobre 1911 à McAlester en Oklahoma, Mary Browne Robinson est une
artiste douée qui obtient une bourse d'étude en 1931, pour étudier à la
Chouinard School of Art (ancêtre de la
CalArts). Deux ans plus tard, elle décroche son diplôme mais la Grande
Dépression ne lui permet pas de réaliser son rêve de faire carrière dans la
peinture. Elle épouse le 3 mars 1934 Lee Blair, qu'elle a rencontré lors de ses
études. En 1938, il est engagé aux studios Disney comme superviseur de la
couleur pour Pinocchio tandis
qu'elle le remplace au sein du département animation de la
Metro-Goldwyn-Mayer. Au début des années 40, elle rejoint les studios de
Mickey sur les conseils de son mari. Sa première tâche est de travailler sur la
séquence Baby Ballet, pour la suite de
Fantasia, projet finalement abandonné suite à l'échec financier du premier
opus. Elle réalise également de nombreuses aquarelles de recherche - non
retenues - pour La Belle et le
Clochard écrit par Joe Grant. En 1941, elle accompagne Walt Disney et
quelques membres du studio pour un voyage
d'étude de trois mois en Amérique du Sud. Le Maître remarque durant ce
périple la talent de la jeune femme et lui confie ensuite la supervision
artistique de Saludos Amigos (1942) et
Les Trois Caballeros (1945). Ses
croquis et ses recherches influenceront alors énormément la plupart des longs-métrages
d'animation Disney jusqu'au début des années 50 :
La Boîte à Musique,
Mélodie du Sud,
Mélodie Cocktail,
Danny, le Petit Mouton Noir,
Le Crapaud et le Maître d'École,
Cendrillon et
Alice au Pays des Merveilles. En 1952,
elle travaille aussi sur deux cartoons : Susie, Le
Petit Coupé Bleu et La Petite Maison. Après la conception de
Peter Pan en 1953, elle quitte les
studios Disney pour se consacrer à la peinture. Elle revient en 1963 sur demande
de Walt Disney lui-même qui veut qu'elle travaille sur la création artistique de
l'attraction it's a small world, destinée à la Foire Internationale de New York de 1964. Mary Blair continue ensuite son travail au sein des Walt
Disney Imagineering et réalise des fresques murales pour l'Inner Space
Building et le Circle-Vision Building de Tomorrowland. Elle signe en 1970
sa dernière collaboration avec Disney par une décoration de l'hôtel Contemporary
Resort de Walt Disney World en Floride. Elle meurt le 26 juillet 1978 à
Soquel en Californie.
La Petite Maison est une jolie tentative pour utiliser à plein le talent de l'artiste. Après trois longs-métrages (Cendrillon, Alice au Pays des Merveilles et Peter Pan) où Mary Blair avait proposé un nombre incroyable de croquis dont les couleurs et le style ont influencé les produits finis sans qu'aucun de ses dessins n'apparaissent jamais à l'écran, ce cartoon devait, en effet, être « son » œuvre (bien qu'elle ne soit curieusement pas nommée dans les crédits). Il faut dire que La Petite Maison est assurément la production de Disney qui se rapproche le plus du style de Mary Blair. Elle sait parfaitement y utiliser les couleurs en marquant par exemple la différence entre le jour chaud et réconfortant et la nuit froide et solitaire mais aussi entre cette petite maison vestige de temps anciens campagnards et l'immensité d'une ville champignon qui s'est construite autour d'elle. Le jeu des couleurs dans l'incendie ou des néons dans la folie nocturne sont ainsi autant de moments forts du cartoon. Mais l'expérimentation n'ira malheureusement pas plus loin : Mary Blair s'estimant dans une impasse, ayant déjà travaillé sur la première version de La Belle et le Clochard et n'ayant pas envie de se redire, décide qu'il est temps, pour elle, de réaliser son rêve d'être peintre… Et de quitter Disney.
La Petite Maison est une pépite des studios Disney. Un cartoon aussi beau que poétique, d'une inventivité incroyable et d'une humilité exemplaire. A chérir et à transmettre de génération en génération.